SPORTS
ET
JEUX D'ADRESSE
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PRÉFACE
vrai dire, la distinction à observer entre les jouets et
les jeux n'est pas sans présenter quelques difficultés :
les premiers s'adressant plutôt à l'âge le plus tendre,
c'est-à-dire jusqu'à ce t[ue l'enfant soit parvenu à
l'âge de raison, tandis que les jeux sont réservés à
l'adolescence et quelques-uns même, tels que les jeux
de table et les cartes, etc., semblent plutôt destinés à
servir de récréation dans les autres périodes de l'existence.
De même que les différents travaux caractérisent les saisons, de
même les jeux pourraient servir à marquer les diverses phases de la
vie; il n'est pas, en efTet, de moment de notre séjour en ce monde qui
n'ait besoin d'un certain repos et d'une sorte de détente tant au point de
vue physique que moral. Toutefois, parmi les jeux, ceux qui sont les plus
intéressants à étudier se rapportent plus spécialement à l'enfance ; des
exercices variés et choisis avec soin doivent servir à faciliter le dévelop-
pement des divers organes chez les adolescents : ils sont désignés d'une
manière plus spéciale sous le nom de » gymnastique ».
En dehors de ces exercices du corps, il est d'autres jeux plus puérils
qui servent à délasser l'esprit eu l'occupant à des riens ; en effet, l'in-
telligence d'un enfant est un mécanisme des plus subtils, dont les divers
rouages demandent à être dirigés avec la plus grande délicatesse. L'enfant
est incapable d'un travail long et uniforme, il a besoin de la distraction
dans le sens le plus large du mot ; toute tension d'esprit im peu prolongée
le fatigue et le dégoûte du travail ; pour obtenir de lui une compréhension
plus nette de ce qui lui est enseigné, il faut donc que les heures d'études
soient fréquemment coupées d'un moment de repos absolu, et, comme
pour le jeune âge le repos ne peut consister qu'en un genre différent
d'occupations, il faut donner à cette récréation des formes variées qui la
rendent toujours plus désirable.
Daus la haute anticiiiité, on avait bien compris l'utilité que pourrait
avoir le jeu; chez les Romains, les jeux pulîlics tenaient une place consi-
dérable dans la vie journalière ; pour les conquérants du monde, le jeu
s'était ])eu à peu transformé en véritable spectacle, où des athlètes de
profession venaient exhiber, en présence d'une foule immense, la vigueur
et l'adresse qu'une longue pratii[ae avait données à tous leurs mouvements.
Les jeux avaient pris chez les Romains une place si importante, qu'ils
durent être l'objet d'une réglementation spéciale. Les législateurs qui
rédigèrent le Code Justinien s'occupèrent minutieusement de ce sujet,
permettant certains jeux et défendant les autres, surtout limitant l'argent
qu'on pouvait y engager. Les jeux de hasard furent totalement prohi-
bés, et, si l'interdiction ne porta pas sur ceux qui étaient destinés à ftùre
paraître l'adresse et la vigueur, encore ne pouvait-on aventurer, en cette
occasion, qu'une somme très minime aiin (jue le pei'dant ne subît pas un
dommage considérable. Les ein(( jmix permis, mais réglementés, étaient :
la course, la lutte, le saut, le saut à la perche et le jet de la lance.
Aux premiers temps de notre histoire, les jeux avaient continué dans
la forme usitée chez les Romains.
Sous les Mérovingiens, le peuple se plaisait aux jeux du cirque, et
pendant tout le Moyen Age les combats d'animaux furent une de ses prin-
cipales distractions.
On peut encore classer sous le nom de jeu tous ces tournois et toutes
ces fêtes auxquelles donnèrent naissance les grandes cérémonies et parti-
culièrement les avènements de rois. Mais ces importantes manifestations
de la joie publique sortent un peu du cadre de notre étude et nous ne
nous y arrêterons pas plus longtemps.
Nous allons maintenant passer en revue les différentes formes de
délassements qui ont été le plus en faveur pendant les derniers siècles.
CHAPITRE PREMIER
PREMIERS JEUX DE L'ENFANCE
Le cerceau. — i. Défmilion. — 2. Le trochus ou cerceau chez les Grecs et les Romains.
— 3. Le cerceau servanL d'accessoire pour les tours d'acrobatie. — 4- Hayons placés à
l'intérieur des cerceaux. — 5. Matières servant à la fabrication des cerceaux. — 6. Tra-
duction du poème de Katz, par Feutr}'. — 7. De la conduite rationnelle du cerceau. —
8. Gravures représentant le jeu du cerceau. — 9. Poésie sur le jeu du cerceau.
Le cerf-volant. — 1. Délinition. — 12. Origine chinoise du cerf-volant. — 3. Expériences
de Franklin au moyen du cerf-volant. Ses continuateurs. — f\. Utilisation du cerf-volant
pour mesurer la colonne de Pompée. — 5. L'expérience du jardin Marbeuf. — G. Diverses
formes données aux cerfs-volants. — 7-. Cerfs-volants enduits de phosphore. — 8. Emploi
du cerf-volant comme moteur. — ■ 9. Règles à observer pour la construction des cerfs-
volants. — 10. Gravures représentant le jeu du cerf-volant.
Le chat et le rat. — 1. Le jeu du pivot chez les Romains. — 2. Le jeu du chat et
du rat au dix-neuvième siècle. — 3. Le jeu de la corde. — f\. Le jeu de l'anguille.
Le criquet et le bâtonnet. — i. Origine anglaise du criquet. — 2. Le bâtonnet
considéré comme un des plus anciens jeux strasbourgeois.
Les échasses. — 1. Leur définition d'après Pompeius Festus. — 2. Les échasses chez
les Romains. — 3. Fable de Richer sur les échasses. — \. Les échasses au seizième
siècle, leur utilisation dans les fêtes publiques. — .5. Combats d'échasses à Namur. —
6. Les échasses landaises. — 7. Représentation arlislique du jeu des échasses.
Le sabot. — 1. Définition. — 2. Le jeu du sabot chez les Grecs et chez les Romains. —
3. Le sabot au treizième siècle. Origine probable de ce nom. — 4- Anecdote sur le jeu du
sabot. — 5. De la manière de pratiquer ce jeu. — 6. Gravure représentant le jeu du
sabot.
La toupie. — 1. Origine moderne de ce jeu. — 2. Définition du jeu de la toupie. —
3. Théorie de ce jeu. — 4- Haber-gess où toupie d'Allemagne. — 5. Gravures représen-
tant le jeu de la toupie. — 6. Poésie sur le jeu de la toupie.
Le toton. — 1. Définition de ce jeu. — 2. Emploi du toton en place de dés à jouer.
PREMIERE PARTIE
LE CERCEAU
I . — D é fl 11 i t i o II ■
oiir construiiv un cerceau, on se sert d'une tige de
bois ou de métal ployée de manière à former une
courbe parfaitement ronde.
Certains moralistes ont déclaré que ce cercle de
bois était l'image de la vie, puisqu'il faut savoir le
cimduire avec rectitude dans le droit chemin si l'on
veut arriver honorablement au bout de la course.
- 4 —
II. — Le trocliiis ou eereeau clie/. les Grecs
et chez les Itoiiiains.
Les auciens Grecs nommaient trochus un instrumout de jeu qui pouvait
se mouvoir et courir suivant l'impulsion (ju'il avait reçue. Le trochus des
LE CKRCEAU
d'apiiès pii.lement, xyiiio sikcle.
anciens était en airain ; Martial, au livre IL chapitre xxi, l'appelle « le
rapide et retentissant trochus d'airain ». Pour mettre en mouvement cet
instrument, on se servait
d'une baguette tantôt droite,
tantôt recourbée. Une des
représentations les plus
exactes que nous ayons de
ce jeu a été publiée par
Wiuckelman d'après une an-
tique pierre gravée ; on y
voit un jeune homme pous-
sant son trochus avec sa
baguette recourbée qu'il
tient dans la main droite, tandis que sa main gauche, légèrement relevée,
tient une seconde baguette de même forme que la première. Il est à
supposer que l'on a voulu représenter les traits de quelque coureur
Li: CEl'.CEAU
ll'Al'llÈS UNE IMAGE l'nPlK.AIIIE DU COMMENCEMENT liU \l\' SIÈCLE.
fameux qui s'était muni do deux baguettes poju* pouvoir, suivant les
accidents du terrain, conduire son cerceau indifférenniient avec une
main ou avec l'autre.
Les anciens estimaient que le jeu du cerceau faisait partie de la
gynuiastique et ils
considéraient cet exer-
cice comme particu-
lièrement propre à dé-
velopper la vigueur
musculaire de ceux
qui s'y livraient.
Properce (livre III,
chap. XI v), dans sa
comparaison des In-
stitutions de Rome
avec celles de Sparte,
exprime son regret que
les jeunes filles ne se
livrent pas à ce passe-
temps destiné à déve-
lopper en elles autant
l'adresse que la grâce.
Au point de vue de la dimension, les cerceaux des anciens étaient
beaucoup plus grands que ceux qu'on fabrique aujourd'hui. D'après une
pierre gravée de l'époque romaine, nous voyons qu'ils arrivaient au-dessus
de la hanche des coin-eurs et, comme ils étaient généralement en airain,
leur poids considérable exigeait un grand déploiement de force ; il en
résultait pour les coureiu's une vive transpiration qui était, la plupart du
temps, considérée comme très salutaire.
Oribase, le médecin de l'empereur Julien, dans son Recueil dexlraits
médicaux (YII, xxvi ; Œuvres^ traduction Daremberg, tome I", p. 521), en
conseillant l'usage du trochus, en a donné une description détaillée :
Le diamt'ti'e du corccau, dil-il, doit êlre inférieur h. la laille de l'homme, de manière que
son point le plus élevé arrive à la hauteur des mamelles. Il faut le pousser, non tout droit, mais
de côté et d'autre. La baguette de fer, le propulseur doit avoir une poignée de bois. Quant aux
plus petits anneaux qui courent sur la circonférence du trochus, beaucoup de personnes les
regardent comme superflus, lorsque au contraire ils produisent un bruit qui cause de la
distraction et du plaisir à l'àme. Mercurialis, qui cite cet extraitd'Oribase dans son traité sur la
gymnastique, le trouve peu clair et peu concluant. Il faut croire qu'il avait raison, car Caylus,
dans le premier volume de son liwucil d'antiquités, a cru voir dans ce passage d'Oribase la
description d'un jeu sans aucun rapport avec celui du trochus.
LE JEU DE LA CORDE ET LE JEU DU CElîCEAU
d'après une lithographie de 1840.
— 6 —
III.
I>e cerceau servant d*acees.soîi'e pour les tours d'acrobatie.
En dehors des cerceaux servant à la course, les anciens ont connu
l'emploi du cercle
coiUMie accessoire des
tours de force et d'a-
dresse auxquels se
livraient les acrobates.
Dans le Bampict
de Xénophon, nous
trouvons une descrip-
tion bien typi([ue de
cet exercice (jui n'al-
lait pas sans un cer-
tain danger pour ceux
qui s'y livraient :
LES EXERCICES BU CEKCEAU
PRÉS « OLAWS MAGNUS «, wi" siècle.
« Je vois, dit Socrale (chap. ii,) une danseuse qui se lient là debout dans l'attente et qui se
fait apporter des cerceaux. Aussitôt In musicienne se met à jouer de la llùte et la personne qui
se tient près de la danseuse lui passe jusqu'cà douze cerceaux. Celle-ci les prend, se met à danser
et en même temps les jette en l'air, en leur imprimant un mouvement de rotation et en calcu-
lant la force avec laquelle elle iloit les lancer pour les recevoir en cadence. »
(Juelqiies lignes plus loin [iôid.) :
<i On apporte ensuite un cercle garni d'épi'es;
ressort par une autre. Les spectateurs tremblent
qu'elle ne se blesse, mais celle-ci accomplit ses
exercices avec assurance et sans accident. »
la danseuse y entre par une culbute et en
Enfin (chap. vu) :
« On apporte à la danseuse une roue de potier
sur laquelle elle devait exécuter des exercices éton-
nants. Elle devait lire, écrire, etc.. , malgré la
rapidité avec laquelle on faisait tourner la roue. »
L'emploi du cerceau dans les exer-
cices de gymnastique et dans les tcuu's ^?«^
de force se retrouve daus la plupart des
gravures du seizième siècle représen-
tant des jeux publics.
Daus le curieux volume de 0/aïi/s
MaguKs^ sur l'histoire des peuples septentrionaux, nous trouvons une
vignette représentant des danses guerrières, et, à côté des personnages
LE .JEU DU CKliCICAi:
n'AI'BÉS INE GRAVUHE ALI.EMAMiE III" XVril' SIÈCLE.
qui s'agitent eu cadence, ou aperçoit tout un gTouj)e de bateleurs ([ui font
les exercices les plus divers fivec des cerceaux (pi'ils tiennent à la main.
IV. — Ita^oiis placés à rintôriciir «l<'s «M'rreaiix.
Les anciens ont évidemment connu le cerceau muni de rayons sem-
blables à C(>ux dune roue ; le long de ces rayous, ainsi (juautour du
cercle lui-même, ils avaient placé uue infinité de petits anneaux en métal
LES A.MLSKMENTS DU CERCEAU
n'APliÈS L'NE I.ITIIOGnAPHIK Dlî I.K l'IUNCE, 1823.
destinés à l'ésonner à l'instar des grelots quand le trochus était mis en
mouvement.
Martial fait allusion à cette disposition particulière (juaiul il dit :
« Pourquoi cet auneau babillard court-il dans le cercle ?... (Test afin que
la foide s'écarte du brillant trochus. »
M. Dillaye, dans une fort intéressante dissertation qu'il a faite sur ce
sujet, suppose^ qu'aucun conducteur ne courait à côté du trochus ; d'après
cet auteur, les Romains et les Grecs se livraient k un jeu consistant à
lancer le trochus devant soi de manière qu'il roulât le plus longtemps
possible saus s'arrêter; les petits anneaux jouant le rôle de grelots étaient
destinés à annoncer le passage du cercle rapide, pour que chacun lui
laissât un lil)re parcours.
V. — Matières servant 51 la fabrication des cerceaux.
Les cerceaux les plus usités parmi les enfants du peuple ont été
certainement ceux qui proviennent des tonneaux. Dans les statuts des
tonneliers de Paris, du sei-
zième siècle, nous trouvons
la désignation de ce cercle :
Art. 8. — Que tous cerceaulx
tant chastigner, couldre, fresne et
tout autres boys... soient bons,
loyaulx et niarchans (1566).
Un littérateur français,
Boulanger , voyageant en
Italie au commencement du
dix-huitième siècle, raj)porte
qn'il a vu dans ce pays des
jeunes gens lançant devant
eux un cercle d'airain avec
viol(Mice, de façon à lui im-
primer vm mouvement d'une
grande durée.
Le jeu du cerceau peut
être quelquefois combiné
avec le jeu des barres ; c'est
une manière agréabh^ d(^ com-
pliquer ce jeu, qui contribue à le rendre plus gracieux et moins bruyant.
JEUNES FILLES JOUANT AU CERCEAU
d'apuès les Jeudis lie ma lanle, 1820.
VI.
i'radiiction «lu poOnie de liaty., par Feutrj .
Feutry, qui a traduit le poème de Katz sur
le cerceau, s'exprime ainsi :
« ... Plus loin, c"est un cerceau qui roule légèrement sur le
sable et répète sans cesse son mouvement uniforme avec plus ou
moins de célérité. L'enl'ant qui le pousse ne prévoit pas que celte
rotation successive est l'image de la vie qu'il mènera peut-être.
Combien de mortels lui ressemblent ; ils parcourent sans cesse
la ligne du même cercle dont ils sont circonscrits ; en un mot, ils
se lèvent le matin pour se coucher le soir. »
LE CERCE.4
d'apiiks vicTon aham, :
vil.
— 9
l>c In c'oïKliiile r:ilii»iiiiollo «lu «"ercoaii
Le jeu du cerceau est la vérification d'une loi |)hysi([ue, car c'est à
la force tan!J,entielle qu'il faut attribuer lÏMjuilibre que conserve le cercle
en tournant. Tant que le cerceau a une vitesse suffisante, la force tan-
p;entielle centrifuge surpasse la gravité ; lorsque cette vitesse diminue,
le cei'ceau tond)e.
On sait t|u'il est difficile de conduire un cerceau d'une manière
parfaitement droite ; la raison est que le coup donné avec le bâton n'est
pas toujours régulier et surtout que la courbe du cerceau est loin d'être
parfaite ; ces deux conditions jointes à l'inégalité du sol obligent sou-
vent le cercle à tourner de côté, et, s'il n'(^st vigoureusement ramené
dans la ligne droite par un coup bien appliqué, il ne tarde pas à s'in-
cliner tout à fait, puis à tomber sur le sol.
VIII. — Gravures repré.sentaiil le jeu du eerceau.
Au commencement du dix-septième siècle, nous voyons par une gravure
LE Cerclk et le Bilbo^et
l> .M'IIÈS UNE COMroSITIO.N DK ('.LAlllINIi DOUZONNEr STELLA, XVII" SIÈCLE.
de Stella que le cercle était l'un des jeux les plus rechercliés parmi les
enfants; toutefois, il semble que ces bambins se servent du cerceau comme
— 10 —
d'iiue corde à sauter. Oiiel(|iies vers placés au bas de l'image ne nous
laissent aucun doute à ce sujet :
Et j'aime bien mieux les postures
De ces sauteurs dans le Cerceau
Quand ils prennent mieux leurs mesures
Que le beau nieusnier à l'Aneau.
Un graveur flamand, à peu près à la même époque, nous montre un
adolescent courant à côté d'un cerceau fait évidemment avec un cercle
de quelque tonneau hors d'usage.
Dans le frontispice des œuvres de Berquin, l'artiste a représenté toute
UNE tîÉPIUMANDE, ii'apuks une lithoghaimiie hk pkiai.î.e, xix' sikc.i.e.
une série d'enfants occupés à regarder un de leurs petits camarades qui
pousse devant lui un cerceau de bois.
Au commencement du dix-neuvième siècle, nous voyons que la mode,
pour les enfants qui jouaient au Luxembourg, consistait à se servir de
— n —
cerceaux munis de rayons agrémentôs de cloclietles et ijiii avaient, toute
proportion gardée, un(> grande analogie avec le troclius des anciens.
Marlet, dans son ouvrage intitulé : Nouveaux lahlcnux de Paris ^ a
consacré une planche à ce jeu du cercle; il nous fait assister à une
charmante pai'tie enfantine se jouant sous les ombrages séculaires (uii
entourent le Palais du Luxembourg.
Pigalle, dont le crayon si humoristique est toujours intéressant au
point de Aue documentaire, nous montre une maman agenouillée près
de la gamine qui vient de déchii-er sa robe, et la grmrmandant en ces
termes : » Fi ! à la laide ! »
Enlin, une gravure de mode de 1839 nous montre deux fillettes vêtues
suivant le goût du jour et s'apprètant à se livrer au plaisir dn moderne
trochus.
Sous le rapport de la représentation artisti([ue, nous ne voyons guère,
en fait d'œuvre saillante, que la sculpture de Falguières, que tout le
monde pouvait admirer au Salon il y a (pielques années.
IX. — Poésie sur le jeu du cerceau.
Le jeu du cerceau a inspiré à un poète, M. A. Vitalis, une ])etite poésie
qui a été publiée en 1796 et est in-
titulée : « l'Enfant et le Cerceau » :
Dans un chemin que bordait un ruisseau,
Rivière si l'on veut vu la quantité d'eau,
Un écolier avec adresse
Faisait rouler un grand ci^rccau.
En cet endroit le chemin était beau,
Et l'on courait d'une grande vitesse.
Mais à force d'aller courant,
Le cerceau toujours en avant
El l'écolier toujours derrière
Le chemin devint fort glissant,
Et la rencontre d'une pierre
Par le cerceau d'abord, ensuite par l'enfant,
Les fit tous deux rouler dans la rivière.
En beau chemin, chacun se fait valoir ;
En pleine paix, tout ministre est habile ;
Mais le chemin devient- il difficile ?
Et le danger se fait-il voir?
Plus d'un coureur alors se laisse choir,
El N'ccker n'est qu'un imbécile.
— 12
DEUXIEME PARTIE
LE CERF-VOLANT
Définition.
Le cerf-volnnt ost une sorte de voile enlevée par le vent à une cer-
taine hauteur dans les airs, et
qui se trouve maintenue en
équilibre par un long appen-
dice plus ou moins chargé
dénommé la queue du cerf-
volant. La machine volante
est retenue par un léger fd
dont l'extrémité est fixée
dans la main du joueur.
Quoique le cerf-volant ne
soit qu'un jeu d'enfant, nous
lui devons cependant plu-
sieurs des plus importantes
découvertes des temps mo-
dernes; à l'heure actuelle,
la question de locomotion
aérienne et de direction des
ballons sont trop à l'ordre
du jour, pour que nous ne
réservions pas une mention
toute spéciale au modeste
cerf-volant, (|ui est le prototype de toutes ces intéressantes questions.
II. — Origine chinoise du cerf-volanl.
On est peu fixé sur l'origine pro])able du cerf-volant et quelques
auteurs l'ont attrilïuée à l'Oi'ient. En etïet, suivant V Enajclopédie chinoise,
Khé-tchi-king-youen (1), la tradition attribue l'invention des cerfs-volants
LL TCfCERYOLANT
ll'APllKS GIIAVELOT, XVIIl" SIÈCLE.
(1) Livi-e IX, f" 8.
— 13 —
au célèbre général chinois Hau-sin, qui florissait en l'an 206 avant Jésus-
Christ. Ce ne fut que plusieurs siècles après que l'on songea à les utiliser
pour l'amusonient des enfants.
Ce général, diU'ouvrage inlitulé Tching-th/ini-isa-lci, convint avec Tchin-i, qu'il entrerait
par le centre môme de la ville qu'il assiégeait; mais comme il ignorait la distance qui séparait
son camp du palais Wei-yang-kong, oîi il voulait pénétrer par un chemin souterrain, il fit
construire un grand cerf-volant qu'il lança par un venl favorable dans la même direction.
Le même ouvrage nous dit «[ue d;uis la troisième période Thai-thsing,
A.MUSEMENTS DIVERS DES ENFANTS
d'après une gravure sur cuivre du XVIIl' SIÈCLE.
du règne de l'empereur Wou-ti, de la dynastie des Liang, l'an 459 de
Jésus-Christ, Héou-king assiégeait la ville de King-thai. Comme les
habitants ne pouvaient faire connaître au loin leur position critique, ils
construisirent en papier un grand nombre de cerfs-volants et les lan-
cèrent pour demander du secours au dehors.
Du reste, le cerf-volant est resté en Chine un jouet absolument
national; on lui a donné les formes les plus variées et il est presque tou-
jours décoré des plus brillantes couleiu's.
Ce peuple, dont l'ingéniosité est vraiment surprenante au point de
vue des petites choses, a eu l'idée de faire des cerfs-volants à musique ;
pour cela, il a suffi d'attacher après le monstre ailé un petit appareil
analogue aux harpes éoliennes, afin de donner aux spectateurs l'illusion
d'un concert céleste h quelques centfiines de pieds au-dessus du sol.
D.aus le royaume de Siam, le cerf-volant était considéré connue une
sorte de drapeau national et chaque mandarin possédait un cerf-volant
d'une forme et d'une couleur spéciale représentant en quelque sorte ses
armoiries. Le roi possédait aussi un de ces jouets, qui devait planer dans
les airs pendant tout le temps de son sommeil ; il y a évidemment dans
cet usage une idée superstitieuse, indiquant la protection que les hommes
doivent chercher auprès des Êtres d'une essence supérieure en leur
envoyant un de ces messagers ailés.
III. — F,.\|)épîciieos do FraiiUIiii au moyen du eerf-volant.
^ Ses coiiliiiuateurs.
Un résultat plus pratique de l'emploi du cerf-volant a été la remar-
LE JEU DU CERF-VOLANT
D'APnKS UNE GBAVUnE ANOI.AISK nU XV[II° SlÈCI.l?.
quable expérience faite par Franklin et dont la réussite a amené la décou-
verte (in jtaralonnerre ; ce grand savant clunu^hait à démontrer (ju'il
existait un rapport l'vidoiii entre l'éleclricité et la l'ondro. coiunu! il est
démoutré par une expérience de pliysi([ue ([ue les corps électrisés se
déchargent sur la pointe uiétalliciue placée à proximité. Il pensa donc
que, si l'on pouvait envoyer un fil conducteur dans un nuage chargé d'élec-
tricité, on arriverait ainsi à canaliser eu quelque sorte la foudre. C'est
pour résoudre ce problème que Franklin eut recours au cerf-volant.
L'expérience du grand inventeur lui donna toute satisfaction et il put aper-
LES CEKKS-VOLANÏS
u'aPHÈS un HECI'EIL DIÎ « dessus ue TADATIÈIIES », -Wlll"^ SIÈCLE.
cevoir une étincelle électrique courant le long de la corde de chanvre
qui maintenait le cerf-volant captif ; heureusement pour lui, la corde ne
laissa parvenir qu'une faible quantité de l'électricité dont le nuage était
chargé, sans quoi il eût payé de sa vie sa hardiesse d'avoir voulu arra-
cher au Ciel, sa foudre.
L'expérience de Franklin fut renouvelée peu après en France par un
magistrat, M. de Romas, ([ui, paraît-il, n'avait pas eu connaissance de
la tentative de l'illustre Américain.
— 16 —
Si M. de Romas put, heureusement pour lui, exécuter cette tentative
d'une manière inoffensive, il n'en fut pas de même pour un membre de
l'Académie des sciences de Saint-Pétersbourg, le professeur Richemann.
Ce savant avait envoyé dans les nuages chargés d'électricité un cerf-
volant relié par des fils conducteurs à un appareil placé sur sa table de
travail ; malheureusement pour lui, l'isolement était insuffisant et il fut
tué par la décharge électrique.
En 1827, près de Genève, un savant suisse, M. Daniel Colladon,
renouvela l'expérience qui avait été si fatale à M. Richemann, mais il
prit mieux ses précautions et put obtenir des étincelles de près d'un mètre
de longueur.
IV.
Ulllisalîoii du cerf-volant pour mesurer
la colonne de I»onip6e.
A la fin du dix-huitième siècle, on employa le cerf-volant pour un
usage au moins inatten-
du : c'était au moment
de l'expédition d'E-
gypte, en 1798, et il
s'agissait de parvenir
au sommet de la co-
lonne dite de Pompée,
près d'Alexandrie, et
qui s'élève complète-
ment isolée aux envi-
rons de cette ville ; on
ne savait comment y
porter une corde afin
de pouvoir ensuite en
faire l'ascension. On
imagina d'attacher à
la queue d'un énorme
cerf-volant une longue
ficelle ; le cerf-volant,
élevé en l'air, passa
par-dessus la colonne ;
on prit alors ses dispositions pour le faire descendre de façon que la
ficelle restât engagée sur le chapiteau de la colonne comme une poulie;
ou la tira par un bout, tandis que l'autre traînait à sa suite une corde
plus grosse ; à cette corde en était attachée une plus forte et enfin à
UNE BATAILLE A PROPOS D'UN CERF- VOLANT
U'APriÉS U.NE ESTAMPE DU .WIll" SIÈCLE.
— 17 —
celle-ci un grcis ci'ihle h l'aide diKjnel iiii matelot fut hissé au haut du
monument; celui-ci assujettit le càhlc avec tant de solidité, que deux
architectes Ihincais, MM. Norry et Protin, purent y f^ravir à leur tour
et mesurer toutes les dimensions de la colonne, (jui se trouva av(»ir
88 pieds 6 pouces de hauteur.
V. — L'expérience du jardin Mai-beiir.
A peu près dans le mèn:e temps, on faisait à Paris une autre expé-
rience avec le cerf-volant ; elle eut lieu au jardin Marheuf, sur l'avenue
(;eh1''-vola.\t et i'auaciiute
ii'aimiks la G'/innaxliijuc de la jrune.i.sf. an xi(ISIJ.'J).
des (]haiu[)s-Elysées. Au lieu de courriers de cartes (1), le physicien
faisait monter le long de la corde des oiseaux mécaniques d'un diamètre
moindre que celui du cerf-volant; ces oiseaux, parvenus à une hauteur
donnée, rencontraient un ohstacle ; le choc faisait partir une détente ;
la détente communiquait le feu à une pièce d'ai'tifice ; on entendait une
explosion et l'on voyait tomher à terre une liasse de papiers; l'oiseau
refermait ensuite ses ailes et retournait au point d'où il était parti.
L'auteur présentait ce moyen comme propre à transmettre les dépêches
importantes dans une place assiégée ou à communiquer de l'intérieur
d'une ville au dehors, eu dépit de la surveillauce des ennemis.
(1) On appelle ainsi des cartes coupées en rond et, i>ercces au centre d'un ti-nu par lequel on l'ait
passer le fil du cei-l'-volant ; ces courriers, pousses par le veid, nionlenl en tournoyant jusques au cerl'-
volant, descendent quelquefois, remontent ensuite quand le \enl de\ ieid plus considérable, et linissenl
ordinairement par aller se fixer près de l'atlache.
— 18
L'expérience fut bafouée et sifflée parce que l'auteur, après avoir
exigé un écu de chaque curieux, n'avait pas tenu ce que promettaient
les termes magniri([ues de son afficlie.
LE CEIU'-VOLANT
D'APnÉS UNE IMAGE POI'UI.AIIIE Dl' COMMENCEMENT DU XIX" SIÈCLE.
M. — l>iv<>i'sos formes «loiinéc»» aux ccrfs-volantis.
La forme classique du cerf-volant est celle d'un cœur dont la pointe
supérieure serait saillante au
lieu d'être en creux comme
elle l'est dans cette figure.
Le cerf- volant qui est re-
présenté par Claudine Stella
affecte la forme d'un losange ;
toutefois, on peut varier à
l'infini les figures données à
ce jeu, à condition cependant
que l'on ne s'écarte pas des
règles fondamentales de la
construction de cette machine
aérienne et des lois de ré([iulihre, sans lesquelles on ne pourrait enle-
ver dans les airs le cerf-volant; c'est ainsi ([u'on peut lui donner la
forme d'un aigle, d'une étoile et même d'un homme.
J';ii vu eiili'ver, dil M. Paulin Desoi'iiieaux, clans les plaines de Moiilrougc, un arlecjuin fuit
on lalTclas de diverses couleurs ; il se levait droit, les bras disposés en anses de chaque côté
du corps, sa Iclo couverte d"iin chapeau gris terminé angulairement, qui favorisait l'ascension
de la machine. A terre, il avait 12 pieds de haut ; celui qui guidait cette espèce de cerf-volant,
le tenait avec un fort bâton planté en terre, et un cordeau ciré, dit « fouet », remplaçait le 111
ordinaire. Cette figure, élevée à près de oOO pieds, recevait par les mouvements que celui
qui tenait le cordeau lui transmettait, un balancement semblable h celui que se donne un
homme qui patine sur la glace. L'illusion causée par ce petit spectacle, qui ne semble d'abord
avoir été l'ait que pour récréer des écoliers, attirait cependant et amusait nn grand nombre de
curieux.
VII. — Corfs-volaiits eiidiiils «le pliospliorei
Le même auteur parle d'un cerf-volant phosphorescent, dont à cette
époque on se serait servi pour le simple plaisir d'effrayer les paysans
d'une contrée. Il y aurait peut-être dans cette idée une utilisation pratique,
qui pourrait être employée utilement pour faire des signaux la nuit
dans le cas oiï l'on ne pourrait avoir recours au feu d'artifice.
En combinant les effets obleiuis par ce moyen, on arriverait à créer
une sorte d alphabet à l'imitation des signes i(ui étaient employés autre-
fois dans la télégraphie oi)li(pie.
I!l
VIII. — Kniploi (lu <*<'rf-volnii( <m>iiiiii<> mioIimii-.
Le cerf-volant est doué d'une force très (•onsidér,il»le, qne Ton n en
pinsieni's fois l'idée d'ntiliser ; on prétend
qn'un nagenr fit l'expérience (le traver-
ser la mer à la nage de Douvres à Calais,
soutenn par un cerf-volant. On a prétendu
égal(Mnent qu'une voiture contenant une
personne avait été tirée par deux cerfs-
volants l'espace de plusieurs kilomètres ;
la chose n'est certes pas invraisemblable,
car les traîneaux à voiles sont d'un usage
courant dans le nord de la Chine.
Jusqu'à ])réseut, la direction des cerfs-
volants ne semble point avoir été décou-
verte ; on s'est servi, il y a quelques
années, d'un cerf-v(dant pour corres-
pondre avec la terre ferme et envoyer
des nouvelles d'un navire échoué à
quelque distance du rivage. ,■ , "' '^'^ ''' cerl-volant
1 1 iii.ipi-.. ri APIIICS U.XIÎ IMAGE D liPl.NAL, XI.X= SIÈCLE.
IX. — Hègle.s à observer pour la eoiistiMieliun des eei-fs-volanis.
Au point de vue de la construction, les cerfs-volants doivent suivre
LE CERI \OL\NT
b'APnÉS LNE LlTHOr.nAPlIIE DE VICTUIt ADAM, XIX' SIÈCLE.
certaines proportions mathématiques ; l'armature principale consiste en
une latte de bois bien droite, de deux à trois centimètres d'épaisseur sur
un peu plus d'un mètre de long : c'est l'épine du cerf-volant.
20 —
Pour former l'arc, on se sert d'im bois flexihle (riine loiifj,uour égale
à celle de la latte ; les deux extrémités de l'arc sont reliées au bout de
\\ \\V 1)L CFRI V0L\M EN SUISSE, n'APnÉs i.i! piiince, 182:î.
l'épine et le tout doit être recouvert de papier. On attache ensuite la
queue au moyen d'un nœud coulant, dette partie du cerf-volant doit
mesiu'er environ douze à quinze fois la loni;ueur de l'épine, et c'est une
des parties les plus indispensables, car elle assure la stabilité de la machine
et elle lui est aussi utile qu'un balancier à un danseur de coi'de.
L'origine du mot cerf-volant est à peu près inconnue ; on suppose que
le nom a dû lui venir des dessins qui recouvrent l'armature. Quelquefois,
les enfants se plaisent à remplacer les images par quelques inscriptions
appropriées à la circonstance et nous en relevons une qui ne manque
pas d'originalité :
J'ai vu le ccrf-vulanl «'(''lever sur la terre
Bien plus haut que le cèdre, il rachait dans les cieux
Son front audacieux,
Il semblait à son gré gouverner le tonnerre :
Il méprisait nos accenls superdus.
Je n'ai fait que passer, il n'était déjà plus.
On a commencé, au dix-huitième siècle, à deviner le pnrti que l'on
pourrait tirer de l'enqiloi des cerfs-volants à condition de prendre la peine
LE CERF VOLANT
(XVIII* SIÈCLE)
— 21 —
d'étudior d'un peu près leurs pro|)rir(és. Dnns le DHionuairc des Sciences, des
Arts et des Métiers, pubtié à Amsterdam en 1776, nous trouvons au mot
rer/'-vo/a/it, celte appréciation que l'auteur ne semble donner qu'avec une
certaine timidité pleine de réserve : « On nomme ainsi une fif^ure faite
avec du papier et des osiers, qui ne servait autrefois que de jouet aux
enfants ; ils y attachaient une ficelle au moyen de laquelle ils relevaient
en l'air lorsque le vent était assez fort pour cela. Mais les physiciens
modernes s'en sont servis pour tirer le feu électrique des nuées, en sorte
que ce jouet est devenu entre leurs mains un instrument de physique;
et c'est pour cette raison que nous en parlons ici. »
X. — Gravures roprciseiitant le jeu du eerf-volaiit.
Le cerf-volant était connu assez anciennement comme jeu d'enfant, et
Stella, quia publié son recueil en 1(357, nous montre de jeunes i^arçons
occupés à envoyer dans l'air
cette primitive machine vo-
lante. Sous la i^ravure de
Stella se trouvent les quîitre
A'ers suivants :
Cliacun à l)ieii jouer prend peine ;
Et l'aulre avec son Cerf Volant
Va courant à perle d'iialeine
Pour fournir d'un jouet au vent.
i\.près Stella, le cerf-vo-
lant a été représenté fré-
quemment comme person-
nification de l'air dans les diverses suites des quatre éléments. Ce jeu,
fort plaisant pour les jeunes yens, demande une certaine adresse,
tant pour la construction du cerf-volant lui-même, (jue pour la manière
de le lancer. Ce sont évidemment ces réflexions (jui ont inspiré à un
poète anonyme le quatrain suivant :
Enfant ! la fin de ton ouvrage
Me paraît combler les désirs,
Mais il ne faut qu'un peu d'orage
Pour te sevrer de les plaisirs.
Au dix-huitième siècle, M. L.-M. Bonnet a représenté dans une jolie
composition le jeu du cerf-volant, mais ce sujet ne semble avoir inspiré
aucun de nos artistes modernes.
LES INCONVENIENTS DU JEU DU CERF-VOLANT
d'aI'IiÉS une I.ITHOGHAPHIE de VICTOR ADAM, Xl\" SIÈCLE.
TROISIEME PARTIE
LE JEU DU CHAT ET DU RAT, LE JEU DE LA CORDE
ET LE JEU DE L'ANGUILLE
I. — Lo jeu (lu pivol chez les Romains.
Une des peintures d'Herculaniim nous a donné une représentation
de ce jeu, qui, cependant, ne se trouve pas décrit dans les auteurs anciens
qui se sont occupés de ce sujet ; voici quelle est l'explication qu'eu a
donnée rauteui' d(\s Peintures d'HerruUmuiii et de Pouijiéi :
LE JEU DC PIVOT
D'ArnÉS UNlî ANCIENNE l'EINTUIlF. D'uElir.ULANCM.
Le premier enfiuil relient ;ivec les deux niiiiiis l"e\lréiiiitr' d'une coi'de attacliée par l'autre
bout h un clou ficbé en terre, et il cherche à tirer cette corde à lui ; le second tire la môme
corde par le milieu en sens inverse et aussi avec les deux mains, quoique l'une d'elles, qu'il
peut rendre libre, tienne une baguette pliante ; le troisième, armé d'une baguette semblable,
semble poursuivre le premier. Le jeu paraît consister en ce que ce troisième enfant doit tâcher
de frapper le premier, sans s'exposer aux coups du second ; d'autre part, le premier délie le
troisième en se tenant ta l'extrémité de la corde qu'il ne doit point quitter ; et le second guette
l'agresseur en lâchant de tirei' à lui celle corde qu'il ne lui est pas permis non plus de lâcher.
— '23
II. — I.o jtMi *lii flial et ilii rsil au <li.\-iioiivi<'iiic sîOelc.
Au comim'ucemeiit du dix-neuvième siècle, probablement pour imiter
ranti<[uité aussi bien daus les jeux que dans la mode et le mobilier, ou
remit eu houneur le jeu du cliat et du rat.
Si nous nous en rapportons à une publication faite sui- ce sujet
en 1821. nous trouvons la description suivante :
LE JEU DU CHAT ET L)U HAT
d'après le pniNCE, 1S2I.
C'csl un jeu très plaisant : il doil se jouer entre deux enfants d'égale force ; mais comme
l'un des coureurs est armé d'un tampon, c'est-à-dire d'un mouchoir roulé et ployé ensuite en
deux, il est défendu de rien y mettre qui puisse le rendre dur, comme des billes, des noyaux, etc.
Il ne faut le jouer qu'avec modération.
Il n'y a, au jeu du rat, que deux acleurs; les autres ne sont que spectateurs, et s'amusent
tour à tour des espiègleries du c/uil et des infortunes du rai.
On fixe eu terre un bâton, auquel tient par le milieu une longue corde; deux enfants qui ont
les yeux bandés en prennent chacun un bout; l'un d'eux, qu'on appelle c/ial, est armé d'un
tampon ; l'autre, appelé le rai, tient une latte ou un morceau de bois plat, dentelé en scie, d'où
il lire un son aigre et discordant avec un autre petit bâton ; le chat poursuit le rat sans
relâche, et lui donne des coups de tampon jusqu'à ce qu'il se soit mis hors de sa porlée; le
pauvre rai, qui n'a point le droil d'user de représailles, esl encore obligé de déeeler le lieu oii
il se trouve toutes les t'ois qu'il en est requis par son adversaire qui lui demande du rat ! du
rat ! Il racle alors son bizarre instrument, et, dès qu'il a donné ce signal, il faut qu'il change
bien vile de place et se dirige du côté opposé à celui où la voix terrible du chat s'esl fait
entendre. Souvent, hélas! celte précaution esl déçue; le malheureux rai se jelle lui-même au-
devant de son persécuteur, et esl rudement traité. Mais, lorsqu'il son tour il devient le chai, il
prend sa revanche.
111. — Le jeu de la eorde.
On peut l'aire rentrer dans la même catégorie le jeu de la cttrde, dans
leqnel le patient n'est pas traité avec pins de ménagements. Polhix,
livre IX, chapitre cxv, décrit ainsi cet amnsement :
LE JEU DE LA CORDE
1)"ai'hès ehrah, xviri" sikclk.
On l'orme un cercle autour duquel tourne un des enfants ayant à la main une petite corde
qu'il cherche à placer auprès d'un des joueurs à l'insu de ce dernier; si, en effet, celui-ci ne
s'en aperçoit pas, il esl condamné à faire le tour du cercle en courant el en recevant des coups
de corde; mais, s'il s'en aperçoit, c'est lui, au contraire, qui poursuit tout autour du cercle, en
le frappant, le joueur qui a maladroitement placé la corde.
Ce jeu diffère du jeu du pivol eu ce qu'il demande plus d'asUicc que d'adresse proprement
dite; mais de toute façon la moindre faute se trouve avoir également comme sanction une ter-
rible volée de coups de lanières.
IV.
L«' joii «lo raiiu'iiilUv
Au (lix-luiiiiômc sirt'lo, ou praticfiie un jeu nualogue ennmi sous le
nom (le » jeu do l'auguille » ; à cet cfîet, les joueurs doivent se placer
en rond et cliacuu met une main derrière soi ; un des joueurs fait le
tour en teuaut à la main nue anguille qui consiste en nu mouchoir roulé
comme dans le jeu du clial et du rat. Celui (|ui tieut l'anguille la place
LE .IKU DE L'ANGLILLE
Il'Al'ni';S UNE COMPOSITION n'KlIRAil, XVII['' Sli'XI.E.
dans la main de l'élu d(> sou choix ; ce dernier, aussitôl qu'il est eu pos-
session de cette arme, doit poursuivre son voisin de droite eu le frap-
pant jusqu'à ce ([u'il soit reveuu à sa première place.
A ce jeu, il faut avoir l'attention continuellement éveillée et surveiller
son voisin, de façon à jionvoir se sauver assez vite, et ensuite revenir à
sa place sans avoir reçu un seul coup d'anguille.
Le j(Hi continue, car celui qui détient l'anguille doit faire à sou tour
le tour du cercle et la remettre suhrepticement entre les mains de l'un de
ses camarades.
Nous avons trouvé deux gravures du dix-huitième siècle qui repré-
sentent ce divertissement, à cette diiférence près que le mouchoir n'est
pas roulé et qu'il est simplement posé à terre près de celui qui devra
s'en emparer.
4
-2C,
Malheiu' au joueni' infortuor qui n'aura pas su se mettre en garde
contre son persécuteur, car il ne tardera pas à recevoir sur le dos les
coups de ce petit (lra|)eau en apparence si inoffensif.
QUATRIEME PARTIE
LE CRIQUET ET LE BATONNET
I. — Oi'îjfine niig'laiso du jeu de criquet.
Le criquet a une certaine parenté avec le jeu du mail, mais il eu
diffère C(q)endant par certaines règles.
Dans le jeu du cri([uet, l'un des joueurs
se tient au but, c(ui consiste en deux
pierres éloignées d'environ im pied l'une
de l'autre. On peut remplacer ces deux
pierres par deux piquets plantés en terre
et présentant le même écartement.
Le joueur qui garde le but est armé
d'une crosse ou d'une sorte de battoir en
bois massif, à l'aide duquel il doit em-
pêcher son adversaire de faire passer
une balle entre les deux limites du but
qu'il est chargé de protéger. L'habileté
du jeu consiste à chasser la balle de son
ennemi le plus loin possible, et pendant
que ce dernier court après sa balle, pour
tâcher de la faire passer à travers le but,
le second se dirige vers un autre but
qu'il frappe de son battoir et s'efforce de
revenir assez i)rompt(Muent à son poste
pour repousser la balle une seconde fois.
Si la balle, malgré sa surveillance, traverse le but, les rôles doivent être
intervertis et c'est l'agresseur ([ui devient gardien du but.
(le jeu est fort pratiqué en Angleterre, où il donne lieu à des parties
qui se disputent avec un acharnement remarquable.
UN JlllTAli liKClilunCT Al xvm» siècle
n'APUÈS UNE ANCIENNE GUAVUllE ANCl.AISE.
II. — I,o bnloiiiiel consi<l<'ré comiiK' un des plus niieicns ji<Mi\ sli-asboiirs'oois.
Un autre jeu ([ui ressemble au criquet est le jeu du bâtonnet. D;ins
cet amusement, il s'agit de faire rentrer le bâtonnet dans un cercle
défendu par un gardien qui, à l'aide d'un bâton, repousse l'agression du
bâtonnet.
Le bâtonnet est formé d'un petit morceau de bois très aminci à ses
LE BATONNET
n'AI'RÈS UNE r.llAVnilE ITALIENNE DU XVIII» SIÈCLE.
extrémités. Pour le lancer, on doit le frapper sur l'un de ses bouts, il
s'élève alors en tournant, et le joueur, le reprenant une seconde fois,
cberche à le faire rentrer dans le cercle. Le joueur qui se tient au milieu
du cercle est dénonnné <i gardien du cercle », l'agresseur, au contraire,
porte le nom de servant.
Lorsque le servant a été assez heureux pour faire rentrer son pro-
jectile dans la place mal défendue, il devient à son tour gardien du
cercle.
(le jeu est fort ancien, puisqu'il en est question dans un acte de 1347
sous le nom de jeu du chat(l).
(1) Voir Sinicon Lucc, (.i /V.inte [)?nd!int la (juerrc de Cent uns, page lii.
— :28 —
Au seizième siècle, le jeu du Ijàtounet éUiil aussi désii!,iié sous le uom
de jeu des bibelots. M. Gay, dans son Glossaire, ftiit veiufii'(|uer (jue dans
le patois de Douai le mot bibelot s'applique aux « (luises », c'est-à-dire
à de ])etits morceaux de bois taillés en forme de navette que les enfants
lancent avec un bâton après les avoir fait basculer :
LE Bâton ET et i^a Cha-RA^b
H'aI'UKS CLAUnlNK lUUVnNMÎT I^TELU, XVll" SIKC.I.E.
1547. — Depuys qu'ils ont commencé de liaïUer les tavernes.... jeux de bibelolz, corte
boule, la bille et nuiras lelz lieux desbaucliez. (Noël du Fail, Propos rustiques, lome I".)
Au dix-septième siècle, le jeu du hàtoimet fii;urait également parmi
les jeux d'enlants, et SIella l'a reproduit en même temps (pie le jeu de
la charrue :
Le balonel plaisl à ces deux ;
lieux cy couplez comme des bœufs
ïraisnenl cet autre par les rues ;
Mais s'ils n'avolent point d'autre pain
Que du labeur de leurs charrues,
Ils pouroient bien mourir de fnim.
Dans nu ouvrage [uiblié à Rouen en 1702, intitulé : Les Vér/lcz pluisaiilcs
au le Monde au naturel, nous trouvons une jietite poésie où ce jeu est
décrit d'une manière fort gracieuse :
— 29 —
11 l'sl époiidi'i'' piir iiiiHliotlo.
Ali dieux l'ûinuie on l'accoiiiotle
El le caresse des deux bouts,
El souvenl jusques à Irois coups.
En ayanl comme des furies,
Joué, rejoué plusieurs parlies,
Elles le livrent aux enfants
Pour en fain; leur passe lemps
El Dieu sait comme ils s'en acquiltenl.
Si de tout le jour ils se quittent.
Si parmi les coups différents
Ils ne vangent bien leurs parents.
Dans la poussière, dans la boue,
Celte jeunesse le secoue :
Vivant, il en voulait à tous,
Mort, il est en butte h cent coups.
lùilin tant de; coups on'luy donne,
EL tant de fois on le l},\l()tnie,
Qu'au milieu de la fusse cnlré
]1 soit de son long enterré.
Mais autant avant qu'il doit l'être,
Car pour peu qu'il semble paraître,
Ou se trouve au bord du tombi'au,
On le bàlonne à nouveau ; '
Et l'un des joueurs avec joie,
Le plus loin qu'il peut le renvoie :
Tandis que pour le raproclier,
L'autre court et va le clierclier.
Pour le motif de cette guerre,
C'est que l'un le veut mettre en terre,
.\u lieu que l'autre ne veut pas
Ou'il ait les honneurs du trépas.
Nous lie devons pas manquer de citer sur ce sujel un intéressant
1.A Foire
n APIIKS CLADDINK BOUZCIXNET STIÎI.I.A, XVH" SIKCLK.
article publié par M. A. Bartli, dans la revue /« 3Ie/if.s//ie (numéro du
o janvier 1888), qui donne la descri[)tion de (pielques anciens jeux en
usage à Strasbourg :
Un autre jeu devenu archéologique, en .\lsace du moins, consiste en un petit cylindre de
bois terminé en pointe à ses deux bouts. Placé à lerre, un des joueurs le fait sauter en l'air d'un
— 30 —
pi'lil coup iVappé avec une pièce de buis appelée aune, avec laquelle il lâche ensuile de lui appli-
quer au vol, et de toutes ses forces, un second coup qui l'envoie au loin, où l'autre joueui' doit
le rattraper également au vol ou le ramasser à terre en satisfaisant à certaines conditions qui
peuvent varier. Le joueur prêt à frapper crie « quiné ! » ; l'autre répond » oui » et le coup part.
C'était une croyance très répandue parmi les survivants de la première Révolution, que ce jeu
n'était autre chose qu'une représentation symbolique de l'exéculion de Louis XVL Le quiné
figurait le roi, le ki/tii, d'où son nom. C'est là évidemment uni; élymologie populaire. Le nom
et, partant, le jeu étaient d'origine française, comme l'indique le oui du deuxième joueur, con-
servé fidèlement en allemand sous la forme de voiii. Le même nom se retrouve pour le même
jeu en pays de langue française, à Belfort par exemple, et il se rattache peut-être au jeu de
« quille-là », qui se jouait à Paris au seizième siècle d'une façon toute semblable et avec la
seule différence que le projectile était une balle. Mais tout n'est pas faux dans cette élymologie.
Les enfants d'alors imitaient bien dans leurs jeux les insanités sanglantes de l'époque. J'ai
connu à Strasbourg de ces enfants devenus vieillards, à qui li^urs parents, braves gens du reste,
avaient trouvé bon d'offrir comme jouet une guillotine en miniature, mais pouvant fonctionner.
Les petits possesseurs de ces odieuses machines étaient fort enviés par leurs camarades.
Parmi les bambins du quartier, c'était à qui leur dénoncerait les chattes et les chiennes près
de mettre bas, à qui leur apporterait les pelils, pour avoir le droit d'assister à l'exécution.
Celle-ci se faisait toujours devant une nombreuse assistance d'enfants, on y imitait aussi
exactement que possible ce qui se passait journellement sur la place d'Armes. Pour juger de
la valeur d'une époque, de pareils usages sont des documents au même titre que la Déclaration
des Droits.
CINQUIEME PARTIE
LES ECHASSES
I. — Loin* (léfiniiioii, d'aprùs l'onipeîus l^'cstuis.
Le plus ancien texte où il soit question des échasses nous est donné
par le grammairien latin Sextus Pompéins Festus qui, dans le chapitre VII
de son Glossaire sm* la signification des mots, désigne ainsi ce jeu :
« On appelle monteurs d'échasses des pantomimes qui, pour imiter dans
lein's danses les Pans aux pieds de boucs, se servent de perches |)ré-
sentant de petites fourches, sur lesquelles ils se tiennent debout à cause
de la ressemblance des perches ainsi disposées avec les jambes de Pan. »
II. — I,es éeliaisscs chez les Itoniains.
Les échasses sont désignées sous le nom de yralhr, et on a voulu
y voir une analogie avec la danse des grues, connue des anciens
Grecs ; cette explication erronée n'est pas à retenir, car le mot écliasse
désigne simplement l'appareil ([ue nous connaissons encore aujourd'hui.
Les anciens ont aussi désigné les échasses sous le nom de « coula-
— ;fi —
Dinnahalcy ; peut-être est-ce cette habitude de mcuiter sur les échasses qui a
été l'origine des Titans dont il est si souvent question dans la Mythologie.
III. — Fablo «l*» Iticlicr sur los échasses.
Le poète Richcr s'est peut-être inspiré de cette supposition dans la
petite fable qu'il a composée sur ce snjet :
■y%^'/'^^^M^?^^0^'
LE JEU DES ECHASSES, d'apuès unk cnAVunE de hueï. xviri" sikci.e.
Quel spectacle s'offre à mes yeux !
Des géants dont la lèle alleiiil jusqiies aux cieux!
Disait un manant dans la plaine.
Or c'étaient déjeunes enfants
Qui, sur des échasses errants.
Au iiaut de la roclie prochaine
Paraissaient de nouveaux Titans,
Image jusqu'alors à notre homme inconnue.
Voyez-les de plus près, lui dit certain l'ailleur.
Le manant s'approche : leur taille diminue,
A chaque pas qu'il fait, il connaît son erreur.
Ceux qui lui paraissaient avoir plus de vingt brasses
A peine avaient quatre pieds de hauteur.
Nous admirons ainsi, de loin, maint grand seigneur,
Qui, de près, n'est qu'un nain monté sur des échasses.
IV.
— 32 —
Les t'cliassos au sei/iOine sî<^eIo, leur utilisation
clans les fêtes publiques.
Dans le passai^e dos œuvres de Rabelais, où il est question de près de
deux cents jeux divers, on retrouve cette désii;nati(Ui du jeu de la grue.
Quoiqu'il n'existe aucun commentaire certain sur ce sujet, il est
probable que Rabelais a voulu indiquer par là le jeu des échasses, qui
était très en faveur à cette époque et particulièrement à la Cour du dnc
de Rourgogne. Lors de l'entrée du futur Charles-Quint à Lille, en 1516,
on s'est servi des hommes montés sur des échasses pour porter la ban-
nière, et les comptes de la ville nous apprennent qu'ils reçurent pour
ce travail un salaire de six sols.
V. — Combat créeliassos à \aniur.
Les échasses ont toujours servi de prétexte à des luttes et à des
combats, mais ce fut à
Namur que ce genre d'exer-
cice fut élevé à la hauteur
d'une institution munici-
pale ; il y avait dans cette
ville deux corps de jeunes
gens, couq)tant chacun près
d'un millier d'adeptes, qui,
aux grandes fêtes, se me-
suraient l'un contre l'autre.
Chaque brigade se distin-
guait par son uniforme et
sa musique ; les rencontres
avaient lieu sur la grande
place de l'Ilôtel-de-Ville,
et il n'était pas rare qu'au
plus fort de la mêlée, les
infortunés lutteurs qui s'é-
taient laissés choir fussent
foulés aux pieds par ceux
de leurs camarades qui com-
l)attaient encore pour sau-
ver l'honneur des couleurs
du canqi.
LES ÉCHASSES, n'Ai'iiKs UN FiioNTisi'icic DK iiiînyiiiN, sviii° siixi.i;. _ i i. t' i
Ces combats d échasses
avaient lieu à épocpu; fixe, au moment du carnaval, mais la municipalité
— 33 —
«loNiunur nt- inan([iiait pas de les décréter toutes les fois qu'elle voulait
honorer dune façon jiarticulière quelque grand personnage devenn
momentanément son hôte ; c'est ainsi qu'on donna des combats d'éehasses
en l'honneur de Pierre le Grand et de Bonaparte.
L'un des plus anciens combats, dont il soit fait mention, eut lieu
en tSlfi et le dernier fut donné en 1814. Ces combats d'éehasses eurent
pour les citoyens de Namur l'avantage de leur procurer l'exemption à
perpétuité des droits sur la bière, et ce privilège n'était ])as ])our eux
un mince avantage, car on sait (pie Gambrinus a toujours été i)articuliè-
rement vénéré dans les Flandres.
VI. — Les déliasses landaises.
Les échasses n'ont pas toujours servi uniquement de jeu d'enfants,
'^'^^df^yfi 1^ ^^z^/ci^<j
et dans les Landes elles sont d'un usage tout à fait courant; les bergers
qui gardent leur ti'oupeau sont montés sur des écliasses qui leur per-
mettent de voir au loin et d'empêcher les brebis de se faire croquer
par le loup. Les femmes, elles-mêmes, pratiquent d'mie manière coui-ante
— ;î'i —
cet exercire, et il n'est pas rare de rencontrer dans la campagne quelqne
bonne paysanne montée snr ces longues jambes de bois , occupée à
tricoter une paire de bas pour son époux.
Les écliasses landaises difl'èreut di? celles dont on se sert pour les jeux
d'enfants, en ce qu'elles sont attacliées par une solide courroie après
les cuisses de celui qui s'en sert. La solidité de ces cavaliers d'un nou-
veau genre est augmentée par une longue canne (jui leur permet de régler
leui" marclie et qu'ils emploient également au repos comme siège portatif.
\\\. — Iteprésontnlioii artîsJiqii*' du jeu des écliasses.
Il existe un tableau de Goya représentant une course d'écliasses en
Espagne; ces conreiu's, pour augmenter la difficulté, jouaient en même
temps d'une flûte qu'ils tenaient dans leurs deux maius.
Berquin, l'ami des enfants, a reproduit, dans un de ses frontispices,
un monteur d'éclmsses traversant un torrent; il profite de l'avantage (pie
lui donnent ces longs supports de bois, |)Our entamer un colloque inté-
ressant avec une cbarmante bergère qui, pour gai'der son unique mouton,
est venue se reposer sur la passerelle jetée en travers du cours d'eau.
Huet, (pii a gravé toute une suite de jeux d'enfants, nous montre un joli
bambin monté sur des écbasses terminées en forme de bécpiilles.
En 1824, Marlet, dans sa curieuse suite des tableaux de Paris, a
représenté les |)etits danseurs d'écbasses aux Champs-Elysées : c'étaient
de mallieureux enfants babilles en Ijaladins, qui exécutaient un pas rytbnu'
aux sons d'un orchestre des plus sonnuaires ; au premier plan, l'on a[>ei'-
coit leur terrible inqM-esario, nnini également de longues échasses ; pour
le moment, il est assis sur un cheval, et connnande la mano^ivre à ces
soldats en herbe.
De nos jours, les échasses font partie presque intégrante du mobi-
lier scolaire, et il en est bien peu parmi nous qui, dans leur jeunesse, ne
se soient livrés avec passion à cet exercice hygiénique.
LES ÉCHASSES
IIAI'UKS VICTOR AHAM, XIX* SIÈCLIÎ.
Uo —
SIXIEME PAIITIE
LE SABOT
1. — Uéfiiiilion.
Le jeu (lu .s;il>ol consiste à laii-e toiiriR'r, ou le rouclluul avec uue
Innière, uu petit morceau de bois de forme ronde (jui se termine [)ar
UMc j)ointe.
On ne peut imaginer un jouet plus simple et plus priinitil' (jue le
sabot, et c'est à juste titre qu'il se ii,lorifîe d'être l'ancêtre de la toupie.
11. — Le jeu du sabot chez les (irees et chez les Itoinains.
Cbez les Grecs, si nous nous eu rapportons au rapport de Callimaque,
LE SaB OT
d'AI'UÈS LNE COSiroSITIOX de CLAUUrNE BUIZON.NEI STELLA, .\V]|' SIÈCLE.
Pittacus, qui mourut en 579 avant Jésus-Cbrist, aurait eu l'occasion de
parler d'une toupie qu'on faisait tourner avec un fouet.
— 3(3
Los liuamius ont cuumi éi^ah-iUL'iit ce joii, c.ir, (laus ses L'uiuiiifU-
taircs sur Horace, Acroii tléci'it très exactement le » trocluis » (lu'on
frappe avec un fouet et
(jui tourne animé d'un
luouviMuent d(! rotation.
I^e sabot des anci(Mis
était en tout poiut scmij-
l)ialde un nôtre ; Piine
couniare l'ondjre projetée
à nue borne renversée.
Or, la forme d'une borne,
mêla, est parfaitement
connue ; ainsi une inctn
posée sur la pointe nous
représente exactement le
sabot des anciens.
(.liez les Homaijis, le
sal»ot était le jeu favori
des enfants. Au lieu de
travailler. Perse n'avait
d'antre aujbition, avouo
t-il, « que de faire tour-
ner à coups de fouet son
sabot de buis » .
Virgile, an livi'e VII de V Enéide, désigne évidemment le sabot ([uand
il dit : Volitinis suh ncrhere turho. ( hi a fait en français la traduction de
ce passage, qui donne une idée exacte de la luanière dont ce jeu était
pratiqué par les anciens :
Sous le IViuel pliant qui sirilc et le poursuit,
Roule ce buis tournant dont s'amuse reni'unce;
11 court, il va, revient sous un portique immense.
La jeune troupe observe avec étonnement
Des cercles qu'il iléci'it l'agile mouvement,
L'exerce sans relâche et, l'animant sans cesse,
Par des coups redoublés redouble sa vitesse.
LE JEU DU SAUOT
h'apIIKS I.li IIEilEII. lili J. LUCKHN, XVJll''
lU. — I.o snliol nu li'i'izîrine siOelc. — Origine pi-obablo «le co nom.
Le jen du saljol s'est perpétué en France d'une manière à peu près
continue, et dans un ouvrage du treizième siècle, intitulé : Miracles de
sdiiit Liiys, le jiom du sabot, comme jouet d'enfant, se trouve déjPi.
— 38 —
On suppose que ce uom lui vieut de lu eoutuiue (pie Tou avait autrefois
de .tailler cette espèce de toupie dans le talon des sabots hors d'usage.
IV. — .\iiec€lotc sur le Jeu du sabol.
Le jeu du sabot n'a pas été dédaigné des lils de rois et nous citerons
à ce sujet une ])etite anecdote dont le héros l'ut le lils aine de Jaccpies
d'Angleterre :
La première fois que le jeune prince alla à Sterling pour y renconlrer le roi, il aperrul à
quelque distance de la porte de la ville une ineule de blé qui avait à peu près la l'orme du sabot
avec lequel il jouait souvent.
« Voilà un bon petit sabot, s'écria-t-il.
— Et pourquoi ne jouez-vous point a\ec? lui demande un de ceux qui l'accompagnaient.
— Je le ferai avec plaisir si vous voulez le mettre en train pour moi. »
V. — De la manière de pratiquer ce jeu.
La grande habileté pour le joueur d(? sabot consiste à le faire tourner
avec assez de rapidité pour
qu'il produise une sorte de
ronronnement, qu'avec nu
peu de complaisance on peut
appeler nn chant. Toutefois,
faire routier son sabot est un
talent qui n'appartient pas à
tout le monde. Un poète, en
voyant au temps jadis un
enfant jouer au sabot, com-
posa les vers suivants qui
renferment une idée ingé-
nieuse :
Ce sabot ainsi maltraité,
Quoiqu'il soit rudement fouetté,
S'endort et fait la sourde oreille ;
Et ce qui surprend ce marmot,
C'est que le fouet qui le réveille,
Sert pour endormir son sabot.
La manière même de jouer
au sabot en le frapi)aut avec
une lauière, ordinairement
faite avec des pcau.\ d'anguilles, a ins|)iré le itetit ([luitrain suivant, en
forme de charade, que nous relevons dans VLnpnicimtciir /'r(i/ira/.s :
JEU DU SABOT
1) APRES UNE EAU-HOllTE DE OllAVELOT.
— ;îo -
Do l:i jeunesse innocente aniusette,
Semblable à qui me fuit mouvoii-,
Sachez que plus on me fouette,
Mieux aussi je fais mon devoir.
VI. — Gravures représentant le jeu <lu sabot.
Le jeu du sabot a été reproduit bien des fois par des graveurs qui
se sont occupés des jeux d'enfant. Stella nous montre que, <le son
LE JEU DU SABOT
d'après une GB.WUKE allemande IHJ XVIII' SIÈCLE.
temps, on se servait d'un fouet à double lanière poiu" fouetter le sabot :
deux enfants sont actionnés à fouetter le même sabot qui est en pleine
niarcbe, taudis ipiun peu plus loin un autre bambin est occupé à lui
donner la première impulsion en le tournant rapidement entre ses dix
doigts.
Un peu plus tard, en 1712, une image lioUandaise tirée du recueil de
J. Lucken présente un joueur de sabot qui se sert d'un véritable mar-
tinet pour fouetter ce moderne trochus.
A la fin du dix-huitième siècle, M. de Saint-Aubin a choisi justement
le jeu du sabot comme frontispice de sa curieuse suite des « différents
— m
jeux des [letits polissons de Paris ». Comîrie légende, il se plaît à rap-
peler que le jeu du sabot est la représentation de la vie liumaine.
DAPRKS UNE COMI'OSITIO.N DE Al'O. DE SAIM-AI'DIN, XVIU'' SlKC.Li;.
Le jeu <lu salnit est un de ceux qui ont le inoins varié', el il est i>ro-
l»able que nos arrière-petits-neveux continueront à loiu'tter leur sahol
avec autant d'insouciance »[ue toutes les i^énératioiis qui l(!s aunuit pré-
cédés.
LE SABOT
n'APfiRS vrcTon aham. xix« siècle.
— il —
SEPTIEME PARTIE
LA TOUPIE
I. — Oi'iiïiiio iiiodci'ue île et» jeu.
Cette invention est relativement récente et sa nol)lesse est de t)ien
fraîche date. Dans les antenrs anciens, les renseignements snr le sabot
LE JEU UE LA TOUPIE
u'aI'IIKS une GIlAVUllK IJE CAimACCI, XVir SIÈCLE.
sont relativement fré(jaents, mais ces mêmes antenrs sont muets snr
tout ce qui pourrait concerner la toupie proprement dite.
On a dit que la toupie n'étaiit (pi'une innovation barbare des temps
modernes et une dégénération tle la race humaine, dont elle est la
preuve matérielle.
La tou|>ie, dit M. Richard, professeur de mathémati(pi(!S, dans son
NoiireuH Manuel des jeux cnscigiiiiiil hi scirncr, publié en 1837, ii"a été
inventée que pour éviter à reniant l'e.vercice fatigant du sabot, qui
demandait au moins une certaine adresse et une énergie évidemment
plus considéral)le que celle destinée à lancer une toupie. Cet auteur
fulmine contre la simplification du jeu et dit à ce propos : « C'est à qui
inventera le moyen de leur épargner quehpie fatigue, à qui insj)irera à la
jeunesse \v, jihis d horreur pour le travail. »
II. — Dénnition du jeu «le la toupie.
Par sa lorme, ou effet, la toupie uiontre clairemeut qu'elle u'est (ju'une
trauslormatiou du sabot. ]J Encyclopédie viêthodiijuc eu doune uue bouue
déliuitiou :
C'est un morceau de bois rond Iraversé par une cheville de fer, dont la pointe d'en bas sert
de pivot k la toupie ; et le bout d'en haut est pour retenir la corde qu'on enroule autour et
LA TOVPIE
ij'.M'iiiîS UNI-: coMi'osrno.N riF. clauiunk bhuzonnet sïei.i.a, xvii» siècle.
qu'on lance avec force contre terre. La toupie prend alors un mouvement rapide de rotation
pendant lequel on peut la prendre toujours tournante sur la paume de la main. On lance aussi
quelquefois contre un but, contre une autre toupie, ou une pièce d'argent qu'il est difficile
d'attraper, mais qui fait gagner quand on réussit.
lit. — 'l'Iiéorîe de ce jeu.
La toupie, qiiaïul elle a été laucée itar uue luaiu liahile, tout-ue avec
rapidité sur sa j)oiute ; elle conserve sa position verticale, parce que
toutes les parties tendent à s'éloigner de l'axe et «[u'elles forment comme
autant de puissances qui tirent dans des directions perpendiculaires à
l'axe. Or, comme toutes ces ]»uissances sont égales, elles se trouvent
'13 —
mniutemies dans un ('-([uililire parfait
tant que rimpulsion qui est
donnée est suffisante pour
maintenir cet équilibre.
Théori(juement, la toupie
nue fois lancée ne devrait
jamais s'arrêter ; les causes
qui tendent à la faire mou-
rir, pour employer le terme
usité, sont d"ab(U"d le frot-
tement de la pointe sur le
sol et ensuite la résistance
que l'air lui oppose et (pii
est un af^ent I)eaucoup plus
actif. Pour prouver cette in-
fluence de la résistance de
l'air, on a fait un jour l'expé-
rience de lancer mie toupie
sur une plaque d'acier par-
faitement polie, placée sous
une cloche pneumatique où
le vide fut fait. La toupie, lancée av
(>t conservent la position verticale
LE .JXUDE'
A. TOUtlE
LE JEU DE LA TOUPIE
'ai'Iiks i.e hindi'ispecl hk katz. wii" sikcle.
ec une force moyenne, a marché
pendant deux heures et seize
secondes.
Les divers mouvements que
prend la toupie, quand elle a
commencé à tourner, provien-
nent du déplacement de son
centre de gravité ; la princi-
pale cause résulte de la forme
donnée au clou placé à l'extré-
mité de la toupie. Ce clou est
généralement éaioussé, c'est ce
qui permet à la toupie qui coju-
mence d'abord à tourner dans
une position inclinée de se re-
dresser ensuite ; si le clou était
terminé par une pointe acérée,
la tou[)ie ne iiourrait jamais se
relever.
— 44 —
Les toupies sont géuéralement en buis et de forme couique ; elles
sont massives et terminées par un clou présentant à peu près l'aspect
d'une poire.
IV. — Haber-gess on toupie cr.\lleinag-ne.
A la fin du dix-luiitiènie siècle, on a fait des espèces de toupies
creuses beaucoup plus grosses que la toupie ordinaire et qui sont app(>-
lu-l loi l'it
n'MIlbS IM- COMIOSIIION Jll- AUl UI iMNl \UD1S Wlll s|H,l L
lées Haber-(jess ; elles sont en bois de chèiie ou de buis et l'intéi'ieur
est goudronné de poix noire ; elles ont quelquefois jusqu'à cinq poiices
de diamètre et sur les côtés on a ménagé une ouverture ronde assez
large. La tète est munie de gros clous dont l'extrémité est ronde ; la
queue, qui a environ cinq centimètres <le hauteur, est grosse comme
une petite datte. Autour de cette queue on enroule la ficelle et ou main-
tient la t(uq>ie verticalement au moyen d'une petite clef eu bois qui
io —
vient sp placer dans l'extrémité de la ([ueue. On pent fort bien faire
marcher celte tonpie en la tirant de la main gauche, tandis qu'on la
LE .Œli DE LA TOUPIE
n'.MMlKS U.NE GIIAVIIIE DE HAMILTON, XVIll' SIl'XLE.
maifitient avec la main droite ; en tournant, la toupie d'Allemagne pro-
duit un rontlemeut assez fort analogue, du reste, au jeu du diable ou
de l'émigrette.
(le jeu a été décrit d'une manière fort intéressante par M. A. Barth,
dans un article publié le o janvier 1888, dans la revue la Mélusine.
La havergaiss est un jouet qui a fait les délices de bien des généralions de bambins stras-
bourgeois et que eeux d'aujourd'hui ne connaissent plus que par ou'i-dire. Il se compose d'une
boule creuse en bois dur de 10 k 15 centimètres de diamètre, percée en son milieu d'une
ouverture carnée, enduite à l'intérieur de poix et se terminant à sa partie inférieure en une
tige solide. Celte tige autour de laquelle on enroule, de bas en haut, la corde, s'emboîte dans
la clef. L'un des joueurs lire sur la corde ; l'autre, ramenant brusquement la clef en sens inverse,
lance au loin la boule devenue libre el qui, animée d'un mouvement de rotation rapide, décrit
de larges cercles en bondissant et en produisant un ronflement sonore. Nous appelions ce
jouet un bourdon. Mais le nom indigène est havergaiss, qui remonte au moins au seizième
— 46 —
siècle, où Fischart h menlionne dans son Gargantua. Dans celle acception, le mol paraît être
propre aux pays rhénans.
En Allemagne ou en Alsace, il se dit
encore d'une espèce d'araignée, le fau-
cheux, haut sur ses jambes comme noire
bourdon, d'une sorte de bécasse et d'un
hibou, tous deux bruyants comme lui et le
dernier mal famé pour son chant lugubre.
Les trois animaux passent du reste pour
donner des présages et on les tient pour sus-
pects de dialjlerie. Le sens apparent du mol
chèvre d'avoine n'est évidemment pas le vrai ;
mais l'étymologie en est obscure; des philo-
logues ont prétendu y découvrir un vieux
nom des boucs qui traînaient le char du
dieu ïhor. Quoi qu'il en soil, le jouet avait
la mauvaise habitude d'entrer en collision
avec la tète des passants et les carreaux des
voisins, el la police le voyait d'un mauvais
œil. Déjà Fischarl le classe parmi les jeux
de plein air « die ins Feld gehoren ». Aussi
la police allemande, plus radicale que l'an-
cienne, l'a-t-elle simplement supprimé,
comme le jeu de la balle, comme le jeu du
quiné el comme bien d'autres. Poui' les enfants sages, il a été remplacé par la toupie japonaise,
qu'on fait marcher sur une table dans une assiette.
En Allemagiu-, on désigne également la toupie ronflante sons le nom
SA sows'iE ffi)'A.aas»SAaiws
LE JEU DK LA TOUI'IE
ii'ApnÉs la Gi/innasiii/iie de la jeunesse, an xt, iSD'i.
de Bruiiniici} /i/'o/sr/\ c'est-à-dii'e qui l'ait des eei'clos ; le mot Jiruiituten
est évidemment une onomatopée qui sert à indiquer le ronronnement
que fuit la toupie en tournant.
— 47
\'. — (liraviires i-cpi*i'>*oiilaiil le jeu do la loupio.
Au dix-sei>tiôme siècle, nous avons la gravure de Stella, qui repré-
sente un groupe d'enfants jouant à la toupie. Ce jeu est toujours le
même : il s'agit de lancer, avec assez d'adresse, sa toupie au milieu d'un
cercle, où d'autres toupies sont déjà disposées, pour toucher celle de
son adversaire ; c'est ce que l'auteur a décrit en ces vers :
Qu'ilz sont ravis ces l)eaux mignons
• Alors que de leur compagnon
Ils peuvent sapper la toupie,
Et que les autres sont dolens
De voir les leurs assujelies
A souffrir ces coups violens.
A peu près à la même épocpie, un graveur ({ue nous avons déjà
nommé, M. Carracci, présente des enfants jouant à la toupie, et la
forme de celte dernière se rapproche heaucoup plus du sabot (jue de
la toupie telle (pie nous la connaissons maintenant.
En 1712, Lucken, dans son Recueil des jeux d'enfants, montre le jeu
de la toupie lancée dans un cercle analogue à celui que nous décri-
vions plus haut.
Une gravure anglaise de la fin du dix-huitième siècle indique une
petite vari.-uitc dans ee jeu : taudis (jiie reiilaiit, placé au preuiier plan,
tieut sa toupie dans sa main, son camarade, qui est debout, la fait
tourner sur une sorte de petite palette en bois analogue à celle dont
les tout jeunes entants se servent pour jouer avec du sable.
Saint-Au])in, dans sa série des Di/fï-irids jeux des pclits polissojis.
J-EUNE Caj^çons quM jouhht a la Tovpte
représente trois joueurs de toupie se livrant à cet exercice au pied d'un
monument qui semble être la grande colonnade du Louvre.
Une suite de jeux du premier Empire représente la toui)ic d'Alle-
magne avec son gros trou percé latéralement. Enlin, une litliographie
de 1840 reproduit ce même jeu où deux enfants se mettent en collabo-
ration pour faire marcher cette toupie.
\ I. — l'oôsie siw le jt'ii «le Isi loiipic.
Un auteur, M. Lcjj'rauc, imagine un dialogue assez Jiiouvemeuté entre
une tou|)ie et un sabot, et c'est probablement à la toupie d'Alleniagu<;
(pi'il fait allusion dans ces vers :
Au Sabot la Toupie un beau iiuUiii l'aisaiil
Une querelle crAlleinand,
r.ui disait ces dures paroles :
<i Que viens-tu de li's cabrioles
— '(!) —
Internimpre mon doux repos?
Ai-je besoin d'aller, an gré de tôles folles,
Comme loi, pur monts et par vaux ?
Sons le fouet de ces vils inarmols.
Traîner nne existence brusquée :
La mienne, j'en conviens, me fut communiquée ;
Mais depuis j'agis seule, et fais ici, je crois.
Quatre fois plus de bruit que toi. »
L'humble Sabot, quoiqu'il eût de la veille
Trois clous dorés sur chaque oreille,
Trouvait, à part certains mois peu décenls,
Que la Toupie avait quelque bon sens;
Mais lorsqu'en un moment il vil la dame fière
S'en aller de vie à trépas,
« Hé ! hé ! dit- il, celle lanière
Fait que si tôt je ne meurs pas. »
nUITIElME PARTIE
LE TOTON
I. — Di'fiiiilîon do ce jeu.
Le toton est uno sorte de petite toupie dont la queue allongée et
tbi't mince peut être facileiuent roulée entre les doigts, qni lui <lonnent
une impulsion analogue à celle de la toupie. Ce jeu est plutôt un jeu
de hasard qu'un amusement d'enfant. Les Romains le pratiquaient sous
le nom de jeu de la pièce d'airain. PoUux, expliqnaut ce jeu, dit : « On
dresse une pièce de monnaie et ou lui imprime un mouvement de
rotation rapide, et, pendant qu'elle tourne encore, il faut l'arrêter avec
le doigt. '1
Cette description est absolument celle du toton, à cette difTérence
près qu'on laisse cette minuscule toupie mourir de sa belle mort.
Le toton a été connu dans tout le Moyen Age sous le nom de <( jeu
de la pirouette » ; il se compose alors d'un disque asjsez épais traversé
on son axe ]»ar une petite tigi; ronde en métal.
II. — Fni]>loi «lu lolon on place «les dés à jjoiier.
Au dix-huitième siècle, le toton semait au même usage que les dés
et le disque était divisé en six cases poi'tant chacune un numéro ; si
50
le joueur aiiu'-iie le point sur lequel il a plaeé tic rarç,eut, celui contre
lequel il joue raet autant que l'on a mis au jeu et il i^agne quaud son
adversaire n'amène pas ce point.
De nos jours, le toton n'est plus guère qnini jeu d'écolier, qui en
LE JEU DU TOTON
ll'Al'nKS CHABIIIN. WIII' SIKCLIi.
fabrique à bon marché avec de vieux boutons de culotte et quebjuefois
même plus simplement encore avec une boulette de mie de pain p(n'cée
d'une allumette.
Collé, dans ses A-propos de société, a consacré ([uelques vers au
toton ; nous les reproduisons ici :
A Cl' jcu-Ià sans cesse on tourne ;
C'est pair ou non ; le fort y fait tout.
Mais (le son côté, morgue l'œil qui se tourne,
Dit, et tout (l'un coup ;
Sur la gaît(5, sur l'esprit, qui la tourne,
Trouve à se llxec-sur tout.
LE JEU DU TOTON OU DE LA PIROUETTE
d'après un recueil d'emblèmes du XX l" SlÈCI.i:
mni.ioTHÈQUE DE l'arsenai.
CHAPITRE II
JEUX A COURIR
La course.
1. iJL'finilion.
Le jeu (le la course chez les Grecs. — 3. Le jeu de la
course clans les Pardons en Bretagne. — \. De la manière de bien courir, d"après
.M. Laurent de Jussieu.
Le jeu de barres. — i. DéOnition. — !>. L'Oslrachynda chez les Grecs. — 3. Le jeu
de la coquille ciie/ les Romains. — \. Le jeu de barres au Moyen Aye. — 5. Le jeu de
barres en Pelj^ique et en Italie. — <j. Le jeu de barres de Napoféon 1''. — 7. Le jeu de
barres assis. — 8. Poésie sur le jeu de barres.
Les quatre coins. — 1. Le jeu de la marmite chez les Romains. — 2. Le champ estroit
au quinzième siècle. — .3. Manière de pratiquer ce jeu. — /,. Le jeu des paquets. —
;>. Le jeu des faf,^ots. — G. Le jeu de la mer agitée. — 7. Gravures du jeu des quatre coins
au dix-huitième siècle.
Le jeu de cache-cache. — 1. Le jeu de cache-cache chez les Romains. — -2. Le jeu
de cliyne-muscltc au .Moyen A'^c. — 3. Le cache-cache Nicolas. — ',. Le l'uret du Jjois
Mesclanies et le jeu de la pantoulle.
PllEMIÈllE PARTIE
LA COURSE
l. — Uôniiilioii.
ET exercice fut le plus simple, peut-être, dont
riioiume se fût jamais avisé ; mais aussi, c'était évi-
demment celui qui lui était le [jIus utile, puis(ju'il
lui permettait soit de pourvoir à sa nourriture en
attrapant à la course les animaux, soit encore d'écliap-
per par une i»rompte retraite aux bètes féroces qu'il
avait à redouter.
II.
I.,e jeu de la course elie/. les OreeSf
Chez les Grecs, la course occujtait une place prépondérante dans
l'éducation ([ue l'on donnait aux jeunes gens des deux sexes. Les jeunes
— 52
filles, en effet, se livraient avec passion à cet exercice, et les anteurs
anciens nons les représentent conrant dans les prairies qui bordent les
fleuves et les canaux, se dé-
fiant et s'excitant l'une l'autre
à qui rivalisera le plus de lé-
f^èreté et de hardiesse.
Platon recommande la
course aussi bien aux ado-
lescents (ju'aux hommes faits.
Sénèque, dans sa XV" lettre,
conseille à Lucilius de s'ap-
pliquer à la course comme à
un exercice des plus utiles.
Notons enfin que les Olym-
piades étaient marquées par
le nom des vainqueurs de la course. L'emplacement destiné à ces exer-
cices s'appelait le « stade » ; il était couvert de sable. La longueur
ordinaire des stades était de près de 200 mètres, et le coureur était
classé suivant le nombre de fois qu'il pouvait parcourir cet espace à
une allure accélérée.
LE jel: de la course
u'apiiks OLAIVS MAGXUS, .\vi<- sjkcLE.
III. — Le jeu de la course clans les Pardons en BreJagne.
Le jeu de la course est encore usité dans certaines provinces, notam-
ment eu Bretagne, où, dans les fêtes appelées k Pardon », les jeunes
gens luttent à la course pour gagner le prix qu'ils arboreront fièrement
pendant toute la durée de la cérémonie.
l^ • — Uc la manière de bien courir, d'après M. Laurenl de Jussieu»
Sur ce sujet, nous ne pouvons faire mieux (jue de citer l'opinion de
M. Laurent de Jussieu qui, un peu avant 1830, sest beaucoup occupé
de l'éducation et de l'instructicm de la jeunesse. Cet auteiu', s'adressant
aux enfants, leur dit :
L'.-iulomiie est In saison où cet exercice est particulièrement agréable ; c'est au moment des
premières petites gelées que vos corps éprouvent le besoin de ce mouvement propre à leur
rendre une chaleur douce, saine et à favoriser le développement des organes. Le jeu de barres
et la lutte à la course et tous ces jeux où il faut courir sont de saison à cette époque. En vous
y exerçant avec intelligence, vous pouvez rendre ces jeux doublement profitables pour vous.
Ils ont, en effet, une utilité immédiate pour votre santé; et, de plus, il peut se présenter beau-
coup de circonstances dans la vie où l'on soit bien aise d'avoir acquis l'habitude de franchir
avec célériti'' un espace plus ou moins grand, soil pour échajiper à un danger, soit pour porter
promptement secours à une personne exposée h quelque péril imminent.
De même qu'on ne doit point négliger de cultiver les facultés intellectuelles qu'on a reçues
delà Providence, il ne faut pas dédaigner non plus de développer les forces physiques dont on
peut tirer quelque avantage pour soi ou pour les autres.
C'est pour cette raison que je crois à propos de vous offrir quelques conseils sur la manière
de courir avec le plus de facilite et le moins de fatigue possible.
Pour courir vile et avec grâce, il faut pour ainsi dire raser la terre, en portant les jambes
tendues en avant, s'enlever d'un pied sur l'autre avec beaucoup de vélocité, et faire succéder
rapidement le mouvement des pieds. Pendant la course, le haut du corps doit être penché un
peu en avant, pour laisser au jeu des poumons toute sa liberté. Il est avantageux de porter les
bras comme collés au corps h la hauteur des hanches, et de les y maintenir sans raideur ni
mollesse, de manière à ce qu'ils n'aient d'autre mouvement que celui qui leur est communiqué
par l'impulsion du corps ; autrement ils embarrassent, gênent et ralentissent la course.
Il faut éviter, en courant, de respirer avec trop de précipitation, car ce serait le moyen
d'être essoufflé après ptu d'instants et de perdre toutes ses forces.
En ne reprenant haleine qu'à de longs intervalles, on fatigue beaucoup moins la poitrine, et
c'est d'ailleurs une bonne chose que de s'accoutumer à avoir, comme on dit, l'haleine longue.
Quand on est arrivé auJjout de la carrière, une bonne précaution à prendre est de pencher
le haut du corps en avant afin de faciliter la respiration.
Si vous avez à fournir une carrière un peu étendue, ayez soin de ne pas donner en partant,
ta votre course, toute la rapidité dont vous êtes capable ; vous épuiseriez promptement vos
forces et vous seriez obligés de ralentir, avant d'arriver au but, peut-être même de vous
arrêter.
DEUXIÈME PARTIE
LE JEU DE BARRES
1. — Uéflnitîoii.
Le jeu lie barres tire son nom des lices ou barrières servant d'en-
ceinte aux joueurs ; c'est une espèce de petite guerre entre deux troupes
qui ont chacune leur camp servant de lieu de refuge. Un des inendires
de la troupe se détache à un moment donné et va provo(pier quelf[ue autre
de la troupe opposée ; ces deux champions se mettant en campagne
cherchent à s'éviter ou à s'attraper, et c'est de cette lutte que résidte
le jeu.
II. — I/Oslrat'liyucla elic/. les (irecs.
Ce jeu, tel (pi'il se joue dans les cours des collèges, n'est, en réalité,
qu'une modification d'un jeu qui était pratiqué par les (Irecs sous le
nom de Oslruchynda.
A cett(! t'poi[ue iTciilëe, il consistait drjù en deux camps, parmi
lesquels les joueurs étaient répartis ; celui (pii avait la maladresse de
se laisser faire prisonnier était dénommé onos, âne, et il devait aller
s'asseoir dans un coin avec défense de participer au jeu tant que durait
la partie.
m. — Le jeu de In coquille chez les Roinniii.s.
Chez les Romains, ce jeu était également très eu favenr, et P(dlux
(livre IX, cha]). m) en donne la description suivante :
« Des enfants se partagent en deux camps égaux en nombre et se placent de chaque côté
il'une ligne tracée en terre. Or, il s'agit de savoir quel est celui des deux camps qui prendra la
fuite. On clioisil, à cet effet, une coquille blanche d'un côté et noire de l'autre ; ou, si elle est
naturellement blanche des deux côtés, on la noircit avec un peu de poix ou de goudron. On a
tiré la raie à terre de façon que, soit réellement, soil convenlionnellement, un des deux camps
soit à l'Orient et l'autre à l'Occident, c'est-à-dire l'un du côté du jour et l'autre du côté de la
nuit, représentant parfaitement les deux principes qui ne peuvent exister simultanément. Un
enfant se tient au milieu de la raie ; il lance la coquille en l'air en lui imprimant un mouve-
ment de rotation et en criant : « nuit ou jour ! » Si la coiiuille tombe jour, le parti auquel est
échu le côté blanc, c'est-cà-dire qui est placé du côté de l'Orient, devient le parti poursuivant, et
l'autre auquel est attribué le côté noir, celui qui est à l'Occident, devient le parti poursuivi. Les
enfants qui le composent doivent faire volte-face et se sauver le plus rapidement qu'ils peuvent.
Aussitôt qu'un des fuyards est pris, il fait l'âne, et il est mis hors de combat; il fait monter
relui qui l'a attrapé sur son dos et le porte ainsi jusqu'au camp oii il demeure prisonnier. »
56 —
IV. — l.c jeu «le bari-es an Mo;teii Age
Dc'S l'aniiL'O 1300, le jeu de barres est déjà coiimi en France sons
ce nom. Dans le Glossaire de Jean de Garlande (§ 63), nons lisons :
1300.
liarri stini ucniis liidi i/al/ire liarres.
A la iiu dn quatorzième siècle, Jean Boncicant, qui devait plus tard
être le célèbre maréchal de France, montrait, paraît-il, un goût très vif
pour le jeu de barres.
Pendant tout le Moyen Age, le jeu de barres prenait rang dans les
fêtes publiques, et les nombreux articles d'inventaire qui ont été publiés
dans le Glossaire de Gav en sont les meilleurs témoignages :
LK .lEU DE BARRES
ii'aphks In Gymnnxlique de la jeunesse, an xi, 1803.
liOO. — Eli laquelle place devoit avoir unes barres dont leil. Jacqunl estoit roy pour le
jour; et pour ce avoU lors assemblé plusieurs gens de plusieurs villes pour veoir lesd. barres.
(Arc/i. J.J., reg. 153, pièce 155.)
1424. — Comme le mercredy d'apiès Pasques communians dernier passé, que les compai-
gnons et gens de la ville de Warloy avoienl fait crier et savoir aux villes (renlour que au jeu
des barres, qui se devoit faire et fisl led. mercredy, ilz donnoient h la plus belle compagnie de
une ville et parroisse un mouton à laine. [Arch. J.J., reg. 172, pièces 022 et 655.)
1-428. — A chascun d'eulx une paire de chausses pourceque... ils avoient rompues les leurs
en jouant aux barres. [Cpte cil., Monteil, xiV siècle, ép. 19, note 20.)
1 ^97. — A Chariot de Raisse et ses compaignons, pour avoir tendu et destendu les pavillons
au jeu de barres qui se lit devant mondit Sgr. 20 s. — h. sire Jehan de la Barre, Jehan Housset
el autres leurs compaignons, joueurs de barres... tant à cause du coust des prix donnés comme
autrement, 12 liv. (Kéjouissance à Lille. — La Fons, Archives des Sociétés savantes,
juin 185'!.)
— 57 —
Les Barres .
u'aI'IIÉS L'NE LITIIOGIIAPIIIE DU MILIEU DU XIX"
Le jeu de hari'es est égcilement jueutioimé (Itiiis le x'ecueil de 1587,
et le graveur a représeuté les eufauts divisés en deux camps ; ou aper-
çoit très netteuieut celui qui, sortant de ses limites, va dans le camp
ennemi provo(|uer un adversaire (jui s'élance à sa poursuite.
V. — liC jeu do barres ci» UelaiqiK' et en Italie.
A l'étranger, ce jeu a été constamment en honneur, et Jean Lemaire
raconte que les Belges s'adon-
naient avec grand plaisir à cet
exercice.
En Italie, cet amusement
était traité avec une égale faveur
et l'on prétend même que la
révolution qui éclata à (iènes a
eu pour origine une partie de
barres; le mouvement populaire
qui prit naissance le 17 mai 1797
et ([ui anéantit le parti français
en Italie est décrit dans le numé-
ro de la Revue des Deux-Mondes
du mois de décembre 1829 :
Depuis quelques jours, des jeunes gens des principales familles de Gènes se réunissaient
dans l'après-midi sur la place de YAfjua Vola, située près des remparts, hors de la ville, et
jouaient aux barres : ils avaient annoncé une grande partie pour le 17 mai, de laquelle devaient
cire plusieurs Français ; on distinguait parmi les acteurs le jeune prince Santa-Croce, expulsé
de Rome pour avoir manifesté, disait-on, un grand attachement aux idées de liberté.
Bientôt le bruit se répandit dans Gènes que, sous prétexte de jouer aux barres, ces jeunes
gens voulaient simuler une lutte entre le parti royaliste et le parti républicain, dont le résultat
serait le triomphe de ce dernier et le couronnement de sou chef.
Quel(iue dénué de vraisemblance, quelque absurde que fût un projet de celte nature, il se
trouva des tètes exaltées qui y crurent; une foule déjeunes gens se réunirent, en conséquence,
pour empêcher la partie de barres ; ils s'arment de sabres, de pistolets, de fusils de chasse et
se rendent les premiers à VAqiia Vola; ils occupent la place du jeu de barres et établissent une
partie de ballon. Les acleurs du jeu de barres arrivent, et, quoiqu'ils voient la place prise, ils
veulent établir leur camp; ils étendent d'un côté un ruban bleu et de l'autre un ruban rouge,
et plantent des drapeaux en pavillons de couleur identique. Les joueurs de ballon se précipitent
sur eux, arrachent les rubans, les drapeaux, et on se bal. Les joueurs de barres qui se trouvaient
en petit nombre, n'étant pas encore tous réunis, se sauvent par la porte A'Aqua Vola, les
autres les poursuivent, la garde de la porte s'oppose aux agresseurs, ils veulent la forcer,
blessent mortellement un soldat et pénétrent dans la ville. Cependant, deux d'entre eux, un
nommé Wola-Bella et un autre Génois, sont arrêtés et conduits à la tour; les autres, craignant
le même sort, quittent Gènes.
Cet événement (il une vive sensation et produisit la plus grande fermentation parmi les
parents et les amis des jeunes gens arrêtés ou de ceux qui se trouvaient en fuite. La Révo-
lution s'ensuivit.
8
— .•>« —
VI. — I.o jeu de barres «le \npoleon l"'.
L'analogie que le jeu de barres présente avec la guerre est évidem-
ment une des raisons qui ont amené Napoléon I" à y trouver un si vif
plaisir. On raconte, en effet, que peu de temps avant le sacre, le futur
em|»ereur, se trouvant un soir à Saint-Cloud avec José[)liine, proposa de
faire, dans le parc, nue partie de barres. Un tel avis éipiivalait à un
ordre et immédiatement on lit venir une vingtaine de valets de pied,
le flambeau au poing, pour éclairer la partie. A un moment doiuié,
José|»liiue, qui était alors très svelte et très élancée, i)arviut à attraper sou
impérial époux pur son habit eu s'écriaut : « Tu es mon prisonnier. »
Napoléon frémit involontairement, il fit même un mouvement si violent
(pi'il s'échappa en disant : " Moi |)risonnier, jamais, de qui «pie ce soit. »
Il ne savait pas lire dans l'avenir, ajoute M"" Lenormand, qui raconte
cette aventure dans une note de ses Mémoires.
VII. — I.e jeu <ie barres assis.
Il existe un jeu de société connu sous le nom de jeu de barres assis
et qui présente nue certaine analogie avec le jeu de barres que nous
venons d'étudier. Ce jeu consiste à diviser en deux camps les messieurs
et les dames, en laissant entre eux un espace de 1°',60 à 2 mètres;
il s'agit de repousser avec le souffle un léger flocon de coton ou de soie,
et le maladroit qui laisse tomber sur lui le léger duvet est considéré
comme prisonnier ; il ne peut continuer à prendre part au jeu (pi'après
avoir accompli une des pénitences imposées par la société.
Une autre manière de se livrer à ce divertissement est désigné sous
le nom de « Xiphias » ou jeu d'Eole. A cet effet, les coucurrents se
placent autour d'une table en joignant les bras jusqu'aux épaules, de;
façon à former une barrière infranchissable pour cette sorte de volant
d'un nouveau genre, que les joueurs s'envoient de l'un à l'autre ; le
maladroit qui a laissé passer le petit fragment de coton est considéré
comme ayant perdu la partie et, par suite, condamné à donner un gage.
On a aussi dénommé ce divertissement le jeu de « coton vole » ; un
recueil du commencement du dix-neuvième siècle raconte à ce sujet la
plaisante aventure arrivée à un homme de distinction «pii avait voulu
|)rendre part à ce jeu innocent :
L'un (le nous, M. Mignanl, noU'c maire, riait do si bon cœur que, ne pouvant souffler, le
colon lui enira dîins la bouche, et à la vue d'un si grave magislral, dont la bouche paraissait
pleine de fromage à la cr&me, les ris redoublèrent jusqu'au délire et je ne sais oii cet excès se
serait arrèlc si l'on n'eut été obligé de retirer le colon de la bouche du bon M. Mignard,qui s'en
trouvait siiffo(jiié et dont la toux ne put cire calmée que par un bon verre de vin.
- 60 -
VIII. — Poésie sur le jeu de barres.
Un auteur plein de bonne volonté, M. Alexandre D..., a, en 1822,
fuit sur le jeu de barres nue loni;ue poésie dont nous extrayons les vers
suivants, (pii donnent assez bien la physionomie du jeu :
Quel est radolcsreiit II l'atteindra : mais Ag-ramant s'élance ;
Qui, d'un pas grave, affronte seul le camp?
Sou froid dédain, sa démarche trop vaine.
Vient rappeler aux amants des combats
Du fier Argant l'arrogance hautaine.
Il a parlé... ïancrède est sur ses pas ;
Renaud le suit, quand Soliman s'avance
Pour s'opposer aux coups de Godefroy,
EL vient soudain de ce sang qui bouillonne.
Glacer le cours, de rage et non d'effroi.
De toutes parts bientôt la charge sonne.
TROISIEME PARTIE
LES QUATRE COINS
1. — Le jeu de la inai'inite chez les Romains.
On peut voir l'origine de ce jeu dans un passage, cité par M. Becq
de Fouqnières, où Pollux parle du jeu de la lîiarinite :
Qu^Ua Juj--7rifc pour la. /OijneJ'se. 'Oa'la^t
LE JEU DES QUATliE COINS, d'aimiès une giiavuhk he n. guéhaud, wiii" sikci.e
Larj- t^iL'ay'anC f-ccr^de. tsprzn^cjrxpj- ti^ San àp£
Un joueur place sur sa tête une marmite qu'il tient de la main gauche en tournant dans un
cercle; les autres le frappent en lui demandant : Qui tient la marmite? Celui qui est dans le
cercle répond : Moi, Midas, et, s'il parvient à toucher du pied un de ceux qui l'ont frappé, il lui
fait prendre sa place ; celui-ci se coiffe de la marmite et tourne à son tour dans le cercle.
Il se joue de deux façons difFérentes; ou, pour iui<!iix dire, nous avons
sous le même titre deux jeux assez semblables. Le premier semble
LE JEU 1)1 s QIIVIHI ((UNS i, unis Ja (,>/iii,i i l /ii I ti / iiii
devoir être de préférence désigné par l'expression de jeu du pot. Dans
les lexiques de Suidas et d'Hésycliius, il est expliqué de la même façon
que dans Pollux (IX, 113). « Un joueur s'assoit au milieu du cercle formé
LES (JUATUE CUliNS, h'aimiks u.nh A.\ciii.\Nii imaul e.n cuuLhUii, .\.\ .x, 1SU2.
par ses camarades; on l'appelle le ])ot. Les autres joueurs tournent autour
de lui, le plument, le taquinent, le frappent même. (Iclui-ci cherche en se
retournant à atteindre celui qui l'a touché et qui, s'il est pris, devient le
pot à son tour. » Dans ce jeu, le joueur assis au milieu n'est appelé le
— 02
pot que par la comparaison que l'on fait de lui à un pot placé à terre. L'ex-
pression de plumer est encore aujourd'hui en usage parmi les enfants et
désigne l'aclion de tirer les cheveux par de petits coups vifs et précipités.
LKS (JUATIÎE CULNS, d'atiiks uni; giiavuhe im ruusiiKu ejii'iuk
C'est sans doute en souvenir de cette marmite anti(pie que celui qui
joue le rôle principal dans ce jeu prend le nom de « pot » . Ce jeu est,
en effet, l'une des combinaisons les plus simples que l'on puisse ima-
giner : quatre joueurs se ])la('ent près de quatre arbres dans une allée,
ou, si c'est dans la cour de
(j-uelque école, prés de quatre
piliers d'un préau. Celui qui est
au centre et qui, comme nous
l'avons vu, est désigné sous le
nom de <i pot », cherche à at-
teindre la place laissée vide par
l'un des joueurs au moment où il
chauge sa plac(» contre celle d'un
de ses partenaires. Ce jeu de-
mande une grande perspicacité
de la part du postulant à la place
vacante : il doit, en effet, cher-
cher à lire dans les yeux ou dans
l'expression de la physiouon^ie de l'un des joueurs quelles sont ses in-
tentions, pour pouvoir ra|)idement gagner l'abri qu'il va quitter.
Les qualrc coins
Ii'aPIIÈS lIiNE LITHOGUAPHIE DU MILIKL' DU XIX»
04
II. — Le champ estroît au quinzîOine isîôclc.
Au Moyen Age, on pratiquait le jeu des quatre coins sous le nom de
Champ estroît; c'est du moins ce qu'il est permis de présumer d'après une
citation empruntée à un texte Ae?, Archives nationales (J.J. 195, pièce 56) :
Lesquels comijaigiions se prirent à jouer l'un à l'aulre à un jeu que on dit champ
1446
eslroil.
Manière de praliquei" ce jeu.
Un certain M. Dres, qui, au commencement du dix-neuvième siècle, a
publié une curieuse série
de petits albums sur les
jeux, décrit ainsi une
partie de quatre coins
De jeunes personnes jouaient
aux quatre coins, un des jeux
dont l'invention remonte peut-
être à l'origine du monde. Tou-
tefois, le jeu des quatre coins
n'est pas de ceux auxquels notre
premier père et notre première
mère se livraient dans le para-
dis terrestre ; il y faut cinq ac-
teurs, el, dans cet âge heureux,
personne ne cherchait à prendre
la place d'un autre ; chacun se
trouvait trop bien dans la sienne.
Quoi qu'il en soit, ce jeu est fort
amusant.
Le joueur qui est au milieu
attend que les quatre autres
changent de place pour en trou-
ver une.
Devenu usurpateur au milieu d'unie de ces petites révolutions qui portent les gens d'un
coin à un autre, il craint à son tour de perdre ce qu'il vient d'obtenir et prouve qu'arrivé au
poste qu'on désire on est loin d'y trouver le repos. En moins de cinq minutes, il s'opère plus de
révolutions sous l'ombre de ces quatre arbres qu'on n'en voit dans les empires durant quatre
siècles. Le jeu des quatre coins est une école primaiie pour les ambitieux. Pompée, César,
Crassus, Antoine et Octave ne jouaient-ils pas à ce jeu dans l'Empire romain ?
LE JEU DES QU.'VTRE COINS
d'apiiks les Jeudis de ma lanle, xix" siècle.
IV.
.e jeu de^ paquets.
Au dix-huitième siècle, il existait une variante du jeu des quatre coins
qui était connue sous le nom de jeu du k Tiers » ou « jeu des Pa-
quets ".Pour cela, (}iM\\ivXK'v\v àiiïEncydopédie nd-thodique^ on se place eu
4- 2 -à
— 66
rond par paquets de deux ; il y a deux joueurs en dehors qui courent
l'un après l'autre ; celui après qui le premier court se place devant un
des paquets, alors celui du paquet qui
se trouve le troisième court se placer
devant un autre paquet sans se lais-
ser prendre, car, s'il était pris, il se-
rait obligé de courir après le premier
joueur qui se déplace, et, toutes les fois
(ju'il y a trois personnes à un paquet,
le troisième est de bonne prise. Si tous
les joueurs sont attentifs à leur jeu, on
fait rester (piehjuetois bien longtemps
celui <pii court iq)rès les autres ; mais les |)ersonues (pii sont petites et
qui sont j)lacées devant les grandes ont bien du désavantage, parce
qu'elles ne ])euvent voir si on se place devant l'autre, et, si elles sont en
troisième, elles devieiuient facilement la |)roie de celui (pii court.
LE JEU DES QLATUE COINS
D'aI'IIKS ViCTOIl AIlAM. .\1\' PIKCI.K.
V. — l,«' j«Mi «les faa,oliSt
Ce jeu a été beaucnu|) |)rati([iié au dix-neuvième siècle comme jeu
LE .lEU DES KACOTS AU .MOYEN ACE
de société, et il était alors connu sous le nom de « jeu des fagots ». Le
Petit Savant de société indique comment ce jeu doit se jouer ; quand il se
pratique avec des dames, on se place en cercle de deux en deux, de
sorte ([lie ch.-ujue cavnliiM- tieniiL' une (Imiiic devant sdi ci forme ce ([iio
l'on appelle un « fagot ».
On choisit deux fagots cpii sont obligés de courir lun après l'autre.
Celui qui court devant a le droit de traverser en tous sens autour
LE JEU DES FAGOTS
d'aI'IIKS un ancien IIKCUEIL DES JEUX DE SOCIÉTÉ, .\1X° SIÈCLE.
des fagots, qui doivent être assez écartés les uns des autres pour qu'on
puisse facilement circuler au milieu d'eux.
Le joueur qui court le premier doit éviter d'être attrapé, car, en ce
cas, il seivait contraint de changer de rôle avec celui qui le poui'suit. Pour
se reposer, il a le droit de se placer devant un des fagots en dedans
du cercle et à son choix.
Il se trouve alors un fagot composé de trois joueurs, ce ([ui ne peut
être ; il faut que celui cpii se trouve en dehors du fagot, sur la partie
extérieure du cercle, s'échappe à l'instant pour éviter d'être pris et
prendre la place du coiu'eur.
VI. — Le jeu de la mer agilée.
Une autre variante du jeu des quatre coins est le jeu de la mer
agitée : c'est une de ces révolutions tumultueuses où personne ne peut
garder le repos, où tout cède à la commotion, où l'on no sait rien pré-
voir, car c'est uniquement le hasard qui donne les places. Une seule
personne demeure debout, mais elle attend une nouvelle révolution, et,
au milieu de cette agitation semblable à celle des flots de la mer, elle
trouve à son tour, aux dépens d'un autre joueur, une place (ju'elle ne
gardera pas longtemps.
La mer agitée est une ressource assurée contre le froid qui pourrait
gagner une assemblée, et, sous ce rapport, c'est un amusement à recom-
mander pour l'hiver.
— 6S —
VII. — <iii'!iviirc «lu jeu cleis quatre eoîns au cli.v-huitiOnic .siècle.
La plus célèbre représentation du jeu des quatre coins est le fameux
tableau de Lancret qui a été gravé par Larmessin ; daus un vaste parc
tout garni de hautes futaies, un groupe de joueurs, représentés par de
gracieuses jeunes filles, se tient adossé soit à des troncs d'arbre, soit au
piédestal d'un vase garni de rocailles. Le patient est figuré par un jouven-
ceau, qui no semble se laisser impressionner en aucune façon par le pied
do nez que lui décoche fort irrévéroncieusement une des joueuses.
La morale du jeu des quatre coins pourrait se résumer dans cet adage
populaire : « Qui va à la chasse perd sa place. »
A ce jeu, comme ailleurs, gardez-vous de quilter
Une place qu'un jour vous ne pourriez reprendre.
Si plus d'un joueur cherche à vous supplanter,
Tenez ferme et jamais ne vous laissez surprendre.
OUATRIEME PARTIE
LE JEU DE CACHE-CACHE
I. — l>e jeu de eaelie-eaelie chez les Uoiiiaiii.s.
Le jeu do cache-cache était très en honneur chez les anciens sous
LE JEU DE C.\CIiE-CACIlK CHEZ LES liO.MAINS
d'ai'jiks u.ne ancie.nne peimurk d'iiehculaniim.
— 09 —
le nom de » jeu île In l'iiite ». Pollux nous en a laissé une ilescription
(livre IX, paf;e 117) :
Un des joueurs se place au milieu de ses camarades et fi.'rme les yeux de lui-même, à
moins que quelqu'un ne soil chargé de les couvrir. Les joueurs prennent la fuite et se
dispersent. Alors celui qui l'est, rouvrant les yeux, se met à leur recherche. Ceux-ci doivent
s'efforcer de le devancer au camp.
Gomme dans tous les jeux de ce genre, celui qui est louché avant d'avoir pu regagner le
camp prend la place de celui qui courait après les autres.
Dans le recueil des peintures d'Herculanum et Ponipéi (vol. II,
page 81), il y a une reproduction qui indique bien (pie ce jeu n'a pas,
depuis l'antiquité, été modifié jus([u'à nos jours.
11. — Le jpii de cli2,-ne-imisette au Moyen AgP«
Au Moyen Age, ou a désigné ce jeu sous le nom de Cligne-Musette,
Clignette ou Climusette ; le poète Destouches a dit, en efîet :
JEU DE LA SAVATTE .
D'.MMIÈS l]^E ANClli.NNE GRAVIUIE ANGLAISE, XVIII'-' SIÈCLE.
Je brûle de vous voir trois ou quatre marmots,
Braillant autour de vous, et vous-même, en cachette,
Jouant à cache-cache ou bien à Climusette
— 70 —
Au sujet (le l'ofigluc de ce nom. nous trouvons dans V Iiiipr<ii:isateur
fnairais une étymologie ([ui paraît bien spécieuse : " Il y a lieu de croire,
dit-il, que le nom de ce jeu vient de Colin Muset, ancien jongleur, qui
allait par les cours des [n-inces jouant de sa vielle. Il était aveugle.
Les plaisanteries qu'il occasionnait et les tours qu'on lui faisait ont appa-
Z-E C^CHE NICOLAS .
ii'.M'iiÈs UN lŒCiiiîiL DE GHAvoiuîs HE Drssus lie labatié
X, Wlll'^ SlKCLIi.
remment donné le nom de " Climusette » à ce jeu, par corruption du
mot « Colin » en celui de « Cli » .
Louis XIII, enfant, aimait à jouer à ce jeu, et Iléroai'd, dans son
journal, nous apprend qu'en 1611 il jouait volontiers d cachette. Un
peu plus tard, en KJli, le même auteur rapporte qjie le roi a joué à
cligne-musette avec les sieurs de Termes, de Courtenvaux, premier
gentilhomme de la chambre, et les sieurs comtes de La Rochefoucauld,
maître de la garde-robe, et de La Hocheguyon.
m. — 1.1? f!i<*li<'-c'a«'li<' .Vieolsis.
11 existe un jeu de société qui, au seizième siècle, était ct)nnu sous
le nom de « cotte-cache » , ou bien encore de « cache-cache Nicolas » ;
c'est un divertissement qui consiste à cacher un objet de i)etite dimension
dans un espace déterninK/ et de le faire cherchei' ensuite par une pei'sonne
présente à la réunion en l'avisant par ([uelques conseils plus ou moins
LE JEU DE CACHE-CACHE NICOLAS
n'AIMlfeUN ANCIEN llEi:UEI L niîS JEUX DE SOCIÉTÉ, XIX" SIÈCLE.
vagues sur la direction qu'elle donne à ses recherches. Pour donner
plus d'animation au jeu, on remplace les avertissements donnés au cher-
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LE .lElJ DU FLUET DU liOIS :\1ESDA.MES
d'apkés une i.iTiiiicnAr'iiiE de mahol', ISiiii.
cheur par le bruit qu'on fait avec des |)incettes. que l'on frappe à l'aide
d'une clef ; do cette façon, on joue du Iriauf^le, iiinis |>liis ou moins rorleiucnt
selon que la personne s'approclu; ou s'éloigne de l'oljjel de ses reelienches.
Au seizième siècle,. dans le volume des Treiitc-six fif/iiros andoiumt tous
les jeud\ etc., nous trouvons la description du jeu de caclie-cache dans
ces trois vers :
Au jeu aussi de : c.;iclir liicn, tu l'as
Où mainl garson et mainle Mlle
En tout honneur preinenl un grand soulas.
Au commencement du dix-neuvième siècle, au lieu d'ol>jct à trouver,
il s'agissait d'accomplir un acte
fort simple concerté d'avance
à l'insu de celui qui est le prin-
cipal acteur et qui consistait à
dénouerun ruban, par exemple,
de présenter une tleur à une
personne, de lui baiser la
main, etc.. La complicatioji de
ce jeu augmentait le nondire
des gages, qui étaient payés
pour le ]dus grand [)laisir des
assistants.
Le cacbe-cache mitonlas a
été gravé au dix-buitième siècle
par Cottelle, d'après un tableau
de Lancret : au milieu d'un
parc, sous l'œil bienveillant
d'une nym[)lie en forme de ca-
riatide, une nombreuse assis-
tance de jeunes gens et de
jeunes fdies prennent leurs
ébats ; au premier plan, les
deux principaux acteurs s'ap-
prêtent à jouer leur rôle, la jeune iille témoigne de son intention de se
voiler la face, tandis que le jouvenceau tient à la main un mouchoir
qu'il va cacher dans quelque retraite profonde.
IV. — Le furet ilii bois >les<lnines c« le jeu «le la paiilou!!*'.
Il existe plusieurs variétés de ce genre de cache-cache : l(> jeu du
furet du bois Mesdames et le ji'u de la pantoufle ne présentent, [)our
ainsi dire, aucune différence avec le cacbe-cache mitonlas.
Kl
Dans le jeu de la pantoufle, les joueui-s doivent se former en cercle
en laissant seulement subsister deux ouvertures destinées à faciliter les
recherches de celui qui doit découvrir la retraite de la pantoufle. Les
joueurs doivent se tenir dans une position assez incommode, de façon
que leurs jarrets forment une sorte de voûte sous laquelle circule la
pantoufle; celle-ci circule de mains en mains, mais l'on doit de temps
à autre signaler sa présence en frappant sur le sol.
Le poète Delille a donné dans les Trois li'ijncs de la nature une char-
mante description de ce jeu :
Tantôt sous des genoux qui se couiijont en vuùlc
Une pantoufle agile, en déguisant la roule,
Va, vient et quelquefois par son bruit agaçant.
Sur le parquet biiltu se trahit en passant.
LE JEli DE CACHE-CACHE
d'aPHES une VIG.NKITE DE r.A IIESTAUIUTION.
CHAPITRE III
JEUX D'ADRESSE
Jeu de l'arc et de l'arbalète. — i. Hxislence de l'arc dans lanliquilé. — 2. Usage de
l'arbalète en France à une époque reculée. — 3. Diverses espèces d'arcs employés au
Moyen Age. — 4- Exercice obligatoire de l'arbalète au quatorzième siècle. — 5. Les
confréries de l'arbalète au seizième siècle. — 6. Le jeu du « Pape-Gaye ». — 7. Jeux
publics de l'arc et de l'arbalète au dix-neuvième siècle. — 8. Un ancien jouet des enfants
suisses. — 9. Gravures diverses représentant le jeu de l'arc.
Le jeu de bague. — 1. Origine mauresque de ce jeu. — 2. La bague à cheval dans
les carrousels. — .'{. Le jeu de bague perpendiculaire. — 4- Les jeux do bague aux
seizième et dix-septième siècles, d'après des anciennes estampes. — 5. Définition du jeu
de bague au dix-huitième siècle. — (>. Le jeu de bague de Jean Papillon en 1766. — 7. Le
jeu de bague du jardin Monceau, près Paris, en 1779. — 8. La bague chinoise au jardin
Tivoli. — y. Jeu de bagues mù par des pédales. — 10. La promenade dédalienne. —
II. Caricatures politiques sur le jeu de bagues. — 12. La flotte aérienne. — i3. Les
manèges de chevaux de bois depuis le second Empire. — l'j. Le jeu de bague à pied.
— i5. Le jeu du baquet. — i(i. La bague sur Tcau. — 17. L'oiseau égyptien. —
18. Le jeu des oiseaux voltigeurs.
Le bilboquet.— 1. Description du jeu et origine du nom. — 2. Fabrication des bilboquets.
— 3. La foire franche des bilboquets. — 4- L'^ passion du jeu du bilboquet au dix-hui-
tième siècle. — 5. De l'industrie des bilboquets au dix-neuvième siècle. ■ — (>. Le bilbo-
quet joué avec un palet. — 7. Représentations diverses du jeu du bilboquet.
Le jeu du diable. — 1. Composition de ce jeu. — 2. Origine chinoise du jeu. Sa des-
cription d'après le Père .Amiot. — 3. Emploi des diables en Chine pour remplacer le
bruit de la crécelle. — 4- Oe la vogue du diable en France en 1812. — 5. De la manière
de jouer au diable. — (>. De la fabrication des diables. — 7. Estampes satiriques sur
le jeu du diable.
Le jeu de l'émigrette. — 1. Définition. — 2. La satire du jeu de l'émigrette. —
3. \'ogue considérable de ce jeu. — 4- Représentation du jeu de l'émigrette.
Le jeu du tonneau. — 1. Définition et origine probable du jeu du tonneau. — 2. Le
jeu de (jrecque au dix-huitième siècle. — 3. Tonneaux en forme de ti'épied. Manière
de pratiquer ce jeu au dix-neuvième siècle.
Le jeu du bouchon et le jeu du palet. — 1. Le jeu du palet dans l'antiquité. —
2. Origine du jeu de bouchon. ^ 3. Jeu de bombiche ou de galoche. — [^. Repré-
sentations du jeu de bouchon.
PREMIERE PARTIE
JEU DE L'ARC ET DE L'ARBALÈTE
I. — l'I.visteiico <le l'arc dsiiis l'antiquité.
Cet exercice remonte à la plus haute antiquité, et, au livre XXIIl de
V Iliade, nous voyons que le jeu de l'arc faisait partie des fêtes célébrées
en l'honneur de Patrocle.
Le inauiemeut de l'arc a été pcudaut bien dos siècles considéré
comme faisant partie de l'éducation de tout jeune guerrier, et l'adresse
à se servir de cette arme était considérée, dans les temps primitifs,
t: Arbaj^este
D A Pli Es CLAl'DI.VE BOUZU.NNET STELLA, XVII'' SIKCLE.
comme une des principales qualités des citoyens. Hérodote raconte que
les Persans n'enseignaient à leurs enfants, entre l'âge de cinq à vingt-
cinq ans, que trois choses : dire la vérité, manier un cheval et tirer de
l'arc.
II. — Usasfe lie l'arbal«^le c-n France à une époque reculée.
En France, au (piatrième siècle, l'arbalète était en usage d'une manière
habituelle, et il existe au musée du Puy deux bas-reliefs de cette époque,
où on retrouve les éléments dé cette arme.
Dans un manuscrit du dixième siècle (1), on retrouve la re|)rodnction
de deux personnages se servant d'une arbalète.
La justesse du tir obtenu avec cette arme l'ayant fait considérer comme
trop meurtrière, elle fut prohibée en 1189 par le concile de Latran.
(1) Bil)li(i(lièqiie nationaU'. — Minuiscril latin, 12802.
77 -
Cepoiulaiit, Philippe-Auguste ne lard.i |)as à en rétahlir l'usage et elle
resta connne anne de guerre jusqu'au seizième siècle.
Ou distingue différentes sortes d'arbalètes : l'arbalète à main, l'arba-
lète à crosse, l'arbalète à pied de chèvre, l'arbalète à moufle, etc..
m.
nîvorsejs ospôees «l'airos oiiiployrs au ^lojoii Akc.
L'aspect que présente le plus ordinairement cet instrument est la
foi'me d'une verge de bois courbée munie d'uue corde tendue ([ui relie
ses deux extrémités. Outre cette forme éminemment simple, il est souvent
question, dans les inventaires, des arcft tuir/uois, qui sont composés de
LES Dards
h'aimiks cialîoîne douzon.nkt Stella, xvii" sikcle.
contre-courbes et muuis parfois de pièces de corne collées sur le bois.
Cette dernière sorte d'arc s'est perpétuée jusqu'à nos jours eu Orient et
particidièreraent en Perse.
Une des représ(^ntations les plus typiques que l'on connaisse des arcs
au onzième siècle est empruntée à la tapisserie de Baveux ; elle repré-
sente un archer couvert d'une cotte de mailles, la tète protégée par un
casque conique et tenant à la main une demi-douzaine de flèches de
rechange. Son arme, autant que permet de le juf:,er la grossièreté du
dessin, était composée de coutre-eourbos suivant la mode des arcs
tunpiois.
Trois siècles plus tard, au quatorzième siècle, on a employé l'arc du
type anglais, dont la hauteur est égale et quelquefois même supérieure
à celle de l'archer. Cependant, en France, on a préféré, tant pour la
chasse que pour la guerre, nne arme plus courte et plus cambrée.
i.£ RiPE-GvAr
CI.AULllNE BOLZO.NNliT STELLA. XVIIi^ SIECLE.
L'usage de l'arc comportait un gant servant à protéger la main droite et
une sorte de bracelet ou hracih'e placé dans la maiu gauche. La corde
des arcs était ordinairement cm chanvre, mais on en a fait aussi en soie,
ainsi que le montre la citation suivante :
1.328. — La première (chose) fut que la corde ili' son arc fust de soye verde ou autre
pour trois causes : la premii'ire que la soye est si forte qu'elle dure plus sans rompre qu'elle
ne fait de nulle autre chose. L'autre cause est, quand bien assemblée, elle est si singlanl
qu'elle envole une sayeUe ou bougon plus loing... arc de droicle mesure doit avoir de long
entre la coche du bout d'en haut jusques à celle du bout d'en bas 22 poignées estroilement
(2 mètres). {Mjdm rt /lari,,, f ,52, v.)
Pour la confeclion des arcs, on employait diverses essences d'arbres,
— 80 —
telles que l'érable, raubépine, le noisetier et le frêne, mais celui (jui était
le plus recherché était le bois d'if en raison de son élasticité.
IV. — Ivvfrcift' «bliaatoire <U> l'arbalète au qiiator/.ièiiic siôflc.
Edouard III, roi d'Angleterre, par une ordonnance rendue en 1337,
défendit, sous peine de mort par tout son royaume, de se divertir à un
autre jeu que celui de l'arc à nuiin et du tir de flèches; ce fut grâce à
LI-: Tilt A L'ARC
u'aI'IIÈS I.E TAULKAU de LAM;11ET, GIUVK l'AR LAIIMKSSIN, WH" SlKlil.i;.
ces exercices réitérés (]ue se formèrent ces célèbres compagnies d'ar-
chers qui nous infligèrent de si sanglantes défaites à Crécy et à Azincourt.
Charles V, dès les premiers mois de 1369, prit une mesure inspirée
évid<'mment par celle qui avait tant contribué au succès de son ennemi :
le 30 avril de cette année, il avait interdit, sous peine d'une amende
de 40 sous, presque tous les jeux d'exercice ou de hasard et avait en
même temps enjoint à ses sujets de s'exercer au tir de l'arc et de l'ar-
balète, de choisir un emplacement convenable à cet etfet, de décerner
des ]jrix et, eu un mot, de donner à ces concours le caractère de véri-
81 —
t;il)l(>s l'êtes. C.cWc ordoiniaiice fut nMioiivch-c le 2o iii.ii cl die iilliibuait
le ([uart de rameiule à ceux
(jui dresseraieut procès-ver-
bal des délits et appréhen-
deraient les délinquants.
Pour l'exécution de cette
ordonnance, les sergents et
autres officiers inférieurs se
préoccupèrent de désigner
dans chaque localité un em-
placement spécialement aftec-
té à ces exercices de tir.
De préférence ils choisirent
nu terrain bien plan et lé-
gèrement en pente, terminé
à son extrémité par un tertre
artificiel destiné à servir de
cible : ces endroits furent
dénommés bttl^ et ce n'est
qu'à une époque relative-
ment récente qu'on se servit
du mot ôittle pour désigner
une hauteur.
Pour donner plus d'attraits au jeu de l'arc et provoquer l'énudation,
on institua, à la fin du quatorzième siècle, des prix et des récompenses
de tous genres réservés aux plus habiles tireurs. On trouve la mention,
à la date de 1382, du prix qui fut octroyé par Gautier de Monchel,
écuyer châtelain et garde du château d'Etaples; il consistait eu un
épervier d'argent attribué « au mieux jouant de l'arbalète, pour plus
entretenir et accoutumer icelui jeu » (I).
LE JEU DE IJARB-ALESTE..
ii'.M'm-;s GRAVEi.or, xviii" siècle.
V. — Les eonIVérîes de l'arbalèJe au seizième siècle.
Le jeu de l'arbalète a donné lieu à d(^ véritables confréries, très floris-
santes dans le nord et dans l'est do la France, et on possède encore les
statuts de la corporation des ai'balétriers de la ville de Senlis, qui furent
publiés au mois de septembre de l'année 1538 ; ils commencent en ces
termes :
(1) ... Voir à ce sujel rai-ticle de M. Siméon Lucc, publié dans le tome XVII des Comiiles rendus des
séances de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, année 1889.
Il
82
Ce sont les ordonnances faites siii' le jeu de l'arbaleslre de la \ille de Senlis el de la manière
du serment qu'il convient el appartient l'aire à ceulx qui veulent être de la l'rancliise des cheva-
liers arbaleslrlers d'icelle
ville, et afin que aulcun
n'en puist prétendre cause
d'ignorance, ont élez de
nouvel renouvellées par
le Roy, capitaine, connes-
table et chevaliers sui-
vants et entretenants le
jeu d'arbalestre.
Ces statuts nous
apprcnneut qu'il
existait entre les
membres de cette
corporation une vé-
ritable confraternité
qui les oblii^eait à se porter mutuellement aide et assistance.
Le jeu d(> l'arbalète était une occasion d'élire un roi, qui était natu-
rellement celui qui avait l'ait preuve de la plus grande adi^esse dans cet
exercice. A ce sujet, nous relevons dans les statuts des arbalétriers de
Senlis cette |)etite
LIÎ Tilt A L'AIUJALETE
d".u'Iii:s u.sj; ghavciik seii mus extkaitk de OLAIUS MAGNUS, xvi" siècle.
description :
Cy après sensuit la
forme el manière de faire
le roy dudit jeu et les so-
lemnités qu'on doit garder.
Premièrement, il est
coutume de faire tous les
ans un roy le jour de la.
Trinité Notre-Seigneur el
il doibl faire entre deux
bulles au nombre compé-
lentel faut que celuy qui
veulêtre roy face et mette
quatre coups franchement
dedans les cercles et doit
avoir aucuns joyaulx cà
volonté d'iceluy ny tirant la couronne, car il doit ce faire, el ung chapeau de fieurs, et se
doivent jouer, cesl assavoir la couronne à quatre coups francs, comme dit est ; les esguillettes
à deux coups et les gants à celuy qui premier mets dedans les cercles pourveu qu'il se tienne
audit premier coup. Mais s'il avoil mis après ledit premier coup encore d'autres et qu'il pût
avoir la couronne ou les esguillettes el que les autres eussent mis des coups dans lesdils
cercles, en ce cas il ne pourra avoir que l'un desdits joyaulx el les autres seront distribués à
ceux qui auront mis esdils cercles comme dessus el aussy s'il ny en avait qu'un qui eut mis
esdits cercles, il aura seul tous lesdils joyaulx.
Lie riU A L'AltliALKTK
GIIAVUIIE SUll HUIS EXTIIAITE DE OLAIUS MA(jNUS, XV!' SIÈCLE.
— 8;} —
Hem ecluy qui ga,£:ne ];i coumniii' et qui doiiil (^Irc Uduveau roy doilit (loiiucr [tom sa liicinc-
luie et joyeux advcnenn'nt aucuns joyaulx... et raisoniiajjle à sa volonté el y en doibl avoir un
qui se donne h trois coups et des cssuillelles à deux et une paire de gants au premier coup
comme dessus el un cliapeau de Meurs au plus beau coup durant le jeu pour le jour.
Item pour ce que plusieurs chevalliers ont reiïusés et différés d'estre dudit jour, obstant
qu'ils n'avaient aucun prouffit, a été accordé que celui qui sera roy après ce qu'il aura payé sa
bienvenue, et fait les droits accoutumés loultes el quantes fois que les dits chevalliers se trou-
veront après le jeu, il ne paiera aucun écot, mais si aucuns desdits chevalliers qui auront perdus
audit jeu se déporte sans payer leur perte, iceluy roy sera tenu advancer et payer la perte et la
recouvrer sur le perdant.
VI.
Le jjoii ilit « l»apo-(jlaje ».
Le jeu de l'arc a été égtiloinenl fort en lioiiiieur pendant tout le Moyen
Age et il était connu sous le nom de jeu du (( Pape-Gave ». Le peuple
se complaisait dans cet exercice et
c'est ce qui lui a fait donner le sur-
nom de <c ToiM-noi de la liourgeoi-
sie I) .
L'exercice du tir au Pape-Gaye
était considéré, au seizième siècle,
comme un des jeux classiques
auxquels devaient se livrer les
enfants; dans le recueil de 1587,
nous voyous trois adolescents (jiii
s'apprêtent à se disputer les prix
qui sont fixés aux branches de
l'arbre au sommet duquel est per-
ché le Pape-Gaye. Parmi les ob-
jets proposés en récompense aux
vainqueurs, on distingue, au mi-
lieu des ditférents joyaux et acces-
soires du costume, les gants qui
devaient être attribués probable-
ment suivant les règles indiquées
dans les statuts de la confrérie
de l'arbalète de Senlis.
La légende qui accompagne cette image mentionne, du reste, les prix
que vont se disputer les tireurs :
LE TIR A LARC
U'Al'ni-S UN BECUEII, DE JEU DE LA RESTAU[i.\T10X.
L'arc en la main, menant joyeuse vie,
Ils vont tirer dedans une prairie
Au Papegay, pour des joyaux avoir.
A l'eschaudé aussi tirent ensemble,
Et pour jouer aux poussinets, et voir
Qui sera pris, un les autres ensemble.
Les membres de la corporalion du « Pape-Gaye » devaient porter le
costume distinctif et, dans un rèj^lement de 1728, nous en trouvons la
description détaillée. Pour les officiers, c'était un habit de drap écarlate
bordé de galons d'or ; les brigadiers portaient le même habit, avec cette
seule difi'érence que le galon d'or se trouvait seulement sur la manche
et sur la poche; quant aux chevaliers, ils portaient l'habit simple, mais
avec le chapeau bordé d'un galon et orné d'une cocarde blanche.
Le nom de » Pape-Gaye », donné au jeu, provient du but qui était
proposé aux coups des joueurs;
ce but était formé d'un oiseau
en carton ou en bois peint en
vert et ressemblant d'une ma-
nière plus ou moins vague au
perroquet.
Dans certains textes, on
trouve le mot « Pape-Gaye »
remplacé par le mot » Pape-
Gault 1) et il est possible (pi'à
l'origine ce fut lui oiseau vi-
vant qui servit de cible.
Les exercices de tir à l'arc
avaient lieu pendant toute l'an-
née le premier dimanche de
chaque mois, mais la véritable
fête de la compagnie était au
mois de mars ou au mois de mai ;
à cette époque, les chevaliers se
réunissaient quatre dimanches
de suite pour voir quel serait
l'heureux gagnant du joyau pro-
mis connue prix au vainqueur.
Le but était fixé sur une longue perche placée contre nue tour ou bien
encore le long des ailes d'un moulin à vent, et les joueurs, se plaçant
au pied, tiraient presque perpendiculairement au-dessus de leur tête.
Les Slaiuts Synodaux du cardinal de Tournon, en 1566, d(''f(MKlaient aux
ecclésiastiques de tirer à l'arbalète « pour gagner des prix et faire
parade d'une adresse dont ceux de leur condition doivent avoir honte ».
Les couqiagnies d'archers, nous apprend M. Siméon Luce, avaient pour
s'exercer des champs appelés le plus souvent hersavln; ce mot est plus
souvent employé poui' désignei' la cible proprement dite et c'est de là
ô '^^^ro'cce^ife-
— 86
qiw l'on a fait les verbes /jener et bersailler, qui signifient tirer en visant
ou bien encore tirer à la cible, et ce ternie a été conservé dans la langue
italienne. (Voir les lectures faites à l'Académie en 1889.)
VII. — Jfii.v publics «le l'arc et de l'arbalète
il II di-\-iieiiviènie siOcle.
En 1808, à Paris, le tir de l'arc était encore bien en honneur, puisque
dans un recueil d'adresses désigné sous le nom de Dictionnaire adminis-
tratif et topographique de Paris nous voyons, à l'article Spectacles et divertis-
sements, mentionné un jeu d'arc in-
stallé au numéro .^0 de la rue du
Fanbourg-du-Temple.
En 1824, nous lisons dans le
Journal des Dames la petite an-
nonce suivante :
Un (les jeux d'adresse du jardin Beaujon
consislc dans un tir cà l'arbalète ; lorsqu'on a
assez d'adresse pour alleindre le but, une
petite figure (qui n'est point la Victoire, bien
qu'elle ait des ailes) descend du sommet d'une
espèce de temple et vient déposer une cou-
ronner sur la lèle du joueur.
Un recueil fort intéressant, inti-
tulé : les Amusemenls de la cam-
pagne, nous donne des détails assez
ciu'ieux sur cette mode de faire
apparaître un génie pour célébrer
l'adresse du tireur qui avait été assez habile pour atteindre le but.
Au détour d'une allée ombragée, choisissez un vieil orme dont le tronc robuste et branchu
puisse vous servir à suspendre lu dépouille d'un cbevalier ; formez un tropliée de ses armes;
que la cuirasse, le casque, l'épée et le carquois s'y trouvent groupés d'une manière pittoresque,
qu'une courte devise tracée sur un écu invite le passant téméraire à lancer un trait sur le
bouclier. S'il est assi'z adroit pour frapper au centre de l'écu, quelle ne sera pas sa surprise en
voyant descendre d'entre les brancbes de l'orme un jeune Amour qui viendra le couronner.
Ce petit prodige s'obtenait de la façon la plus simple au moyen d'un
déclic qui faisait glisser la statuette en bois le long d'un iil de fer pré-
paré à l'avance.
Le même auteur raconte qu'en 1811, le tir à l'arbalète ligura dans les
fêtes qui eurent lieu en l'honneur de la naissance du fds de Napo-
léon I" :
LE Tilt A LAHBALETE SUR UN BUT MACHINE
d'après les Amitsemi'nls de la (■(iDipar/ne, xix" sikcle.
— H8 —
Lors du bnplciiK' du roi de Roiru', ou lil .'i Sainl-Cloud de frrandes réjouissances : il y eut
entre autres choses un tir ta l'arbalète. L'empereur parut prendre beaucoup de plaisir à voir
jouter les daines de sa cour. Une princesse, c'était peut-cire la marraine, ayant lancé une (lèche,
il sortit de derrière le but une grêle de dragées qui vint tomber sur la joueuse et les spectateurs.
Cette surprise fit beaucoup rire; une autre personne fit jaillir des (leurs.
VIII.
l'n ancien jouet des eiilaiils .suisses.
Dans lin recueil fort amusant, la Momiquc, publié pav M. E. Muller,
nous trouvons la description d'un jouet à peu près inconnu eu France ;
ce jouet est lancé au moyen d'un fouet muni d'une longue flèche, qui
joue ici le rôle de l'arc ; la flèche doit être de bois mince et cependant
assez résistant; elle est terminée
par une pointe imitant le carreau
des anciennes arbalètes. A peu
près à moitié de cette longueur est
praticpiée une encoche dans la-
quelle vient se fixer la lanière du
fouet, qu'un nœud sert à retenir ;
en opérant une tension vigoureuse,
on ari'ive à faire ployer le manche
du fouet, et, si l'on vient alors à
abandonner la flèche, elle monte
en l'air presque à perte de vue ;
si, au contraire, elle est lancée
horizontalement, il n'est pas rare de voir ce projectile franchir des dis-
tances de cent à cent cinquante mètres.
le lir
L EXEliClCE nu TIR SUR DES 1>I)L'1'ÉES DE PLATRE
d'.vphès une imagf. d'éi'Lnal du .second emphœ.
I.\.
Gravures diverses représeuJanI le jeu de l'are.
Les fêtes du tir au pape-gaye ont été le sujet de nombreuses es-
tampes, car nous avons vu que cette institution s'était perpétuée jusqu'à
la fin du dix-huitième siècle. Dans la curieuse composition qui a été
gravée d'après le tableau de Van Breughel et qui est intitulé La grande
feste de nostre village^ on aperçoit, tout à fait au dernier plan, les tireurs à
l'arc qui s'exercent à atteindre un « pape-gaye» placé à une grande hauteur.
Un auteur contemporain, Olaius Magnus, dans son Histoire des
peuples septentrionaux, a consacré deux planches à ce genre d'exer-
cice ; l'une représente le tir à l'arbalète et même à l'arquebuse sur un
but qui devait évidemment représenter quelque oiseau analogue au
« page-gaye » . Une autre gravure montre des tireurs s'exerçant à at-
teindre une cible, de forme ronde, avec des projectiles d'un aspect par-
— 90 —
ticulier. Ils ont comme servants des chiens bassets dressés à aller cher-
cher ceux des ]>rojectiles qui ont manqué le but et à les rapporter ensuite
fidèlement à leurs maîtres.
Dans la suite des jeux qui a été publiée jjar Claudine Bouzonnet
Stella, ce genre de divertissement a donné lieu à la composition de trois
planches : rarl)alèle, le pape-gaye et les dards. Ce dernier ressemble
absolument au jeu des fléchettes, qui a été remis à la mode il y a (jnelques
années, cl qui est un exercice demandant autant d'adresse que de pru-
dence.
Gravelot, dans la charmante série de cartouches de style rocaille
qu'il a consacrés aux jeux, présente un groupe d'enfants montrant leur
adresse en transperçant uu chapeau placé comme but au milieu des
branches d'un arbre.
Le tir à l'arc a été l'occasion d'une des plus charmant(^s compositions
de Lancret, gravée par Larmessin ; l'artiste nous présente des jeunes
gens poursuivant de leurs flèches un invisible but, tandis que leurs
compagnons et leiu-s compagnes, assis sur l'herbe fleurie, sendjlent
passer très agréablement leur temps.
Au début du dix-neuvième siècle, le tir à l'arc a été mentionné dans
un certain nombre de recueils de jeux, mais les gravures en sont
médiocres. Notons, enfin, les tirs où l'on s'exerçait contre des poupées
de plâtre et dont, aux Champs-Elysées, on voyait plusieurs spécimens
sous le second Empire.
— '.Il —
DEUXIEME PARTIE
LE JEU DE BAGUE
I. — Origine iiiaiire.sc]ue «le ee joii.
Le jeu (le bague c^st maintenant beaucoup phis connu sous le nom de
jeu des chevaux de bois ; il a perdu son antique splendeur et est main-
tenant relégué sur les places publiques ou dans les fêtes de villages.
LE JEU DE LA BAGUE iMAUHESQUE
d'après une lithographie de le rniNcE, 1S23.
Les Maures passent, à tort ou à raison, pour en avoir été les inven-
teurs ; ils en auraient amené l'usage en Espagne, d'où ce jeu se serait
répandu dans toute l'Europe.
II.
La bajfiie à elit'val dans les carrousels.
Ceux qui doivent prendre part à ce jeu doivent être montés sur des
coursiers agiles ; ils se rangent ensuite en lile iiulienne, armés de longues
— 92 —
lances. A un inoment donné, le premier, tenant sa lance en arrêt, part
comme une flèche, au galop de son cheval; les autres concurrents le
suivent à intervalles égaux. Tous passent successivement sous une large
potence, où des anneaux en fer léger sont suspendus par des rubans de
couleurs ditl'érentes. L'anneau glisse le long de la lance jusque dans le
bras du cavalier qui continue sa course en laissant flotter derrière lui de
LE JEU DES CllEVALX DE BOIS
u'AiMiiis la Gymnastique de la jeunesse, an xi, 1S03.
véritables flots de rubans. Le prix est décerné à celui qui est assez
habile pour enlever l'anneau sans modifier en rien son allure.
Le journal de Héroard nous apprend que ce jeu était honoré des
faveurs de Louis XIII enfant, puisque, en 1615, nous le voyons courir pour
la première fois la bague sur la place Royale.
Dans les brillants carrousels qui eurent lieu sous Louis XIV, des che-
valiers, superbement vêtus, couraient la bague à cheval et quelquefois
même en char, mais ces différents exercices ne ressemblaient en rien à
uos chevaux de bois modernes (1).
m. — Le iieii de bag'ue perpciidiciilairet
La première description que nous trouvons de ce jeu, tel qu'il est
connu actuellement, est empruntée au V<njage de Monccnii/s^ tome I",
page 445.
(1) 1.,
Cai'l'OUSt;
pur coni
iir lo> cliev;ui\ cic l.iiis l,
Mcj>cn Ajje, cl. >\ co jfi
Diip clans l'est i nu- des enl
liant en eenle esl une réiainiseence des exereices de
insi Iranslni-mé a perdu do Sun antique noblesse, il a,
Ls à la inn'lée desquels il se trouve mieux adapté.
— !i;t
1648. — C'esloil [h Conslanlinoplc' le beirnn di's Ttiirs, qui cdiisisle en jnyc, pronieniules,
yvrogiu'rit's, à br.iiislei- dans une pscai'iiolrlU' di'ess('e au inilifii des places publiques, el h
tourner assis dans des sièges façonnez en [lelils chevaux ijui pendent de divers bâtons croisez
et ficbez en baull d'un grand pieu autour duquel un lioninn' fait lournei- ces basions, et par
conséquent tous ci'ux qui sont assis aux sièges qui en pendent.
Cet aiimsement, tel (|ii'il est désij;ué dans les l'elatioiis de l'illustre
voyageur, est le jeu de bague
perpendiculaire ; il figurait
encore eu 1820 aux Champs-
Elysées, et un auteur cou-
temporain nous apprend
que, dans les premiers temps,
on avait placé une coulisse
à bagues à la portée des
joueurs assis dans les fau-
teuils. Ceux-ci devaient être
assez habiles pour enfiler la
bague en remontant. On a,
depuis, supprimé ce qui exi-
geait de l'adresse, et le pu-
blic s'est contenté du plaisir
de décrire dans l'air de
grands cercles de vingt pieds
de diamètre.
Ce jeu, ajoute le même auteur,
est fort agréable ; quand on monte
pour la première fois dans les fau-
teuils, on éprouve une sensation
neuve ; la différence des poids cause
parfois des scènes fort divertissantes,
JEU DE LA BAGUE PERPENDICULAIRE
APiiÈs les Amusements de la campagne, xix» siiscle.
les personnes les plus lourdes descendant toujours les premières lors(iu'on veut s'arrêter el
que la machine est livrée à elle-même. Les médecins assurent que cet exercice esL salutaire;
je le croirais assez, ne fût-ce que par les ris et la joie qu'il provoque.
IV. — Les jeu-v de bagues aux sei/.ièinc et dî.v-septiOine siècles
d'après des aueîeuiies estampes.
Dès l'époque de Louis XIV, on trouve la représentation du jeu de
bague dans les caricatures politiques : le manège consiste en une lourde
construction formée de six poteaux en bois reliés à une pointe centrale
par une sorte de dôme ; dans l'axe de cette dernière partie est monté un
pivot qui supporte une vaste croix à chacune des branches de laquelle
94 —
est suspeudiie uno luicelle dont l'avaut est formé de la tète d'un animal.
Le mouvement de rotation est imprini*'' j)ar un cheval qui tire péniljle-
mcnt cette massive machine.
A l'époque de Louis XVI, nous trouvons les manèges de chevaux de
hois à peu près semblables à ceux qui figurent encore dans toutes les
fêtes .suburbaines. Dans un des frontispices de Berquin, on peut voir
L.A Courte ou Pot
d'après une composition he Claudine douzonnet Stella, xvii= siècle.
des enfants montés sur des chevaux dont une ample dra|)erie dissinude
les jambes al)sentes ; une gentille petite fdle, assise sur une estrade,
fait glisser au moyen d'un plan incliné les anneaux que ses petits cama-
rades chercheront à atteindre dans leur course vertigineuse.
D'autres fois, le manège de chevaux de bois consiste simplement en
une sorte de roue dont les rayons sont terminés par de grossières
sculptures. Chacime des personnes qui prend part au jeu de bague s'ins-
talle sur le dos d'un de ces pacifiques animaux et, armée d'un long bâton,
cherche à décrocher l'anneau au moment où elle arrive à proximité.
Le dessin que nous reproduisons un peu plus loin, est tiré d'une
gravure de Hogarth publiée le 1" août 1800. C'est évidennnent une pièce
satiri(pie dirigée contre la noblesse et le clergé, qui se trouvent fort mal-
menés dans la légende placée au bas de la gravure.
9G
V. — Déflnilioii du jpu do baiçuc au di.\-hidtiènie siOele.
Dans le Dictionnaire des jenx familiers, publié dans V Encyclopédie
mcthodii/uc, nous trouvons une bonne définition du jeu de bague tel qu'il
était jjratiqué à la fin du dix-huitième siècle :
UN JEU DE BAf.UE PEnPENDlCULAIRE EN RUSSIE
d'après une cnAVUllE DD COMMEXCEMENT UU XIX» SIÈCLE.
Ce jeu consiste en une grande machine qui présente quatre fauteuils, ou quatre figures de
clieval qu'on fait tourner sur un pivot devant une boîte élevée dans laquelle on met des
anneaux à ressort, que les joueurs assis ou à cheval doivent enlever malgré les mouvements
rapides où ils sont, en faisant passer ces anneaux dans un bâton pointu qu'ils tiennent à la
main. On joue deux personnes, ou deux contre deux, et celui des deux pai'lis qui a le premier
le nombre d'anneaux convenu gagne la partie.
Une des parties essentielles de ce jeu et que l'on oublie souvent est la
coulisse aux bagues qui contient les anneaux devant assurer la victoire
au plus habile jouteur ; c'est une planche, portant à son centi'e une rai-
nure, qui reste suspendue à son extrémité au moyen d'une petite bande
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— 07 —
de rer-l)I<uic lonnaul ressorl. (Ici ajuiMi-ci!, d'ime ('onsti'iu'tioii très siinplo,
consiste en deux feuillets de bois superposés et assend)lés au moyeu de
vis ; dans la planchette iuférieure, ou creuse une excavation de quelques
millimètres de profondeur et c'est dans cette rainui^e (pie doivent être
ranimés les anneaux qui viennent ainsi se présenter automatiquement à la
lance du joueur.
Pour rendre le jeu plus facile, on peut, au lieu d'une seule rainure,
en tracer plusieurs, ce qui pennet de présenter au bas de la p!anch(>tte
un plus grand nombre d'anneaux et par suite de diniiiuier les chances
d'insuccès.
VI. — Le jeu de ba^'iie de Jean l'apillon eu 17(»6(1).
Dans l'œuvre de ce graveur qui appartient à la seconde moitié du dix-
LE JEU DE LA BAGUE SYMBOLIQUE
d'aI'UKS une GHAVUHE sur bois de JEAN PAl'ILLON, 17C6.
(1) Jean-Michel Papillon, né à Paris en 1698, fut un célèbre graveur sur bois qui composa un grand
nombre d'ornements, de modèles et de dessins pour les étoffes, le papier et même les cartes à jouer; son
œuvre a été publiée en 1766 et forme deux volumes.
13
98 —
huitième siècle, ou trouve la représentatiou du jeu de bague allégorique
qui préseute cette particularité intéressante qu'on retrouve dans cet amuse-
ment populaire un souvenir des courses de tètes mauresques si en
honneur aux seizième et dix-septième siècles. L'appareil (pie nous montre
Jean Papillon est une machine des
plus rudimentaires; deux madriers,
assemblés en croix, tournent au-
tour d'un axe placé au centre d'une
sorte de manège formé par quatre
poutres de bois reliées les unes
aux autres par des traverses que
soutiennent des consoles ; à l'ex-
trémité de chacun de ces madriers
sont disposés, d'une manière symé-
trique, deux chars traînés par des
dragons et deux cavaliers montés
sur de nobles coursiers. Chacun de
ces personnages tient à la main
une de ces longues lances de tour-
noi en bois léger : ce sont ces
armes de convention qui se trou-
vent, de nos jours, remplacées par
les fines baguettes au moyen desquelles on doit décrocher les anneaux.
Dans le jeu que nous reproduisons ici, la bague est suspendue à une
petite potence fleurdelisée, mais l'adresse des jouteurs peut également
s'exercer sur une targe, un heaume ou une tète mauresque placés de
façon à pouvoir être atteints par la lance du jouteur. A l'extrémité du
madrier qui est la plus rapprochée de l'axe, se trouvent quatre figures
allégoriques représentant les Saisons : en avant, on aperçoit l'été carac-
térisé par une gerbe de blé et l'autonuie représenté par les vendanges.
Au sommet de la poutre centrale formant l'axe, le graveur a figuré
une Victoire ou une Renommée qui embouche la trompette pour célébrer
la gloire du gagnant du jeu de la course à la bague.
UN JEU DE BAGUE ANGLAISE
d'aPHÈS une CAIUCATUHE de la fin du XVIll" SIKCLS.
vil. — Le jeu de bajiue du jai-diii de .^loiifoaii, pr«>.s Paris.
En 1779, on publia une description du jardin de Monceau, près Paris (1),
(1) Cet oiivrai,'e fut piihlio à Paris clicz Dclal'osse. s''avi'iii'. i-iie du Camnisel, près des Tuileries
en 1779. Les gravures de ce livre portent comme indication d'auteur dans l'angle à droite : L. C. de Car-
montelle, et à l'autre extrémité on peut lire ; <• Terminées au burin par Colliberd. ■>
— 100 —
appartenant à Son Altesse Sérénissiiue M'^v le duc de Chartres (1).
Dans ce parc, on s'était plu à réunir tout ce qui pouvait alors constituer
un élément de curiosité. Outre la Nauma-
chie et les ruines des temples antiques qui
existent encore dans toute leur intégrité,
on avait établi non loin du pavillon princi-
pal (2) un jeu de bague exécuté dans le
style chinois, et l'ouvrage auquel nous em-
pruntons cette reproduction en donne une
description détaillée :
En avant ilu bâlinient est un bassin qui s'élend au-
tour du jeu de bague et le renferme dans une île ; ce jeu
de bague est un parasol chinois soutenu par trois Chi-
nois pagodes, qui tiennent aussi une base horizontale sur
laquelle s'appuient ceux qui font tourner la bague et qui
n'ont d'autre mouvement à faire que celui de marcher
sur le plancher qui est sous leurs pieds. Des bords de ce
plancher partent quatre branches do fer, dont deux soutiennent des dragons sur lesquels on
monte à cheval ; sur les deux autres branches sont couchés des Chinois soutenant d'un bras
un coussin sur lequel on s'assied et tenant dans la main un parasol garni de grelots ; de l'autre,
ils tiennent un coussin sur lequel on pose les pieds ; les femmes sont assises sur les deux
branches.
Le bord du grand parasol est garni d'œufs d'autruches et de sonnettes ; les quatre lanternes
que l'on voit renferment les bagues qui ne se présentent à ceux qui les courent qu'au bout des
glands qui sont sous les lanternes.
CNE- BAGUE A CHEVAL
D'UN NOUVEAU GENRE
d'après dne LiTiio(ii\ aphie de i.a
RESTAlinATION.
Vlll. — I-a bague ehiiioiso au jardin 'l'îvoli.
A l'époque de la Restauration, on a continué à se livrer au plaisir de
LE JEU DE BAGUE
ÉDirrÉ A SAINT-r.LOUD, AU DÉBUT DU XIX' SIÈCLE.
la course sur les chevaux de bois et, comme en bien d'autres circons-
(i) Ce duc de Chartres-est celui qui fut connu un peu plus tard sous le nom de Philippe-Égalité.
(2) L'édifice que l'on nommait alors le Pavillon principal est cette sorte de rotonde qui subsiste encore
aujourd'hui et qui se trouve dans l'axe do la vue couiianl niainlenant dans sa largeur le jardin du
Parc Monceau.
— mi —
lances, ce jeu dv bajoue a doiiiir lien à l'apparition de nonibrenses carica-
tures. Dans une image extraite de la série dn Bon Gc/irr, on trouve,
en effet, les Amusements île la bagne cliinnise an junlin de Timii. Qnatre
sièges placés aux extrémités d'une fort(> armature en bois sont occupés
par des joueurs, qui cherchent à attraper des anneaux qu'une belle dame
en rose fait glisser sur une planche ; le mouvement est imprimé par un
malheureux homme à demi (Mifoui dans un trou circulaire, qui pousse
péniblement avec ses épaules les croix qui soutiennent les fauteuils, où
d'autres prennent un plaisir ([ui n'est pas fait pour diminuer sa peine.
1\- — Jeu de bag^iie niù par des pédales.
Dans les Brevets d invention, nous trouvons (tome IV, page 119) la
description d'un nouveau jeu de bague infiniment plus ingénieux que
UN JEU DE BAGUE DANS UNE FETE PUBLIQUE
d'apkès un jEti d'oie iNTiTiLÉ Les nouveaux cris de Paris, 1779.
celui que nous venons de décrire ; dans cette invention, en effet, les
chevaux de bois sont mis en mouvement au moyen de pédales sei'vant
d'étriers. Les joueurs doivent pédaler consciencieusement pour faire tourner
la machine, et, s'ils ont le plaisir, on ne peut pas dire qu'ils ne sont pas
à la peine. Cette invention est due à un sieur Cardinet.
— 102 —
X. — La pi'onionade «lédalîoniie.
En 1817, clans le nii-me recueil, nous voyons la desi-ription d'un méca-
nisme destiné à faire courir quinze chars à la fois, et l'inventeur,
M. Lésigne, a baptisé cette découverte du nom de Promenade dédalienne ;
voici en quels termes il décrit cette ingénieuse invention qui peut être,
à bon droit, considérée comme l'ancêtre des trottoirs roulants :
LN MANEGE DE CHEVAUX DE BOIS. AU XVII- SIECLE
u'aPIIKS une CAUICATI'IIE HOLLANDAISE, CONTEMPORAINE.
Les quinze cbars sont attachés à une chaîne sans fin horizontale, conduite par des
pignons, qui sont disposés de manière à faire parcourir à cette chaîne les dilTérentes allées
d"un jardin.
Chaque char est monté sur deux barres de fer verticales, qui sont enfilées dans l'épaisseur
de la chaîne et dont chacime est montée, à son extrémité inférieure, sur un petit chariot à deux
roues, qui se meut sous terie dans un chemin pratiqué parallèlement aux allées du jardin. La
chaîne sans fin se meut également sous terre, dans l'intervalle qui sépare les chars des
chariots qui les portent.
Le tout est mis en action par un manège faisant marcher un engrenage, composé d'une
lanterne, d'une grande roue et de deux pignons montés sur deux des axes des pignons de la
chaîne et dans lesquels engrène la grande roue.
XI. — C'ai'îfaltii'eis politiques sur le Jeu tl«' bague.
Sous Louis-Philippe, nous assistons à une nouvelle reproduction du
jeu de bague ; l'image a pour légende : « Le jeu de la bague nuptiale ».
« L'Allemande et d'vno... rAiijjluise et de deux... partie perdue pour vous.
— 104 —
Monseigtiew... », et, tandis que les personnages tournent avec rapidité,
on aperçoit le malheureux roi Louis-Philippe qui pousse à grand'peine
tout ce manège de chevaux de bois.
Le maître du jeu qui est chargé de faire passer les anneaux dans le
glissoire est le ministre Talleyrand, qui avait été le négociateur des
JEU DE BAGUE POLITIQUE, d'ai>iiès une lithographie de renault, 1848.
mariages pour le duc d'Orléans, que l'on aperçoit cherchant vainement
à attraper un anneau avec son épée ; les deux princesses sont déjà loin
et elles le raillent sans pitié.
En 1848, nous retrouvons le même manège, mais il est à remarquer
qu'à cette époque les chevaux sont plus perfectionnés ; ils sont munis
de jambes et il y a là tm progrès sensible à noter.
Tous les principaux personnages politiques se trouvent représentés
dans cette caricature : le prince Louis Bonaparte, Cavaignac, Ledru-
RoUin, Lamartine, Raspail et Marest. Chacune de ces personnalités est
caractérisée par un emblème, et l'aigle, la lyre et le bocal de camphre per-
mettent d'identifier les personnages avec autant de certitude que si leur
nom était écrit à côté d'eux. Le manège de chevaux de bois est mis en
mouvement d'un côté par le prince de Joinville et de l'autre par Louis
Blanc; chacun des joueurs s'efforce de recueillir, à l'aidi^ de sa baguette,
le plus grand nombre possible de bulletins électoraux »jui s'échappent
d'une urne contenant les votes pour la Présidence de la République.
— lori
XII. — La floll<> aérîciiiK',
Dans les premières années dn dix-neuviènie siècle, on avait établi à
Paris nne machine» de ce ^enre qni ne laissait pas qne d'être fort com-
pliquée ; cette construction couq)renait une partie fixe en forme de
pyramide tronquée ; (die servait à contenir le mécanisme ot à abriter
l'homme destiné à faire mouvoir toute la machine. Au-dessus de cette
LA FLOTTE AERIENNE
l'UBLiKE l'AK LE joiiRNAL la Caricature, en 1832.
boite était placée une sorte de tourelle surmontée d'une guérite ; quatre
grands bras sortaient de la tourelle et chacune de leurs extrémités
portait un joug en bois posé à cheval sur le bout de la traverse ; la
106
nacelle était suspendue à ce support, ce qui lui permettait de rester
toujours parallèle au sol, (]uell(> que lût l'inclinaison. Pour at;rémenter le
jeu, une pièce en fonte ondulée
placée auprès de l'axe faisait
monter et descendre les vais-
seaux cinq fois au cours d'une
révolution complète de la bas-
cule à double pivot. Dans les
caricatures du temps de Louis-
Pbilippe, la flotte aérienne a été
aussi im des éléments dont les
journaux savaient tirer un parti
si caustique, pour tourner en
ridicule le f^ouvernement, et le
•graveur d'une de ces composi-
tions a donné aux voyageurs
qui sont dans les nacelles, les
traits des amiraux Piigny et Roussi ii (jui étaient p(Mi aimés du public.
LA ILOITC AERICNNT
d'après les Amusemenls de la campayne, \\\' siècle.
XIH. — Los iiianô5;-es de fhevaii.v «U> bois (l<'|tiiis le .seeoiid F.iiipire.
A la fin du second Empire, vers t8G5, les nianèg<'s de cbevaux de
bois deviennent plus luxueux; ils sont garnis de tentures et de nombreuses
1 1 11 L 1)1 ^ Cni \ Vl\ 1)1 liOls 1 ui I LM iiJii I 11 1111 n -1 OM. niiii r
— 107 —
laiitoi'ucs vôiiiticiiiies, ou hicii encore de simples lampes à [léti'olc miiiiics
de réflecteurs produisent, au milieu de ce cliiiquaut tlécor, des jeux de
lumière destinés à attirer la foule et à l'aire tomber, ilaus l'escarcelle du
l>an(|uiste, les i:,tos sous qui lui permettront de nourrii' sa noudn'euse
famille.
De nos jours, ces jeux de bajoue ont subi une transformation com-
])lète : le mouvement vient dune plate-forme mobile placée à la paiiie
inférieure de la machine tournante, et on a apporté à la confection des
animaux devant servir de monture un soin et une vai'iété inconnus pen-
dant les années précédentes.
xiv.
Le jeu «le basfiie à pied.
Le jeu de baj^ne peut être joué é|:,alement à pied. Pour se livrer à ce
};enre d'exercice, les enfants n'ont besoin que de bien peu de préparatifs :
au tronc d'un arbre est fixée une planchette portant à son extrémité un
anneau maintenu par ini cordon ; entre la main de chacun des joueurs
LE JEU DE LA BAGUE A PIED
u'ArilÈS UNE GRAVUHE DE CAKllACCI, XV1I« SIÈCLK.
on place une longue b.iguette de bois, et ceux-ci, mettant en arrêt la
lance improvisée, doivent traverser l'anneau avec la pointe de leur arme
sans modifier leur course.
Dans le « Recueil des jeux des jeunes filles » de tous les pays, qui a
paru en 1823, nous trouvons la description de la bague mauresque, qui est
une variété du jeu de la bague à pied :
Les dames maures, bien plus libres que les autres femmes mahomélanes, élaienl toujours
spectatrices de ce jeu, dont elles faisaient le plus bel ornement. Réunies dans leurs jardins,
elles rivalisaient d'adresse entre elles. Une branche de palmier soutenait l'anneau et les jeunes
fdles devaient le traverser en courant avec rapidité : une Heur devenait la récompense de la
plus adroite.
— 108
XV. — Le jeu «lu bsKiiiet.
On doit faire rentrer dans la même catégorie du jeu de bague, le jeu
qui est plus communément appelé dans nos campagnes « le Jeu du
baquet » .
Ce jeu est une importation italienne et il l'ut très en honneur en
France dans la dernièi^e partie du seizième siècle, à l'époque où l'on
cherchait avec ardeur à se rapprocher le plus possible des mœurs de
l'autre côté des Alpes.
Dans le recueil de 1587, ce jeu est désigné sous le nom de » Tirer la
jatte» ; le jouteur est placé à cheval sur un tonneau qui repose sur une
sorte de grossier traîneau tiré par deux de ses camarades, et il doit être
assez habile pour enfder le bout de sa perche dans le trou percé au
centre de la planchette fixée sur l'un des côtés du baquet; il est à peine
utile d'ajouter que, malgré son habileté, il ne saurait se soustraire à
cette douche plus ou moins salutaire.
La même scène se trouve représentée dans une gravure figurant les
différents jeux ayant pour acteurs des singes habillés avec les costumes
et les modes du seizième siècle. La grande analogie qui existe entre
cette composition et la planche des jeux de 1587 donne à supposer que
le graveur s'est simplement contenté d'utiliser la précédente composi-
tion, après l'avoir retournée; il l'a modifiée légèrement pour les besoins
de ce genre de caricature, qui jouissait à cette époque d'une vogue si
considérable.
Un graveur itahen de la fin du dix-septième siècle donne la repro-
duction de ce jeu dans une des villes de la région napolitaine, autant
qu'on peut en juger par les costumes. Au milieu d'un portique, on a
placé un léger baquet remph d'eau, maintenu par deux pivots ; à la
partie inférieure du récipient se trouve fixé un anneau, que les concur-
rents, montés sur un cheval lancé au galop ou perchés sur quelque
légère voiture, doivent traverser avec l'extrémité de leur lance.
Ce jeu du baquet a également été appelé le « Bajjtème du tropique »,
parce qu'il paraît dériver de cette mémorable coutume. Quelquefois ceux
qui concourent pour les prix, au lieu d'être montés sur un cheval, sont
assis sur une chaise placée au sommet d'un plan incliné analogue aux
montagnes russes ; la difficulté consist(> à saisir le moment propice pour
attraper l'anneau lorsque le petit chariot, lancé à toute vitesse, passe à
proximité.
Ce jeu, certes infiniment moins iuoffensif ipie les chevaux de bois,
X
c 3 t-
. C
«G > u
_< *" t-
— no —
était cependant un des exercices préférés dans les fêtes des villages; et
c'est avec regret que nous le voyons disparaître de plus en plus et
s'effacer comme la plupart des traditions populaires du temps jadis.
XVI. — I.a baguo sur rosiii.
Si l'on ne craignait de faire un jeu de mot trop facile, on pourrait
dire que le jeu du baquet est un jeu de bague sous l'eau.
Il existe une autre manière de se livrer à cet amusement qui est
connu sous le nom de jeu de « la bague sur l'eau ». On a souvent
donné ce spectacle aux Parisiens dans les fêtes célébrées du temps de la
première République. Il faut être bon nageur pour entrer en lice, car il
est à peu près impossible au joueur d'écbapper à un bain plus ou moins
agréable. Voici comment se construit ce jeu, qui convient particulière-
ment aux fêtes publiques et aux grandes assemblées :
On choisit un endroit de la rivière oîi la berge est haute, où l'euu ait au moins huit pieds de
profondeur, et où le fond soit uni et sans herbes. On fait construire en planches une
coulisse large de dix-huit pouces environ, tiyant des rebords de la hauteur d'un pouce ou
deux, prenant au haut de la berge, et descendant par une pente assez rapide jusqu'à six on
huit pieds au-dessus du niveau de l'eau. A cet endroit, la coulisse cesse tout d'un coup; il
LE JEU DE LA BAGUE SUU L'EAU
D'.M'nKS les Amusemenls de la cainpayne, xix» sikcle.
faudra avoir soin que le fond de la coulisse soil bien poli, bien savonné afin que rien ne puisse
accrocher ou arrêter celui qui s'y hvrera.
La bague suspendue à un fort cordeau pendi'a au niilii'U de lu coulisse, à la hauteur de deux
pieds et demi ou trois pieds au-dessus. L'anneau en fer ou en cuivre sera d'une bonne force et
aura à peu près trois pouces d'ouverture, alln de multiplier les chances du succès.
-c ^
— 112 —
Les choses ainsi préparées, les jouteurs, légèrement vêtus, ayant en main une canne longue
lie trois pieds et de la force d'un jonc ordinaire, montent sur la berge et celui dont le tour est
arrivé s'assied dans la coulisse, à laquelle il ne doit point loucher avec les mains du
moment où il commence à suivre sa pente. Il glisse sur le derrière, les jambes en avant ;
arrivé près de l'anneau, il cherche à l'enfiler avec sa canne ; s'il manque son coup, il poursuit
sa course jusqu'à l'endroit où la glissade cesse et il tombe dans l'eau. Si un autre joueur, plus
adroit ou plus iieureux, vient à enfiler l'anneau, il s'en sert comme d'un point d'appui pour
s'arrêter. Il lui est alors permis de poser son autre main sur le rebord de la coulisse pour s'ar-
rêter tout à fait ; il sort ses jambes et descend sur l'échafaud pour aller chercher son prix au
bruit des applaudissements des spectateurs.
XVII.
,'oisoau ég-j'ptien.
Dès le dix-huitième siècle, on avait installé, dans les lieux de diver-
tissement public, une sorte de jeu d'adresse connu sous le nom de Yniseau
égyptien, et qui n'était, en réalité, qu'une variété du jeu de bague.
Co jeu exige de la justesse dans le coup d'œil et de l'adresse dans la
LE JEU DE L'OISEAU ÉGYPTIEN
d'apuès les Amusements de la campagne, xix' .siècle.
main; pour l'établir, il suffit de dresser un portique haut de 13 ou
20 pieds, portant au milieu de la traverse supérieure, une longue tige de
fer terminée à chacun de ses bouts par un crochet ; cette tige descend
presque jusqu'au sol et reçoit, dans le crochet inférieur, un anneau attaché
au dos d'un oiseau en métal ou en bois garni de fer. Cet oiseau doit
avoir les ailes étendues pour pouvoir plus aisément fendre l'air.
Les choses étant ainsi préparées on dispose deux buts : l'un est celui
du départ contre lequel se tient le joueur, l'autre est celui de l'arrivée
— lia —
qui contient la st-rie des anneaux (jue l'oiseau lauci'' d'une main sure
devra atteindre à l'extrémité de sa course.
L'habileté consiste à bien assurer l'équilibre de l'oiseau servant de
projectile et à l'abandonner à son mouvement à l'instant propice.
On trouve encore fréquemment chez les amateurs ou dans les musées
ces espèces d'oiseaux f>rossièrenient construits, mais peu d'amateurs
connaissent ce jeu de baji,ue ainsi simplifié.
XVllI.
Le jeu dos oiseaux volli2;eurs.
11 existe, au Mexique, une sorte de jeu que nous devons fair(> renirer
dans la catégorie des jeux de
bague, en raison du mouve-
ment de rotation qui est im-
primé à ceux qui se livrent
à ce périlleux exercice.
Cette fête avait lieu aii
renouvellement du siècle, et
la foide en tirait des présa-
ges suivant que les joueurs
avaient montré plus ou moins
d'habileté dans la mission qui
leur était confiée.
Pour construire ce jeu, on
se servait d'un arbre soigneu-
sement écorcé et ébranché ;
le sommet de cet arbre, taillé
en pointe, portait dans le
creux un tronçon de bois
cylindrique duquel pendaient
quatre grosses cordes qui sou-
tenaient un cadre de l)ois ou
un fort châssis ([uadrangu-
laire.
Entre le cylindre et le
cadre étaient enroulées ipiatre autres cordes qui faisaient sur l'arbre un
certain nombre de tours. Les extrémités de ces cordes passaient cha-
cune par un trou pratiqué dans l'épaisseur du châssis.
Tout étant disposé de la sorte, quatre hommes, travestis en aigles ou
en hérons, grimpaient jusqu'au châssis à l'aide d'une corde qui était fixée
LE JEU DES OISEAUX YOLTICEUUS
— 114 —
le loii^ de l'arbre. Ils s'attachaieut alors par le milieu du corps au bout
de l'une des cordes enroulées sur l'arbre, puis, les ailes écartées, ils
s'élançaient tous dans l'espace et s'agitaient à (pii mieux mieux pour
évoluer.
Les efforts (pi'ils faisaient ne tardaient pas, en effet, à inetlre en
mouvement le châssis et le cylindre, et comme, à mesure qu'ils toiu'naient,
les cordes, en se déroulant, prenaient j)lus de longueur, le; vol de ces
singuliers oiseaux devenait plus étendu.
Poui' que, de cet exercice, on pût tirer un bon augure, il fallait que
treize tours non interrompus amenassent à terre les quatre voltigeurs.
TROISIEME PARTIE
LE BILBOQUET
I. — Doscripfion <lii jiou el oriijîiif dii nom.
Le bilboquet se compose il'une boule percée d'un trou conique, reliée
par une cordelette de chanvre
à un bâtonnet eu forme de
balustre tourné ; il est terminé
d'uu côté par une pointe et de
l'autre par une sorte de disque
plat légèrement creusé en forme
de coupe.
Le nom de ce jeu est formé
de deux éléments bien distincts,
la bille ou boule qui doit être
projetée eu l'air, et le bouquet,
mot qui, en ternie de blason,
signifie fer de lance et qui sert
à désigner la pointe sur la-
quelle le joueur doit recevoir la
boule.
Nous voyons cette étymo-
LE BiLiioyum logie vérifiée d'une manière
l'aI'HÈS in HECrEII. I)K JEUX DIVKIIS l'UBUK DANS I.A SIXONDK , • 1 n I 1 "
.MOITIÉ n.j XIX' siKoiK certaine dans Rabelais qui, ra-
r
it JcLo uiL ÛDdlôbûLjiLd:.
HuPuhiu: lUCfiTiU-d hiL^ (juel e.rt l^Au^ù-rru^x/ / _ l/n suu dêja hun L'use U fcuj.t iju€ jr U due'
E.rt-ce. la ct- hecwjcu, ^llc la mo^^£auU^rlJe, Et tnacccmode feu d un parçii /nslranurU._
Et aiu ftzU d<- Fans -iTiUifiir itnvu^enij>rU ' ^/•„„^,., i... e /. /o.//> -..,.. v.^,.... ^ t. /•./.'.■./....._;,.•
— IIG —
coiitaul los exploits de rincoinparable Gargantua, parle du " Bille bou-
quet ». (Livre I", cliap. xxii.)
Le Journal de P. de l'Estoile donne de curieux détails sur la passion
que Henri III avait pour ce jeu :
En ce temps, le roi commença à perler un billeboquel à la main, mesmes allant par les
rues et s'en jouait comme font les petits enfants. Et à son imitation les ducs Desparnon
et de Joieuse et plusieurs autres courtisans s'en accomodoienl, qui estoienl en ce suivis de
gentilshommes, pages, laquais et jeunes gens de toutes sortes.
II. — l'abi'icatioii des bilboquets.
A la fin du seizième siècle, le jeu du bilboquet était désigné sous le
nom de <i bilbouquet » et fabriqué par les
peigniers et les lanterniers de cors et
d'ivoire.
Les plus anciens Itilboquets n'étaient pas
sembla])les à ceux (jue nous voyons aujour-
d'hui. Dans la première édition du Diction-
naire de F Académie^ nous trouvons au mot
« bill)oquet » la définition suivante : « Petit
instrument fait au tour et creusé de telle
sorte par les deux bouts, qu'en jetant en
l'air une petite balle qui y tient par le
moyen d'une longue ficelle, la petite boule
puisse être reçue dans l'un des creux. » La
boule, ordinairement en plomb, devait
donc rentrer exactement dans la petite
LE BILBOQUET cavité placée à la partie supérieure du
UAPnÊS UN BECUEII, DE JEUX BU COMMEN- 1 1 1 -il i
CEMENT DU xao SIÈCLE. mauchc du bdboquet.
m. — I.a foire franche «les bilboquets.
Si nous nous en rapportons à une estampe du dix-septième siècle,
nous voyous que tous les joueurs se servent d'un instrument de ce genre
et que la balle est extrêmement petite. Cette gravure, qui est évidem-
ment une pièce satirique, montre tous les corps de métier délaissant
leurs occupations pour jouer au bilboquet.
Au premier plan se tienuent le savetier, la lavandière, le petit décrot-
teur, le portefaix, le porteur d'eau; tous s'arrêtent dans leur travail pour
lancer en l'air et rattraper d'une manière savante la petite botde si
attrayante. Un peu plus loin, des couples de jeunes gens et de jeunes
LA FOIRE FRANCHE DES lilLUUQUETS
U'APIIÈS UNE ESTAMPE DU XVU' SIÈCLE.
— 118 —
filles jouent, parallèlement, au bilboquet, eu se regardant avec complai-
sance. Tout au fond de la scène est une grande boutique adossée contre
une maison, quatre demoiselles de magasin suffisent avec peine aux
demandes dun nombre considérable d'acheteurs. L'image montre que le
jeu du bilboquet n'est pas sans inconvénient. i)uisquuno jeune personne
qui s'y est trop longtemps attardée reçoit de sa mère une magistrale
volée de coups de trique.
Le bilboquet a été le motif principal d'un bal masqué qui fut donné
au Louvre en 1626 et dont l'abbé Marolles nous a laissé le souvenir.
IV. — La passion du jeu du bilboquet au di.\-liuiliènie siOcle.
Sous Louis XV, la passion du bilboquet revint de plus belle, et le
marquis de Bièvre, qui était déjà le roi
du calembour, devint aussi celui du bil-
boquet ; c'est pourquoi l'on publia, sons
son portrait, ces deux vers qui carac-
térisent sa double supériorité :
Beverley n'aurait pas éprouvô tant ih maux
S'il eut passé sa vie à jouer sur les mois.
La jnode de jouer au bilboquet était
en si grande faveur, ipiil était parfaite-
ment admis que les acteurs sur la scène,
entre deux répliques, s'amusassent à ce
petit exercice anodin.
Dans le Dictionnaire d'anecdutcs, qui a
paru à la fin du siècle dernier, nous
lisons, en effet :
LE MAUQLIS DE BIÈVRE
Avant que les pantins eussent régné à Paris, la
mode avait mis un bilboquet entre les mains de la plupart des Parisiens ; cette niaiserie
monta jusqu'au théâtre et l'on vil, il y a environ soixante ans, la Desmares s'en amuser au
milieu de ses rôles de suivante, au grand contenlomcnt des spectateurs.
V. — De l'iudustrie des bilboquets au di.x-iieuviènie siècle.
L'industrie du bilboquet a continué à être très florissante pendant tout
le commencement du dix-neuvième siècle et le centre de fabrication était
dans l'est de la France. « A Saiut-Chiude, Besançon. Poligny, Pont-eu-
Royans, lisons-nous dans le rapport du jury de l'Exposition de 1849, on
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«Il
— 120 —
taille, on sculpte et l'on tourne le buis, le hêtre et le charme ; une partie
de cette bimbeloterie est finie et assortie à Paris.
» Paris fait aussi bon nombre d'objets tournés, entre autres les bilbo-
quets, les toupies, les diables, les quilles et les boules. »
LE JEU 1)L' lîILBOQUET, u'aimiès une lithogiiaimiie du milieu uu six* siècle.
Enfin, en consultant une statistique, nous voyons qu'en 1849, on vendait
à Paris pour 39200 francs de quilles, toupies et bilboquets.
Le chansonnier français n'a pas dédaigné de consacrer au bilboquet
une poésie plutôt légère, dont nous n'extrayons seulement que les premiers
vers :
Ah ! maman, je meurs d'envie Au jeu du bilboquet,
Déjouer avec Coliiiel L'agréable folie !
Dans l'album d'un fabricant de jouets du premier Empire, dont nous
avons donné de nombreuses reproductions au cours de ce travail, on voit
que les bilboquets étaient vm article fort demandé sur la place de Paris;
il s'en faisait dans toutes les tailles et on se servait de différentes essences
de bois. Toutefois, les plus recherchés étaient les bilboquets en buis qui
étaient à la fois plus solides et plus précis que les autres.
Hl
VI. — l.t' biIl>o«nie( joué Jivfc un palol.
Au seizième siècle, on a é^alenieiit donné le nom de » l)iIho(|net » ù
une sorte de jeu de quilles ; pour gagner, il s'agissait de renverser le but
avec un palet ; ce jeu était loin
lï?M-t«> .â'itA^'v \ d'être innocent et servait aux
bonncteurs du temps à dépouil-
ler les passants naïfs, c'est du
moins ce que nous apprend la
petite poésie que nous repro-
duisons ci-contre :
Ayant désir de tromper un novice,
Qui tombe es m:iin de quelque lin vallet,
Au bilboquet ils prennent exercice.
(;'est probablement pour
prévenir les jeunes enfants
contre le danger présenté par
ce jeu, qu'il a été admis à figu-
rer dans le recueil des Trente-
six fujurcH contenant tous les
jeux, etc., édité eu 1587. No-
tons, eu passant, que la quille
est en forme de balustre et
rappelle assez exactement le bâtonnet d'un véritable bilboquet : c'est
évidemment à cotte disposition spéciale que ce jeu doit son nom.
vil. — Uopréscnlalions diverses du jeu du bilboquel.
Stella a représenté le jeu du bilboquet, et de sou temps c'était encore
la petite balle de plomb qui était en usage.
An commencement du dix-neuvième siècle, la
balle prend des dimensions plus considérables et
dans les images de l'Empire, de la Restauration et
du temps de Louis-Pbi lippe, le bilboquet que l'on
voit entre les mains des enfants ressemble beau-
coup à ceux(jiii se fabriquent encore aujourd'bui.
Au Salon de 1808, il y avait un tableau de V.
Cbappuy qui représentait le jeu du bilboquet, ce
qui tend à prouver que ce petit jeu d'adresse a continué à être en faveur
jusqu'à xme époque contemporaine.
LE JEU DU BILBOQUET
d'.m'i\és les Jeudis de ma tante, xix" siêi:i.e.
LE lilLBUQUET
b'.M'lll;.S VlCTOIl AI>.\M, XI.'C SIÉCLK.
122
QUATRIEME PARTIE
LE JEU DU DIABLE
I. — Coinposilioii de ce jeu.
Le diable est, en quehiuc sorte, formé de deux toupies d'Allemagne
CnmmenI un apprend ;'i joner an di/iLle.
d'aI'HES lIXE (inAVURE nu modes du l'nEMIEH EMPIRE.
réunies par une même tige ; les anciens n'ont pas connu ce jeu, que
l'on pourrait qualifier d'amusement enfantin des grandes personnes.
— 124
11. — Orîg'îne cliiiioise du dînblo. Sa description
d'après le père Ainiot.
Toi qu'il a étô en usage au commencement du dix-neuvième siècle,
le diable est une importation d'origine chinoise, et,
par un rapprochement assez singulier, c'est un mis-
sionnaire, le Père Amiot, qui uons donne la des-
cription de ce jeu :
Ce lioclu'l bniyanl consiste en deux cylindres creux, de nK'lîil,
de bois ou de bambou, réunis au milieu par une traverse. Chacune
des cavités est percée d'un trou dans des sens opposés. La corde
l'ait un nœud coulant autour de la traverse. En suspendant en
l'air ce hochet et en l'agitant avec vitesse, il s'établit dans cha-
cune des portions des cylindres un courant d'air rapide et l'on
entend un ronflement semblable à celui produit par la toupie d'Alle-
magne.
m. — Emploi des diables en Chine pour reniplaeer
le bruit de la eréeelle.
Longtemps avant la Révolution, les missionnaires de Pékin en avaient
LE .JEU UL^ DIMILE
d'ai'hks u.nk vue de fantasmaoohie, xix" sfècle.
envoyé des spéciuiiMis au ministre d'Etat, Berlin, grand amateur de curio-
1 "^^.^^i^-m^i
I2G
sites chinoises. Le diable chinois était dune grosseur énorme : ce nétait
pas seulement un jouet, il servait aussi comme crécelle à plusieurs
colporteurs ambulants et surtout aux marchands de fi;àteaux pour annoncer
Imv approche et attirer les pratiques.
De la vog'ii»' «lu diable en Fraiiee en 1812.
(Vouleur Je liose)
Lorsque le diable acquit parmi nous une vogue si subite, ce ne fut
pas seulement un hochet réservé à l'enfance ; de jeunes dames et même
les personnages les plus graves y signa-
lèrent à l'envi leur adresse, au grand péril
des glaces et porcelaines des salons et sou-
vent aussi au grand danger de la tète des
promeneurs.
Mais la véritable époque où le diable lit
fureiu- par toute la France, ce fut en 1812,
et nous ne pouvons faire mieux sur ce
sujet que de reproduire l'appréciation que
fit paraître, en t848, le chroniqueur du
journal l'Illustration. Cet écrivain, passant en
revue les différentes inventions de cette an-
née qui ont pu avoir une influence sur les
modes, parle d'abord de l'aviateur construit
par un Viennois, M. Uéghen, dont l'inven-
tion n'eut d'autre résultat (jue d'inciter
toutes les dames à porter des bonnets ou
des chapeaux à la Déghen.
FRONTISPICE D'UN CALENDRIER
DE I.A KESTAUBATION.
« Mais, ajoule-l-il, la grande préoccupalion du mo-
ment, ce n'est déjà plus la comète qui file, l'aéronome qui ne vole pas, c'est à peine le
bruit des préparatifs gigantesques que fait l'Empire pour aller mourir en Russie. Ce qui, avant
toutes choses, est la pensée du moment, l'obsession de tous les esprits, c'est h diable ! non
pas le sombre génie du mal, cet impertinent et froid railleur à la maigre figure, aux traits
pointus, aux doigts effilés et au rire strident, dont nous avons été si engoués nous-mêmes
depuis quelques années et dont nous avions fait une sorte de type du suprême dandy du dix-
neuvième siècle; non pas le diable de Milton, de Micliel-Ange ou de Meyerbeer, mais un jou-
jou, une sorte de toupie à deux têtes, qu'il s'agit de faire tourner rapidement sur elle-même
en lui donnant l'élan au moyen d'une corde fixée à deux baguettes. Aux Tuileries, dans les
jardins, dans les salons, toutes les daines, tous les enfants sont occupés à faire ronfier le
diable. La mode, toujours aux aguets de toutes les folies et de tous les caprices, ne manque
pas d'enregistrer ce nom de plus dans ses fastes. »
— 127 —
V. — l>c la manière de jouer au <liable.
La manière de jouer au diable demandait un apprentissage des plus
sérieux ; une charmante j^ravure
de J814 indique les difTérentes
manières de se livrer à cet exer-
cice. La pj'omière et la plus
simple est la proinonado^ qui con-
siste à faire courir le diable le
long d'un des bâtonnets ; quand
il arrive au milieu de 1m corde,
cette nouvelle position s'appelle
Va comme je te pousse ; si l'on
croise les mains après avoir
vivement tendu la corde et qu'on
fasse remonter le diable à son
point de départ, l'exercice s'ap-
pelle Jean s'en va comme il est venu.
Le chevalet consiste à tenir le
diable au bout des deux bâtons
croisés. On peut également faire
des tours d'équilibre en faisant
arriver le diable à l'extrémité
d'un des bâtonnets ; c'est ce qui s'appelle le çjrand équilibre du croissant.
Les joueurs habiles savent faire monter le dialde le long de la corde
raids : c'est ce qui s'appelle l'ascension à corde
tendue.
Le plus difficile de ces exercices est le
saut périlleux. On peut ainsi lancer ce jouet à
une grande hauteur, disent ceux qui ont
écrit sur ce sujet ; cette manière de jouer
ne peut avoir lieu qu'eu plein air et exige
de la part du joueur autant de force que d'a-
dresse.
La grande voltige est la manière la plus
perfectionnée de jouer au diable ; on se sert,
à cet effet, d'une corde de la grosseur des cor-
donnets employés pour les cordons de tirage.
Un auteur anonvme du commencement du dix-neuvième siècle cite uji
LE JEU DU DIABLE
d'aPIIKS une LlTHOCnAPHIE DE C. MOTTE, XIX' SIKCLE.
LE DIABLE JOUANT AU DIABLE
n'Ai'nÈs UN Recueil de sujets divers
DE L\ nESTAUllATION.
— 128
LL Jl.Li 1)1 DIAlîLL Ll LL JLL DL L 1,.\1I(,KLI 1 1.
d'ai'uès les Jeudis de ma tante, xix« sikci.e.
jou du (liablo (jui avait été établi aux Champs-Elysées, dont la corde ne
mesurait pas moins de
60 toises de long; elle
était relevée dans le mi-
lieu par une perche de
20 pieds de hauteur.
On se plaisait autre-
lois à établir de vérita-
bles combats entre ces
toupies volantes :
Pour ajoulcr à l'inlérèl de
celle partie, <lil le mciiie aii-
Icur, on emploie deux diables,
que l'on lance au même mo-
ment sur chaque bout de la
corde; ils montent chacun de
leur côlé et arrivent ensemble à
la liauteurdu milieu, et, comme
s'ils voulaient se disputer le
terrain, ils se livrent un com-
bat, se choquent, avancent et reculent plusieurs fois de suite, et finissent par tomber lorsque
leurs forces sont épuisées. Il arrive quelquefois que le
diable fait d'un bois plus lourd et plus compact, ou
qui a été mis en train par une main vigoureuse, fait
reculer l'autre jusqu'au bout de la carrière.
Ou s'amuse aussi à placer le diable sur
une corde tendue en pente par une perche
inclinée, de manière que, la coi^de venant
tout d'un coup à inantpun', le diable tombe
de quinze ou vingt pieds de hauteur. L'a-
dresse consiste à courir, aussitôt qu'on a
dé[)osé le diable, au bas de la pente, et à
l'aller attendre pour le recevoir sur le cor-
donnet. Ou le l'anime en revenant, on le
pose encore en bas, on court de même l'at-
tendre et ainsi de suite. Si deux ou trois
joueurs le font ensemble, on doit conce-
voir qu'il deviendra très divertissant.
Au point de vue de la l'abrication de
ce jeu, les Français ont apporté un perfectionnement au diable chinois,
car, au lieu des deux cylindres réunis, ce sont deux sphéroïdes taillées
dans le même morceau de bois et creusées avec art.
LIi JEU 1)U DIABLE
d'ai'Jiks use imA(;e d'épinal, xix" siècle.
130
VI. — De la fabrication des diables.
Le diable était généralement en bois léger,
mais on en fit en toutes sortes de matières, et les
élégants de l'époqne se servirent même de diables
en cristal dont la sonorité était plus grande.
11 est à peine utile d'ajouter que la durée
de ces boules si fragiles était des plus éphé-
mères; au surplus, le jeu en lui-même ne tarda
pas à disparaître, et, après avoir joui pendant
quelques mois d'une vogue colossale, il tomba
dans le plus profond oubli.
VII. — Estampes satiriques sur le jeu du diable.
Les caricatures du commenceinont du dix-
nouvièuie siècle représentant le jeu du diable
sont très nombreuses, mais elles ne sont j)as
exemptes de toute idée satirique. Dans une de
ces images, la jeunesse, sous les traits d'une
charmante jeune femme, vêtue d'une • robe de
mousseline, est représentée envoyant galam-
ment son diable en l'air; en face de cette
joueuse habile est un groupe de vieillards dont
le dialde pend lamentablement vers la terre, et
leur maladresse à ce jeu doniu^ lieu à cette gaillarde légende :
On joue à ce jeu charmant Envoie tout en murnuirant :
Lorsque l'on est aimable. Au diable, au diable.
Vieillard eu vain rimilant (Air t/rs rraises.)
LE DIABLE SLU LE CHEVALET
d'après va Recueil de sujets
divers i>s la kestaubation.
LE JEU DU DL\BLE EN 18i0.
LA MANIÈRE DEJOUER AU OIABLG.
_^ ^tU-^So^^^-^y.
— 131 —
CINQUIEME PARTIE
LE JEU DE L'EMIGRETTE
On i)eut dire de ce jeu qu'il l'ut une vériUible satire : son existence
no fut pas de bien longue durée, car son origine ne remonte pas au
delà des dernières années du dix-huitième siècle et la mode de l'émi-
grette avait complètement disparu à l'épocjue de la Restauration.
1. — Dénnîtioii»
Ce jeu consiste en deux disques de buis, d'ébène, de bois de rose
ou d'ivoire, qui sont réunis au centre par un boulon pour ne former
Llçc/iera/ va/, ena/urrc
Jit le- roial /?ùuc6(e
L'^ encrai uaZ e/vj;reie^rc . t/.- Afa//>û/-oua . Jfi^ott'/t ion. i^fn Mirû/Uai/u.
^-Z2<;ti rû^.'a^ l>o/7v6ûn. , — . £i ^ roca/ aiétu'é/e ,
Conlrc les Emigratits '
LE JEU DE L'É.MIGIîETTE
D'AniÈS UNE CAniCATlRE CONSEHVKE AU CADINET DES ESTAMPES IlE LA BIBLIOTHÈQUE NATIONALE.
qu'une seule pièce ; ce boulon est percé d'un trou dans lequel on fait
passer mie cordelette nouée à son extrémité comme le lien du bilboquet,
dont Téraigrette a été la rem])laçante dans la faveur du public. Pour
— 132
luire manœuvrer ee petit iustrumcut, on roule la corde autour du
boulon et on abandonne à kii-
même ce petit disque qui tombe,
mais la force do rotation ({u'il a
acquise en tond)ant l'oblige à re-
monter pres([ue jusqu'au poinld'où
il est parti et il revient en roulant
le cordonnet sur lui-même ; l'ha-
bileté du joueur consiste à retenir
l'enroulement du cordonnet et à
maintenir toujours eu activité l'é-
migrettc, malgré les tours qu'on
lui fait fciire.
Théoriquement, l'émigrette de-
vrait revenir d'une manière auto-
matique dans la main de celui qui
l'a lancée, mais, une partie de sa
force se trouvant naturellement
détruite par le frottement et par
la résistance de l'air, il appartient
au joueur de savoir, à un moment
donné, imprimer au moyen du poi-
gnet un léger mouvement à l'émi-
DAME DE nUALITE FAISANT JOL'EU SON ENFANT ,,• i,
A L'ÉMiiaiETTE grette, })Our rétabhr 1 équilibre et
D'aPKÈSL'XE GHAVCIIE DE MOUES DE I.A FIN Dir XVIII» SIÈCLE. h\ fairC relUOllter COU VClialt 1 (MUCU t .
II. — La salirc du jeu de réiiiîgi'ctlo.
Le jeu de l'émigrette porta également le nom « de Coblentz », proba-
blement en raison du grand nombre d'émigrants qui avaient été chercher
un refuge dans cette ville.
V Improvisateur français Q,on?>i'iXie, non sans mélancolie, qu'en 17'.)t, alors
(pi'une partie des Français se préoccupait de chercher le salut dans l'émi-
gration, ceux qui étaient restés s'amusaient à tourner en ridicule ces
courses des émii-rants.
m.
Vogue eoiisîdéi'able de ee jeu.
A cette époque, le jeu d(> l'émigrette était devenu une véritable folie :
à la porte des boutiques, aux fenêtres, partout, on ik^ voyait que des
femmes, des enfants, des jeunes gens faisant mouvoir leur émigrette.
Miraéea^^^ CÂô/ d'une lésion .
cà /'Armeé noire e( jaune e/i jra/u/ UAt/br/ne^.
134
Les pai'lisaiis du roi avaieut adopté ce jeu, aussi les personnes qui se
piquaient de royalisme ne manquaient pas de se montrer avec leur énii-
grette aux promenades où la foule élégante était grande. On marchait à
pas comptés en tenant, chacun au hout du
doigt, le jeu en mouvement, et les papiers
du temps disent que la terrasse des Feuil-
lants, qui était le rendez-vous aristocraticpie
par excellence, offrait alors mi spectacle vrai-
ment singulier.
La vogue de ce jeu fut tellement considé-
rable que, cette même année, une seule mai-
son de Paris, le « Singe Verd », établi rue
des Arcis, en fabriqua en très peu de tenq)s
vingt-cinq mille pièces.
Quand -les émigrés furent rentrés eu
France, ce jeu n'eut plus aucune raison d'être
et le peu d'intérêt qu'il présentait ne pouvait décemment lui assurer
ime plus longue existence.
LE JEU DE LÉMIC.UETTE
u'aphks un Recueil de sujets divers
DE LA HESTAUnATlON
IV. — Ueprésentatîon du ïcii de rémigTeCte.
Dans les gravures de modes de la lin du dix-huitième siècle on repré-
sente des enfants qui s'adonnent à ce plaisir sans se douter de la raillerie
mordante de ce jeu qu'ils considèrent comme si innocent.
On dit qu'à Paris toute chose doit se terminer par une chanson, c'est
probablement pour cette raison qu'au moment où ce jeu faisait fureur,
on entendait partout ce refrain :
Quelqu'un qui d'il s'y bien connaître
L'appelle jeu des émigrants,
El sur ce nom chacun s'accorde :
L'on y trouve à la fois et la roue et la corde.
Mirabeau a été également représenté comme commandant d'un régi-
ment d'émigrés et n'ayant pour toute arme que la traditionnelle émi-
grette, que chaque soldat lance consciencieusement pour la rattraper
ensuite avec adresse dans la main. C'est probablement aussi le même
personnage que l'on a voulu caricaturer, tenant une émigrette dans
chaque main et marchant derrière un noble et un général qui s'avance
gravement tandis (pi'un }»etit tambour bat la caisse au moyen de son
émigrette : cette satire contre les émigrants se chantait sur l'air de
Malborough.
— 133 —
SIXIEME PARTIE
LE JEU DE TON NEAU
I. — néfinilion o< orii>'iiie probable du jeu de tonneau.
Le jeu (le tonneau est un jeu de ptilet consistant à envoyer des disques
de dimension réduite dans certaines ouvertures ménagées dans un petit
meuble.
Certains auteurs ont vonlu voir l'origine du jeu de tonneau dans le
LES JOUEURS DE TONNEAU
DAPniiS UNE CAIilCA'IUUE DE LA llKSTAnUTION.
jeu du casse-pot dont parle Scarron ; dans ce jeu, il fallait envoyer des
palets ou des pièces de monnaie dans un vase plus ou moins éhréché et
tpie l'on achevait ainsi de briser.
Sans chercher une origine aussi compliquée, il semble que ce jeu a
été de tous les temps et de toutes les époques. Quoi de pins simple,
en effet, que de s'exercer à jeter des pierres dans l'ouverture de quekjue
tonneau préalablement vidé ?
II.
Le jeu de « 2,Tecque » au di.v-liuitiî'nie siècle.
Au dix-huitième siècle, ce jeu était désigné sous le nom de << jeu
de grecque » ; déjà, à cette époque, cet amusement faisait partie du mo-
bilier de toutes les petites guinguettes avoisinant Paris.
C'est, dit railleur de Y Encyclopédie, une espèce de lonnenii qui a plusieurs fonds à divers
étases, tous percés dans le milieu d'un li-ou rond. On jette dessus des palets ou des écus de
six francs. Quand ils passent dans le premier plancher on compte un certain nombre de points ;
dans le second, dans le troisième et par terre de même.
— 130 —
III. — Toiiiicaii.v en foriiK- cU' Ifépîod, niniii^re «le pratiquer ce jeu
au <li.\-neuvi<>ine siOcle.
Au commencement du dix-neuvième siècle, nous voyons que le jeu du
tonneau était formé d'une sorte de trépied muni simplement d'une
ouverture on son milieu et de deux autres plateaux servant à différen-
cier riiabileté des joueurs.
Dans le manuel de la Gymnaslirjue de la jeimesse, publié eu 1803 par
M. Amar Durivier, nous trouvons une description qui donne le moyen
d'installer un jeu de tonneau à peu de frais :
LE JEU DU TONNEAU
d'aPUÉS U.NE LITHOllIlAPlIIK DU GOMMENCEMENT DU XIX" SIÈCLE.'
On dispose pour ce jeu un tonneau qui, indépendamment de ses deux fonds ordinaiics, en
a deux intermédiaires percés dans leur centre, comme les deux autres, d'un trou de la
circonférence, à peu près, du pelit palet. Des trous se correspondent perpendiculairement et
le nombre de points se compte sur le nombre de trous enfilés par le palet du joueur; le
coup est gagné par celui dont le palet enfderait successivement les quatre trous correspon-
dants, sans s'arrèler sur aucun des planchers intermédiaires.
Un peu plus tard, le jeu du tonneau se complique ; il se compose
d'un couvercle rectangulaire percé de six ouvertures rondes, dont quelques-
unes sont défendues par des arceaux insidieusement placés.
L. Boilly a fait une charmante composition représentant des joueurs
de tonneau à la porte d'iui marchand de vin ; un fort aux farines,
d38 —
reconnaissablo à son chapeau à large bord, s'apprête à lancer un palet
qu'il tient entre ses doigts ; toute l'assistance, les yeux fixés sur le bras
du joueur, attend le résultat de ce coup important qui doit probable-
ment décider du gain ou de la perte de quelques bouteilles de bon vin.
Le tonneau, dont
une partie seule-
ment est visible,
est divisé en deux
étages contenant
chacun quatre
cases; dans ce
meuble, le tourni-
quet,quel'onvoit
au premier plan
dans tous les jeux
modernes, est
rcmiplacé par une
petite ouverture
longue et étroite
assez analogue à
celles que l'on place au sonnuet des troncs fixés au mur des églises.
De nos jours, on a compliqué le jeu de tonneau en multipliant les
ouvertures placées sur le plateau ; le milieu du jeu est occuj)é par un
motif en bronze qui représente ordinairement une grenouille dont la
forme a varié bien des fois.
Les fabricants de jeu de tonneau se sont plu, à une certaine époque,
à transformer la classique grenouille en une caricature représentant les
traits des hommes politiques qui n'avaient pas le don d'être aimés du
public. Nous en sommes revenus, maintenant, aux ordinaires batraciens,
et il est peut-être à regretter que nous ne suivions pas l'exemple de nos
prédécesseurs, qui avaient trouvé cette ingéiyeuse méthode de faire de
la caricature dans le sens vraiment gaulois de ce terme.
LE JEU DU TONNEAU
d'aphks la Gymnasliijuc de la jeunesse, an xi, 1803.
— i:i!) —
SEPTIEME PARTIE
LE JEU DU BOUCHON ET LE JEU DU PALET
I. — IjC jeu du palet dans rnniiquité.
Tel qiK' nous le jouons, le jeu du bouchon ne paraît pas avoir été
pratiqué dans l'antiquité ; toutefois, les anciens avaient un jeu de palet
dont PoUux fait mention (livre IX, paye 117) « Ce jeu consistait à placer,
soit sur une table, soit à terre, une co([uille ou une pièce de monnaie
et à la faire tourner au moyen d'une autre coquille ou d'une autre mon-
LE JEU DES PALETS PERCES
Ii'aI'KÈS une GBAVIBE ITALIENNE DU XVIl" SIÈCXE.
naie qu'on lançait. » Ainsi qu'on peut le voir par cette citation, il s'agis-
sait d'atteindre un but déterminé au moyen d'un petit projectile lancé
de manière à ce que la tranche vienne frapper le bord de la pièce
de monnaie placée à terre ; ce jeu du palet est évidemment un des ascen-
dants directs du jeu du bouchon, auquel nous nous sommes contentés
d'apporter seulement quelques additions et quelques changements.
Le jeu du palet avait dû lui-même avoir comme origine le jet de
pierres, puisque cet exercice consiste simplement à lancer un projectile
contre un but ({u'il s'agit d'atteindre.
— uo —
Aiitipntère a dépeint cet exercice d'adresse d'une manière frap]mnte,
en se faisant l'interprète des sentiments d'un arbre choisi comme but
pom" ce jeu :
Noyer planté sur le bord du cliemln, les cnfanls qui passenl s'amuseiU à me clioisli- comme
but des pierres qu'ils lancent. Toutes mes branches, celles surtout qui portaient le plus de
noix, ont été brisées sous celte grêle de projectiles. A quoi sert anx arbres de porter des fruits ?
Dans l'antiquité, on se servait de palets affectant la l'orme d'un
disque légèrement renflé en son milieu. Le palet était en bronze et d'un
poids assez considérable. On a fait, à une épi)([ue postérieure, des palets
d'un genre différent; ils sont généralement en fer, évidés à l'intéi'ieiir,
et présentent une face concave, tandis que l'autre est convexe. Le
joueur devait tenir cette dernière partie eu dessus, et l'adresse consis-
tait à atteindre un but composé d'une barre de fer eufoncée dans le
sol et ne le dépassant que fort peu. Le point était compté suivant que
le palet était exactement enfilé dans la barre de fer ou cpi'il la toucbait
par la tranche ou bien encore qu'il la recouvrait complèfement. (l'est
à cette espèce de palet qu'il faut rapporter la gravui-e ilalieune que
nous reproduisons ici, et qui représente deux jeunes enfants tenant à la
main toute une série de palets enfilés dans une corde à la manière des
grains d'un chapelet.
LA Patte avx Jettons
LES DIFFÉRENTES MANIÈRES DE JOUER AU PALEf
Ii'aPIIKS les compositions l)B CLAUDINE BOUZONNET STELLA, XVire SIÈCLE.
— 142
Origine du jeu du bouclioiit
Un peu plus tard, ce jeu fut prati([ué avec l'aide de doux briques, dont
l'une servait de but et l'auti^e de limite aux joueurs ; souvent, la brique
formant le but était remplacée par im bourbon de liège, une quille ou
LE JEU DU BOUCHON
d'aPUKS une LITHOGHAPIIIE de JLLKS IIAVID, XIX' SJKCI.E.
quel(|ue autre objet facile à renverser. Ou voit là l'origine bien distincte
du jeu du bouchon, et les seules modifications sensibles qui y aient été
apportées consistaient à placer sur le boucbon une pile de pièces de
monnaie formant l'enjeu ; ou sait que, pour avoir gagné le prix, il faut
(pie l'enjeu tombe plus près du palet du joueur que du bouchon qui sert
de support, et uu joueur habile doit savoir, à l'aide d'un second palet,
l'envover au loin.
111. — Jeu de l)ouibielie ou jeu de a,siloehe.
Le jeu du bouchon a porté différents noms : on l'a appelé « bom-
biche » (»u « galoche ». Le mot « bombiche » sert probablement à dési-
gner un but (pii l)ombe et le mot « galoche » signifie plus spécialement
le talon d(^ bois d'un soulier ou d'un saltot, ce qui donnerait à supposer
(pi'on a, dcuis certains cas, remplacé le bouchon par c(> fragment de
14'( —
chaussure, dout la forme plato et semi-cyliiuli'i({uc devait (Mre particuliè-
rement propre à porter les enjeux qu'on installe d'habitude sur le bouchon.
Le jeu de la « riquelette » est, en tous points, semblabl(> au jeu du
U/y ^J^uy/^/é^
bouchon, mais il se joue avec de larges pierres plates à la place de pièces
de monnaie.
IV.
Représentation <lii jjtni du bouchon.
Un tableau de ïéniers représente des joueurs de bouchon se livrant
à cet exercice sur une sorte de table, mais, le plus souvent, les jeunes
apprentis se contentent de quelque rue plus ou moins déserte pour
se livrer à ce plaisir favori, et une lithographie de Jules David montre
mi patron venant interrompre d'um> mauière malencontreuse la partie de
son a[»prenti, (pi'il ramène à l'atelier eu le tirant par l'oreille.
CHAPITRE IV
JEUX DE BALLE
Le jeu de la balle. — i. Dùlinilion du jeu de la balle. — a. La balle cbez les Grecs
et chez les lîoniains. — li. Les jeux de balle au Moyen .\ge. — !\. ^Lanière de fabriquer
les balles. Leur composilion. — 5. Dill'éreules manières de jouer à la balle. — (i. La
balle empoisonnée.
Le jeu du ballon. — i. Délinition. Son emploi chez les Romains. — a. Le jeu de
la Soûle au quatorzième siècle. — 3. Le jeu du ballon pratiqué par les rois de
France. — \. Manchons et brassards servant à lancer le ballon. — 5. Manière de
fabriquer les ballons. — (i. Description du jeu du ballon.
Le jeu de paume. — i. Origine de ce nom. — 2. Le jeu de paume chez les Grecs cl chez
les Romains. — .3. Le jeu de paume à la cour des rois de France. — l\. Diverses inter-
dictions du jeu de paume. — 5. La paume au quinzième siècle. — C». La paume au
seizième siècle. — 7. L'équipe du jeu de paume royal sous Louis XIV. — !S. La paume
considérée eomnie jeu d'ar'^ent. — \). Le jeu de paume devenu au dix-septième siècle
un spectacle public. — 10. L'safjes et coutumes dans lesjeu\ de paume à la (in du dix-
huitième siècle. — 11. Diverses espèces de jeu de paume. — 12. Les tripots ou jeux
de paume à Paris. — i3. Le serment du jeu de paume. — iV Le jeu de paume et le
lawn-tcnnis. — l5. La corporation des paulmiers-raquettiers. — l(>. Description du
métier de paulmier au dix-huilicmc siècle. — 17. Les balles du jeu de paume. —
18. Raquettes et battoirs. — ly. Arrêts et rèi;lenients concernant le jeu de paume.
— 20. Gravures représentant le jeu de paume. — 21. Poésies sur le jeu de paume.
Le jeu du mail, de la crosse et du croquet. — 1. Définition. Le jeu du mad
dans l'antiquité, d'après le poète latin Quintus Lnnius. — 2. Les divers jeux de mad
établis dans Paris. — 3. Des quatre manières déjouer au mail. — /[. Origine byzantine
du jeu de polo. — 5. Le jeu de la crosse au treizième siècle. — (i. Le jeu de la truie
et des quatre aveugles. — ' 7. Le paille-maille, ancêtre du jeu de croquet. — 8. Le jeu
de la crosse, d'après Stella. — 9 Le jeu royal delà passe.
Le jeu du volant. — 1. Le jeu de volant de la reine Christine de Suède.— 2. Le volant
de Frédéric de Prusse. — 3.' Diiïérents noms du volant résultant de son_ mode de fabri-
cation. — 'i. Définilion-du jeudu volant. — 5. Le volant au cornet. — (J. .Vvantages du
jeu du volant pour la jeunesse. — 7. Gravures représentant le jeu du volant. — 8. Poésie
sur le jeu du volant. — y. Le jeu des grâces.
PREMIÈRE PARTIE
LE JEU DE LA BALLE
L — Définition du jeu de la balle.
N peut défiiiif le jeu de la balle un exercice qui con-
siste à se renvoyer une petite sphère de l'un à
l'autre, ou bien eucore à la lancer contre un mur
pour la repousser ensuite à la volée ou au premier
])ond ; les joueurs peuvent convenir d'une ligne
an-dessus de laquelle doit revenir la balle pour
(|it'elle soit jugée bonne.
— I'i6
II. — l.a ballo elle/. les Cirées el elie/, les Itoinaiiis.
Le jeu de la balle seniblo avoir été eu usage chez les aucieus Grecs,
car Homère y fait allusion dans deux passages de VOchjsséc^ et il déclare
que les joueurs doivent être plutôt considérés comme des jougleurs qui
se donnent en spectacle. Homère a immortalisé les noms de Laodamas
et de Halius, qui dansèrent devant Ulysse en même temps (ju'ils jouaient
do la balle avec une adresse merveilleuse :
I.A FaSSETTK
l).\l'Bi;S UNE COMPOSITION llli CLAUDINE DUUZO.N.NEf STliLLA, XVli' SIECLE.
Ces (liHix priiiCL's, pour monlrer Iimp adresse, preiiaeiil un ballon rouge que Pulybe leur
avait fait. F^'uiul'eax, se pliaiUelse renversaiil en arrière, le pousse jusqu'aux nues, el l'autre,
s'élanranl eu l'air avec une admirable agilité, le reçoit et le repousse avant qu'il tombe cà leurs
pieds.
Un des modes du jeu le plus en honneiu- est la balle céleste ; PoUux
(IX, 104), citant les vers d'Homère, la décrit ainsi :
Un des joueurs, se renversant en arrière, lance sa balle vers le ciel, les autres bondissent
el leur ambition est de la saisir avant qu'elle louclie la terre.
Parmi les jeux de balle usités chez les anciens, il en est sans doute
un ,!jrand nombre «pii nous sont inconiuis. Ceux qui nous ont été trans-
- l-'iR
LE JEU DE LA BALLE ET DU BALLON
d'ai'RÈs la Gt/mnasiir/iie de la Jriinesse, an xi, 180.'!.
rais, tout au moins dans leur physionomie j^énéraie, sont : la balle
commune, la phaeninde, la balle au boud, la balle céleste et la balle au mur.
e
LA iiALLE E.MPOISON.NEE
Le jeu de la phseninde était considéré par les anciens comme un
exercice très fatigant, et le poète Antiphane déclare que « ce jeu de
balle est très pénible et fatigue la colonne vertébrale » .
En outre, les Romains connaissaient le jeu de la balle circulaire qui
consistait à placer les joueurs en cercle, et ceux-ci s'envoyaient la balle
— W.)
de l'iui à l'autro ; It» jeu de la Italie Irii^onale (|ni consistait à ()lacep les
joueurs en triangle : |)oiu' se livrer à C(\t exerci(;e, on employait une
petite balle appelée trij^on, qui était ti'ès dure, et il fallait la saisir à la
volée ou au moins au premier
bond et la renvoyer ensuite à
ses pai'tenaires.
Pollux nous apprend que,
dans certaines parties, le vain-
cu était appelé une et faisait
tout ce qui lui était commandé
parle vainqueur, appelé le roi.
M. Becq de Fouquières, se
demandant pourquoi le nom
d'àne était donné au vaincu,
croit que c'était parce que
l'un des jou(nu's servait de mon-
ture à l'autre, connue dans
notre balle cavalière. Rien
dans les auteurs grecs n'auto-
rise à affirmer cette hypothèse,
mais, parmi les peintures égyp-
tiennes de Beui-Hassan, il en
est une qui donne raison à sa
supposition : Deux fenunes,
placées à quelque distance
l'une de l'autre, sont montées sur deux de leurs compagnes et jouent à la
balle.
Quoique les anciens n'aient pas connu le caoutchouc, il faut croire
cependant qu'ils étaient parvenus à donner à leurs balles une grande
élasticité, puisque, dans le jeu de la balle au bond, Pollux nous apprend
qu'il <( fallait frapper vigoureusement la balle sur le sol de manière à la
faire rebondir, puis recevoir le bond de la balle et la renvoyer de non-
veau avec la main » .
Le jeu de la balle commune était encore connu sous le nom de « balle
sur la marque » ou « balle des éphèbes » ; on y jouait en divisant eu deux
camps les concurrents, et l'adresse consistait à envoyer la balle dans le
camp de ses adversaires en passant par-dessus leur tête ; ceux-ci cher-
chaient à s'y opposer et faisaient leurs efforts pour atteindre la balle
au vol.
Les Piomains [se [servaient, |)(Hn' leurs jeux, de balles diversement
^^a^
- loO —
coloriées et faites de tissus variés ; le plus souvent, la l)alle était remplie
de son et on en a trouvé de nombreux exemples dans les tombeaux
d'enfants découverts dej)uis quelques années.
m.
Les jeux de balle au ^lojeii Asfe.
Au douzième siècle, la balle était un des passe-temps favoris des
ecclésiastiques, et un auteur qui vivait à cette époque, Jean d(» Letb,
raconte même que les évêques et les arcbevèques ne dédaignaient pas de
participer aux jeux de la balle, ainsi qu'aux danses auxquelles se livraient
Curjitaf'^anu/^feiiceci, tuuenta Jahjat Sanjuinis ift ea ^is ntmpe in luucnihhuc anntc
3ohfam ptrcutiens at^ rejpr-ccuhen' Çratiof at^ ijthac fit >aHone abus
LE JEU DU BALLON
d'après use KNXYCLOPÉDIE du XVl" SIÈCLE.
les clercs ; la mode était même que chaque nouveau chanoine devait, à
certaines grandes fêtes. Pâques ou la Noël, offrir une grosse balle à la
compagnie ; les chanoines commençaient alors une danse ou ronde,
accompagnée de chants, et se renvoyaient la ball(> tout en dansant.
Dans VHisloire de Paris, Ai- Lobineau (t. III, p. 419), nous voyons
qu'au seizième siècle les balles à jouer étaient de deux sortes : les unes,
qui étaient extrêmement dures, s'appelaient scophi ou scnphœ ; il était
défendu aux écoliers de se servir de ces balles, qui étaient un<> cause de
— loi —
disputes et (racciileiils ; on ne leur permettait (jue (reiiiployer la balle
molle désignée sous le nom de jiilw.
La vente des balles était, depuis le «piatorzième siècle, réservée uux
merciers et ceux-ci ont très longtemps conservé ce privilège.
Au seizième siècle, le jeu de la balle était un des exercices les plus
LA HALLE AU TAMIS ET LE JEU DU TOTON
DAPnÈS UN ALPHABET ILLUSTllÉ DU COMMENCEMENT DU XIX" SIÈCLE.
rechercbés par les adolescents et, dans le recueil de 1587, nous trouvons
deux planches indicpiant les diverses manières de se livrer à cet exer-
cice. Dans l'une, il send)le que les concurrents manpient leur adresse eu
envoyant la balle à la plus grande hauteur ([u'il soit possible d'atteindre;,
c'est, du moins, ce que laisse sup|)oser la légende qui accompagne cette
image :
Cus compagnons onl faicl partie égalle
Pré.seiilement pour jouer à la balle,
Qu'ils font sauter d'un merveilleux effort.
Un autre jeu de balle est désigné sous le nom de la « Boutte hors » ;
les joueurs lancent une balle sur un petit toit incliné et, au moment où elle
ressaute, ils doivent être assez habiles pour la rattraper d'un coup de
battoir et la renvoyer à nouveau. Deux joueurs seulement participent à
cet exercice, qui est ainsi décrit dans la légende :
Sans espargner l'atlresse de leurs corps,
Ceux-ci gaillards jouent à la boutte hors
Dessus ce toict
— 152 —
IV. — ■^laiiicro de fabriquer les balles. Leur eoiiiposilioii.
Au c'omnu'uceinent <lu dix-iieuvièmo siècle, il existait des balles de
toutes sortes de qualités et uous reproduisons une description que nous
avons relevée dans une publication intitulée Les Jeux des jeunes (/arçons :
Les balles tlonl les unTanls font usage sont de diverses matières et faites avec plus ou
moins de soin ; les plus mauvaises sont celles de c/iiffe, c'est-à-diie composées de bandes de
chiffons mises les unes sur les autres ; on en fait de meilleures avec des bandes de vieux
drap ou de lisières coupées fort étroites; les meilleures et les plus usilées consistent en fils
de laine roulés avec soin sur un bouchon de liège taillé en boule ; dans tous les cas, on
recouvre les balles de peau fine ; celle de vieux ganls est excellente pour cet usage. Ces balles
LE JEU DE LA BALLE ET LE JEU DU BALLON
d'amies t'N TABLEAU Dlî l/ÉCOLE FLAMANDE, XVH« SIÈCLE.
rebuudisscnt fort bien et ne font point de mal à la main des joueurs. Si la laine tournée autour
du liège est mouillée, soit dans l'eau, soit dans le vinaigre, en se séchant, la balle alors
devient fort dure, a d'excellents rebonds et s'appelle balle à l'eau. On appelle balle à répélilion
celle où l'on a introduit dans le liège arrondi, qui fait le fond ordinaire des balles, un court
tuyau de plumes, dans lequel on mel quelques grains de sable el dont on ferme les exlrémités
avec du parchemin. La balle ainsi fabriquée produit un léger son. On ne se sert guèi'e des
balles de chiffe que pour le jeu de la balle empoisonnée.
Les balles de gomme élastique ont un inconvénient dans leur élasticité même : elles
font des bonds réitérés, sont faciles à se perdre, et occasionnent d'ailleurs beaucoup de mal
de main, à raison de leui' dureté.
— 153
V. — Dîirt'rentes iiiniiiOros «lt« juikm- à la balle.
Nous citerons sinipleiuciit pour iiK-moii'i! les (litlereiits modes de
de balle, et il suffira d'une simple ('nu-
mération renvoyant aux manuels spé-
ciaux pour les règles de chaque jeu.
On distingne la halle mi caiiip, ou bulle
eoijjoiso/uic'c ; la ùalle cavalicre ; la ùalle ou
cliasseur, à laquelle tout le monde a plus
ou moins joué pendant les années de
collège ; la balle en posture ; la balle à la
riposte et enfin In balle au pot, qui consis-
tait à lancer la balle au milieu d'un carré
tracé sur le sol et dans lequel on a creusé
neuf petits trous. Le roideur, c'est-à-dire
celui ipii a été désigné pour servir la
balle, lance cette balle en faisant en sorte
qu'elle aille tomber dans un des trous.
Le propriétaire d(! ce trou la ramasse
aussitôt pendant que tous ses camarades
prennent la fuite, et il cherche à en frap-
per un de ceu.K-ci; s'il réussit, celui qui
se trouve avoir été atteint est marqué.
Quand un des joueurs a trois marques
jeu
L\ DISTnmUTION DES JEUX
5 U.\ FIIONTISl'TCE ni! DEHQUIN, XYIlll^ S
il est déclaré hors le jeu.
VI. — La balle empoisonnée.
On a donné dans des vers d'une poésie plutôt discutable les règles
du jeu de la balle empoisonnée. Nous les reproduisons ci-dessous :
Dix ou douze marmots, formés en deux partis,
Vont à la balle empoisonnée
Voir finir gaîmenl la journée.
Sur les quatre coins, marqués par les liabils
De tous nos jeunes étourdis
Il en est un que l'on désigne ;
C'est lecamp: l'occuperesl unbonheurinsigne.
La balle à mainte autre pareille
Qui fait que chaque partenaire
Te maudit de belle manière
Et quitte en enrageant,
Le camp,
Celle balle est, mon cher enfant
L'image de la calomnie.
- loi
DEUXIEME PARTIE
LE JEU DU BALLON
I. — Di'Hiiilioii. — Son oinpioi eliez les Itoiiiniiis.
Le ballon est iino sphère creuse d'assez grandes dimensions, formée
d'une vessie de porc ou de bœuf recouverte d'une enveloppe de cuir
destinée à la protéger.
Les Grecs ne semblent pas avoir connu ce que nous appelons un
ballon ; ils en apprii-ent l'usage des Romains, ainsi
que cela jjaraît ressortir d'un passage intercalé
dans les nouvelles éditions d'Athénée : <( Ce qu'on
apnelle petit ballon a été inventé pour Pompée
le Grand, par un artiste de gymnase, nommé
Atticus, de Naples. »
Le ballon était en cuir et gonflé d'air. Pour
le lancer, on le frapi)ait avec l'avant-bi-as qui,
à cet effet, était recouv^ert d'uu brassard. Ce
ballon était jjIus gros que la tète.
Il y avait aussi une autre sorte de ballon ([ui, plus petit, était appelé
ballon de poing, parce qu'on le poussait avec le poing au lieu de se
servir du brassard.
LE JEU DU BALLON
DAN^S L'ANTIQUITÉ
i,\\vm:s MEliCVltlAUS
II. — Le jîeii «le la « soûle » nu quatoiv.ii^ine sit^ele.
Au Moyen Age, le jeu du ballon était connu et pratiqué sous le nom
de « soûle » ou » choule » ; il consistait à se disputer un ballon lancé
soit avec le pied, soit avec l'aide d'un brassard ; on se servait aussi
quelquefois d'une crosse, ce qui a fait assimiler ce jeu, par plusieurs
auteurs, au jeu du mail ou de la longue paume : dans l'ordonnance de
Charles V, de 1639, il est interdit à l'égal des jeux de hasard ou d'adresse.
Ce jeu de la soûle ressendjie en tous points au moderne « foot-ball » ,
si en honneur dans les Universités anglaises.
Une gravure tirée du Scoto itincrurio de flul/a montre la manièi'e dont
ce jeu était prati([iu'' à cette époque ; ou y retrouve tous les élénaents de
l'ancien jeu de la soûle, dans lequel ni les coups de tète ni les horions
d'aucune sorte n'étaient épargnés.
!^»>>»^^^»^>'B'>^jSK^»44»4^'^
LIIOMJIE AUX BALLONS
CABICATlIUi POLITIQUE PUIlLIliE SOUS LA RESTAUllATIOS
PAU LEToriiMr, A iji\li';a.\s
— 156 —
Dans lujc lecture faite en 1889 à l'Académie des inscriptions et belles-
lettres, par M. Siméon Luce, nous trouvons un aperçu curieux sur ce
jeu :
(( La soûle, du latin solca, sandale, la « choule », si l'on adopte la
prononciation normande et picarde, est un jeu (pii consiste à se dis-
UN'E PARTIE DE BALLON EN ITALIE AU XV1« SIÈCLE
puter un ballon ou une énorme balle, soit en la poussant du pied, soit
en la lançant à l'aide d'une crosse. Ce genre de lutte constituait, au
Moyen Age, le plus populaire des jeux de force ou d'exercice, comme
les dés étaient le plus usuel des jeux de hasard. La soûle avait, de
vieille date, de trop profondes racines dans presque toutes les parties
du royaume, particulièrement dans les campagnes, pour que l'oixlon-
uauce de Charles V put la détruire. »
Au quatorzième siècle, ce jeu, qui se ressenlail de la rudesse des mœurs, n'allait pas sans
plaies ou bosses, et ceux qui s'y livraient devaient s'estimer heureux s'ils n'avaient ni un œil
crevé, ni un bras rompu, ni uue jambe cassée. C'est qu'en réalité, dans beaucoup d'endroits,
la Soûle perpétuait, sous la forme d'un amusement violent, ici des haines de races et des
luttes locales séculaires, là des rivalités inspirées par la diiïérence d'âge et de situation sociale.
On sera frappé de cette particularité que le jeu de Soûle n'était nulle part plus en honneur
qu'à la limite des petits pays de l'ancienne Gaule, tels que le Vermandois, le Bray, le Ve.xin, le
Meldois ou pays de Meaux, la Brie, le Gàlinais, le Beauvaisis, l'Amiénois, r.\rtois, etc..
Gomment l'ordonnance de IGIW aurait-elle pu faire disparaître un genre de lutte qui s'était
— lo8 —
transmis de génération imi génération à travers des siècles ? Anssi cette ordonnance
fut-elle plus impuissante encore, s'il est possible, contre la Soûle que contre les autres jeux.
Dès 1374, on snnlnii à Cliauny, et la lettre de grâce où il est fait mention de ce jeu contient le
préambule suivant : « Comme, en icelni pays de Vermandois, spécialement environ les dites
villes de Ghauny et de Caillouel, il soit accoutumé, de si long temps, qu'il n'est mémoire du
contraire, faire certaines soûles de jeunes hommes et enfants, c'est à savoir des villes contre
autres, esquelles soûles les uns rencontrent aux autres des poings es visages ou es corps et si
fort et si durement comme ils peuvent. » Nous apprenons par un acte daté de 1380 que l'on
LE JEU DU BALLUA
Ii'aI'UKS une LlTHOOliAl'IlIE DU XIX'^ SIÈi.LK.
n'avait pas cessé de se livi'er à ce même exercice à Neufcbàtel-en-Bray : c, La Soûle, en la
manière accoutumée, se fit en dehors d'icelle ville de Nenfchàlel, et certains joueurs, en
soûlant, férirenl par le visage à effusion de sang un prêtre, présent le dit Perceval, qui leur dit :
Soûlez paisiblement ou vous eu allez hors de la Soûle. »
La partie se jouait souvent entre le camp des hommes mariés et le camp des jeunes gens :
« En Bourbonnais, dans le bailliage de Cusset, le jour fixé pour cette lutte des maris contre les
célibataires de chaque localité était le plus souvent la fête de Noël, et dans certains villages de
ce bailliage on n'appelait pas ce jeu la Soûle, mais la « boule de Glialandas ». Des prix étaient
décernes aux vainqueurs. »
(les parties de soûle ont coiitimté jusqu'à la fin du dix-lniitiènie
siècle à être jouées aux cnvii'ons de la Noël ; on trouve, en elîet, un
arrêt du Parlement, en date de 1781, dans lequel il est fait défense « à
toutes personnes de jeter aucunes boules de cuir le jour de Noël, ni
aucun autre jour ; de s'attrouj)er pour courir la boule sous quelque pré-
texte que ce soit, à peine de cinquante livres d'amende ». (Isambert,
Ih'Ciieil (jt'uu'val des uncimiies Itiix fraiiçidscs., t. XXVII, p. 3.)
— lo9
III. — l,4> joii (lii bnINtii |>rali(|ii«' pni' les rois (l(> l'i'iiiioc.
Au quatorzièiiK^ siècle, nous voyons ([iio rjiarles VI, voulant avoir un
ballon, on fut lui imi aclicfor un qui était fait d'une vossio do bœuf
LE JEU DU BALLON'
d'après l'NE ciiavuhe allemande du xvC! siècle.
(1383, Douet d'Arci, Compte de fhôlel des rois de France, p. H 5 et 208).
Louis XIII, enfant, reçut plusieurs fois en cadeau des ballons ; une
première fois en 1004 et une second(^ fois en 1606. Le journal d'Héroard
mentionne cet événement mémorable en ces termes : « Il joue du bal-
lou de poing, que M. de Bassompierre lui avait donné. »
IV. — Mnnclioiis ot brassards servant à laiieor le ballon.
L'usage de lancer le ballon avec un lu'assard se retrouve en France
à une époque assez ancienne ; les graveurs du douzième siècle qui repré-
sentent ce jeu semblent indiquer deux espèces de brassards : l'un, qui est
composé d'un treillis de lanières de cuir, et l'autre, comme nous le voyons
dans la |.:,ravure de Stella, ([ui est formé d'une sorte de manchon d'osier
tracé de manière à former des parties saillantes et des parties creuses
analogues à ce que nous appelons en term(>s de tapisserie le « capiton-
— IBO —
nage » ; cette disposition empêchait le ballon de glisser le long du bras
et permettait ainsi de le renvoyer avec une plus grande force.
A la fin du dix-huitième siècle, Jaubert, dans son Dictionnaire, nous
apprend que de son temps les manchons en osier n'étaient plus en
usage ; on se servait alors d'un brassard formé d'une douille de chêne
iji Balon
DAI'llÈS UNE COMI'OSITION l>E CLAUDIMi lidUZONiNKT STKLLA, XVII" SIKCLE.
assez mince et de la longueur de l'avant-bras qu'on y faisait entrer de
force avec des mouchoirs ou des serviettes. On pouvait, avec le bras
ainsi armé, recevoir le ballon et le pousser aussi fort que l'on voulait
sans crainte de se blesser.
Le jeu du ballon est toujours pratiqué avec ferveur dans certaines
parties de la France ; il passe, dans les villages des Pyrénées, pour une
institution natioiuile ; on le joue dans un emplacement particulier consis-
tant en un vaste terrain clos de murs et à ciel ouvert. Pour lancer et
repousser le ballon, les joueurs arment la main et le poignet d'un gros
gantelet de cuir ou de bois. Quelquefois, ils se rangent en cercle et
chassent le ballon au hasard, de manière que chacun le reçoive et le
renvoie à son tour. Le plus souvent, ils se divisent en deux camps
opposés et jouent une partie suivie et régulière en observant des règles
qui sont à peu i)rès les mêmes que celles de la longue paume.
— Ifil —
V. — SlaiiiO'i'o do fabi'iqiioi' los ballons.
Les ballons n'ont iHô, à l'oi'iyino, qn une simple v(>ssio dont l'onlice
était formé par nno cordelotle :
1337. — Prendras premièrement une siringuc, telle qu'on use pour cnller les grosses
bnllcs à jouer. {Sccre/ iFAIcris, f" partie, livre 1", p. 6, vers >
LE GONKLE.MENT DU 15ALL0N
d'aIMîÈS DNE OIIAVUHE nE MÉIIIAN, DU DÉDUl DU XVII» SIÈCLE.
Une ciiriciiso gravure de M. Mérian représente deux joueurs se
livrant à rexcrLàce du gonflement du ballon ; on aperçoit très nettement
le bourrelet de cuir recouvrant l'orifice de la vessie qui, l'opération ter-
minée, devait être assujetti au moyen d'une fine cordelette de chanvre
potu' prévenir les accidents. Un peu plus tard, on recouvrit ces vessies
d'une peau cousue destinée à les protéger contre les chocs. Dans les de-
vises héroïques deParadin, 1557, on voit figurer une de ces grosses balles
avec cette légende : « Battu, je rebondis. » La mode de fabrication du
ballon a dû varier d'une manière sensible ; dans le jeu représenté par
Stella, nous voyons que le ballon était formé de matières molles con-
tenues dans une enveloppe plus résistante, le tout maintenu par des cor-
21
— 162 —
delottes qui lui donnaient plus do rij^idité et l'empêchaient de se défor-
mer. Une autre i^ravure à peu près de la même époipie montre un bal-
lon complètement lisse et orné d'unt; sorte d'étoile.
DALLON FORME DUNE VESSIE
h'atoès un TADLEAii i)i; riiNiEiis, xvii" sikci.i;.
En 1822, d'après M. Lefranc, on fait des ballons avec une vessie de
porc qu'où choisit parmi celles qui sont le plus arrondies et qu'on pré-
pare à l'extérieur avec de l'huile pour qu'elle ne se dessèche pas ; on
enferme cette vessie aplatie dans un ballon de peau destiné à la recevoir;
on y souffle avec un tuyau de plume, et, quand le tout est suffisamment
— Ki'i —
f;uuflé, on hourlic S()ii;iU'US('iuent le col de la vessie avec une licelle ;
l'euveloppe de peau est i;ai'nie d'une espèce de soupape qui referme exac-
tement l'ouverture.
M. Lefranc cite encore un ])assage de Feutry, (]ui, dans son poème,
s'exprime ainsi sur ce jeu :
LE JliU DU 15ALL0N' ALIX CHAMPS-ELYSEES
rilOJET llE M. llKLA.NUy
Regardez cet enfanl, il quille la prairie aux mugissemenls aigus d'un laurcau qu'on égorge
dans la ferme prochaine, qu' 'oparlienl à ses parenls ; lout son empressement, son ardeur ne
tendent qu'à demander la vessie, qu'il obtient et que, soudain, il remplit de vent ; Iransporlé
d'allégresse par sa grosseur, par sa légèreté et par sa résonance, il la fait bondir cent fois.
Mais que celte joie dure peu ! ce ballon, qu'il croyait devoir faire sa félicité, tombe bientôt sur
quelque pointe qui, dans Tinstanl, le perce; le vent s'échappe; celle grosseur faclice s'éva-
nouit et ne laisse qu'une peau llélrie cl di'goùlanle ; l'enfant pleure et revient Iristement
raconter son infortune à ses caninrades qui l'en consolent par des éclats de rire.
VI. — Description du jeu «lu halluiii
Le mètne auteur, dans un [tetit poème, décrit ainsi le
et en même temps donne aux joueurs novices le conseil de
d'une mauière inconsidérée :
Voyons, par exemple, à (|uoi bon
Courir au-devanl d'un ballon !
Tranquillement, à celle place.
J'attends le bond, et de ma main
Un coup le remet en chemin :
Pour l'arrclcr au vol, faut-il qu'on se harasse?
jeu tin
ne ]ias
jjallou
courir
— Itia —
Eli 1827, Marlel a fait ri^ahîmcut une cliariiiaiitc litlioy-rapliie i-opré-
seiilaiit lo jou du ballon : un aperçoit de peCils jeunes gens (jui, après
avoir ôté leur eas(|uette ou leur chapeau liant de foriue, se livrent avec
entrain à cet exercice salutaire.
Disons, en terminant, un mot d'un projet de M. Delanoy, ([ui avait
voulu installer aux Champs-Elysées une sorte d'arène pour le jeu du
ballon ; de ce projet, il ne subsiste (junne gravure assez médiocre, et
il est peu probable (\yii\ l'avenir cette idée soit reprise à nouveau.
TROISIEME PARTIE
LE JEU DE PAUME
I. — Origine de ee nom.
Le jeu de paume est un jeu d'exercice au(|uel peuvent prendre part
une ou plusieurs personnes qui chassent et qui renvoient une balle.
A l'origine, on se servait uniquement de la paume de la main et c'est
de cette circonstance que le jeu a tiré sou nom.
II. — Le jeu de paiiiue eliez les Grecs et elie/. les Komaiiis.
Cet exercice était connu dès les temps homériques, et l'auteur de
VOdijssée s'exprime ainsi au VP livre de son œuvre :
Le repas fini, la princesse Nausieaa el les nymphes qui l'accompagnaienl quillenl leurs
voiles el commencent à jouera la paume... Quand elle fui en élal de s'en relourner au palais de
son père, Minerve songea à faire qu'Ulysse se réveillât; Nausicaa, prenant donc la balle, voulut
la passer à une de ses femmes, mais elle la manqua et la balle alla lomber dans le lleuve. Les
nymphes jetlenl aussitôt un grand cri : Ulysse se réveille...
Sophocle lit une tragédie en prenant comme thème ce passage d'Homère,
et son œuvre, malheureusement [»erdue pour nous, hit, parait-il, très
goûtée de ses contemporains.
D'une manière générale, les Grecs appelaient sphéristiques tous les
exercices où l'on employait une Italie. Les lieux consacrés à ce divertis-
semeut se nommaient spheristeria ou jeu de paume.
Chez les Romains, il existait des jeux de paume dans presque tous
les établissements de bains publics ; Pline le Jeune uous apprend que ces
— 1b6 —
exercices étaient ;:,oùtés à un si luuit point par les riches citoyens, qu'ils
avaient dans leurs maisons de ville un local disposé j)our le jeu de la j)aunie.
(i Au-dessus de la chambre dans la([uelle on (piitte ses habits pour le
bain est un jeu de paume, où Ton peut prendre dilTérentes sortes d'exer-
cices et qui pour cela se partage en deux i-éduits. »
Les empereurs romains prati(piaient ce jeu et ils ne manquaient pas
L'ENTAI CE
d(> l'aire précéder une or!j,ie de tabl<> d'une partie de paume destinée à
les mettre en appétit. Le sévère Caton lui-même tenait ce jeu en grande
estime et on raconte qu'un jour où il avait échoué aux élections du
Consulat, au lien d'aller se renfermer piteusement dans sa uuiison, connne
faisaient d'ordinaire les candidats malheureux, il passa bravement le rest(>
du jour à lancer et à rejeter la balb." <lans le Chanq) de Mars.
Il existe plusieurs manières de jouer à la pamiK» et la Pliuniiule des
Grecs paraît être le type le plus ancienm'inent connu de tous les jeux de
paume, tels que les pratiquent les modernes. Dans la Plicciiinde, le camp
de celui (pii lance la balle à |)artir d'un emplacement déterminé s'etTorce
— 107 —
(lt> la l'aire iiioiii'if le plus loin possible, taudis (|ue le caiii|) de son adver-
saire, au eoulraire, eherclie à la reuvoyer do manière à la faire mourir !(>■
plus près [)()ssible de sou point de départ. Lorscpi'uue balle est laucèe,
si elle n'(\st pas renvoyée soit avant sa eliute, soit an pi-eniier bond, le
jeu s'arrête, l'exlrèuie liniile ([u'elle a atleint esl niîU'ipiée et les deux
VAUGEOIS,
Marchand rue des Arcis, près Sainl Merrj.
\ind Boiter à cutù-illu i/f mrni'j- J,' lu C/ii/ic , e/i /luc/i: de /Jurte.en jfuuiiv et ^ii h^ij-, ffoah'S en c.iJiill" crtj
jjctiiiers pour le OrelaitiJ et le Tiy ,fic/ii:s et JellonJ- de nacre Je /Jef/e et^/voi/e, Ti'ietraes eti/foire et J'el>éiie
et piectj' et-portattfs- ^1 g^nèrnicjuent f'e'tl ee ^jtti est relat^^aux fr,jtniux e^i u/nuj-e/ne/ilj- *(ej- Daines, /vi^ne<i
J'ecizilh a c/iiffnon et de toilette et^rulrej- . Jeuocele <ftull«j- deJ Indes de Caroyiiolles. ùiMri/nof, />ann'e/v, Ecltec,
Ba^ne/wdiers , Pa/i/iiet, Solitaire, Bille^r, Billurjs, Trou lAidaine, deux co/ej- sur di-s earto/ij- ef toutes SOftes
d^ Jeux /Jour lu lampa^ite en beau et en eom/nim, avec tuie lij te particulière et détaillée des di//éiviis deux
et leurs ■Px-plicjlions, /Ires et Flèches et autres .HarcÂandises de frame et etraiiijères , A PARIS.
t^/t ne t/oftiv personne tes -Dmia/iett^'s t-t J'etea^,
1
CAUTE DADIŒSSE DU MACASIiN .. AU SINGE VERlJ ..
ME.MioN.NK DANS LA Grand'. Encyclopédie de Diderot et d'alembeht, xviii« siècle.
camps changent de rôles en même temps que de position. C'est au camp
adverse à lancer la balle, toujours du morne point, et il s'elTorcc de la
faire tomber au delà de la première marque.
Les médecins de ranti(iuité ont considéré le jeu de la ])aume comme
un des meilleurs exercices et ils Font même qualifié de gynmastique
— 1GS —
médicinale, (ialicii lui a consacre'' nn article curieux dans ses écrits: «Les
inflexions du corps, dit-il, que demande cet exercice, les mouvements
alternatifs des extrémités, les iinjndsions répétées ipi'il faut n^cevoir on
conniniuiquer, mettent en action tous les nmscles, l'animent la chaleur
vitale et d(''l)arrassent le corps des humeurs superflues. »
III. — I.o jeu <l<» pitiiiiic à la cour «los rois do Frsuico.
Nous ne possédons aucun l'enseignement sur ce (piil advint du jeu
de paume en France jusqu'à la fin du treizième siècle.
Dans le recueil du théâtre français au Moyen Age, Miracle de Nostre
Diiiiie (j)aj;(> 537), nous trouvons une désignation du jeu de la paume
sous le nom de jeu de la Bonde.
1300. — Cuidi'z-vous que point me grcv.isl?
Car souvent la mer par mainte onde
Jouoil de moy comme à la bonde,
Elle me jelloit puis çà, puis là
Imitant en cela les enq>ereurs romains, les rois de France tinrent en
très grand honneur le jeu de la paume ; on sait, en elFet, qu'en 1316,
Louis X, dit le Ilutin, s'élant extrêmement échauffé à jouer à la paume
dans le bois de Vincennes, se retira dans une grotte où il fut saisi par
un froid (|ui lui donna la mort :
Si but trop et fi-oid se boula
Là il perdit plumes et pennes.
En 135G, on se servait encore de la paum;' de la main pour renvoyer
la l)alle : ce jeu était désigné sous le nom de hisu>< pil;e ckih pulnia.
Dans la Vie de Diif/i/esc/i/t, nous relevons encore cette anecdote sur le
jeu de paume :
jyilluslre connétable s'amusait un jour à regarder une partie de longue paume sur la place
de Dinnn assiégée par les Anglais, lorsqu'on vint l'avertir que son frère avait été fait pri-
sonnier conire les lois de la guerre; Duguesclin quille aussilûl 1<' jeu, monte à cheval et va
punir, comme il le mérilail, l'insolent ravisseur.
Charles V aimait beaucoup à jouer à la paume, et il possédait au
Louvre une salle qui occu})ait deux étages de hauteur. Toutefois, quand,
au mois de mai 13()9, il lit un édit contre les jeux, il m^ manqua pas
de proscrire la paume, (pioicjn'il eu eût été un des fervents amateurs.
Heureusement qu'à cette épo(pie les édits royaux, pas plus «jue les
arrêts du Parlement, n'avaient le pouvoir d'impi'essiminer violemment
les habilanls de Paris. Il en fut de cet édit comme de ceux qui l'avaient
- I6'J —
|)1V('('(U', cl les îiiiiiileiirs de coi exercice n'en continuèrent |i;is moins à
se livi'er à leur iinuisenient l'îivori.
Mu 1.')'.»'.), an nidiiicnl de la Inlie i\<' Charles \l, ini des |>asst!-lcni|»s
, Rue Saint Antoine , au coin de la rue de Jouy ,
'vis'à-vis l'Hôtel de la Trinité.
! T E D U C , Marchand Mercier : Vend de
^ J,^ très - beau Papier battu , lavé pour dcflincr
de toute grandeur , Papier d'Hollande & de
France battu , verni & doré pour écrire ; toutes
fortes de Papiers pour la Mufique, Plumes d'Hol-
lande taillées & non taillées , Encre double &
luifante , Cire d'Efpagne , Pain à cacheter de
toute couleur , Regiflres réglés & non réglés de
toute grandeur , Porte - feuilles de Maroquin ,
EctJtoires de poche & de Bureau , Canifs , Gra-
toirs , Poinçon très - fin de Paris , Raquettes ,
I Volais de toute grandeur , Crayons de toute fa-
ucon pour defllner , Boëtes de Comptes & de Bu-
reau , & toutes fortes de Marchandifes qui con-
cernent l'Ecriture.
Il vend auffi toutes fortes de petite Mercerie ;
le tout àjufte prix. A PARIS»
CAUTK L) AI)lti;SSK DK « LEDLC .., .MAUGHAM) JH-UICIKU, xyiii' sjkci.k.
du inallieureux roi était de regarder jouer à la longue paume dans les
fossés du château de Creil-sur-Oise, où il se trousait enfermé.
Dans les anciennes descriptions de Ihôtel Saint-Paul et des hôtels
d'Etampes et de la Pissotte, au temps de Charles VI, on comptait, outre
six pi'éaux, huit jardins, douze galeries et uue cour, servant aux joutes
— 170 -
et aux tournois. Le logis comprenait une antichambre, une salle à
manf^er, diverses pièces d'un usage indéterminé, et enfin la chambre
des ua|>pes, des étuves nommées chaiijj'c-dwi.i-, une volière et im jeu
de paume.
IV. — Diverses inlerdietioiis du jeu «le paume.
Dans son volume sur la passion du jeu, Tliiers déclare cpie la courte
et la longue paume ne sont pas des jeux défendus pour une infinité de
gens, quoique Charles V les ait interdits à tous ses sujets par son ordon-
nance de 1369. Il serait néanmoins messéant, dit cet auteur, à une femme
ou à une jeune fille, et il le serait encore davantage à un religieux ou à
une religieuse. Un magistrat même déshonorait en quehpie sorte son étal
s'il en jouait publiquement en bonnet, en caleçon et en chaussons et cami-
sole comme on y joue d'ordinaire.
Les Statuts si/nodint.r, de Pierre de Colimen, archevècjue de Rouen
en 1245, défendent le jeu de paume aux prêtres. Ceux d'Etienne de
l'oucher, évèque de Paris en 1512, l'interdisent aussi.
Dans les statuts synodaux du diocèse de Soissons en 1673, nous
lisons :
Nous défendons à tous les ecclésinsliques de noire diocèse ];i lianlise cl t'réiiucnlalion des
jeux de longue et courle paume cl tous aulres qui se font en des jardins ul lit'u\ puljlics.
En 1 183, le concile de Sens défendit aux religieux de jouer à la paume,
surtout en chemise et en puldic.
Saint Charles Borromée permet néanmoins aux jeunes ecclésiastiques
(pii sont élevés dans les séminaires de jouer à la courte paume.
V. — La paume au qiiiii/.iOine siOele.
Dans le JokiikiI d'int hmirgcois de Par/s, sous la date du 5 septembre 1427,
le narrateur raconte qu'il a vu la vaillante paumière du tri[)ot de la
rue Grenier-Saint-Lazare, où elle provoquait l'admiration unanime :
Alors vinl à Paris une femme nommée Margol, âgée de vingl-liuil ans, qu'esloit du pajs
de Hainaull, laquelle jouoil mieux à la paulme qu'oncques homme eusl vcu, et avec ce jouoit
de l'avanl et de l'arrière-main li'ès puissamment, très malicieusement et très liabilemenl,
comme pouvoit l'aire homme, et y avoit peu d'hommes qu'elle ne gagnast, si cen'estoil les plus
puissants joueurs, et estoitle jeu de Paris, où le mieux jouoit, en la rue Grenier-Saint-Ladre,
qui éloil nomn;é le Pelil-Temple.
Le célèbre capitaine La Hire s'adonnait au noh\o jeu de la paume
quand il fut fait prisonnier jiar son terrible ennemi, le seigneur d'Olle-
mont ; c'est en vain (pi'il essaya d'échapper eu se cachant siuis la nuui-
171
geoire dos elicvaiix; on no tiU'dii p;
jxuir Ini nno forlo ranoon,
qui lui i)orniit Je reprendre
sa place au milieu des siens.
En 1498, Charles Ylil, (pd
résidait alors au château d'Ani-
boise, vint avec la reine regar-
der une partie de paume qui se
jouait dans les fossés du châ-
teau ; Commines , qui nous
donne cette anecdote, nous
laisse des détails assez cir-
constanciés sur cet évéueinent :
à ly déc<»uvi-ir et on dut jtayor
LE JEU DE PAUME
. COMMEMUS, xvi» sikclf.
il partit lie la chambre de la roync, i
Anne de Brelaigne, sa femme, et la mena
avec lui pour veoir jouer à la pauline ceux qui jouoicnl aux fessez du chasleau, oii il ne l'avoit
jamais menée que celle fois, el cnlrèrenl ensemble en une galerie qu'on appeloil la galerie
Haquelebac..., el s'y heurta le roi du front contre l'huis combien qu'il fut bien petit et puis
regarda longtemps les joueurs el devisoit à tout le monde... La dernière parole qu'il pro-
nonça en devisant en sanlé, c'estoil qu'il dit avoir espérance de ne faire jamais péché mortel
ni véniel s'il pouvoil. Et en disant celle parole, il cheul à l'envers el perdit lu parole.
VI.
La paume an seizième siècle.
François !"' aimait li^ jiMi d^ paume el s'y montrait foi't habile joueur;
Lois Ciuyou raconte dans ses Diverse,^ krons qu'un jour où il était engagé
dans une jjartie contre deux seigneurs, il avait comme second un moine;
ce dernier, par un coup de raquette heureux, fit gagner la partie au roi :
« Ah! dit celui-ci, voici un bon coup de moine. — Ce sera un bon coup
d'abbé quand il vous plaira », répondit le moine.
Comme il se trouvait justement une abbaye manquant de titulaire, le
roi l'octroya à son second, autant pour son beau coup de raquette que
pour son ingénieuse réponse.
Brantôme, dans ses Mémoires (1), donne de curieux détails sur la ma-
nière dont Henri II jouait à la paume :
Le roi jouoil h la paume et très bien ; mais jamais il ne vonloil tenir le jeu, mais secondoil
ou lierçoit, qui sont les deux places les plus difficiles et les plus dangereuses. Aussi estoil-il le
meilleur tiers ou second (mais meilleur liers) de son royaume, et s'y affeclionnoil fort. 11 se
(I) Edition de 1722, W volume.
\7i -
plaisoil fort quand la reyiie sa femmi', Madamp sa sœur et les dames le venoicnl voir jouer,
comuie souvent elles y venoienl, et qu'elles donnassent leur sentence comme les autres, des
feneslres d'en haut.
Le roi Henri II était un joueur éiuérite, et, quand Rabelais vante
l'adresse de Pantagruel à la paume, il est évident que c'est à celle de
Henri II qu'il veut faire allusion. Ce roi, en effet, était certainement le
^e(iadT/:npilulaynJimr^'lr c /' ohm'»- J&mpihte/hturatr'akfr^nmcoi-p u vira
Ex.Tc^ t jr- s cor^ et vyi. Ma Tbrpct ni afsiduts oh)-uhi)wisJhàjs
LE JEU DE PAUME
n'AniKS UNE ENCYCLOPÉDIF. DU XVI' SIÈCLE.
prototype du héros de Rabelais, et dans certains passages le fait apparaît
avec certitude. Henri II était réellement le plus habile joueur de paume
de son royaume, et, s'il se fût mesuré dans les concours publics, il aurait
certainement mérité un des fameux ('Iou['h iPargcitt décernés comme prix
aux plus habiles joueurs.
On sait qu'au momeid de la Saint-Rarthéleniy, Nompar de Caumont,
qui devint plus tard maréchal et duc de la Force, ayant été laissé pour
mort au moment du massacre, fut sauvé par un paumier qui le conduisit
à l'Arsenal, où il le soigna et le rendit à la santé.
Henri IV se plaisait beaucoup au jeu de |)aume, et, dans l(> Joiinwl
de Pierre de l'Estoilc, nous trouvons une j)einture saisissante de l'impor-
tance que ce jeu avait prise à la cour :
— l-.i —
Le samedi 24 septembre lô'J't, le roi J(jiia loul le Idii,';- du jour à la |)auine dans le jeu i\v la
Sphère. Il esloil en ehemise, encore esloll-ello déchirée sur le dos, el avoit des chausses grises
à jambes de chien, qu'on appelé, ne pouvant bien aller à l'esteuf parce qu'il estoit las, et, dit-il,
qu'il ressembloit aux asnes qui l'aillent par le pied; puis, à l'instigation de l'avocat Durel, qui
dit à Sa Majesté que, si elle vouloit avoir du plaisir, elle fît fouiller un nacquet qui faisoil le
initouard sous la galerie et qu'on lui ôtàt son manteau, on lui Irouveroit une grosse de balles
qu'il avoit dérol)ées, commanda M. d'O. de ce faire, et lui ayant été trouvé ce qu'il avoit dit, le
roi en rit bien et fort, et ayant fait venir le nacquet, l'arraisonna assez longtemps el en lira du
plaisir.
Le jeudi :27 octobre, même année, le roi ayant gagné quatre cents écus à la paume, qui
estoienl sous la corde, les fil ramasser par les nacquels et les mettre dans son chapeau, puis dit
tout haut : « Je liens bien ceux-ci, on ne me les dérobera pas, car ils ne passeront pas par les
mains de mes trésoriers. »
Ou se plaisait à venir voir jouer le roi, et Pierre de l'Estoile rapporte
qu'en 1597, parmi les nombreuses dames qui venai(Mit admirer son
adresse, il en était une dont il aimait tout particulièrement à obtenir
les suflPrages : c'était M"" de Mousseaux, plus connue sous le nom de
Gabrielle d'Estrées.
VII.
L'équipe du jeu de paume ro.^al sous Louis XIW
Louis XIV ne dédaigiuiit pas de jouer à la paume, et, dans sa maison,
il existait tout un état-major
qui n'avait d'autres fonctions
que de s'occuper de prépa-
rer ce divertissement royal.
Le maître pauinier, au-
quel revenait l'bonneur de
présenter la raquette au roi,
jouissait d'une pension de
1 200 livides, et il toucbait, en
outre, une i»rime de 50 livres
cba(pie fois que le roi prenail
sa raquette.
Le personnel attaché à la
partie royale comprenait, eu
outre, six marqueurs de cour, recevant chacun 10 h-aucs poiu' chaque
partie.
Le roi possédait un jeu de paume dans chacune de ses principales
résidences : à Compiègne, Saint-Germain, Fontainebleau et enfin Ver-
sailles, et l'on sait (\no ce dernier existe encore aujourd'hui.
U.NE l^Ain'lli UE PAU.ME
u'aIMIKS une VIGXlîlTK IIU XVI1° SIÈCLE.
— 174 —
La paume eon.sidérée comme jeu cl'ai'gont.
Lo jeu de paume n'était |)as soulenient un exercice physique, dans
lequel le joueur cherchait à montrer sa stipériorité sur ses partenaires,
simplement pour l'honneur de remporter la victoire. Au temps de
HcMiri II et de Charles IX, les enjeux d'une parti(» de paume étaient
couramment de 300 à 400 écus.
Les sommes qui avaient été perdues par le roi dans les parties qu'il
Quittance d'une somme de lois livres \'j sols tournois payée pai' le roi de France
à François Goufficr, 10 mai 1518.
jouait étaient l'ohjet d'un ordonnancement spécial de la part des tré-
soriers royaux; nous avons eu la bonne fortune de retrouver une de ces
quittances délivrée par « François GouCfier, chevalier, seigneur de Bou-
uivet, colonnelle des gens de pied français estans en Piémont». Par cet
acte, Gouflier donne quittance au trésorier de l'épargne « de 1.^18 livres
li) sols tournois que le roi lui fait remettre parce qu'il les avait perdus
au jeu de la paume à Troyes, le dix de ce mois de may, contre monsei-
gneur de Guise. »
Gette mode de jouer de l'argent ne fit qu'augmenter, et, à la lin du
seizième siècle, Bourdeilles nous apprend que, de son temps, on risquait
souvent en une seule partie un enjeu de 4000 à 6000 écus et quel(|uefois
même une somme deux fois plus forte.
Dans la seconde moitié du dix-septième siècle, nous voyons que
17'i
(Ml [),irc()iii';iiil les Icllrcs de ("iiiy-
celte h;i])iliule s'est conservée: niiisi
Patin, docteur en méde-
cine de la Faculté de
Paris, professeui' au
Collège royal, nous
voyons qu'il écrivait
en 1648 :
On ne parle ici que de
M. le duc de Beauforl, pont-
qui les Parisiens, et purticu-
liirement les femmes de la
Halle, ont une dévotion toute
pai'liculière. Comme il jouait à
la paume dans un tripot du Ma-
rais du Temple, il y a quatre
jours, la plupart des femmes
de la Halle s'en alloienl par
pelotons le voir jouer, et lui
faire des vœux de prospérili'.
Comme elles faisoient du tu-
multe pour entrer, et que ceux
du logis s'en plaignoient, il
fallut qu'il quitlAl le jeu et qu'il
vînt lui-même à la porte mettre
le liolà; ce qu'il ne put faire
sans que ces femmes entrassent
en petit nombre, les unes après
les autres, pour le voir jouer;
et s'apercovant qu'une de ces
femmes le regardoil de bon
œil, il lui dit : « Hé bien ! ma
commère, vous avez voulu en-
trer : quel plaisir avez-vous à
me voir perdre mon argent? »
Elle répondit aussitôt : « Mon-
sieur de BeauforI, jouez liar-
diment, vous ne manquercî!
pas d'argent; ma commère
que voilà et moi, nous avons
apporté deux cents écus, et, s'il en faut davantage, je suis prèle d'en retourner
tanl. » Toutes les femmes commencèrent à ciier qu'elles en avoieni à son service
les remercia. Il fut visité ce jour-là pir plus di' deux mille femmes.
Fronlispicc du Irailé intilulo De i'ulililé r/iii jirmii'i
paume, imljlii!' à Paris chez Charles Uiilpeau: par 1"
maistrc en cesle exercice, 1623.
ilii jeu lie la
rliei't l'aisnc,
(|uei'n' au-
ce il.. ni il
IX. — Le jeu «le pniiiiic dovenii an »lîx-.septîOino sîùele
un ispt'fincle public.
Sous Louis XIV, le jeu de pauni<> se transforma, ci devint plutôt une
sorte de spectacle (jue les amatem-s allaient contemplei-, sans cependant
— I7(i —
iiilci'venii' dans le jou. Daiigcuu cite le fait de joueurs de [U'ofcssioii qui,
ayant allii'é l'atlentiou du roi à Fontainebleau j)ar leur adresse merveil-
leuse, ohtini-ent la permission de jouer i)nl)li(|uement ou plulôl (l(> donner
des reju'ésenlalions dans un des jeux de ])aume de Paris :
Lo roi, (■■ci'il-il sous la date tiiiiti oclobru iCtHl, h Fontainebleau vil jouer les bons joueurs
de paume et leur aixorda le privilège qu'ils demaiulaieiil. Ils joueront deux fois la semaine à
Paris el feront afliclier comme les comédiens. Ils sont cinq : les deux Jourdain, Le Pape,
Clei'gé et Servo.
X. — Usages et (M>iiluiiu-s «Isiiis It-s jeux «le paume
lY la lin (lu <li\-huili<'nie sit^cle.
Un auteur, «[ui a eu partie gardé l'anonyme, M. de Man..enx, publia
JOUEURS DE PAUME EN COSTUME
l'uis IN niAiiK INTITULÉ l'Utilile qui provient du jeu de la paume, Ui-23.
eu I7<s:> lui hailé sur la connaissance du jeu royal de paume, qu'il dédia
au coude dArlois. Ce recueil est intéressant à plusieurs titres, et il
présente, sur les oiivrai;es similaires, l'avantafie de nous initier à (piebpies
détails prarupies que l'on chercberait vaiiu'ment dans les auteurs (|ui
ont traité le même sujet.
— 177 —
Tout d'alxti-il, |);u'l;iiit dv la coiistniclion du ])àUineiit, il déclare (iiic
les jru\ de paume, ([uoique assez variaMes dans leurs dimensions, doiveiil
tonner un carré loug entouré de nnu's en pierres de taille de 20 h 22 pieds
de hauteur. La longueur d'un beau jeu de paume doit être de •)() pieds
sui' 27 à 28 de large ; il faut (pi'il soit pavé (M1 carreau uni de pierre d(>
taille de la grandeur d'un i»ied et demi, et le sol ainsi disposé doit être
iréipiemment rougi au sang de lioMif. Les murs de la salle sont |)eints en
LA SAINT-NICOLAS
d'ai'uks une GHAV\iiiK sru e.uiviiK i)i' xvm* sikoi.i;.
noir au moins deux l'ois par an, et cette disposition est indispeiisalile iioni-
]>ermeltre aux joueurs de distinguer plus lacilement la halle (pii arrive
SIU' eux.
Les l)alles, (jue l'on désigne aussi sous le nom de pelotes, sont de
la grosseur d'une pomme et t'ahri(piées avec des bandes de drap enrou-
lées ; elles sont blanches et, pour leur conserver leur couleur, le garçon
paumier doit, avant chaque partie, les faire rouler dans un sac de peau
garni de son.
il était coutume, alors, de louer aux maitres jiaumiers des chemises,
di's l>as et même des souliers, de l'açon <pu> les joui'Ui's, en se rhabillant,
23
— 178 —
pussent revêtir des vètemeuts parfaitement secs. L'auteur du traité, pré-
voyant tous les inconvénients qui peuvent résulter pour les joueurs de
ces linges qui n'étaient que peu, ou même pas du tout, nettoyés, recom-
mande aux amateurs de ce genre de sport d'avoir des vêtements spéciaux
leur appartenant en propre et, à l'issue de la partie, de se faire essuyer
et frictionner par les valets paumiers avant de revêtir leurs habits, que
l'on devait conserver dans un (Midroit sec, ])0ur éviter toute cause de
refroidissement.
Au point de vue du prix à payer à l'entrepreneur du jeu, il est
ordinairement, à Paris, d'une livre cinq sols pour une partie comprenant
huit jeux. En province, la partie n'a que six jeux et se paye une livre.
Pour remédier à la modicité de cette redevance, les maîtres paumiers
avaient coutume de réclamer, outi-e le prix de la partie, le prix des
rafraîchissements, la location des chemises ou auh'cs vêtements, la four-
niture du bois de chauffage ou la lumière.
A ces frais, il ne fallait pas manquer d'ajouter les revenants-bons
des garçons marqueiu's conaus sous le nom de « uacquets » et enfin les
dépenses extraordinaires destinées à arrondir le chiffre de la note.
Parmi les joueurs de paume les plus fameux, on remarquait aloi's
Mgr le comte d'Artois, Mgr le duc d'Orléans, Mgr le prince de Coudé,
Mgr le duc d'Ausson, le chevalier de JMaupeou, etc.. On comptait peu
de dames se livrant à cet exercice ; il convient, cependant, de citer
M"° Funel qui faisait la partie avec Mgr le prince do Coudé. Il y avait
aussi quel([ues professionnelles et entre autres M"" Masson, maîtresse
du jeu de paume de la rue de Grenelle-Saint-Honoré, à Paris.
XI. — Uiverses espOces de jeu de paume»
On distingue deux manières de se livrer à ce jeu suivant l'emplace-
ment dont on dispose : h* Jeu de la courte puiiiiie et le jeu de la longue
paume.
Le jeu de la courte paume se joue dans un lieu fermé et borné de
murailles ; il est tantôt couvert, tantôt découvert. On joue avec des
raquettes, des battoirs, des petits bâtons et un panier. Pour y bien jouer,
outre l'agilité du corps qu'il convient d'avoir pour courir à la balle, il
faut aussi beaucoup d'adresse, de la nuiin et de la f(U'ce de bras.
11 faut, avant de commencer le jeu, tendre une corde à telle hauteur
qu'on puisse voir le pied du dessus du mur du côté où est l'adversaire,
et, le long de cette corde, on attache un filet dans lequel les balles
donnent souvent.
179
La longuo paume ne diflëre de la précédente (jue parce (jiie ce jeu
se joue sur un champ plat à ciid ouvert et sans être limité par aucune
muraille.
A Paris, l'emplacement ([ui était réservé pour le jeu de |)aumc se
LA PaVME
IiAI'liÈS l'NE COMPOSITION DE CLAII>1NE IIOIZONNET STELLA, XVll" SIKCLE.
trouvait aux Champs-Elysées, à l'endroit même où s'élevait naguère le
Palais de l'Industrie.
En 1833, lors de la construction de cet édifice, le jeu de paume fut
porté au Luxembour;;, où il est encore fort en honneur.
XII. — Les tripots ou jeux do pnunie si l'aris.
Le jeu de paume fut touj(Jurs considéré comme l'apanage d(» la noblesse
et il était interdit, sous des peines très sévères, aux roturiers de prendre
part à cet exercice. Cette prohibition resta probablement lettre morte,
car, dès le seizième siècle, Paris comptait un grand nombre de jeux de
paume qui n'étaient pas uniquement fréquentés par les représentants des
vieilles familles de France.
Dans une relation duu voyage fait à Paris )>ar Francesco Grégory
— 180 —
lerni, il est fait mention de deux cent cinquante jeux de paume, « tous
jeux beaux et bien installés qui comportaient un personnel considérable
de gardiens et de niaitres de jeu, sans compter les marqueurs dont la
mission consistait, en dehors de leurs fonctions, à masser les joueurs
et à les soigner après chaque partie » .
Dans une antre relation, faite par Robert Dallington, qui voyagea en
ii'ai'kès une G];AVinuî dp; ouiuiï, .wiii* siècle.
France sous Henri IV, on voit que ce divertissement jouissait d'une aussi
grande faveur qu'à l'époque précédente ; le narrateur trouve que le pays
est couvert de jeux de paume, qui sont plus nombreux même que les
églises et, chose à peine croyable, il déclare qu'il y a plus de joueurs de
paume en France que d'ivrognes en Angleterre.
En 1657, il y avait encore à Paris 114 jeux de paume et au milieu
du dix-huitième siècle il existait 70 maîtres paulmiers, dont 13 tenaient
des jeux de paume et les o7 autres des jeux de billard.
Les plus célèbres de ces établissements furent ceux de la rue de la
Perle-au-Marais et de la rue Mazarine. Ce dei-nier ne fut fermé qu'en 1826,
sous le gouvernement de Juillet. Après la fermeture de cet établissement.
— 181 —
il ne sultsista }(lus à Paris (in'un seul jt'u de |i;uiinL', celui du passage
Saiulrié. Un des derniers renscigneniouts que nous ayons sur lui est un
extrait du Journal des Dôbats du mois de mai 1842, dans UmjucI on doime
le compte rendu dune partie mémorable qui venait justement de s'y
disputer.
Vers le mois de mai 1842, lisons-nous, une parlie de paume des plus intéressantes avait
réuni au jeu de paume du passage Sandrié, à Pai-is, l'élile de la fasliion parisienne. L'on
INTÉRIEUR U UN JEU DE PAU.ME
APnÈs LA Grande Encyclripédie de diuehot et dalemdeut.
remarquait parmi les speclaleurs : MM. les ducs de Valencey, de Maillé et de Moucliy, les
marquis de Lavalette et deConlades, le capitaine Ferey et M. Hubard. Les joueurs ont excité
au plus haut degré l'attention des amateurs. M. de la Noirville s'est montré digne de sa répu-
tation d'amateur, et le célèbre paumier Barre a enlevé, par son jeu plein de grâce et de finesse,
le suffrage de toute l'assemblée.
Le second Empire, sous prétexte de i^yninastique, voidut ressusciter
le jeu de paume, et Napoléon III fit construire au Jardin des Tuileries,
H Textrémité orientale de la terrasse des Feuillants, un gracieux édifice
où ce jeu fut logé de la manière la plus parfaite. La Ville de Paris, de son
côté, voulut créer un jeu de paume à fangle de l'avenue d'Antin et du
Cours-la-Reine ; les travaux furent même commencés, mais on ne donna
pas suite à ce projet et bientôt les fondations de ce jeu de paume tom-
bèrent sous la pioche des démolisseurs.
MU.
— 182 —
Le serinent du jjeu «le paume.
La plus célèbre sallo do jeu do paume est évidemment celle de Ver-
sailles, qui subsiste encore aujourd'hui ; elle fut installée par Bazin,
maître paumier du roi, Nicolas Cretté, le i^endre de Bazin, et Davesne,
garde officiel du roi, qui s'associa avec eux pour cette entreprise.
L'édifice fut achevé en 1686 et coûta 45503 livres ; cet établissement
LNE PAItTIC DEPMJMC \L Wlll- blt( LE
d'ai'Iiès l\ Grande Eiirt/rlnjtnti'^ i>F. rmiKriOT et h'alembeiit.
comprenait, outr(^ la salle de jeu, une sorte d'étuve où les joueurs allaient
se sécher et se faisaient masser par les « naccjuets ».
Eu 1787, deux architectes furent cbar{j,és de faire une description de
ce hâtiment et d'en donner une estimation ; ou voit, dans ce document,
que sur trois côtés s'étendait une f^alerie large do cin(i pieds et haute de
huit; elle était munie de haies permettant aux spectateurs de suivre la
partie. Des filets étaient disposés pour empêcher la halle de venir s'égarer
dans les galeries. La salle était revêtue d'une décoration sombre permet-
tant de distinguer plus facilement la balle, le plafond était jieiut en bleu
semé de fleurs de lis d'or et au centre étaient h^s armes de France.
11 est à peine besoin de rappebn- ici que c'est dans cette salle du jeu
de paume que, le 20 juin 1789, les députés du Tiers État se réunirent,
après s'être vu refuser l'entrée de la salle de l'Assemblée, à cause des
préparatifs qui s'y faisaient pour la séance royale. Ce fut là que fut pro-
noncé le fameux serment par lequel les députés jurèrent de se réunir
jusqu'à ce que la Constitution du royaume fût établie.
Cette salle du jeu de paume subit les destinées les plus diverses. Un
183
(lôcrot delà CouvtMition décida (luV-lle serait ac([uise pai- la Nation r[ clli;
fut payée avec les biens de l'émij^Té Grimaud d'Orsay.
Sous le premier Empire, ou oublia l'intérêt histori([iie <|ui s'attachait
à cette salle et le célèbre ijeiutre Gi'os y iustalla sou atelier; c'est là que
lut peinte la célèbre toile des » Pestiférés de Jaffa ». De 1830 à 18'i8,
LUGGIA DES SPECTATEUnS U'LNE PAKTIE DE PALME
ii'Ai'iiÈs LA Grande Encyclopédie de dideuot et d'à i.em deht.
la salle du jeu de paume servit d'atelier au peintre Horace Vernet et,
le 14 mars 1848, eut lieu dans son enceinte un banquet politique.
Sous le second Empire, la salle fut affermée pour y installer un jeu
de paume public, qui ne réussit pas, et l'entrepreneur se trouva ruiné.
Depuis une vingtaine d'années, ce monument historique a été complè-
tement restauré et transformé en musée.
XIV. — Le jeu de paume et le lawn-leiiiiis.
Le jeu de paume est maintenant plus en honneur que jamais chez nous,
mais on a changé son nom en celui de << lawn-tennis », et notre manie
d'accepter tout ce qui vient de l'autre côté de la Manche nous a fait oublier
que le jeu de paume avait été pendant bien des siècles la distraction
favorite de la partie la plus intelligente de la nation française.
Les Anglais ont été obligés de reconnaître que le fameux lawn-tennis
a une parenté très étroite avec notre ancien jeu de paume et, dans un
Ijrevet qui fut pris eu 1874 par le major Wingfield pour une invention
nouvelle à laquelle il avait donné le nom de Sphairistike, nous voyous que
la demande de brevet d'invention définit son jeu sous la désignation de
CoKi' tramporlabk nouvelle et iierfeclionnée pour Jouer l' ancien jeu de paume.
— 184
XV
,a corporalioii dois paiiliiiîers-raquettîers.
Otte industrie remonte au treizième siècle, puisque dans les rôles
de la taille de Paris, publiés en 1292, on voit qu'il y avait alors treize
paulmiers fabriquant des balles ; on mentionne aussi deux valets paul-
miers qui servaient d'aides aux patrons.
Au dix-septième siècle, les paulmiers formaient à eux seuls une cor-
poration indépendante des métiers similaires; ils s'intitulaient : Commu-
nauté des maîtres pa>//m/ers, raquettiers, faiseurs d'es-
leufs, jieloli's et bulles. Leurs statuts avaient été
eiu'es'istrés au Chàtelet, le 13 novend)re 1610; seuls,
les maîtres de cette corporation avaient le droit de
faljriqner et de vendre les raquettes et les balles.
La corporation était régie par quatre jurés qui
veillaient aux intérêts communs et empêchaient
les industj'ies voisines d'empiéter sur leur privi-
Pour devenir maître, il fallait faire un ai)pren-
ARMOIUIES l)i:S. MAITRES . . i .> i -
PAL'LMiEiis-UAQUETïiEHs tissagcdc trois aus et accompur un chet-d œuvre.
Le brevet valait 30 livres et la maîtrise 600.
Les armoiries de la corporation étaient conqjosées d'un écu, dont le
fond était de sable, sur le(]uel se détacjiaient quatre boules probablement
d'argent et au centre une raquette.
Otte corporation suivit le sort de toutes les maîtrises et jurandes,
et disparut au moment de la Révolution.
xvi.
Desfi'îptîoii du iiiétioi- do paiilniicr au di\-liiiiliôiiie siôclo,
Le métier, ou ]»our parler plus exactement, l'art du paulmier raquet-
tier a été décrit d'une manière très remarquable par M. Garsault dans
son excellent traité. Ce membre de l'Académie des sciences ne craignit
pas de faire une longue dissertation sur les outils et instruments propres
à la fabrication de la raquette; et sur les procédés <pje l'on emploie
pour la former, la percer, la brunir et enfin la corder. L'ouvrage de
M. Garsault a été entièrement reproduit dans la Graudr Etiri/rlitpédii-,
dans laquelle il n'occupe pas moins de neuf planches. La première
gravure nous montre l'intérieur d'un jeu de paume avec les joueurs
occupés à se livrer un combat des plus palpitants; nous voyous ensuite
les différentes formes <le raquettes, droites ou cintrées, ainsi que les
divers battoirs garnis de juirchemin; les deux planches suivantes rejtre-
J77ancâand de ^a^aeltes
/,'2//w ^rosseà manche d'ûs.^^ne^fvsse/ioï/andaiseà/iaôùls^
3,i/ne ëèrosse ordùiai/r à Âabi/Sj //^,^ùie ù/usse à Ô^iapeau^,
âS^'z/iœaiix, ô\&nœau d ôlanc/un 7,Q/amcaii, S.é^a^ueUe.
9, Sale àe cochon ,70, Stresse à veloiu:s J/,<£êrosse à ha^^n
'/^S^aùu poiir/c ùuffoù^oupatirlepùj/icher. /J, £è/DSse à/risefy
//fySahii àa/mz/nee^, hSfBwsse à cheœiLr,/(pj> %i Q^aniasse-imissiêœ,
— IS:i
soiitfiit les divers iuslruniciils servant ;i la fahricaliuii dos ia([iiL'tlos;
la ([uatrièiiio planche nous iiuliqnt! connuent (■tait cordée une raquette,
lABlUCATIOX DES KAnUKTTES SEKVA.NT AU JEU DE PAUME
d'aphks la Gramle Encyrlopédie de diiiehot et d'ai.embeht.
et de quelle manière était l'ahri(|U(''e la balle; la cin([uièiiie planche donne
la représentation d'un jeu de billard et les quatre dernières pages
présentent le [)lan et les divers détails de construction d'un jeu de
paume carré.
XVII. — Les balles du jeu «le paume.
Les balles du jeu de paume n'ont pas sensiblement varié depuis
l'origine de ce jeu; à répo([ue romaine, elles étaient composées de plu-
sieurs espèces de peaux, simples et corroyées, ou d'étoffes cousues
FABUICATION DES BALLES UU JEU DE PAUME
h'apiiks la Grande Encyclopédie de diueuot et ij'alembeut.
ensemble en manière de sacs que l'on rem])lissait, tantôt de plume
ou de laine, tantôt, quand on voulait rendre la balle plus lourde, de
farine, de grain ou de salde. Ou donnait à ces balles ditlerentes gros-
2t
— 18(1 -
snirs; il y ru avait de très jx^'tites, de iiioyeimes et de très grosses, ce
(lui établissait dilléreiites sortes de sphéristiques.
Au Moyeu Age, les balles dont on se servait le plus coiumuuénient
étaicut les esleiif.s. i)\\ a prétendu que ce nom leur avait été donné parce
(prelles étaient bourrées d'estouffes ou d'estoupes, ou bien encore do
laine provenant du nom latin stapa. Cette origine est assez difficile à
établir, mais ce qu'il y a de certain, c'est (jue les maîtres ra<{uettiers,
trouvant la laine trop chère, ne se gênaient pas pour la renq^lacer par
d'antres matières. Souvent, ils remplaçaient les bonnes étoupes de laine
par du son; une ordonnance royale intervint même à ce propos, ([ui leur
rappela la stricte observance de leur métier, et les engageait de ne
mettre en vente que des esteufs couverts de bon cuir et rem|)lis de
Itonue bourre.
Dans le Recueil des ardonnaneex des rois de Fr/aice, tome XVI il, on ti'oux'e
un document (jui luontre avec cpiel soin était réglementé cet accessoire
du jeu de paume. Connue les maîtres |)aulmiers de Rouen s'étaient plaints
à Louis XI de ce que certaines gens sans aveu lem- taisaient concurrence
et fabriquaient des l)alles dangereuses pour les joueurs, (. emplissent
iceux esteufs de chaux, sablons et antres choses qui ne sont bonnes et
à l'occasion de <pioi plusieurs ont en les bras et les mains fêb's et
blessés. »
Par son ordonnance du 24 juin ticSO, le roi, reconnaissant (pie cet
état de choses pouvait être préjudiciable pour le public, déclare :
A l'avonir seront Ions les maîtres ilu ilil niiHier tenus de fiiirc bons esleufs h'wn garnis et
(Mofftis, (le bon cuir et bonne l)ourre, sans y mettre sablon, craie, baUie (rognures de métaux),
ciiaux, son, reslure (rebut), de peau nomni(^e resur, sciure d'ais (de bois) cendre, mousse, poudre
ou terre, sous peine d'amende et de saisie de tous mauvais esteufs qui seront « ars et bridt^s
a'iii (jue aucun n'eu soit incuiivt-iiienltj ».
La fabrication des balles avait été réglementée à Paris d'une manière
toute particulière, et clans les statuts des panlmiers de la ca[)ital(! un
article était spécialement consacré à ce sujet :
l.')()'(. — Ne pourront faire ni Faire l'aire aucuns eslœufs s'ilz ne sont pesanlz de 17 eslellins,
laits et duuljl(^'S de bon cuir de moulons, plains de bourre de tondeur aux grands forces sui'
peine de confiscation
//. lesd. jun''s et gai'des d'icelluy, faisans leur visitations, seront tenuz et leur est cnjoincl
visiter les eslœufs, pelottes et balles si elles sont eslon'(''es comme il appartient, assavoir que le
plolon soit bien rond, fait de morceaux et rogneures de drap, avec une bande de thoille seul-
lemont sern'-, bien feriiiii de bonne fisselle et couverte de bon drap blanc tout neuf, pesant en
tout ic(d!e balle le poiz de 19 eslellins (33 grammes). (Statuts des paulmiers de Paris, An/i.,
Y, ]'(, t. .\, l"(il.)
.Nous trou\(iiis, pour le seizième siècle, un docinnent assez curieux
— 187 —
iiHMilidiniaiit le hail (riiiic maison servant de jeu de paume, passé par
lia niai'eliand l'aiseui' d'esleiirs à un de ses confrères :
l.'i '(.';. — Cliuulc Dupi'c, marcliiincl faiseur d'cslciil's, chh ;i Thihaiil Tiiihaidcl, aussi faiseur
d'csteufs, le ilroil au l)aii <rune maison, jeu de pauhne et jardin faisant h coin di's rues de
Paradis et Porte du Cliantier, appelé le jeu de paulnie du Tabourin, pour trois ans et trois mois
Unissant à la saint lîemy, loW, à la charge de payer à Jehan Bouyn, marchand liourgeois de
Paris, Gristolle Ilénon, barbier cirurgien, et aultres le loyer de 132 1. 10 s... (> douzaines
d'esteufs aux propriél aires et 6 douzaines de raquettes. (iVlinules de M" Iluillier, notaire à
Paris, extrait J. Piclion, p. 170.)
A une épo([ue ]»lus moderne, les amateurs du jeu de paume ont
étahli nue distinction entre les esteufs, les ballons et la halle; les pre-
■fait par JPereilt CUi.ec Truiit^ediLRi^
UNE l'.UtTlE DE PAU.ME JOUÉE AVEC DES BAÏTOIIIS
n'APnÉS UNE OR.WflŒ DE PÉHEf.LC. XVII» SIÈCLE.
S^laapiat al
niiers sont faits de bourre recouverte de peau de mouton ; on joue
avec les esteufs sans raquettes ni battoirs, mais simplement avec la
jtanme de la main; les pelotes sont des balles toutes ficelées, mais <jui
n'ont pas encore été recouvertes; quand cette dernière opération a été
faite, et que les pelotes ont été garnies de drap blanc, elles prennent
le nom de lialles.
188 —
XVIII. — RaqiK'Iles el halloirs.
Pendant toute la période romaine, il ne semble pas que l'on ait
connu, poni' renvoyer la balle, autre chose que la paume de la main;
un pou plus tard, les joueurs se servirent d'un f;ant de cuir ou s'entou-
mmm»
i)ii-'i''i-:iiic.\Ti:s sniri'Es di: uaqukites kt de UArruiiis
n'APiuis I.A Griindf Encijc/npérliP nE didduot et n'Ai.EMDEiiT.
rèrent le poignet et la main de lanières de cuir, ce qui permettait di;
renvoyer la balle avec une plus i^rande force.
Le plus ancien instrument dont on se soit servi pour renvoyer la
balle est le battoir composé d'un cadre en bois recouvert de parchemin.
Au seizième siècle, on a beaucoup fabriqué de ces instruments, mais
comme à c(^tte époque le parchemin était rare, et par suite fort cher, on
a détruil des rpiantités de manuscrits précieux pour en couvrir des
180 —
battoirs dostiués ;ï raimistMiiciit des jcuiiil's f^i'iis. Siii' ce l'ail, nous
citerons un passage do ('olomiès rclalit'à la dostnii'tidn d'iiiic des copies
do Titc-Livc.
J';ii ouï dire ;i M. (^liapt'Uii, dil cet auteur, qu'un de ses iiniis, Iiouiuil' de letlccs, ;ivoiL jnui''
à l:i longue paume avec un balloir, sur lequel se voyolent des fragments de (juelques déeades de
Tile-Live que nous n'avons point, et que ces fragments venoient d'un apothicaire qui, ayant eu
en don des religieuses de Fontevrault plusieurs volumes en parchemin du même auteur, les
avoil vendus par ignorance à un faiseur de battoirs.
Les [dus célèbres joueurs de paume étaieut, à lu lin du dixdiiiitième
siècle, originaires de la Bcauce ; dans ce pays, les joueurs venaient de
plusieurs lieues à la ronde, ac-
compagnés de leurs parents et
amis pour disputer la palme à
tel village renommé par l'adresse
et la vigueur de ses habitants.
Là, se bâtissaient de hautes répu-
tations basées sur de longs suc-
cès, et qui ne faisaient place à
d'autres que lorsque l'âge atfai-
blissait la vue et diminuait les
forces. Ces athlètes méprisaient
la raquette ; c'était avec la batte
ou le battoir qu'ils prenaient des
volées superbes, étonnantes, et
qu'ils lançaient la paume avec
une force inconnue dans les par-
ties de raquette ; cet instrument
ne doit cependant pas être dé-
daigné, car il est plus facile,
plus maniable, et l'on ne risque
pas, avec sou aide, de jeter
raide mort |)ar terre le specta-
teur inattentif', comme cela n'avait (|ue tro[> souvent lieu lors des beaux
coups de battoirs que la Beauce voyait donner.
Au dix-huitième siècle, le jeu du battoir consiste, dit VEnnjclojKklie,
(( ;i chasser avec une palette à long manche une balle dure de chiffons
bien ficelés, et couverte d'une étoffe, que les joueurs doivent tâcher de
renvoyer en la reprenant à la volée, ou au premier liond. On joue en
partie au battoir; la moitié des joueurs se mettent à ini bout d'une
longue allée et l'autre moitié à l'opposite. »
S2!^uy0a//t^
- 190 —
Le traité publié, en 17cS3, ])ai' M. de Mau...eux, nous apprend qu'à
cette époque les habitants du Midi, tels que les Espagnols, les Langue-
dociens et les Provençaux, se servent le plus souvent, pour jouer à la
paume, du battoir :
C'esl un inslrumeiU f;iil en buis mince, qui ;i lu forme d'une pelile raquelle; ceux qui se
sont adonnés à celle manière de jouer onl raffiné sur sa conslruclion, ils ont fait construire des
batloirs creux en dedans, collés el nervés de tous côlés ; cette invention leur donne plus d'élas-
ticité, de sorte que les joueurs renvoient la balle plus vivement. L'on pense que ce battoir de
bois ne peut avoir l'élasticité des cordes à boyaux, néanmoins, ceux qui en font usage parent
la balle de volée, le relèvent et la renvoient avec autant d'aisance qu'avec une raquette.
l'outefois, la raquette remonte à nue origiue assez ancienne, on en
trouve la trace dès le commencement du seizième siècle. En effet, dans
le livre intitulé le Colloque iVEnifimc, imprimé à Bàle en 152S, on trouv(»
la raquette désignée sous le nom de retkuhim^ qui signifie un petit filet.
La raquette est, en effet, un lacis de cordes croisées l'une sur l'autre,
en façon de mailles et de rets; le tout était maintenu dans uu cadre
de bois, qui s'emmanchait lui-même dans un bâton court et fort. Ces
croisillons de cordelettes furent copiés pai' la mode pour en faire une
parure. Les dames de la cour, au temps de Catherine de Médicis, arran-
geaient leurs cheveux en les croisant par liaudes comme les raquettiers
disposaient leurs cordes : c'était ce que l'on appelait les coiffur'es eu
ra([uettes.
Les raquettes, «u dix-septième siècle, étaient également ajqx'lées rdinon-
iieUcs ; le manche était couvert de peau de mouton et les ])lus réputées
venaient de Rouen; elles se fabriquaient en Normandie. Cette spécialité
s'est du reste conservée longtemps dans ce pays, puisque nous voyons
qu'à l'Exposition de 1855, un artisan de Gouruay-sur-Aronde, M. Hricad,
avait exposé des raquettes de païune « fabriquées, dit le rappdi't du
Jury, avec le plus grand soin et des préparations longues et minu-
tieuses pour réunir les conditions de force et de souplesse et d'élas-
ticité ».
XIX. — .Xrrèts el règlements eoiieernanJ le jeu de paiiine.
I>e jeu de paume a été réglementé par un très grand nondtre d'ari'èts
de la (^our et d'ordonnances royales.
Dans le fameux traité de la police de Delaniarre. on trouve, à la
date du 22 juin 1397, une ordonnance rendue par le prévôt de Paris,
qui défend de jouer à la paume les autres jours que le Dinumche, parce
(pie H ])lusieurs gens de métier et autres du petit peu|)le (piittaient leur
/l cUqne ci^Jti^é J^d. bien. a. lav Sei^tie^i^
^our ejccit^ ^ Orrjts , poio- Ire^tta^rver L'cirdeur,
a>ont son ftcperbe- (Cspr^ doùr brtUcr cLms U o'^Und^ ;
Xa. daupUûe est- cherve- aux Cours dss- (Jouvercun ,
éh foitJe^ le. ^o7tAa^- d^end set4 de^ rios cMuws
%■ /int, yuc tmtt che^ ncrus trançuiU&menir al»>7vtù-- , -
192
« ouvrage et leur famille pendant les jours ouvrables, ce (|ui était fort
» préjudiciable pour le bon ordre public ».
Au seizième siècle, François I", dans sa lettre patente du 9 no-
SENTENCE
DU CHASTELET.
PORTANT homologation de la Délibération de la Com-
munauté des Mairtres Vergettiers , Brofliers & Raquettiers,
de la Ville de Paris, du 24. Mars 175^. contenant cinq
Articles y le premier pour la reddition des comptes des Juréî
fortans de Charge j le deuxième pour la fomme qui fera
remife au Juré qui entrera Comptable ; le troiCéme pour
les AiTemblées qui fe feront dans la Mail'on du nouveau
Juré , ou fera établi le Bureau , & dépofé le CoflFre de la
Communauté j le quatrième pour les fômmes qoi feront
payées par les Afpirans^lelqueJJes feront miies dans le Coffre
delà Communauté enprefence des Anciens}& lecinquiéme
pour empêcher qu'aucun Marftre ou Veuve j n'acheté des
Marchandifes dudifc Métier aux Ouvriers fans qualité, &
ne colporte aucuns Houfloirs ni Balays , &c.
TITRE DUNE SENTENCE CONCEUNANT LES RAQUETTIERS
vembre 1527, déclare que l'argent qui servira d'enjeu pour la paume
sera considéré pour celui qui l'aura gagné comme une dette raisonnable
et acquise par son travail, et, eu conséquence, on ne pourra lui opposer
l'exception de jeu.
XX. — Ciravures représeiitanl le jeu de paume.
Au point de vue de la représentation figurée, le jeu de paume a
donné lieu à de très nombreuses compositions; l'une des plus intéres-
santes, (jui date du dix-septième siècle, nous montre un amateur de
paume, la raquette à la main, (jui regarde une partie qui se joue sous
ses yeux.
Un graveur du dix-septième siècle, Pérelle, représente une partie de
battoir, jouée par des paysans auprès d'une ferme. On voit, par ce
document, que le battoir est d'une forme tout à fait différente de la
raquette; le manche est ^jeaucoup plus long, tandis que la partie recou-
verte de parchemin est presque ronde et de petite dimension.
Au commencement du dix-neuvième siècle, dans la série des carica-
m
— Itli —
turos du Bon Gc/ire, ou a représenté une antre partie de battoir, uù des
élé}:,ants de répoqne mettent habit bas et se mesurent courageusement
pour obtenir nu signe d'approbation de la belle venue |)ourles contempler.
Le jeu de la longue paunu' avait souvent pour théâtre ces niagnifi(pies
terrasses que le siècle de Louis XIV a su ménager dans la plupart des
jardins et dont l'habile conception est encore pom- nous aujourd'hui un
sujet d'admiration.
Nous reproduisons ici un jeu de longue paume dessiné et gravé par
Israël Silvestre, qui donne une idée de la manière dont cet exercice
était alors pratiqué.
XXI. — l'oésîos siii* If joii «le paiiiiii'.
Le jeu de paume a eu, lui aussi, ses poètes, et le meilleur ouvrage (|ui
ait été l'ait sur ce sujet a été écrit en 1800 par M. Hajot, qui lit paraître
cette anné(! un poème en deux parties, la première de trois cent ciiupuinlc
vers et la seconde de deux cent soixante-quinze. Cette œuvre fut fort ap-
préciée du public et mérita trois éditions qui se succédèrent à de longs
intervalles : en 1806, en 1824 et en 1854. Nous en citerons seulement les
vers suivants, en éprouvant un vif regret de ne pouvoir reproduire plus au
long cette œuvre vraiment remarquable :
l'ourquoi clianler l;i Paume el parlei' tic combals?
A des joueurs pourquoi coinpiirer des soldais?...
Non, ne me Volez point, celle imago m'esl chère !
Eli ! mon jeu n'esl-il pas l'école de la guerre ?
De cenl soixante pas sa longueur se compose :
Dans un moins vasle champ, voire bras raccourci
Lancerait à regret un coup trop rétréci :
Un champ plus spacieux sérail peu nécessaire;
Notre force est bornée; el, pour la satisfaire,
11 faut qu'on lui présente el qu'elle atteigne un but ;
Qu'un joueur s'encourage à son premier di'bul.
Que de chaque côté, laissant vingt pas enti'e elles,
Celte largeur suffit, rè'gnenl deux parallèles,
Légers sillons Iracés pour former le pourtour
De l'enceinte sacrée objet de votre amour.
De l'une à l'autre au centre i-lablissez la ligne.
Qui sépare les camps et tour à tour désigne
Les coups qui, se portant ou dessus ou dessous,
Sonl jugés aussitôt ou bons ou mauvais coups.
Les postes sonl marqués ; on voit six combat tanls.
Avec ordre rangés; trois gardent les devants.
Marchent de front, bravant le sifllemenl des balles ;
Au centre sonl plac(''s, à dislances égales.
Deux voltigeurs : leui' bras, aussi prompt que l'i'clair,
Sans attendre le bond prend la balle dans l'air;
Le coupon osl plus fort, la chance plus certaine,
La bulle perce et rond la résistance vaine.
Lie lu niatn du petit ^act^u
Ce Gioèe va partir tut autre mfimt j-'appri
V LE JEU DE LA. CROSSE
A le.euter Jti ênit ^iuun (lu/i,f tnvt proiet
X finrvent noc^ a^rauvi^nj tui cAûe ifui runjj iirrùe
QUATRIt:ME PARTIE
LE JEU DU MAIL, DE LA CROSSE ET DU CROQUET
I. — Définilion. — Le jeu du mail dans ranti<iuilé, d'après le poi^le latin
Quiiitiis Knniiis.
Lo joii du mail se ilistingiie du jeu de Ijalle ordiuairo en. ce que la
boule, au lieu d'être lancée avec la main, est chassée avec un instrument
de formes variées.
Les Romains ont connu et i»ratiqué le jeu du mail, et le poète latin
Quintus Ennius, qui était né deux cents ans avant Jésus-Christ, parle
dans ses œuvres de cette pratique. Il raconte que les jeunes f^ens de
son temps jouaient aux boules en les chassant devant eux avec une
grande violence; pour désigner cette action, il se sert du mot latin tudi-
tantes, qui signifie, à proprement parler : poussant avec un maillet. Nous
n'avons, malheureusement, aucune donnée certaine sur la forme de ce
maillet, ni sur la manière dont ce jeu était pratiqué.
II. — Les divers jeux du mail établis dans Paris.
Le jeu du mail a été universellement répandu en France, et toutes les
grandes villes possédaient plusieurs emplacements qui étaient spéciale-
ment affectés à ce jeu.
Tout près de l'Arsenal, dans l'île Saint-Louis, il existait un jeu de mail
où Henri IV s'arrêtait quelquefois quand il venait de rendre visite à sou
ministre. Ce jeu de mail était très nettement désigné sur le plan de Paris
gravé par Vassalieu en 1609 : on y voit une allée plantée d'arbres; des
joueurs s'y promènent, tenant à la main leur instrument, et s'apprêtent
à pousser devant eux la houle.
.H
«^
cd
1118
11 existait un ti-ôs Ix'au jeu de mail dans le jai'din des Tuileries, ([ui
fut agrandi parée que le roi se plaisait à y venir fréquemment.
Nous trouvons de fort eurieux renseignements sur ce jeu dans une
remarquable étude que vient de publier M. Albert Babeau (1); parlant
ATTITUDES DU JOUEUIl
n'APBKS LES Nouvelles rir/les pour le jeu du Mail, publiées chez chaules [iui;ieh, ni7.
des travaux qui furent exécutés dans le jardin des Tuileries en 1722,
l'auteur s'exprime ainsi :
« En attendant qu'on arrachât les charmilles des ltos([uets en partie
détruites par le grand hiver de 1709, on démolit un théâtre de verdure
construit sous Louis XIV et sur les gradins duquel pouvaient tenir des
milliers de spectateurs, pour y établir le mail du roi et construire à
(I) Le Jai-Jiji di-s TuilL'i'ics an tlix-sopliùiiie cl an (liv-liuiliùnio sicl'oK-s, lecture l'aile à l'assemblée
fîénéi'-ale annuelle de rilisloli-e de Paris, par M. AIIktI li^ibean, mendiie de l'Inslilnl. (Exti-ail dos .1/e-
iiiuires de Ui Sociélé de niisloire de l'uris el de VUe-de-rr:iine. Innie XXVIll, l'Jdl.
I!)!l —
IV'\ti'('iiiik'' un h'f^ci' ouri>s de liàliiiiciil pciiil ru ini\v\)iv qui lut (Icsiiiié
à alti'itcr un billnrd pour S;i
Majesté. » (1721.)
Un autre jeu de mail, «[ui
l'ut 1res célèl>re, était situé
dans le plein centre de Paris,
entre les faubourj^s Montmartre
et Saint-Honoré; il subsista
jus(|u'en 1()33, et c'est pour
en conserver le souvenir qu'on
a donné le nom de la rue du
Mail à la voie qui arrive main-
tenant sur la place des Petits-
Pères, près celle des Victoires.
Enfin, il faut sipiUaler le j(>u
du mail dans le jardin du Pa-
lais-Royal, qui était IVécpieuté
])ar la cour et par' la noblesse.
Le jeu du mail a, dans une
foule de villes de province,
donné son nom à la prome-
nade sur la<]uelle il était éta-
bli. .\ Versailles, au dix-bui-
tième siècle, il (existait encore
un jeu de mail. Dan^eau écrit à la date du 12 août 1704 : 'i Sur les six
heures, le roi et la reine d'Augleterre arrivèrent; le roi les reçut dans
le jardin et les mena d'abord dans un endroit auprès du mail, où l'on
avait préparé une collation magnifique. »
m. — Des <|iia(rt' iiiaiii«>i'es de joiior au mail.
Le jeu du mail peut être joué de quatre manières difr(''rentes : T le
rouet^ oii chacun joue pour son compte ; 2° la |)asse, où les joueurs se
groupent par camps; 3° les grands coups, où deux seuls concurrents sont
en présence et s'escriment sur la même boule ; 4° la chicane, qui ne
ditïère des précédentes (ju'en ce (ju'elle se jou(! en plein champ, sur un
sol non préparé.
Le jeu du mail présente une certaine analogie avec le jeu de la
paume et il existait, au dix-huitième siècle, de véritables académies
dans lesquelles on se livrait à cet exercice. Dans un recueil (1) du début
(Il .Ic.a/emi'e iiniiersellc des jetir. Lynn, ISOi.
200
du dix-neuvième siècle, nous trouvons une sorte de code indiquant la
manière dont ce jeu devait être pratiqué et relatant les principaux
usages qui avaient force de loi. (le règlement est promulgué presque
dans les mêmes termes que les statuts des corporations d'arts et métiers,
ce (jui laisse entrevoir la haute estime que l'on avait pour ce jeu :
RÈGLES l'ARTICrUKRES CONCERNANT LE MAITRE DU MAIL OU SON COMMIS OU LES PORTE-LEVES.
Quiconque voudra jouer sera lenu de venir à la loge du maître, ou de celui qui tiendra sa
place, pour y prendre un mail el des boules ; el, s'il en emporle, il n'entrera point au jeu sans
avoir averti ou faire avertir le maître ou le commis pour lui payer le droit de son jeu, suivant
ce qu'on a coutume de donner.
Le maître fournira des boules, des mails et des lèves à ceux qui n'en auront point moyen-
Ze^ ôiijlc^ qu^€^ c^^cu jfou^^eavec tant ete^irrc
LE JEU DU MAIL
Ii'aI'IIÈS une GllAVUUF. I>E N. aUliUAIin, XVIir SIÈCLE.
Ctpa^san£ par Ui- pas^c
VtttEinpj' tpu tûuj'^urv Cvurc nous vre^eme- la, &ace ,
nant dix sous pour tout, depuis six heures du matin jusqu'à midi el depuis une heure jusqu'au
soir, mais ceux qui ont leur équipage de mail ne devraient payer que la moitié, ou tout au
plus les deux tiers ; et, en ce dernier cas, le droit pour le porte-lève y doit être compris.
Si l'on casse un manche du jeu, on payera vingt sous ; si l'on perd ou si l'on casse une boule,
dix sous; si l'on perd la boule de passe, vingt sous; si l'on perd ou si l'on casse la lève,
trente sous; et, si l'on casse la tête du mail, on ne payera rien pourvu qu'on en rapporte les
morceaux, faute de quoi on payera trente sous; et pour louer une lève et une boule de passe,
cinq sous.
Les porte-lèves doivent aller toujours devant le coup, autant qu'il est possible, pour crier
gare, prendre garde aux boules, empêcher qu'on ne les change ni qu'on les perde, el les
remettre dans le jeu quand elles sont sorties, vis-à-vis leiidroit où elles se trouvent.
201
l\'. — Oriçhie byzantine <Iii joii «lo polo.
Lo jeu (lu mail i)cut (''f;alemcnt ètro joué à cheval et |)ron(l alors le
nom tle /iiilo. Vn historien i;rec du douzième sièeh», Ciunamus, nous
apprend qu'à eetle ép0(|ue ce jeu était fort apprécié- de la jeunesse ;
dans son Hislairc (livi'e VI, ehap. v), il nous dit :
LE JEU DU MAIL
d'APUÈS van LOCHOM, XVir SIÈCLE.
Poiii- se livrer à net exercice, quelques jeunes gens, parlagés en deux camps, cliassenl de
l'un à l'autre une boule faite de cuir, grosse comme une pomme, sur un terrain liien uni, ou
du moins qui a paru convenable aux joueurs. Sur celte balle qui est comme le prix de la lutte,
et qu'on place au milieu, ils courent au galop, chacun tenant à la main une baguette de
moyenne longueur terminée par une large courbure dont le milieu est fait de cordes à boyaux
dessécliés et entrelacés comme un fdet. Chacun cherche à dépasser les autres et s'acharne à
conduire cette Ijalle à un but qui a été désigné d'avance ; car, lorsque poussée d'un côté el
d'aulre elle a nlteinl le but, la victoire appartient à celui qui l'y a menée (i).
Le jeu de polo a été particulièrement eu honneur chez les Persans,
qui y voyaient un moyen de se perfectionner dans l'art de monter à
cheval, et ou trouve dans les manuscrits orientaux de fréquentes repré-
sentations de ce jeu. En Angleterre, et particulièrement en Ecosse, on
joue beaucoup à la crosse, qui est sensiblement le même jeu, à cette
différence près que le maillet, au lieu d'être droit, est léi^èremeut
recourbé.
(1) Quatrcmore, Histoire ilex SiilLins imimloiilis iVEinnde, ISiJ", in-l°, l. I". l'i-c
•e parlie. pa^c 122.
2n
202
V. — \,o jou do la «"rosso au ti'<M/îf'ine sièelo.
Le jou de la crosse remonte, en France, à une épo([ue très ancienne,
puisqu(>, dans les rôles de la taille de 1292, on voit fi|;,urer deux mar-
chands crossetiers qui payaient l'impôt ; au surplus, l'abbé Lebœuf, dans
son Histoire du diocèse de Paris, rapporte une tradition très ancienne
suivant laquelle le voyai^our arrivant dans la capitale rencontrait un
ATTITL-UES DE JOUEUR
d'apuks les XouwUes règles pour le jru du Mnil, i'I'hlikes chez ciiap.lks mr.iEii, nO.
grand nombre de Parisiens occu[)és à jouer à la crosse sur les remparts.
Dans la ville d'Avranches, au quinzième siècle, la crosserie se prati-
quait avec un véritable cérémonial : au jour fixé, tous les liabilants se
rendaient sur la grève de la Saudière, non loin du pont Gilbert, et l'évècpie
lui-même donnait le signal en frappant la boule avec un maillet en forme»
de crosse; au même instant, les cloches de la catlu-drab» sonnaient à
— -2()[i —
t(Hit(' voire et les liahilaiils [)assaiL'iil lout le reste du jour à se livi'er
à leur plaisir l'avori.
Ce jeu s'est uièiue maiuteuu jus(Ju'h nos jovu's dans l'Avrauehaiu,
uiilauiiueul à (leuets et sur tovile la f;rève de la l)aie du Mcuit-Saiut-
Mieliel ; il u'a disparu couiplèteiueut que vers 18iO(l).
Les boules qui étaieut enq)loyées pour le jeu du luail devaient être
d'une nature toute particulière; nous trouvons, à ce sujet, dans VAca-
LES ATTUIBUTS DU JEU DU MAIL
d'à pu 1:3 LE LIVIl K 11 K KATZ « K [ N D E [\ S P E E I.
demie des jeux (2), quelcpies détails et anecdotes véritablement dignes
d'être cités :
I.cs boules, lisons-nous, sont île racines île buis, les meilleures viinnenl des pays eliauds,
on les trouve dans les fentes ou petits creux de rochers, où il fait des nœuds. On les coupe et
on les laisse sécher un certain temps ; après quoi, les ayant lait tourner et battre à grain
d'orge, on ne joue qu'à petits coups de mail sur un terrain graveleux; on les joue ensuite
plus fort, on les fait frotter avec de la pariétaire toutes les fois qu'on les accommode après
qu'on s'en est servi ; enfin, h force de coups de mail et de les faire rouler, elles deviennent
dures.
,1 I,'al)h.- K. l'ii;con, U- Diocdse (lAvninchcf, loiiic I-', pilles ll,i-lll.
(2) Edilidii (II- I8I1;., loiiic II, |uif,'e ii.'i.
— 20'i —
Un iiuirchand (.le boules de Provence en appoi'l.'i un gros Siic h Aix ; les joueurs, qui
élaienl en grand nombre dans cette ville, les aclietèrenl toutes trente sous la pièce, h la réserve
d'une seule, qui, étant moins belle que les autres, fut rejetée. Un bon joueur, nommé Bernard,
vint le dernier, il acheta cette boule de rebut, dont il ne voulut donner que quinze sous ; elle
pesait sept onces deux gros et était d'un vilain bois à moitié rougeâtre; illajoua longtemps,
la fit et elle devint si excellente, que, quand il avait un grand coup à faire, elle ne lui manquait
jamais au besoin et lui faisait immanquablement gagner la partie ; elle fut appelée : la
Bernarde.
Le président de Lamanon, qui l'a eue, depuis, en a refusé plusieurs fois cent pistoles.
Louis Le Brun, un des plus grands joueurs de mail qu'il y ait eus en Provence, qui, dans
un jeu uni, sans vent et sans descente, faisait jusqu'à quatre cent cinq pas d'étendue, voulut
faire une expérience avec la Bernarde : il la joua diverses fois avec six autres boules de
même poids et de même grosseur ; son coup était si égal, que les cinq autres boules étaient
presque toutes ensemble à un pied ou deux de différence ; pour la Bernarde, on la tiouvait
toujours à cinquante pas plus loin que les autres; ce qui lui fil dire un jour plaisamment
qu'avec la Bernarde il jouerait aux grands coups avec le diable.
Dans le rt'cueil des Trente-six fifjw'es contenant tous les jeiix^ etc...^
publié eu 1587, le jeu de crosse est désigné ])ar un vers :
Et cependant tous les autres se plaisent
Au jeu de croce
L'auteui' qui a ptiblic'' ce cui-ieux volume cite comme analogues les
jeux de » <|uilles là », du <( cochonnet vu devant » et de << la truie ».
\\. — I.c jieii do la Iriiic et «les quatre aveiiglesi
Au sujet du jeu de la truie, nous avons trouvé une anecdote assez
curieuse racontant comment ce jeu avait été pratiqué à Paris au mois
d'août t'i2.'S :
Devant l'hùtel d'Armagnac, situé rue Sainl-Honoré, et sur une partie de l'emplacement des
bâtiments du Palais-Royal, on avait fait dresser un champ clos, où l'on enferma quatre
aveugles armés de gros bâtons et couverts d'une armure. Avec eux se trouvait également un
cochon destiné à celui des quatre combattants qui viendrait à bout de le tuer.
L'historien contemporain tpii a conservé ces détails, et (jui était un
riche et considérable bourgeois de Paris, assistait sans doute à cetle
fête, qu'il appelle une « bataille étrange, et qui réjouit fort les assis-
tants » .
A nn signal doimé, les quatre aveugles, agitant en l'air leurs unisses
ou Initons noueux, s'avancèrent au hasard pour Irapper l'animal, dont
la mort seule d(nait finir le combat. Aux grognements répétés de la
victime, cliatpie fois (ju'ils s'approchaient du côté oii ils avaient entendu
sa voix, chacun d'eux, accourant à Ut fois et h-appant au hasard, portait
— 206 —
de nulcs eoiips, recevait tour ;i tour et faisait des Idessiires d'autant i»lus
terribles (lu'il était
iiu[»ossible de les pa-
l'er.
Si l'on en croit
l'auteur du .Journal d'un
h<tur(jeois do Paris ^ sous
Cliarles VI, ce jeu ne
fit pas fortune. Cette
lutte d'aveufi,les, où ni
la force ni l'adresse
ne pouvaient trouvei'
[dace, et qui semblait
moins un combat
(pi'nn massacre, ré-
volta bien i>lus (ju'elle
n'amusa, bien (pi'à
cette époque on ne se
montrât pas bien dé-
licat au sujet de ces
amusements popu-
laires.
Qiianl aux aveugles, ils
se donnèrent, clil l'auteur,
de si grands coups de bâ-
ton que dépit leur en fut ; car, quand le mieulx cnidoienl (croyaient) frapper le pourcel, ils
frappaient l'un sur l'autre ; s'ils eussent élé armés pour vrai, ils se fussent tués l'un l'autre.
LE JEU DE LA TltUlK ET DES AVElIfiLES
d'aPHÈS une GRAVUBE ITAIJENNK DU XVI» SIÈCLE.
VII. — Le paille-maille, aiieêlre du jeu tle eroquel.
De nos jours, le jeu du mail et le jeu de la crosse ne sont plus
pratiqués, du moins sous ce nom. Nous avons, toutefois, le jeu du cro-
quet, ([ui offre une grande analoj:,ie avec ceux dont nous venons de
parler.
Au seizième siècle, le croijutd était connu cliez nous sous le nom de
« Paille-maille » ou <( Pèle-mèle » et était l'amusement favori de la
noblesse française. On le trouve aussi niejitionné vers cette époque, à
Florence, sous le nom de « Palamaglio » ; il était réservé aux diver-
tissements du carnaval. Plus tard, sous le nom de « Paill-maillet » , ce
jeu passa en Angleterre, on il obtint une grande faveur, à Londres sur-
tout, et il donna nu^me son nom à im ipiartier de la ville. Plus récem-
— 207 —
nionl, le nom »lo co jeu a (''li'' chauffé en celui de « ('i'(ik<>ll "; l'aneieu
« Paille-maille » a l'ait ainsi chez nous sa réapitarition sous un nouveau
nom.
La principale modification cpie 1(> Paille-maille reçut, en Anp,leterre,
/éy ôrt^^-iùet
consista dans l'adjonction d'arceaux qui auii,nientai(^nt la difficulté du
jeu, tout en exigeant une moins i^rande dépense de forces, et c'est proba-
blement pour cette raison qu'il a été adopté anjourd'bui }tar tout le
monde.
VIII. — Le jeu do la crosse, d'aprf's 8(ella.
Autrefois, les joueurs étaient moins délicats (;t pi'éférai(>nt l'exercice
sensiblement i)lus rude de la crosse, qui entretenait la .souplesse des
muscles et donnait au corps une chaleur salutaire ; c'est, du moins, ce
que Claudine Stella se donne la peine d<> nous apprendre dans les vei'S
qu'elle a inscrits sous son estampe du jeu de la crosse :
Malgré It; temps et la saison.
Ceux cy sortent de la maison,
Et s'en vont crosser par caprice ;
Et là chacun pour le Degot
S'escliaufTe, et, ilans cet exercice,
La crosse Ifur vaut un fagot.
208
LA Crosse
d'aPIIÈS une CO.MI'OSITION IJK CLAUDINE BOUZONNET STELLA, XVII" SIÈCLE.
IX. — Le jeii ro.val de la passe.
An <lél)ut (lu (lix-lniitième siècle, un certain Desporte.s avait imagine
nu jeu ({u'il avait dénummé lo Jeu royal do la passe. C'était une com-
binaison du j(>u dn mail, du jeu du trou-madame et du jeu de billard.
Par sa dimension, il se rapprochait du jeu du mail puisqu'il mesu-
rait en longueur uu peu plus de dix toises, soit environ vingt mètres,
et en largeur de douze à treize mètres; on voit j»ar ces données (pie
c'était un véritable jeu d'exercice.
Le jeu royal de la passe se ra[)procbait du jeu du trou-nuidame, eu
ce que les joueurs devaient faire passer la boule sous l'un des treize
arceaux à chacun des(piels était attribuée une valeur nunu''ri(pie, difîé-
reute, constituant le point que devait enregisti'er le marqueur.
Enlin, ce jeu tenait du jeu de billard parce qu'il se jouait avec des
blouses et que l'on devait obtenir également certains efl'ets en poussant
la bille de son adversaire. Pour compléter la ressemblauce, il est bon
de signaler le coup qui était compté comme bricole, c'est-à-dire aju-ès
que la boule était venue frapper contre la pierre de reitroi jouant ici le
rôle des bandes de ]>illard.
LE JEU HOYAL DE LA PASSE
DUES3É POUR SA MAJESTÉ, PAU DESPORTES, 1717.
— 210 —
L'auteur a pris soiu, dans le fascicule (jui accompaj^ne la j^ravure,
d'indiquer la manière dont il entendait que ce jeu fût pratiqué et nous
en donnons ici un rapide aperçu :
« Ce jeu se joue à deux contre deux ou trois contre trois, n'ayant
» chacun qu'une boule marquée et numérotée pour la distinguer de
» celles des autres joueurs.
» Les parties se font i:,éuéralement eu 100 points et, lorsqu'un joueur
» fait plus de points que le nombre convenu, il perd la partie. (Chacun
» joue suivant son ranj;; et le numéro de sa boule.
)i Pour commencer la partie, tous les joueurs se placent sur la raie
» marquée (Ubul et chacun, à tour de rôle, tire aux passes, composées
» de treize arceaux de f(M' placés à une certaine distance.
» Les joueurs, |Jour lancer la boule, se servent d'un instrument
» nommé Ihe; ils lancent la boule soit à la volée, soit en la roulant, et
» peuvent, au lieu de tirer directement à la passe, s'ajuster sur la ligne
» de passe placée à trois pieds en deçà des fers.
» Une boule faisant bricole et passant par hasard dans l'anneau des
» fers gagne la partie. On compte les points faits par toute boule ren-
» contrée à laquelle on fait franchir les passes. Quand la boule s'arrête.
» dans les fers, celui à qui elle appartient peut la faire passer en jouant
» du manche de la U'i^e comme au billard.
» Tous les coups décisifs des parties ne sont comptés au joueur qu'au-
» tant qu'ils ont été annoncés avant de frapper la boule. Les principaux
» coups sont : Tirer à la bricole; tirer à la passe; tirer à l'anneau, et
» tirer à la planche. »
CINQUIEME PARTIE
LE JEU DU VOLANT
VjC jeu ne semble pas reuionter à une bien haute antiquité, et quoique
certains auteurs prétendent en avoir vu la représentation dans uu
manuscrit du seizième siècle, manuscrit qu'ils se gardent bien de
désigner d'une manière plus précise, nous ne pensons pas qu'il
remonte à une date antérieure à celle de l'invention des raquettes de
paume.
^11 —
I. — Le jeu du volant <le la reine t lirisCiiie de Suè<le.
iNous ne trouvons do renseignements précis sur ce sujet qu'un dix-
septième siècle : on dit, en effet, que Christine, rillustre reine de Suède,
aimait avec passion ce jeu
et ([u'elle forçait les plus
grands persoiniages à s'en
amuser comme elle ; c'est
ainsi qu'elle proposa à
l'illustre savant Bochart,
de jouer avec elle au ao-
lant. Une pareille invita-
tion équivalait à un ordre
et Bochart dut accéder
au désir de la reine ; ses
amis et ses admirateurs
le blâmèrent de cette fai-
blesse, ce en (juoi ils
eurent grandement tort.
Peu soucieuse des rè-
gles du protocole, la reine Christine obligeait les grands seigneurs de sa
cour à quitter leur manteau et [eur perruque, et, tant bien ([ue mal, le
volant était poussé d'une raquette à l'autre, et voltigeait dans les airs
à la grande satisfaction de la reine.
LE JCU m C(inlA\Tl.\
d'aI'IIKS ^J■^E CI1AVI.'1IE nOLl.AMlAISli DU XVII" SIÉr.LK.
II.
Le volant de Frédéric de Prusse.
Bochart ne fut, du reste, pas le seul à subir les fantaisies de la reiue,
et on comprend facilement qu'à une époque où l'on ne badinait pas avec
l'étiquette, cet exercice, plutôt violent, s'harmoni-
sait mal avec le port des énormes p(MTui[ues qui
étaient alors à la mode.
On cite encore, sur le jeu du volant, une anec-
dote qui a été rapportée de différentes manières
par plusieurs auteurs mais dont le fond reste tou-
jours le même. Le Journal de Bmiilhnt^ à la date
de 1787, raconte que le jeune Frédéric de Prusse
s'amusait nn jour à jouer au volant dans le cabinet
de travail de son graml-oncle Frédéric II. .Après
quelques coups jilus ou moins adroits, le jeune Frédéric envoie son
LE VOLANT
D'APIIKS VICTOIl ADAM
212
volant sur le bureau du roi ; colui-ci le prend et le rend aussitôt, la
partie continue et le volant ne tarde pas à retomber une second(! Cois
au milieu des papiers
de Frédéric H. Ce
dernier restitue en-
core au joueur mala-
droit son jouet, non
sans lui adresser (piel-
que réprimande ; la
partie reprend son
cours, mais une troi-
sième fois le joueur
inalliabile envoie sa
balle juste sur le pa-
pier que le roi était
occupé à couvrir d'une
écriture fine et ser-
rée. La mesure était
comble et Frédéric If,
saisissant le volant,
le fait disparaître dans
les ju'ofondenrs de
sa poche ; l'enfant de-
mande qu'on lui
rende son jouet et,
sur la réponse néga-
tive du roi, il réitère
sa demande mais n'es-
suie qu'un nouveau
refus. Se campant
alors résolument devant son grand-oncle, le jeune Frédéric lui dit :
.( Plaira-t-il bientôt à Votre Majesté de me rendre mon volant? Répon-
dez oui ou non. » La légende ra|)porte (pie le roi, enchanté de la fer-
meté de langage de son i)etit-neveu, qui devait lui succéder sur le
trône, lui rendit l'objet de ses désirs en lui disant : «Tiens, le voila
ton volant, je vois que tu es un bi'ave garçon et que les Allemands ne te
reprendront pas la Silésie. » On pourrait dire que le jeu du volant est
une excellente épreuve p(jur façonner la jeunesse et lui donner à la fois
l'habitude du calme et de la décision, car, pour réussir dans ce jeu, i\ con-
vient de saisir le moment propice, sans courir et sans s'agiter mal à propos.
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LEJCL Ub VOL\Nr A ULU\ UA(JLCTlEs
LAi'llIb U\r OIIWCIII AIlIMiNUI I>b \\II« Ml ( I I
— 'il3
lit. — niirërciils noms du \oli)n( ■■«'■siillanl do son modo <l<' riibi-ioiilioii.
A l'oi'ii^iuo, le volant so coiupusail siiii|iI('iiiLMil (ruiic sorte de houclion
lie lièi;e ne portant ([ue deux plinnes. Dans le ti'ajet d'une ra([iu'ltc à
J.\' éca dtL Jôlaiit
On voit Jouv/in viu C^jtutU, F.cliaujlW rliu uiijfuiie Ain.jiH
PoJ- un mr ^,ott et charr,<^U. Ûut l/PiLiiic rt U Ra^iielU . ..
l'autre, le volant tournait censénieut sur lui-uièuie et de là lui vient le
nom de iiilcoliau, sous leijuel il est désigné par les Champenois.
On se servait généralement, pour garnir le volant, de deux longues
plumes de coq et c'est assurément à cette habitude que l'on doit le
nom de coquanliii^ sous lequel ce jeu était connu dès le règue de
François I".
— 214
Dans (|iiel({U('s pays, et iioturament dans l'Anjou, le volant est appelé
(jrwdio, parce qu'il était garni avec des ])]unies de pie-grièche, ou bien
UNE PARTIE DE VOLANT A LA .MAISON
ii'ai'Iiks i;xK GiuvuivE TiHKE DU l^eciicil de dessus de labaticres, xvii" sikc.le.
encore parce que la disposition des plumes ressemblait pbis ou moins à
cet oiseau.
Dans le Lyonnais, le volant est appelé iiicaiulcuu, parce qu'il est
orné de plumes de pie, dont les couleurs blanche et noire sont placées
alternativement.
I\'. — Définîlîon du jcii de vulnnl.
Dans VEncyclopéilie iiiêthodi(jue\ nous trouvons la défmition suivante du
volant : » C'est un petit peloton de liège rond en dessous et plat en des-
sus. Il y a sur le plat de petits trous, dans lesquels ou fiche des bouts de
plumes, disposés en pointe par le haut. »
Les règles du jeu ne sont pas laites, ajoute l'auteur d(^ cette note,
et les joueurs en commençant leur partie en établissent à leur choix.
Le jeu du volant présente cette particularité qu'il est admis un peu
par tous les gens. Les tout jeunes enfants s'exercent à faire sauter le
volant sur la raquette, et c'est là im excellent exercice (jui les oblige à
conq)ter le nombre de coups qu'ils peuvent recevoir la balle empennée
sans la laisser miséral)lement retomber sur le sol.
Un peu plus tard, au moment de l'adobiscence, les jeunes tilles jouent
entre elles au volant et la grande habileté consiste à rester le plus long-
t(Mii[ts possiMc (Ml |»lac(' cl .'i l'ccovoir le volniil soil en t''l»;iul;iiil le lirns
s'il t'sl l;iiic('' 1111 |)«'u loin, soit, au cdiilrain', en le ronvoyant vivcmoiil
LA GOUVEPvNAXTE
Al~ll<frc' /f IIH/IOW htpccn-U Ir ijaqrrcus ,fu.'U prrmttlite
à CAu- .!^„,niy ?^ r.-c P.iifaiil ?e r.lmnur ,> .fou Volant
r A^.:. .,., .r' /...
P D P.
d'un rcvci's de main si! nienaco de passer pai'-dessus la tète de celle tiid
lient la racjuetle.
Los «Mdants particulièrement habiles se servent de deux volants à la
fois et les lancent en lair, de façon qu'ils se croiseul au moment où ils
arrivent au |)lus haut point de leur course.
Ce jeu est fort élégant, mais il exif>e une î^rande habileté, ce qui n'est
pas à la portée de tous ceux qui veulent se livrera cet innocent exercice.
— 216 —
\ . — I.e volant an eorneC.
Au commonccmeut du dix-noiivième siècle, on inveiitii le volnnt
assis ou au cornet; ce jeu
n'eut pas une bien lonyiie
durée, puisque dans dans un
recueil de 182G il est déjà
considéré comme démodé :
Dans cel amusemont, on substitue
;ï la raquette un cornet de cuir ou de
carton fixé au bout d'une baguette de
.10 centimètres de longueur environ.
On reçoit le volant dans le cornet et on
le l.ince à son vis-à-vis qui le reçoit de
la même manière. Ce jeu n'est pas
aussi facile que le volant ordinaire, il
est aussi moins répandu.
On raconte (ju'en 1829 la
duchesse de Berry était en-
core une joueuse de volant
très distiuf^uée; elle comptait
aisément jusqu'à deux cents
points sans que le A'olant
(ju'elle recevait manquât une
seule fois 1 entrée du cornet.
11 existe encore une autre variété de ce jeu, moins connue que la
précédente; ce n'est pins un cornet dont on se sert pour recevoir le
volant, c'est un bâ-
tonnet qui se ter-
mine par une
pointe, comme le
côté pointu du bil-
boquet. A trois pou-
ces de la pointe est
une embase ou ar-
rêt qui sert à rete-
nir le volant et à
l'empêcher de glis-
ser le long du bâton.
Le volant, dans
cette variété, afïecte une forme spéciale, (l'est un anneau de bois dur
sur lequel sont implantées des plumes.
LE JEU UU VOLANT
n'APUKS INR KSTAMr-l-; IlK GIIAVIÎLOT, XVIII'; SIIXI.K .
L'NK PARTIE DE VOLANT
ii'apiiks unk LiTiiocmpiiiE nu six' siècle.
— 217
\\ — Avaiilaaos «lu j|«mi <Iii volaiil poiii' la jciiik'sso.
L'autour de la Cijiiimdxtiqiic de la jntncxsc. en 1803, reconimaiult' ce jeu
CORVÉES ENFANTIINES
aux jeunes filles; il estime que, pour elles, ce passe-temps est non seu-
lement une agréable occupation, niais un des exercices les plus hygié-
ni(iues qu'on puisse leur recommander :
CAliTE 1>'.U)1U:SSE UXN PAPETIEli, MARCHAND DE VOLANTS, xix» sikcle.
Pourquoi négliger ce joli jeu, mesdemoiselles, dil-il; tout ce qui tlemiinde de la grâce el de.
1,1 légèreté vousappartienl si irilurellemenl 1 Cel exercice n'a rien que d'aimable; il s'accommode
2^1
— 2IS —
h tous les âges, à tous les temps et à tous les lieux. Fait-il beau? on s'exerce en pleine cam-
I.E VOLANT Al! CORNRT, h'apiik^ unk i.iTiiiniiupiiiE i.i; i.k I'Iiinck, 1823.
pagne. Le temps esL-il mauvais? un salon, un portique remplacent lacampagne, elles avantages
LE VOLANT AU CORNET, d'aimiks iwe kstami'E dkstimîk au jku iik la famasmaoouik, xix" sikci.i:.
sont les mêmes, par rapport à la salubrité de l'exercice, ce qui est loin d'èlre à dédaigner.
- ^il9 —
Un autre agréiiifiit cncoi'c de cet exercice, c'est que ses insiruments ne sont ni difficiles, ni
dispendieux à se procurer. Mais un volant est bien fragile, sa légèreté l'emporte et l'égaré quel-
quefois ; le plus petit accident le froisse, le gâte et le rend incapable de servir une nouvelle fois.
Eli bien, on a le plaisir d'en f.tire un autre : le premier sera mal, très mal; on recommence, on
réussit mieux; on réussit complètement, et c'est un petit succès qui a son mérite et sa gloire.
Il n'est pas très difficile, d'ailleurs, détailler un petit morceau de liège en forme de cône obtus,
de le couvrir par-dessus d'un morceau de velours ou d'autre étoffe, de le percer en dessus d'une
douzaine de petits trous, dans lesquels on dispose, en calice, un pareil nombre de plumes uni-
formes, et proportionnées à la grosseur du cône?
^ ^a/a.n^.
En parcourant le recueil de M. de la Mésangère, on voit qu'en 1824,
le jeu du volant était revenu eu honneur dans la plupart des intérieurs
parisiens :
Depuis quelques semaines, on a repris le jeu du volant dans les salons, on y joue des heures
entières, le soir aux bougies. Mais il faut des étages élevés et les petits ménages, qui veulent
imiter les grands, jouent de côté, ce qui rend le jeu plus difficile et moins amusant.
\'1I. — Gravures représentant le jeu du volant.
Le volant se joue ordinairement avec une raquette. En étudiant le jeu
de i)aume, nous avons déjà parlé de cet accessoire du jeu et nous n'y
reviendrons pas ici.
2:20 —
On s'est servi ])ieii plus fré(|ueiiiineiit du battoir (1) pour renvoyer
le volant, surtout an sei-
zième et au dix-septième
siècle; c'est un instru-
ment de ce genre qui
est re])résenté dans la
gravure de Stella, où
deux enfants se ren-
voient le Coc/,anfin, pen-
dant que leurs petits
camarades sont attelés
à un char minuscule
(ju'ils traînent conscien-
cieusement , comme si
c'était un devoir qui
leur incombait. La lé-
gende de cette gravure
dépeint très exactement
la situation :
LE JEU DU VOLANT
( Jeudis de ma lanle, \i\' sikcle.
Si ces joueurs n'adressent bien.
C'est que le volant ne vaut rien
Ou que la palette est perci-e :
Mais qui ne riroit des Irav.iux
Que soulFrent ces petits chevaux,
Pour traîner cette carossée.
Sous Louis XIV, le volant était déjà garni d'un jikis grand nombre
de plumes, et un graveur de
ce temps nous fait assister - ^
à une partie de volant à trois,
où un jeune chevalier semble
avoir bien de la peine à
tenir tète à deux dames.
Le jeu du volant se pra-
tique généralement en plein
air ; toutefois , les joueurs
adroits, qui sont sûrs de leur
adresse et ne craignent pas J'-u i^es gu.vces, dapiiks um; litiiugiiaimue he victou adam.
!l) C'est prubublciuent à ccUe nianiùre de jouer au volant qu'il est l'ait allusion dans les HislorieKes
de Tallenianl des Réaux tome U, pape 78, : ce Un jour Notent Hautru, capitaine de la Porte, en jouant à
la paume ou au pros volant, avec le roy, luy cria : « A vous, Sire. " Le loy manqua : ' .\li ! Mainienl.
dit Nogenl, voylà un beau Louis le Juste. » H ne s'en fascha point. ■>
±21 —
d'ouvoyer leur balle dans les glaces ou au milieu de (piel(|uc étagère,
peuvent fort bieu faire une })arlie dans <juel([uo grande galerie ou
même dans un salon. C'est une scène de
ce genre que représente la gravure tirée de
la suite de modèles |)our tabatières, qui a
été exécutée au dix-sep.tième siècle, et qui
contient toute une série de su,iets gra-
cieux. Cbardin, dans sa jolie gravure cou- ..M^W^ ■ >
nue sous le nom de /« Gouvernante, nous sSbI*!®?
donne à penser qu'à son épo([ue les en-
fants avaient infaiiment plus de goût pour
le volant que pour l'étude :
Malgré le minois liypocrile
Ell'air soumis (11- cel enfant,
Je jugerais qu'il prémédite
De retourner à son volant.
En 1818 on a publié dans la série des
caricatures du Bon Genre, qui était une sorte
d'annexé de la publication de M. de la Mé-
sangère, une planclie intitulée le jeu de la
bague volante qui est également intéressante
pour l'histoire du costume à cette époque.
Le Journal des dames et des nmdes, pidîlié
en 1820, prend prétexte d'une partie de
volant pour nous donner la représentation
d'une élégante toilette de jeune fdle, qui
est ainsi désignée : « Ruban de satin
» dans les cheveux; robe mousseline à
» côtes garnie de volants pareils et fron-
» ces; canezou de mousseline; teinture de
» velours sans bouts. » Une autre gravure
de la même époque nous représente deux
jeunes filles dans un élégant costume, qui
semblent fort occupées à ffiire voler le
volant d'une raquette sin* l'autre. Enfin,
vers 1835, Deveria a consacré une de ses charmantes lithographies au jeu
du volant, et, dans cette image, les pantalons portés par le petit garçon
et la petite fille semblent taillés sur le même modèle, ce qui était, paraît-
il, le dernier mot de l'élégance.
LA .lOUF.USE 1)K VOI,\NT
i;s iJNK unAvi;iiii: I'UDi.iiciî dans i.e Journal
des dames et des modes, 1820.
222
^ III. — Poésie sur le jeu du volanl.
On a fait, sui' le jeu du volant, un certain nombre de fables, dont
m^^
LliS AMUSEMENTS DE LA JtLNESsE
d'aPIIÈS une LITHOGnAPHlE DE 1850.
la moralité, quelque peu puérile, n'en est pas moins absolument recom-
mandable :
Monsieur F.aiifan sait prendre un papillon,
El croit n'ignorer nulle chose;
A l'entendre surtout, c'(^stau jeu de volant
Qu'il est savant.
« Voyons un peu celte haute science, »
Dit le grand-père finjoueur.
Une salle est choisie ; en place est chaque acleur,
Et la partie enfin commence.
Au premier coup le volant est à bas :
C'est qu'il faut être prêt; Fanfan ne l'était pas :
Au second tour le jour l'incommode.
« Changeons. » Même succès. <■ D'après votre méthode
J'ai voulu jouer, voyez-vous;
Je le ferai, s'il vous plaît, à ma mode,
. El je suis sûr de tous mes coups. »
Au liège épais un plus léger succède.
La raquette est bien lourde à présent. « Qu'on me cède
Celle-ci. — Quoi? — La vôtre, et je vais vous lasser.
— La voici. » De son mieux il guette
224
Le volant qui s'en vîlmiI passer
Au beau milieu île sa raquelle.
11 regarde, ô surprise! et ne voit au cerceau
Pas un cordeau.
« Quoi, c'est avec ce bois... — Hé oui vraiment! Ecoule.
De son talent joueur qui doute,
Ne donne pas dans le panneau. »
IX. — I.o jou des grâces.
Une dos variétés du volant est le «jeu des ji,Tàces », qui porte divei>s
noms; certains auteurs l'ont
désigné sous le nom de
(I cerceau volant » et, dans
la série des images du Bon
Genre, il est, avons-nous vu,
(jualifié de <i jeu de bagne
volante » .
De toute façon, ce jeu
est d'une invention relati-
vement récente, puisque
M. Paulin Desornieaux,
qui en a donné une des-
cription dans son recueil
en 1820, en parle comme
d'un jeu tout à fait nou-
veau, et il ajoute : « nous
croyons que ce jeu pren-
dra faveur. »
La manière la plus
simple et la [dus habi-
tuelle de prati([uer cet
exei^ice comprend deux
joueurs ; chacun est muni
de deux baguettes de bois
léger, longues de deux
pieds environ. La bague
ou ceiceau volant est for-
mée d'un petit cercle d'osier
d'un diamètre de 15 à 18 pouces. Le bois de ce cerceau est entoni'é d'un
ruban ou, ce qui est mieux encoi^e, recouvert d'une fine peau de cha-
mois, dont la coulure est i)lacée en dehors.
UNE P.VRTIE DE GlUCES
Il'Al'IlKS UN UKCUEII. riE JKUX DU rilHMIKIl EMI'llli:.
— ^23
La hH^iic est plaiM'o ;i r<'xliriiiitù des hagueltrs et les joueurs la
laucent en l'air ou levaut les liras. Celui (\u\ la reçoit doit être assez
habile pour l'at-
traper au vol et
l'arrêter au moyen
d'uu croisement de
ses baguettes.
Le jeu tiic son
uoni des attitudes
gracieuses qu'il
donne au corps ,
mais il faut pour
cela que le joueur
soit d'une habileté
consommée, car,
s'il est mal joué,
rien n'est moins
i;racieux <pie cet
e.vercice et c'est
dans la manière de
recevoir et de lancer
ce projectile que réside toute la grâce du jeu. Le plus souvent on joiu' aux
grâces à deux personnes avec un seul cercciui volant, mais on peut
LE JEU DU VOLANT
ij'amu^s iNi! Lnriofii'.M'iiii; hk hkvkuia, 1S;J2
UIVEKS ACCESSOUÎES DU JEU DU VOLANT ET DU JEU DES GRACES
u'aIMIKS l'album U'I'N FABIUCAM' DU l'ULMlliU EMI'llli:.
rendre la partie phis animée en em|>loyant deux cercles, de façon que
29
— 226 —
chaque joueur ait le sien; il faut alors fîiire preuve d'uue grande habi-
leté, parce que le cerceau vohiut arrive presque au uioment où l'on
vient de lancer celui que l'on avait entre les mains. Les joueurs doivent
également prêter attention à ce que chacune des bagues volantes passe
l'une au-dessus de l'autre sans se rencontrer en l'air, car alors elles tom-
beraient immédiatement sur le sol et la partie serait iuterronquie.
Lorsque ce jeu n'est pas contrarié par le veut et ({ue les joueurs
sont animés d'un mouvement bien régulier, on peut jouer (juatre per-
sonnes à la fois en se plaçant en croix.
C'est, eu réalité, un jeu qui présente d'assez grandes difficultés, et
qui semble réservé plutôt à radolescence ; c'est ce qui expli([ue probable-
ment le peu de durée de son existence et la mince faveur dont il a
joui auprès de la jeunesse.
CHAPITRE V
JEUX DE BOULES
Les billes. — i. Doiinilion. -
ou jeu de la fossette. — ^i
•2. Le jeu de la dispersion ou du cliastelet. — .'i. I,a c Iropa »
La rangelte. — 5. Les f^obilles au dix-huitième siècle. —
('). Dillereiils jeux de billes. — 7. Importation des billes étranf^ères. — 8. Fabrication des
billes à Strasl)ourj;. — t). Diverses représentations du jeu de billes.
Le jeu de boules. — 1. Délînition. — 9. Le jeu de boules chez, les anciens. — 3. Inter-
diction du jeu de boules, par l'ordonnance de Charles Y en i30i). — 4- Anecdote sur
Turenne pris comme arbitre dans une partie de boules. — 5. Les boulingrins au dix-
huitième siècle en .Angleterre. — G. Le cochonnet. — 7. Le jeu de boules d'après les
estampes des dix-septième et dix-neuvième siècles. — 8. Le jeu du clos-porte. — -
9. Poésies sur le jeu de boules. — 10. Tableaux célèbres représentant le jeu de boules.
Le jeu de billard. — 1. Origine commune du jeu de mail et du jeu de billard. — • 2. Le
jeu de billard au seizième siècle. — 3. l.,ouis XIII et le jeu de billard. — /j. Définition du
jeu de billanl au dix-septième siècle. — 5. Louis XI\' et Chamillard. — ('>. Le billard de
Louis XI\', d'après une estampe de Trouvain. — 7. Formes et matières diverses du
bâton ser\ant à pousser les billes. — 8. Le jeu de billard, d'après ^'an Lochom. — 9. Les
billards publics au dix-septième siècle. — 10. La salle de billard du château des Tuile-
ries au moment de la Révolution. — 1 1 . Le billard allégorique de M. de La Fontaine. —
12. Le jeu de la poule au billard. — i3. Le jeu de la Montoison en i8t>i. — 14. Billards
à musique. — l5. lîillards à bandes mobiles. — ifi. Diverses matières servant à former
les tables de billard. — 17. Représentations artistiques du jeu de billard. — 18. Les
règles du jeu de billard mises en vers.
Les quilles. — 1. Le jeu des piquets chez les Romains. — 2. Le jeu des couteaux. —
3. Les squils à l'époque carolingienne. — 4- L^s quilles au quatorzième siècle. ■ — 5. Les
quilles à pirouette. — ('). Roileau réputé un habile joueur de quilles. — 7. De l'utilité
du jeu de quilles pour développer l'adresse des enfants. — 8. Le jeu des quilles suspen-
dues. — 9. Diverses représentations du jeu de quilles. — 10. Poésie sur le jeu de quilles.
Le jeu de Siam. — 1. Disposition de ce jeu. — 2. Supériorité du jeu de Siani sur le jeu
de quilles. — 3. Origine tlu nom donné à ce jeu.
PREMIERE PARTIE
LES BILLES
I. — Déflnilioii.
OLK désii!,ner les billes, telles que nous les connais-
sons actuellement, on employait autrefois le nom de
« gobilles » ; ce sont, dit l'auteui- de V Encyclopédie ,
de petites boules de pierre ou tXi^ marbre qu'on
lance violemment avec le pouce en les ajustant contre
une autre gobille ; l'adresse consiste à frapper de
et à cliasser la bille de son adversaire.
228
II. — Le joii «le la «lispersioii ou du eliaslelel.
Le jeu (le l)ilk'S est loin d'être nouveau ; il était très counu des
aneiens, et Ovide, dans le Nn//ei\ donne la description d'un amusement
appelé (( jeu de la dis-
persion » , (pii est la
véritajjle repi'ésentation du
jeu du c//a.sfekt.
Une des formes les
plus connues du jeu de
billt's , au dix-septième
siècle, était ce jeu du
clnixlelcl : un enfant, de-
bout, disperse -les noix
d'un coup bien ajusté ou
penché et, jouant avec
les doigts, les gagne en
deux ou trois coups.
Onatre noix suffisent à
ce jeu, la quatrième étant
superposée aux trois
autres.
Les auteurs ne sont
pas d'accoi'd pour savoir
si les Romains ont connu
les billes taillées et façonnées telles que nous nous en servons aujour-
d'hui. M. Bec(j de Fou(]uières incline à croire cpie les anciens ont comiu
les véritables billes.
Lorsqu'elles cunsislaicnl siinplcnienl en pdiles pierres de peu de valeur, dil-il, ils ne lui
donnaient pas de nom particulier el se conientuient de les appeler de petites pierres rondes
polies ; mais lorsque Fart y ajoutait son travail, comme on se servait sans doute de matit'i'es
plus prr'cieuses, telles que l'onyx, l'ag^ati', le marbre veiné, on les nommait ocellala.
Suétone dit que l'empereur Auguste, pour se délasser l'esprit, s'amu-
sait à jouer aux osselets et aux noix avec de jeunes enfants.
m. — I,a « Irupa » on jeu de la fossette.
LE JEU DE UILLES AU CEliCLE
fi'Ai'HKs LE Kindempeel, de katz, xvi|0 sifxi.E.
Les anciens Grecs prati({uaient le jeu de la « tropa », ([ui consiste, dit
Pollux, à atteiiidi'e une petite fosse au moyen de glands ou de chà-
Li:s nivEiiS JEUX ue billes
u'ai'Uès les coMi'OsmoNs dk claiiiinf, BorzoxxEi- stella, xyiiiî siècle
— 230 —
taigues contenues dans la main et de faire enti-er dans cette petite exca-
vation le plus grand nombre de fruits possible.
A Athènes, les représentations des pièces avaient lieu aux Diony-
siaques, épcxjue de joie et de liberté pendant laquelle on se livrait à
tous les jeux ([ue Ton pouvait imaginer pour se divertir. La représen-
tation dramatique avait, par elle-même, quelque chose d'une solennité
LL JLL UL LA 13L0(JLE11E
ri'Ai'IlKS l'.MÎ lillAVUllK D1-: C. KlinAll, X\n<^ SIIXLE.
religieuse, et, en sortant, on éprouvait le besoin de se délasser l'esprit.
On jouait alors sur les promenades, sur les places publiques, autour des
temples même à tous les jeux connus, d'adresse et surtout de hasard.
Dans un fragment tiré des Séiipliiens, de Cratius, il est dit : « A ceux
qui sortent du théâtre, il est permis d'envoyer dans la fossette. » Ceci
donne à supposer que ce jiui était en grande faveur auprès des Athé-
niens.
Nous man([uous com[)lètement de renseignements sur l'fMnploi des
billes pendant tout le Moyen Age.
Le nom de bille ou billette existe cep(!iidant, mais, avant le seizième
siècle, il désignait spécialement le jeu de quilles qui présentait une grande
analogie avec le primitif liillar-d en terre. Lr mot bille (h'rive de billette,
— 231
mut (jiii servait aiitix-lViis à (l('sii;iiei' iiu Iruur (m une ti!j,c (h; bois (tu d{\
inctal de diflercnte grnssour.
Dans les inventaires du (juinziènie el du seizième siècle, il est'souv(M)t
([uestion de nienl)les exécutés
pour jouer aux Idlles, mais il
faut évidennueut voir par là
des espèces de billards :
1492. — 2 aulnes 3 quarts
drap vert-gay pour faire bu-
reau et celui atacher et cbjuer
sur une table en la cluunbre
dud. Sgr. à jouer aux billes,
4 I. IG s. 3 d. t.
3 aulnes drap vert-gay
pour couvrir une table d'en-
viron 10 piez pour servir en la
cliaudjre dud. Sgr à jouer aux M
billes, 103 s. t. (10 Cpte roy.
de P. Briconnet, f. 29 et
30.)
1500. — Une table pour
jouer à la bille, couverte de
veloux tanné dont, du vivant
du feu roy (Chai'les VIII), en
fut robbé bien la tierce partie. (luven. d'Anne de Bretagne, 189.)
1550. — A Marcel Frérot, menuisier, pour un jeu de bille quil a faict
en la salle du bal an chasteau d(» Blois. (Cpte roy., cit. Laborde, Glossaire.)
1\', — La raiig-elte.
En arrivant au dix-septième siècle, nous voyons dans la suite des
gravures des quatre âges de Ibomnie, dues au burin d'Abraham Bosc, ({ue
le jeu de billes était considéré comme un des principaux jeux de l'en-
fauce ; d'autre part, dans la série des jeux publiés par Stella, se trouve
une planche spéciale consacrée au jeu de la » rangette »; les six vers pla-
cés au-dessous de l'image nous expli(pient ce genre d'exei'cice d'adresse.
Ils visent tuus à ces monceaux,
Qu'entre eux ilz noment des cliaste.'iux
Pour en jelter quelqu'un par terre ;
Quel qu'il soil il n'importe pas,
Car tout est pris de lione guerre
Pourveu qu'(in rn nielle un à bas.
LEJKU Dli LA GODILLE
i:ne estami'K de ouavelot, wm'^ siècle.
— 232 —
La même îirlistc a consacré au jeu de Ijilles deux autres planches :
la fossette (ma: tioi/aii.r, (jui est, en réalité, le jeu de la bloquette ou de
la tropa grecque, et le jeu île la fossette ahnple^ qui est joué avec neuf
pots et présente, p;ir sa disposition, une grande analogie avec la balle
au pot.
V. — I>es g-obilles au <li.\-Iiuitit>uic .siècle.
Sous Louis XV, le jeu de billes continue à être très en faveur sous
le nom de « jeu de la gobille » ; c'est, en effet, par abréviation du mot
LA SORTIE DE L'ECOiE .
rr.VI'KK.S UNE GIIAVCIIH Dl- I.'kCOLE AN'C.HISE, XV[H" SIÈCLE.
fjobille i[ue nous avons fait le mot hille. Le mot ijulnlle venait lui-même
du mot f/lohilles^ signifiant petit r/lolie.
Les billes, telles qu'elles sont manufacturées, sont de petites boules
de terre cuite, de pierre ou de marbre parfaitement rondes.
Z^ FOSSETTE cni le Jew d& NOYjLUX. .
n'APUÈS UNE OUAVUIIE IlE Alii. W. SAlNT-Al IllN TlllÉE DE LA SCIÏE (Us }lHHs l'olisson^ de PoriS, XVTIie SIÈCLE.
30
234
VI. — Diirôrenls jeux de billes.
La règle du jeu de billes est des plus simples : il s'af^it de faire
sortir du cercle une ou plusieurs billes au moyen d'une autre bille
chassée violemment à l'aide des deux premiers doigts de la main.
Les billes sont le billard des enfants : il y a une seule blouse, qu'on
appelle le pot ; c'est une petite excavation creusée en terre ; un des
Uly ^^MA^/^.
joueurs, placé à une distance convenue du pot, tâche d'y l'aire entrer
sa bille, en la roulant.
Il existe un grand nombre de manières de jouer aux billes, et l'un des
modes les plus attrayants est désigné sous le nom àçr pont des neuf arches ;
c'est une sorte de jeu du trou-madame, puisque le joueur doit faire
passer sa bille sous de petits arceaux numérotés, et qu'il paye une
redevance au péager chaque fois qu'il touche une des arciies du pont.
On joue aussi au biit^ c'est-à-dire à frapper une bille placée à une
certaine distance. Dans le jeu de la poursuite, les deux adversaires
cherchent à atteindre leurs billes en marchant toujours en avant. Le
jeu du cei'cle et celui du triangle sont la manière la plus habituelle de
pratiijiic'i" lo jeu; [loiir i^agncr 1rs Itillcs phicrcs au ceulre de la ligiu'i;
géoméh'iquo, lo joueur doit les l'aire sortir en les frap|)€Uit avec eclle qu'il
lance avec les doigts. On joue aussi au jeu des fortilicatious, ([ui est
composé de plusieurs cercles concentriques. Notons, enfin, les jeux de
la ])l(t([ueUe, du |)ot ci de la tapette.
VII. — Iiiiporinluui «les billes éCraiig'èrcs.
Autrel'ois, la Hollande avait la s[)écialité de la fabrication des billes,
où elles étaient confectionnées avec des fragments d'albâtre, de marbre
ou de i»ierre au moyen d'une sorte de moulin de fer dans lequel elles
UNE l'AUTlE DE BLOQUETTE
i>'ai'iii':.s uni; i.niiOGiiAi'iiiE ije I'Igai., .vix= siècle.
s'arrondissaient ; elles étaient ensuite projetées à travers des trous d'un
diamètre différent.
Des cargaisons de ces billes étaient expédiées dans toutes les villes
d'Europe.
Dans un journal de 182(j, le Bon Génie ^ on nous dit que les billes
de marbre viennent d'Alleiuagne ; elles sont taillées dans le marbre de
Steinbacb ; les billes en agate sortent de la manufacture d'Obersteiu,
dans le Palatiuat.
— ^3U —
VIII. — Fabrication des billes à Strasbourg;.
Nos industriels français ont fait de sérieux efforts pour ramener en
France ce genre de fabrication ; nous trouvons, en effet, dans les bre-
vets d'invention à la date du 11 mai 1840, la description des procédés
employés pour la fabrication des billes par M. Enghelbardt, à Stras-
bourg. Ces billes, dont quelques-unes étaient en marbre, étaient dési-
gnées sous le nom de cliigues ; pour arriver à fournir aux enfants ces
petites splières si utiles à leurs amusements, il fallait faire subir à la
matière première cinq opérations successives :
PnEMMiliE OPÉIUTION : LE CASSAGE.
— Consiste à casser les gros mor-
ceaux de minéraux calcaires en
petits morceaux d'une grosseur telle
que cliacun d'eux, après sa ré-
duction en globe, peut donner le
diamètre désiré.
Cette opération est exécutée
sur les lieux mêmes de la carrière,
avec des marteaux-masses à l'ins-
tar de ceux dont se servent les
cantonniers sur les routes.
Deuxième opéhation : décapage.
— Consiste à enlever les plus
fortes aspérités des morceaux pré-
parés, à leur donner un commen-
cement de forme ronde.
Cette opération est exécutée au
moyen d'une pierre meulière mise
en mouvement par un moteur ({uel-
conque.
Tiu)isiEJiE oPEUATio.v '. DÉGUossissAGE. — Cousistc à donucr un conmieu-
cement de rondeiu' aux calcaires par le moyen du frôlement sur eux-
mêmes et encore contre des cylindres en pierre dure.
OuATitiEME opÉiiATioN : AiuîoNDissAGE. — Cousistc l\ arrondir complète-
ment les calcaires par le frôlement sur eux-mêmes. On opère pendant
quebpie tem[ts l'arrondissage par le frôlement seul ; alors, après avoir
extrait du tonneau toute la poussière qui s'est détachée des calcaires,
on y introduit une petite quantité démeri en petits morceaux de la gros-
;;;;^.^ i\ÉiJtm§^^'^^gi>
LA PAIiTlU DE BILLES
d'aIMIÈS U.NE LlrHOGllAIMIIli DE LOUIS LASSAI.I.K, XIX" SIKCLF
— 238 —
seiir d'une lentille, ce qui achève précipitîiinnient i'arrondissaf:,e et donne
le «poli mat.
CiNouiÊME opÉnATioN : Pour le poli luisant, le cylindre en jtierre est
remplacé par un cylindre en bois couvert de zinc. Si ce sont des fi,lobes
en marbre blanc, on introduit dans l'appareil une petite quantité de
poussière d'émeri. Si ce sont des globes en autre marbre ou eu pierre
calcaire nuancée, on met une petite quantité de poussière d'étain.
IX. — Diverses représentations du jeu de billes.
Au point de vue de la représentation artistique du jeu de billes, nous
pouvons signaler, en dehors de la planche de Stella, qui représente le
jeu de la rangette, une fort belle gravure d'Errar où sont représentés
six enfants, sur une terrasse, jouant à la bloquette.
Un graveur du dix-huitième siècle, Auguste de Saint-Aubin, a consacré
une des planches de la suite des jeux, intitulée : les Jeux des petits polissons
(le Paris, au jeu de la fossette ou jeu des noyaux; il a placé la scène vrai-
semblablement au pied de l'observatoire de Catherine de Médicis, qui était
appuyé contre l'ancienne halle aux blés, et l'on aperçoit trois jeunes
bambins discutant gravement un coup de bloquette, tandis qu'un peu
plus loin deux de leurs petits camarades emploient, pour se convaincre,
des arguments infiniment moins ])arlementaires.
Au dix-neuvième siècle, Pigal a reproduit également le jeu de la
bloquette dans une gravure intitulée : x Mon apprentissage ». On aper-
çoit trois gamins et une fillette qui, au lieu de prendre le chemin de
l'atelier, préfèrent exercer leur adresse au jeu de billes.
La représentation de ce jeu a tenté quelques artistes et on put voir,
au Salon de 1843, un groupe de marbre de M. A. l-'amin ; ini tableau
de Jean Fezons a figuré au Salon de t85U.
LE JEL DES blLLES
UAI'llÉS VICTOU AtlAM, XIX* SIKCLt.
— ^39 —
DEUXIEME PARTIE
LE JEU DE BOULES
I. — Définition.
Co jeu se joue ù terre avec des boules qu'on tâche de pousser le plus
près possible d'uu but déterminé : c'est le jeu des f>rosses boules.
Une autre manière de se livrer à ce divertissement est le jeu du
« cochonnet », ainsi noniiné du nom d(^ h» petite boul(> qui doit servir
de but.
II. — Le jiou de boules chez les nneiens.
Le jeu de boules a été connu des Grecs et pratiqué chez eux comme
im des exercices les plus salutaires parmi ceux en usage dans h>s gymnases.
Nous trouvons (|ucl(|ues renseignements sur ce jeu dans un écrit
d'Oribase, médecin
grec , qui naquit
vers Tan 325 après
Jésus-Christ. Il dis-
tingue plusieurs
espèces de boules :
une petite , une
moyenne, une
grosse et encore
vnie plus grosse, et
enfin une ]>oul<^
creuse. La grosse
boule était portée
au-dessus de la tête
et le joueur devait parfois marcher sur la pointe des pieds ; dans d'autres
circonstances, il sautait en lançant la boule, de façon à produire une
force plus considérable.
il semble qu'à cette époque primitive, le jet de la boule a été considéré
simplement comme une manifestation plus ou moins brutale de la force;
il s'agissait uniquement d'envoyer la boule le plus loin possible de son
point de départ; c'était, en somme, quelque chose d'analogue au jet du
disque.
Plus tard, vers l'époipie romaine, le jeu se- transforma ; on cherchait
LEJIiU UE BULLES
Fi'.M'iiÈs OLAW^ MAGMIS, wi' sikcle.
— 240 —
moins la force (Jik» l'adresse et pour être déclaré vainqueur, dans ce jeu, il
fallait, à l'aide d'une boule, arriver le plus près possible d'un but déterminé.
III. — Iiitcrdielîoii du jeu <1o boules pai- rordoiiuaiico
de Charles \' en i:t(>9.
En France, le jeu de boules fut très en honneur pendant tout le Moyen
Age; le public s'y adonnait même avec tant de ferveur- qu'une ordon-
nance fut rendue à ce sujet. Le 23 mai t369, Charles V fit défense à ses
sujets de continuer à se livrer au jeu des boules; il ordonnait aux séné-
UNE PAliTIE DE I{(jULES
l'IlK!? l'NE GIIAVUIIE DE VAN I.OCHOM, XVII" SIÈCLE.
chaux et aux baillis de faire renq)]acer, dans toute l'étendue de leiu'
juridiction, les jeux de boules par des tirs h l'arc et à l'arbalète, qui
avaient l'avantage d'exercer les jeunes gens au métier de la guerre. Des
récompenses étaient données comme encouragement aux plus habiles
tireurs, tandis qu'une amende de 40 sous parisis frappait les amateurs
récalcitrants de l'ancien jeu de boules.
Malgré tous les édits royaux, il est à supposer que le jeu de boules
continua à être pratiqué dans toutes les gi-andes villes, et les vastes espaces
situés {très des remparts étaient particulièrement pro[)res à ce genre
d'exercice.
Plusieurs étymologistes ont voulu proliter de cette coïncidence jtour
trouver là l'étymologie si contestée du mot bovlevanl ; ils l'ont fait venir
de la juxtaposition des deux mots « boule vert >> ou » verds », mais cette
opinion nous paraît bien contestable.
— i'il —
I\ . — Aiic<mI4>I<> sni* ■l'iii-ciiiif pris «•oiniiic nrbid'C
«liiiis iin<> psirtic <lf boules.
On ne |>('iit nianqiici' ;iu sujet du jeu de ])onles de rapiioi-lei" \a
TLRENNE PIUS COMME AlililTUE DANS L.NE PARTIE !JE liOLLES
(XVII" SIÈCLE.)
fanieuso anecdote d'une partie, dans la(|uelle Turenue joua le rôle
d'arbitre :
Il passail un juiir près d'une compagnie d'arlisans qui jouaient à la boule el il s'arrèla pour
les regarder. Sui'vint un coup difficile qui mil toute la bande en émoi et en contestation. Le
vicomte, speclaleur désinléresfi', fut pris pour juge. 11 y consenlil sans façon, mit un genou en
— ^'rl —
liM're, mesura 1rs ilislniicos avec sa canne cl. prononça. Celui conlre qui il avail prononcé se
fàclia, au poiul de lui dice quelques injures. Turenne ne dil rien, cl, croyant même s'èlre trompé,
il se remettait bonnement à mesurer une seconde fois, quand des officiers (jui le cherchaient
l'ahordèient, lcmoi,i,'nant leur surprise do trouver Monseigneur dans cette posture. Ce mol
ouvrit les yeux des joueurs, el celui qui l'avait injurié se jeta aux pieds de Turenne : « Ah 1 si
On vint Ivy Ca'vaJt^r^ fj-a7woù-
e quille
•'Et jmrrnpU et i-ejii
j'avais su, disait-il, en implorant son pardon, si j'avais su que c'était vous Mouseiu'iieur!
— Eh! mon ami, dit Turenne en le relevant, vous deviez être poli envers qui que ce rùl,el
surtout à l'égard d'un juge que vous aviez choisi, cl qui, croyez-moi, ne voulait pas vous
tromper (1). »
(1,1 Kilniinnl l'^
I-, Ilinli,irc(U':i Jiiiiftx cl (Icsjeiii- ircnf.inis. pA'^r 170. l'ai-is, Dcnlii, tSS'.'.
X
O
h
e/5
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a
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o
— 2i;] —
V. — I,es l>oiiliii»riiis nii iliv-hiiili^inc siOc-le en Aiiah^U'iTt-.
Le JLMi (le ])onlos iMait très en r.-ivoni' en Aiiglotoi-re ù la fin du dix-
huitième sièel(>, et les mémoires d'Hamillou donnent à te sujet quelques
renseignements curieux :
Le jeu ili" boules, en Angleten-e, n'esl d'usage que iliins les belles saisons et les lieux où on le
joue sont des promena les délieieuses. On les appelle boulingrins; ce sont de petits prés en carré,
dont le gazon n'esl guère moins uni que le lapis d'un billard.
VI. — I,e coclioiiiiet.
Le jeu du cochonnet n'est qu'une variété du jeu d(.' boules, puisqu'au
LZ Jeu de Cochonet
Craue à après te Tablediu Orini/iol c)e même oronàeur Peint par Dauii) Teniers .
lien d'atteindre nu but fixé, il consiste à .se rapprocher le pins près pos-
sible dune boule plus petite, toute clouée de fer et facilement recon-
iiaissable à cette sorte de cuirasse qui la recouvre.
Le jeu du cochonnet a été reproduit dans un fort beau tableau de
D. Téniers, qui a été i^ravé plusieurs fois, et surtout par Angèle Moitte, qui
l'a représenté d'une manière fort intéressante.
Dans une espèce de jeu d'oie, publié en 1784 sous le nom de : iSun-
— 244 —
veau jeu chi Jiiif\ on trouve la reproduction du jeu du cochonnet, dont les
règles sont ainsi formulées :
Près dp CPlle petite boule
Fort doucement la grosse roule.
A sa marche on est attentif,
Petit cochon vaut tout le niif.
VII — Lt' joii de boules «Papri^s les eslainpos ilii t1i.\-.septit>inc
au <li\-ii<Mivi(^ino siOele.
Van Lochoin, dans sa suite Dos hcaiix et q/en adroits joueurs <Jo toutes
LE BEAU SEJOUR DES JOUEURS l)E BOULES
d'après une estampe du XVII» SIKCLE.
sortes (le jeux, a donné la n'présentation d'un jeu de houles, (|ui devait
être évideiunient le jeu du cochonnet : des personnages grotesques dans
— 245 —
I(> i;tMii'e (IcHlalldt sont occupés ù liincer des lunules dans une sorte de petit
olos et ch(>rehent à atteindre le hut qui est figuré par une boule d'un [»his
]»etit diamètre, placé(> à l'autre extrémité du jeu.
Uu peu plus tard, un graveur, Lenfant, a donné une intéressante
composition intitulée : Le beau srjour des joueurs de houles : deux camps
sont divisés pai' une balustrade; au premier plan, on aperçoit un gen-
tilhomme occupé à vérifier un coup douteux; le second camp, placé dans
le lointain, présente, à côté des jcjueurs, une collation abondamment
servie qui ne devait pas être une des moindres attractions de la partie.
En 1G89, Arnoult a ]»ublié, chez Bonnard, une estampe intitulée : Le
jeu de bhule, qui représente un jeune seigneur et deux fdles de noble
maison qui semblent bien plus préoccupées de leur toilette et de leur
coifTure que du jeu qui a été le prétexte de cette composition.
A la fin du dix-septième siècle, ou a fait une caricature intitulée : Le
Jeu de boules de la Chicane, qui représente tous les avocats fameux de
répo([ue jouant au cochonnet, tandis qu'un de leurs confrères, se dissi-
mulant dans un coin, renouvelle un des incidents fréquents dans les
tableaux de Téniers.
Il doit y avoir évidemment un rapport entre cette estampe et le pro-
— a'io —
loj;ue (lu I)ii'iirri\ do R«'<;n!ir(l, jouô on dOHS, »l;iiis lo(|iu'l Ju[»itor se
plaint davoii' étô dôponillo par (|iiatro piwtcin'oni's :
AnLLiijL'iN. — Ah ! monsieur Jupiler, un gentilhomme comme vous aux troisièmes loges?
JiTiïEa. — Je me suis amusé en venant à jouer à lu boule aux Pelils-Carreaux contre quaire
procureurs qui ne m'ont laissé que trente sous.
Arleouin. — Oii diable vous cles-vous fourré là? Ces messieurs savent aussi bien rouler le
bois que ruiner une famille.
Dans les derniôi-es annôos dn dix-hiiitiôino siècle, (lai-lo Vornet a
publié un cliarniant dessin, qui a été i'e|n'oduit p.U' Dehucouit, et qui est
un véritable tableau de f;eiu'e : il représente un jeu de boules, dont les
acteurs suivent avec intérêt les émouvantes péripéties; le cliien lui-même,
le museau allongé et le regard obstinément tourné vers le but, sendjle
comprendre toute la gravité de la situation. Carlo Vernet ne se con-
tentait pas d'avoir de l'esprit avec son crayon, il savait fort bien observer
et traduisait élégamment ce qu'il avait vu; à ce sujet on rapporte sur
lui ranecdole suivante :
Deux iKjmmes se rcneontraient presque tous l 's jours, depuis plusieurs années, au même
jeu (le boules; mais c'était là seulement qu'ils avaient occasion de se voir.
:>i7 —
Ccjicndiinl il (Hiiil facile de r('in;ii(|ii(T ([iic quelqu'un numquiiit à l'un des deux ([uand l'aulre,
fureément retenu chez lui, ne venait passe mêler à la partie.
■ L'un d'eux mourut subitement; le joueur qui apporljiit celte triste nouvelle an rendez-vous
accoutumé s'estima heureux d'être ari'ivi'' avant l'ami supposi' du diMuiil : il pouvait se con-
- Frj-rM/: dure J^rtiiil/V n :ii Rijy ^iT.2rir c.'lctj ^' dcFinlli/ ru^ S^ Ijrxpitir a itS Ittu^^c
LIi JEU DE BOULES
o'AlMir.S U.NF. laiAVUllE DIÎ PEREI.LE, XVIIl' SIÈCLE.
ccrler avec les aulres pour préparer le survivant au coup terrible que ce malheur n'aurait pu
manquer de lui porter s'il lui eût été annoncé sans ménagements.
On délibéra longtemps, et, quand on eut suffisamment pesé les mots et mesuré les phrases,
le plus habile à bien dire, s'élanl chargé de la douloureuse mission, alla .à la rencontre de l'homme
qui arrivait, cherchant déjià des yeux son partenaire pour toujours absent.
De quelque artilice qu'il usât, l'orateur fui forcé d'arriver à cette conclusion : » Celui que
vous cherchez est mort. — Il est morl! répéta l'autre sans sourciller; eu ce cas, cela fait un
vii'il imbécile de moins. ■>
Au conimeiicemeut du dix-neuvième siècle, daus la série de ces cari-
catures parisiennes publiées chez Martinet, lijjraire, rue du Coq-Saiut-
Honoré, le jeu de ])Oides est désigné sous le nom deyVv/ (1rs xagrs, pro-
bablement eu raison de quelque allusion politicjue.
C-liarlet a fait un joli croquis du joueur de boules daus W volume
intitulé : les Frauntis pr/nts pur viu-ihcdics (tome II, page 290). Nous ne
suivrons pas l'auteur de cet articb\ M. Durand, (pii veut v(dr dans les
248
Ixiiilcs le in'ololypc et l'osseiicc de toutes choses; toutefois, son enlliou-
siasiiK; [loiii' ce jeu est respectable, et nous croyons devoir re]»ro(luire
ici un Inhleau niouveuienté qu'il a fait des parties de boules ([ui se
jouaient ordinairement sur la promenade chérie de tous les Parisiens :
Le Cocliojincl ,
d'aimiks un c.mit(].n iiu Souvenu jeu du Juif, xviu' siki;i.i:.
l'ciil-(Miv ;ivez-voas remarqué quelquefois, sous les ombrages soi-clisanl iVa's des Cliainps-
Eiysécs, au milieu des solitudes de FObservatoire ou de la barrière du Trùne, deux lignes
parallèles de spcclaleurs, lignes mouvantes qui s'allongent dans toutes les directions, qui
serpentent dans la plaine, qui sï'carlenl et se rapprochent, qui se dissipent et se reforment
incessanmient, et au-dessus desquelles on voit s'élever, par intervalles, de petits globes noirs
pareils à des bombes, mais à des bombes qui n'éclatent jamais; tandis que, a. travers les pii'ds
des spectateurs, d'autres globes semblables roulent, se précipileni rt jillriit partout le désordre
et lii confusion?
Approchez-vous avec précaution et mesure. La précaution n'est pas pour vous : elle est
pour ces globes vagabonds. Qu'il vous arrive d'en heurter quelqu'un au grand détriment de
vus jambes ! .vous recueillerez, pour excuses et pour marques de compassion, mille reproches,
mille malédictions, mille injures. Oserez-vous bien vous plaindre du coup que vous avez reçu ?
Votre coup! eh, malheureux 1 il ne s'agit que de celui que vous avez fait manquer.
;>50 —
En manière ilc dédomniagremenl el do consolation, éludiez le tableau que vous avez sous
les yeux. Les bonnes figures! les honnêtes et placides physionomies de rentiers! Car il n'est
pas permis de s'y tromper : ce
sont, pour la plupart, d'anciens
négociants qui ont passé par
toutes les tribulations des fins
de mois, et qui, retirés dans leur
revenu comme le rat dans son
fromage, n'ont d'autre souci
que les prédictions du baromètre
el le cours de la rente. Les voilà
le corps penché en avant, le
cou tendu. Le soleil brûle leurs
tôles. Le froid rougil leur nez et
bleuit leur visage; ils s'in-
quièlenl bien du froid ou du
soleil ! IVop long ! disent-ils
gravement. J'rop covil.' disent-
ils encore d'un Ion doctoral, el
ils restent là se passionnant
pour telle ou telle boule, et sui-
vant d'un œil exercé les diverses
chances du jeu, jusqu'à ce que
le jour baisse et que l'heure du
dîner approche. Alors vous ver-
rez le cercle se dissiper avec re-
gret : ces braves citadins s'en
retourneront lentement à leur
faubourg, emportant des émo-
tions, des souvenirs, un fonds
inépuisable de conversation el
un violent appétit. Voilà une
journée bien employée.
Les joueurs sont dignes des
spectateurs. Examinez celui que
Charlet a placé sous nos yeux.
'Vous le voyez : le joueur de
boules doit avoir de quarante-
cinq à cinquante ans; c'est pour lui la belle saison de la vie, l'âge de la perfection ; il a con-
servé la force qui exécute, il a acquis l'expérience qui dirige. Car ne vous y trompez pas,
vingt ans d'études et d'exercices assidus ne suffisent pas toujours pour former un joueur de
boules de quelque distinction. Regardez bien celui-ci : vous lirez sur son visage, dans son
attitude même, toutes les tribulations auxquelles son àme est en proie; il est sous l'influence
simultanée des deux plus puissants mobiles du cœur humain : la crainte et l'espérance. Il
vient de lancer sa dernière bouh^ : elle roule devant lui, et vous pouvez en suivre le mouve-
ment sur sa physionomie; il la couve, il la protège du regard; il la conseille, il voudrait lavoir
obéissante à sa voix ; il en hâte ou bien il en ralentit la marche, selon qu'une ravine ou un mon-
ticule l'arrête au passage ou la précipite à une descente ; il l'encourage du geste, il la pousse
de l'épaule, il la tempère de la main ; suspendu sur la pointe du pied, le bras tendu, le visage
animé par une foule d'émotions diverses, il imprime à son corps les ondulations les plus
bizarris : on dirait quv son àme a passé dans sa boule.
LE « JOUEUll t)E liOULES
XIX' SifXLE.
DE CIIAliLET
— 2.Ï2 —
VI 11. — Le jeu du elos-porte.
Il existe une autre manière de jouer aux boules qui porte un nom
particulier : il est désij;né sous le nom de Jeu du dos-porte, dans une gra-
vure du tableau de Van Breughel, intitulé : La rjrandc fesle de nostre village.
Ce jen se pratiquait, au seizième siècle, au moyen d'une lève munie d'un
manche fort court, à l'aide de lai[uelle les joueurs devaient faire passer
une boule d'un diamètre assez considérable dans un anneau fixé en terre :
LE JEU UE BOULES SOUS LE l'REMlEU EMPIUE
d'a['hès une suite de gravures représentant les jeux
ce jeu semble avoir été surtout en honneur dans les Flandres, car la
plupart des gravures qui le représentent reproduisent des tableaux de
peintres hollandais.
Une intéressante conqjosition de David Ténicrs montre également ce
jeu de clos-porte joué dans la cour d'une auberge; les joneurs sont
armés d'une lève de dimensions beaucoup plus considérables et munie
d'un long manche; au surplus, ces instruments semblent être de
formes assez variées et quelques-uns sont coudés : ils présentent en
cela une certaine analogie avec les maillets qui servent au moderne jeu
du Uulf.
Le même exercice se trouve représenté dans une gravure liollandaise
du dix-septième siècle qui caractérise les occupations dos différents âges
de la vie. On aperçoit deux joueurs munis l'un d'une lève droite, tandis
que l'autre tient à la main un instrument analogue dont la spatule est
LE JEU UL" CLOS-POUTE AU XV1<= SlECLt
DAI'IIÈS « LA GH.\>DE FESTE DE .NOSTHE VILLAGE » DE VAN BIIEUliHtL.
montée perpendiculairement au nianch(\ Celui ipii s'apprête à jouer semble
viser une boule surmontée d'une croix destinée, dans la |)ensée du graveur,
à figm-er quelque attribut allégorique.
LE JEU DU CLOS-PORTE EX ITALIE AU XIX'^ SIÈCLE
Le jeu du clos-porte a été aussi reproduit dans une lithographie du com-
mencement du dix-neuvième siècle, où Ion voit des Napolitains jouant sur
la grève : ils se servent d'une lève à manche court, de même forme ([uc
celle qui est indiquée dans le tableau de Van Breughel.
1\. — l'oésies sur le ioii de boules.
Addison a fait sur le jeu de boules une fort jolie poésie latine, dont
M. Bajot, l'auteur du poème sur la paum(\ a donné cette élégante ti-aduction.
Daiii un cli.imp spacifux el libre, donl le sol aplani cl coiiverl de gazon s'élcnd au loin,
ronlenl sur une arène lisse une infinité de globes en bois bien luisant, auxquels un fer artis-
lemenl employé a donné cette forme ronde pour les rendre plus mobiles. Les joueurs gravent
sur leurs boules une marque particulière, pour ne pas les confondre.
Dès que, par convention ou en tirant au sort, on s'est di^isé en deux nombres égaux, chacun
prend ses armes. En avant, vole au hasard une bille pour servir de but. Celui qui doit com-
mencer la partie obsc'rve attentivement quelle direction elle prend, pour la sui\rc, et le premier
pousse sa boule. Mollement balancée, elle s'échappe de ses mains, décrit un petit cercle et par-
court légèrement sa route jusqu'à ce que, son permier essor venant peu à peu à se ralentir, elle
s'arrête : aussitnt chaque autre lui succède.
Oii:uiil un 1,'i'aiHl noiiibri' de limilcs onldurpiil le l)iit, et lui l'ont, poiii' ainsi ilire, un l'cnip.iil
en rendant les appi'ociies plus difliciles, il faut alors plus de pn'caution pour s'introduire dou-
cement auprès de lui.
Un joueur voit-il sa boule se traîner languissamment et ralentir tout à coup le mouvement
qu'il lui a imprimé, il la suit pas à pas, s'agite
autour d'elle, lui reproclie sa lenteur, et voudrait
par ses menaces liàler sa marche tardive; pour
sauver son honneur, il accuse les inégalités du
terrain et les monticuliis qui se sont renconliés.
On entend rire, lorsqu'une boule reste lion-
leusement en route, ou qu'entraînée par son
propre poids elle prend une fausse direction.
Celui qui Ta poussée se répand bruyamment en
vaines plaintes, fait mille contorsions, peste après
les écarts de sa boule et l'accable d'injures. Au
mépi'is de ce courroux, la boule poursuit le chemin
qu'elle a pris, sourde à toute lamentation.
Mais les éloges et la gloire sont réservés à celé
qui, sans se déranger ni se ralentir, passe à tra-
vers toutes les autres, achève victorieusement sa
course et vient se reposer sur le but. Vite un
adversaire se dispose à l'en chasser de force ; des
yeux il mesure l'espace, calcule ses efforts et saisit
fortement sa boule. Elle vole, lancée par un bras
vigoureux. Tel, en Elide, un Automédon s'élançait delà barrière, emporté rapidement sur son
char, et voyait tout fuir, tout disparaître à ses yeux. Si, au lieu de la boule ennemie qu'il
ajustait, le joueur attrape celle de ses adversaires, et occasionne un dérangement désavan-
tageux, il entre en colère, crie au malheur, et s'en prend à la nature entière. Mais, s'il réussit
el trouve le moyen d'enlever h la partie adverse la gloire qu'elle s'était acquise, un murmure
d'approbation se fait entendre ; on applaudit: Draoo ! disent ses compagnons, et toute la
galerie de faire chorus.
Le jeu de Ijoiiles a eu aussi son « barde » ; M. Blanc de Fiigeret, dans
V Echo des Alpes de 1817, lui a consacré ces quelques vers :
Le jeu d'échecs est trop savant ;
Je fuis un plaisir qui m'occupe ;
Aux jeux de cartes bien souvent
L'homme devient fripon on dupe :
En vain le billard tant vanté
Vient ui 'offrir sa queue et ses poules ;
Pour le plaisir el la santé.
Vive le noble jeu de boules !
X. — Tablonii-v célèbres roprésentanJ le jeu de boules.
LE JEf ALLEGOItlQUE DU CLOS-PUllTE
XVII" SIÈCLE.
Deux peintres célèbres ont pris le jeu de boules comme sujet de leurs
tableau.K : M. Meissonnier, on 1848, avait exposé deux joueurs de boules
d'une perfection et d'un coloris remarquables; à peu près trois années
2oG —
plus tard, M. N. Diaz composa un tableau repri'sentant une partie de
])oules, et cette œuvre d'art, qui figura à la vente de Michel de Trétaigue,
en 1872, fut adjugée au prix de rjoOO francs.
Ui .lEi: uv: m.iULKs
ii'aimii'S i.a llijmiiaslii/iie de la jpiinesxi'. an xi, lXU:i.
TUOISIKME PARTIE
LE JEU DE BILLARD
I. — Orig-iiio cuiiiiiiiiiic du joii de ninil el du ji<>ii de billard.
L'Académie universelle des jeux domie im(> descrijjtion foi't exacte de
ce que l'on entendait autrel'ois par jeu de liillard : n On sait, lisons-nous
dans ce recueil, que ce jeu fait le divertissement de tout ce qu'il y a de gens
de distinction, ainsi (]ue de bien d'antres; il demande, pour y jouer, une
certaine adresse que tout le monde n'a pas. Le mot de billard a trois signi-
fications différentes. La première signifie un jeu honnête et d'adresse qu'on
joue sur une table où l'on pousse des boules dans des blouses, avec des
bâtons faits exprès, et selon certaines lois et conditions du jeu : telle est la
définition du billard. 11 signifie, eu second lieu, la grande table couverte
d'étoffe verte sur laquelle on joue et on pousse les billes dans les l)lonses
qui sont sur les coins et sur le milieu des bords. Il y a pour l'ordinaire six
blouses. Le mot de billard, en troisième Heu, s'entend du bâton recourbé
avec lequel on |)ousse les billes; il est ordinairement de bois de gaïac ou de-
'.-s^
— ^r,H
cormioi-, garni par lo groslioiit, on (rivoiro ou d'os simplement. Il y en a
aussi dont on se sert sans ces
garnitnres. Les Itilies sont des
boules d'ivoire ou de bois avec
lesquelles on joue au billard.
Les billes ont souvent varié
comme i^rosscur et comme
nombre; autrefois elles étaient
beaucoup plus petites et
étaient teintes de couleurs
variées pour permettre aux
joueurs de les reconnaître.
L'étymologie du nom de
ce jeu est assez simple ponr
qu'il ne soit pas nécessaire
de chercher une origine plus compliquée que celle du mot ùi//e, dési-
gnant la petite sphère qui est lancée à l'aide d'un instrument appelé
LE JKU DU BILLARD
sEiivAM' i>F, iiiiMONsTHATioN (le 1(1 force des corps
d'.M'IIKS U.NK VIGNKTTi; DL' XVI|i' SIÈCLE.
UNK l'AIlTlE AU XVII'> SIIXLE SUK U.N IflLLAUl) JIUM DE BLOUSES EN FILET
d'aPHICS l'NE GHAVIUE DE L'ÉEdLE ALLEMANIlE.
h'iUoucr on hillart ; c'était un bâton gros et court, recourbé parfois en
façon de crosse, dont on se servait jiour cliasser la bille.
Au sujet de ce jeu, M. Siiuéou J.iiee, (l.ins son ti'UViiil sur I Ordiuiimuee
de (lharles V, de 1369, sij^nale une dizaine de lettres de rémission,
datant de 1369 à 1380, où il est question de querelles ayant pris nais-
sance au jeu de billes on de billard :
Deux compagnons, allublés dans une lavornc, se ilisaicnl volunlitTHriin àraulrc : «Allons
faire ceUe quarte île vin au jeu des billes. » El quand on en venait dans une dispute aux i^ros
mots et aux voies de fait, on se cassait la tète à coups de « billart ». On ne connaissait alors
que le billard en terre, analogue au croquet, qui se jouait en plein air et nu ras du sol.
Dans le renuuvjuable travail de M. GuiHVey (1) sur fev Amours de Goin-
LE JEL: de liILLMU> AU .Wlli" SIÈCLE
d'apuks une iihavciik iif. i.' école ali,i;ma>
ôai//t et (le Marée, on trouve une intéressante reproduction du l»illard en
terre, tel qu'il se pratiquait autrefois en France. Les joueurs sont placés
dans une sorte d'enclos formé par des fascines et ils tiennent à la maiu
une longue crosse analogue à celle qui est employée dans le jeu du mais-
on voit qu'à cette époque les quilles figuraient parmi les accessoires ser-
vant au jeu de billard.
(I) La jiravurc ci-conlrc a été reproduite d'après l'exemplaire de la BiblioUièquc nationale con-
servé au cabinet des estampes, mais le sujet existe sur une tapisserie à la Manufacture des Gobelins
et se trouve exposé dans le Musée. Quoique cette lenture ne soit que du commencement du dix-septième
siècle, nous pensons, avec M. GuilVroy, que le sujet représente est beaucoup ])Uis ancien et remonte à
la (in du ipiin/.iènie. C'est un document des plus précieux pour l'histoire de ce jeu qui doit certaine-
menl être cumpté |)armi les plus piipulaii'cs.
— 200 —
Ainsi pr;iti(|iu'', le jeu de J)illai'<l en terre n'est, en somme, «{u'un jeu
de mail de moindre dimension.
Les articles d'inventaires (|ue nous trouvons sur le jeu de Idllard au
quinzième siècle ne permettent pas de déclarer d'une manière positive si,
à cette é|)0(jue, on connaissait déjà le billard monté sur pieds.
Dans un inventaire du CompU- roi/al de Louis XI (1), nous trouvons, à
la date de 1170, la mention d'un billard acbeté pour le roi :
A Meliun-sur-Loiro, pour ['nhv urlieclci' des billes et billars pour le plaisir ot csLat dud.
Sgr. un l'scu.
1480. — l'our deux jeux de billes ganiJz de billars et deux jeux de boulles qu'il a aclielez
pour servir au Plesseis dud. seigneur. (D. D'Arcq, Comptes de Vliôlel, p. 387.)
II. — I.e jeu de l»ills)r<l au seî/îOine sîOele.
A l'orij^ine, le mot billard désij;nait le jeu et non pas le meuble dont
on se servait ; les accessoii-es du billard ont, du l'cste, beaucoup varié ;
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• LE JEU DU llILLAUl) AU XVIl'^ SlÉfXE, n'u'nHSVAN luciimm.
on jouait, en effet, à C(! jeu, tantôt sur une plandietle ou sur une table
garnie de drap.
1520. — i aulnes drap vorl-gay... pour couvrir un .trrand jmi de billes faicl de boys de
cbesne, 7 livres lournûis.
i.")o'i. — Une table servant de jeu de billes, bordée de drap vcri. — 2 Ircsieaux à pailes...
(1) liil,lH.llir(|,R' iiali.HKiK', iiianuscnl C.i.jll. fcli,. 18.
— 261
1558. — Uiii; jcLi (le bill.'irl cuaiiily, assavuir la purlu la (iiiiUi', les ilcux hitullel/ cl les driiv
billarls, pes. escarcemenl 1 o. ;î est.
D'autre part, on sait (juc le fameux joiif Je la Sainl-HartlK-lemy, le
jeuue roi Charles IX était occupé à jouer au billard daus la stillc ([iii est
ArtM/ pren^'i jarx>c a, loy bcLoii^t-
aujourd'hui la !.;raude galerie d'Apollon, au Louvre, ([iiiiiid ou vint lui
annoncer qu'un certain nombre de huguenots traversaient la Seine à la
nage pour s'échapper; le roi, interrompant alors sa partie de billard,
courut au balcon devenu historique et, prenant son arquelnise, tira sur
ses hérétiques sujets.
m. — Louis XIII et le jeu tie billard.
Au commencement du règne de Louis XIII, le jeu de billard lut plus
répandu et le roi fit installer au palais de Fontainebleau une salle de
billard, que l'on peut voir encore aujourd'hui. Au surplus, nous pouvons
juger, d'après les inventaires des premières années du dix-seplièuie siècle,
du peu de perfectionnements ([ui ont été apportés à ce jeu depuis son
origine.
1617. — UiK' graïKlu lablc du bois du sapin d.' 9 piedz de longueur l't de -4 pledz 1/2 de
largeur avec deux Iracteaulx pleniers, servant ladile table cà faire uiig jeu de billiard, demy
neufve. [Invculairc du c/uileau de Vai/rcs.)
IV. — Définilion du jeu do billard au div-sopliènio isiècle.
Dans le Dictionnaire de Furetière ligure une ex|)licaliou 1res com-
plète de ce ([ue l'on euleudait alors par le mol li/lhail :
— i()i —
C'ost, dil cel iiiilt'iir, un jeu lioiinùli' l't d'udressL' qu'on joue sur une Uible où l'un poussodos
boules avec dos basions faits eNprès el selon ceiinines loix et condilions du jeu.
Billard est aussi la grande lable d'éstoffe, sur la quelle on joue el on pousse les billes dans les
blouses qui sont sur les coins et sur les bords. On fait aussi des billards dans des places qu'on
prépare exprès dans les jardins. Billard est aussi le baslon recourbé avec le (juel on pousse les
boules Bille est une boule d'yvoire ou de bois avec la quelle on joue au billard.
/cr InllAf qu£ àt^ Vtnf Se rurycr
TaptrrcnetU que. Strwvent IX^/mt htuna
Ij^j- ^«« Unk du. milieu doJ^e Seqartr SeiimfT^ .
U.N'E ACADE.MIE ÛE WLL.UID AU XVilI- SIKCLE
U'Al-nÈS UNE GHAVUliE DE N. GUÉBAim.
DfiDS son ouvrage si curieux, intitulé : Méluiujes tirés d'i/nc ijrande bihlio-
thèqiie^ M. de Pauhny, faisant allusion à un volume publié en 1B68, donne,
en ces ternies, son opinion sur le billard, qui, avons-nous dit, n'est qu'une
réduction du jeu du mail :
LLs PLIII^ JULl Llis 1)L LU L\lil)
Il ^IILS IM \IGNCnL nu \\lll° MI(LE.
C'est nue es|irce de jeu de mail ou pail-niail, sui' une table tendue d'un Inpis, où les boules,
au lieu d'èlre poussées dans la même direction par un ninillel, sont poussées dans la même
direction l'une contre l'aulie parle bout d'un bâton appelé billard.
JLeJlayal leitoej To^tificatianj'
L. ej ti-oT<} Jr l'oued} JLouan.^ a ce leu ae la Ci iLCrr^
NeriiJ . vrejanent qu'un Jtnir par ieiWJ J^cuta Inoiua ^
IL/ ^er-ant a il/tu er an jrcjte Ae In Terr^ , _
QliÇilj Jo-nt lej Atnnej Jt-Ij lie JMtrna.rejue AuCTlLLé -
Vendent AFai-ij Ckt^ LU^irv Ulr^c rue J^Ia^.^c nL vUUD^(oLjn
— 2G4 —
Au surplus, le mol hillunl servait déjà auci(Minemcnt à désif>,ner un
(les maillets emi>loyés pour le jeu du mail. Vallon dit, en elTet, dans son
testament : » ... Et un billard de quoi on crosse. »
V. — Louis \l\' o) (liainillnrd.
Le jeu de billard fut très en honneur sous Louis XIV^ car les méde-
cins avaient ordonné au
i;rand roi de se livrer
chaque jour, après son
dîner, à cet exercice hy-
giénique ; le roi lit alors
dresser à Versailles un
somptueux billard dans
la pièce près de la cha-
pelle et <le la tour de
marbre. Le grand roi pi'e-
nait grand plaisir à ce jeu,
où il était d'une force
remarquable; il arrivait à
gagner tous les soirs ses
familiers, et il avait
comme partenaires habi-
tuels MM. de Vendôme,
de Villeroy et de Gram-
mont.
Saint-Simon raconte
([ue ce joueur éraérite, fa-
tigué de lutter contre de si
piètres adversaires, ht ve-
nir Chamillard, conseiller
au Parlement, qui était à
ce jeu d'une force peu
commune. Sa bonne grâce,
autant que son adresse,
plurent infinijnent au roi qui ue sut plus se passer de sa compagnie, et du
même coup la fortune du conseiller au Parlement se trouva assurée.
Cette faveur ne fut pas sans susciter des envieux et on écrivit contre
lui cette épigramme sous forme d'épitaphe :
Ci gU le fameux Clinmillard, Qui fut un liéros nu billard.
De son roi le pMrU'iiaiir, U" ziiro daiis le minisli;re,
UNE l'AliTIE DE BILLARD DANS IN TIIIPOT
ii'apiiks umî GUAvriiE mi xviii" siiCL';.
266 —
VI. — Le bilhifd de Loiiiis \l\ d'aprO^s une estampe de Trouvain.
Dans la curieuse suite de six estampes représentant les appartements
de Louis XIV, et qu'Antoine Trouvain a gravée de 1694 à 1698, on peut
voir les divers plaisirs auxquels le roi se livrait les jours où il ouvrait
ses appartements à (juclques invités de marque.
Le troisième appartement nous montre un jeu de billard formé d'une
LE JEU UU BILLARD
u'APnÉs la Oijinnastifjue de la jeunesse, an xi, 1803.
grande table, sur laquelle on poussait une ])oule d'ivoire qui devait passer
sous une petite arcatle appelée passe.
Dans la suite des gravures <jiii ont été publiées dans les dernières
années du dix-septième siècle chez Bonnard, on trouve une estampe :
« le royal jeu des fortifications » et où Ton représente le duc de Bour-
gogne, le duc d'Anjou et le duc de Berry, petits-fils de Louis XIV,
occupés à un jeu tout à fait spécial. Il semble que cet amusement puisse
être comparé au jeu du trou-madame ; il s'agissait, en effet, d'envoyer
de petites billes dans la porte d'une forteix\sse, d'où elles ressortaient peu
après pour venir s'arrêter contre le mur d'une place fortifiée figurée par
une sorte de pian en relief posé sur le billard.
Cette manière de se servir du billard doit être considérée comme
tout à fait exceptionnelle et analogue un peu à ce qu'est notre croquet
de billard. Il ne faut pas oublier, toutefois, qu'aux dix-septième et dix-
huitième siècles la manière de jouer au billard était le jeu de la bourse
ou de la blouse. L'habileté du joueur consistait alors à envoyer la bille
de son adversaire dans des trous disposés aux angles et au milieu de
267 —
chacun des grands côtés de la tahh» ; ces oi-ilices ont conservé jusqu'à
nos jours le nom d(^ blmise (1).
Les gens du dix-septième siècle, qui aimaient bien les j<Hix de mots,
FRONTISPICE DU Manuel de famaleur de billard
PAU LOUIS BÉnoc, xix'' sièclf..
n'ont pas manqué une si belle occasion de se livrer à leur passe-temps
favori ; c'est ainsi que nous trouvons ces deux vers placés comme iiégende
au-dessous d'une gravure de ce temps :
Amy, prens garde à lal)elouse,
Qui veut brouser, souvent se brouse.
Dangeau, dans son Journal à la date du 20 juin 1701, faisant allusion
à la scène qui est représejitée dans une gravure publiée chez Bonnard,
raconte que Louis XIV, à son i^etour de la chasse, trouva M"" la duchesse
de Bourgogne qui jouait au billard.
VII. — Fornios ot niatîôrcs diverses du bâton
servant à pousser les billes.
Les premiers instruments qui ont servi à pousser les billes, dans le
primitif billard en terre, étaient évidemment en bois et analogues en
tous points à la crosse servant au jeu du mail. Un peu plus tard, au
seizième siècle, on a fait des billards tout en ivoire ; c'est évidemment à
(1) La blouse portait aussi le nnm de bmrse, parce qu'elle était en lilel et allectait la l'orme d'une
bourse servant à mettre de l'argent.
— 268 —
un de CCS accessoires de jeu que se rapporte la inoiition tirée de l'inven-
taire du château de Nérac, 1598 : « Un petit billiard d'yvoire d'un pied
de long. »
Ces sortes de crosses atteignaient au dix-septième siècle des dimen-
sions beaucoup plus considérables ; dans une gravure du temps de
Louis XIV, éditée chez Bonnard, on voit la suivante, qui accompagne
M"" la duchesse de Bom-gogne, ]iorter sur son bras tout un faisceau de
queues de billard qui devaient bien avoir de trois à quatre pieds de long.
LE JEU DU BILLARD AU XVIII= SIECLE
AVEC LES QUEUES IlllOITES EFFILÉES DU BOUT, d'aI'HÈS L'.NE GHAVUIIE DE l' ÉCOLE ANGLAISE.
Au dix-huitième siècle, dans les enseignes de tablctier et autres mar-
chands de jouets, on trouve encore la représentation de ces ipieues, qui
atteignent d'assez grandes proportions.
Dans les caricatures anglaises du connuencemeut du dix-neuvième
siècle, on commence à trouver les queues de billard de forme conique très
eflilées vers le bout. On se servait encore, à cette époque, d'un certain
nombre d'engins, qui sont tombés en désuétude aujourd'hui ; c'était
d'abord le i^àteau, sorte de foui'chette à long manche (pii servait à guider
l'extrémité de la jjetite (pieue lorsque la bille se trouvait un peu trop
loin du joueur. On avait aussi quelquefois recours à la grande queue
longue de près de six jiieds, dont on retrouve quelques spécimens dans
W'eé'eiL Du ÇBïliai^
— 270 —
les salles de billard de (juelques châteaux de province. Enfin, la houlette
était une palette creuse garnie d'ivoire à son extrémité et servant à
pousser la bille quand elle se trouvait trop loin du joueur. Parfois encore
on employait la queue cadette qui tenait le milieu entre la grande queue
et la queue ordinaire.
VIII. — Le jeu de billard, d'aprOs \aii Loehoin.
Dans une suite de planches gravées par un imitateiu* de Callot, Van
Lochom, on voit la représentation du jeu de billard tel qu'il se prati-
TABLEAU DES MARQUES pour i£ JEU m: BILLARD
!Vi\RgUE BEi PARTIES FAITES
POUR LES JQIIEURS .
MARQUE GE\ER.\LE des POINTS a compteii rot rtouks i.EsVSmm'^
MARQUE DES PARTIES R^ITE S /-o ra /,/; MAITRE y>/^; BILLARD
^HJsj^l^^SîàiÉaê^ÉSSiÉFf^ÉÈiiÉiÉ^
quait à cette époque ; les joueurs se servent, pour pousser la bille, d'un
bâton un peu plus gros à l'une de ses extrémités et légèrement recourbé.
De ce gros bout, ils frappaient la boule et la poussaient vers la passe ou
arcade, qu'elle devait franchir ; on pouvait jouer soit directement, soit
en frappant d'abord contre la bande du bas.
IX. — Les billards publies au dix-sepliOnie sîùcle.
Dès l'année 1610, on institua des billards publics, et le privilège de
tenir ce jeu était accordé aux <( billardiers paulmiers». Quelques-uns de
3 Q
< M
oc <
< C3
— ^271
ces (''tablisscnionts (levoiiaieiit un véritable centre où les amateurs de ce
jeu se plaisaient à veuir deviser entre eux.
Un de ces étaldissenients était particulièrement célèbre au dix-huitième
siècle, c'était celui de la veuve Laurent. Cette dame tenait rue Daupliiuc
LE JEU DU BILLAUD CHEZ U.N .MAITRE PAULMIER
n'Ai'iiÈs LA Grande Encyclopédie de uidehot eï u'alemqebt.
lin café avec billard, et là se réunissaient les plus habiles joueurs, entre
autres le fameux chevalier de Saint-Georges et le célèbre violon Jarnovick,
le même qui, plus qu'octogéuaire, mais toujours bon joueur, mourut
en 1804 à Saint-Pétersbourg en faisant une partie de billard : c'était
mourir au champ d'honneur.
X. — La salle île bîllai'd du eliàteaii des Tuileries
au nionieiit de la Itëvolulioii.
Dans une description du château des Tuileries, qui est conune une
sorte de procès-verbal de la visite faite par ordre du tribunal révolution-
naire, on rencontre une anecdote assez curieuse sur la salle de billai'd
du roi :
La salle de billard dans laquelle nous passâmes n'offrait rien de curieux qu'un petit livret
servant à écrire les parties (jue le roi faisait avec son épouse. En l'examinant, nous nous aper-
çûmes que la reine avoit gagné plus souvent que le roi, et que l'avant-veille de leur chute, ils
.avoienl encore joué onsoraLle dix parties, dont la reine en nvoit gagné sept. Vous m'avez dit,
il y a quelques jours, que le roi éloil mauvais joueur. C'est sur le rapport de tous ceux qui
l'ont vu livré h cet exercice ; car je vous observe qu'il n'avoit aucune passion pour le jeu. Il
LE JEU bV BlLLAlil) AU .\V1II« SIÈCLE AVEC QUEUES lîECOUHBEES
I>'AI>liKS UNE CyiAVURE TE L ÉCOLE ANGLAISK.
connaissoit tellement son défaut, que, plus dune fois, il se priva de ce délassement, eu disant :
Je m'emporterois infailliblement. Lorsque la veille il s'étoit livré à quelque emportement au
jeu, il refusoil le lendemain de faire une partie. On m'a raconté qu'il résista huit jours de suite
aux sollicitations, qu'il s'interdit même pendant ce temps l'entrée d;ins In salle de billard, par
la seule raison qu'il avoit été mallionncle envers M. de La Tour du Pin.
M. — Le billard allégorique de i»I. de La Fontaine.
Le jeu de billard a tenté ]>ien des poètes, et La Fontaine lui-même,
qui se piquait d'être très liabile à ce jeu, envoyait à M"' de La Fayette un
petit billai'd avec ces vers :
Ce billard est petit, ne t'en prive pas moins.
Je prouverai par bous témoins
Qu'autrefois Vénus en fit faire
Un tout semblable pour son fils.
Ce plaisir occupait les Amours et les Ris,
TABLEAU DE LA POULE AU lilLLAIiD
bAPKÈS UNE OlIAVUnli DE LA IIESTAUIIATION CO.NSEIIVÉE AL CADl.NtT DES ESTAMPES DE EA BlULIOTIlÈijL'E NALlONAr.E.
— 27't —
Tout le peuple enlîii de CytlièrP.
Au joli jeu d'aimer, je pourrais aisément
Comparer après tout ce diverlisscmeni,
El doiuier au billard un sons allégorique :
Le but est un cœur fier : la bille un pauvre amant.
La passe et les billards, c'est ce que l'on pratique
Pour toucher au plus tôt l'objet de son amour ;
Les belouses, ce sont maints périlleux détours,
Force pas dangereux où souvent, de soi-même,
On s'en va se précipiter,
Où souvent un rival s'en vient nous y jeter,
Par adresse ou par stratagème.
Ml. — !.«' jeu <lc la poiilo au billai-di
Sous rEiiipiiT, on jouait à la poule et le publie parisien (Mail très
amateur de ce jeu. « Ici un /duc à la poule », lisait-on eu très gros
UNE PAliTlIi DE BILLARD SOLS LA UESTALRATIO.N
caractèi'es sur la devanture de tons les cafés, et u l'on jonc ai/ssi au hillard » ,
ce ipii annonce que la poide était l'objet le plus intéressant du jeu.
Les parties de ce genre se divisent en plusieurs espèces : les unes se
jouent seulement avec deux billes, bien que les joueurs soient plus nom-
])reux ; les autres se jouent avec une bille pour cha(|ue jonciu* et ces
dernières parties se distinguent par la dénomination de (( guerre », juste
dénomination, car elles en sont ri]nag(\
Mil — l.o M'u «U' la ^louCoisoii <'ii 1821
En 1821, nous trouvons dans les brevets d'invention, à la date du
31 décembre, la descrijttion d'un nouveau jeu d'adresse, dit Jeu de la
Montoison, inventé [lar un sieur Regnanlt, ([ui en l'ait la relation suivante :
2§(o
ii
— 276 —
C'est 1111 jeu où 11' biiliirtl cl les caries se li'ouvenl combinés ; de cliaque côlé des bniides
sonl pruliquées vingl-six bluuses, soit en loul cinquante-deux ; au-dessus de chaque ouverture
se trouve placée là découvert et dans un tableau à coulisse une des cinquante-deux caries qui
composent un jeu complet de boston. Par suite d'une disposition spéciale, quand les billes
tombent au fond de la blouse elle fait agir un déclic qui découvre la carie et donne le point
et la couleur que l'on a voulu jouer.
Ce jeu, fort iiif^éiiieiix, avait rincouvôiiieut d'ètfe vraiment trop com-
pliqué, et il ne semble pas avoir été fort goûté du public.
Dans le Joiinuil îles dûmes de 1823, on signale que la mode est alors
de jouer avec six billes : deux jaunes, deux rouges et deux blanches ;
ces dernières sont celles des joueurs, les rouges se placent sur les mouches
en face des blouses d'en haut et les jaunes sont placées sur l'alignement
des blouses du milieu et des billes rouges.
XIV. — nillards si iniisK|iie>
Au moment de l'Exposition de l'Industrie de t827, on s'appliqua à
fabricpier des billards très luxueux; nous voyons, en effet, qu'un
M. (Ihéreaii a présenté un billard en bois indigène l'ichement orné de
bronzes ciselés et dorés. A chacun des angles, au-dessous de la blouse et
en dehors, se trouve une gueule de lion dont la mâchoire inférieure, dis-
posée à charnière, permet de retirer la bille en dehors. Un orgue placé
dans l'intérieur joue un air différent pour chaque blouse dans la(|uelle la
bille est venue tomber.
.\V. — Itillarcis à bandes niobilcsi
La même année, dans le recueil de M. de la Mésangère, nous trouvons
l'indication d'un perfectionnement singulier apporté au billard : <( En
» faveur des dames et des messieurs qui ne sont pas de haute taille, on
» fabrique aujourd'hui des billards dont les bandes se baissent et se relè-
» vent à volonté. Ainsi l'on n'est jamais collé pour jouer; ces mêmes
» billards ont des blouses qui s'ouvrent en dehors au moyen d'une petite
» porte à charnière. »
Un ne savait alors comment s'ingénier pour enrichir les billards on leurs
accessoires et créer un modèle qui fut d'un goût irréprochable ; c'est ainsi
qu'en 1828, nous trouvons dans le même recueil cette petite note : « Dans
» quehiiies maisons élégantes où les billards ont suivi la progression du
» luxe, ou a admiré des encadrements qui, destinés à recevoir les queues,
» ont la forme d'une lyre ; chacun est combiné de manière à soutenir six
» queues qui représentent les coi'des. »
XVI.
Diverses iiintîères servaiil ù rorm<>r les tables «le billard.
Nous voyons, à l'Exposition de 1814, un M. Bouhardet exposer un billard
construit d'une manière assez singulière. '( Il est, dit le rapport du jury, en
bois de noyer avec ornements sculptés en acajou. La table est eu <'ai'ton
de poupée rapproché et sans colle et pressé à la presse hydraulicpie. Cette
matière d'une dureté remarquable, ne faisant pas de copeaux, doit être bieu
difficile H planer. L'inventeur assure qu'elle ne sera point accessible à
l'humidité. »
A la même Exposition, d'autres fabricants proposent une invention dont
ils pronosti([uent le plus grand bien : ils ont, disent-ils, fait l'essai d'une
BILLARD INCltUSTÉ, EXECUTE PAR M. COSSON EN 1839.
table eu foute de fer composée de huit parties qui se rapprochent d'onglet
sans qu'on puisse voir les points de jonction. La table en fonte est ainsi
posée sur un parquet en chêne. Ils prétendent que ce procédé obtient l'as-
sentiment des joueurs les plus exigeants.
Cependant, si ingénieuses que fussent toutes ces tentatives, aucune ne
semble avoir donné de résultat satisfaisant, et le meilleur système semble
être la table d'ardoise en trois morceaux dont un fabricant avait déjà eu
l'idée; à cette môme Exposition de 1844, M. Barthélémy, à Paris, avait
pi'ésenté un billard en acajou exécuté par les procédés ordinaires ; la table
seule était en ardoise, en trois morceaux de 20 millimètres d'épaisseur.
Ces tables, offrant plus d'égalité et de justesse sur toute leur surface, sont
relevées moius souvent, car l'ardoise dévie peu de la régularité de son
niveau.
XVII. — Représentations artistiques «lu jeu «le billard.
Le jeu de billard a été reproduit plusieurs fois parles peintres et par les
graveurs ; en dehors de l'œuvre de Van Lochom, dont nous parlions tout à
l'heure, un autre graveur du dix-septième siècle, Nicolas Arnoult, a gravé
mie planche représentant le jeu du billard ; enfin, à une époque relative-
278
ment récente, M. V. (Iharvet avait envoyé à l'Exposition de peinture
de 1857 im tableau représentant une partie de i)illard : cette peinture fut
fort appréciée du public.
XVIII. — I,es repaies du joii de billard mises en vers.
On a mis en vers la (!lonstitution française, il n'y a donc point lieu do
s'étonner de trouver une poésie indiquaut les règles du jeu de billard. L'au-
teur a même soin d'indicfucr qu'elle se chante sur l'air de « Monse'gneur
le duc d'Orléans ». {Coi/parf, Chansdiis d'un emjildi/r, 1830.)
Pour jouer au billard,
11 vous faul beaucoup d'arl,
Avoir surtout un bien juste regard
Ce jeu n'admet aucun retard,
El semble exclure le vieillard ;
Aussi ne voyons-nous céans
De joueurs que des jeunes gens.
La table est devant vous,
Elle contient six trous;
Le tout est recouvert
D'un large tapis vert;
Trois billes roulent dessus,
Trois, dont une rouge et pas plu?
Un bâton
Bien doux et bien rond
Nous sert en cette occasion.
De ce léger bàlon,
Sacliez que la queue est le nom;
Vous la prenez et cliaque fois
Vous la mettez entre vos doigts.
Il faut tout près vous approcher
Et tâcher
Surtout de toucher;
Car, en jouant, si vous ne loutliez point
On vous marque pour un point.
Mais on doit s'arrCler sans queuter.
La poule est un plus simple jeu ;
On joue à la russe fort peu.
Suivez mon avis et jamais
Ne jouez que le jeu français ;
l'ourlant vous pouvez tout oser
Mais craignez de vous blouser.
D'tme Pnif/r ftjiere Brauie
liutjounr pftnr rfty^ife tfatme çui/Zc,
LK JEU DE QUILLES
metffx à âof ùz^/ùctc ^
QUATRIEME PARTIE
LES QUILLES
1. — l^e ieii tics piqucls clic/. Vvs Uoiiiaiiis.
Tel que uoiis le pratii|Uons actuelleraeut, ce jeu ne sem])le pas avoir
été counu Jesancieus ; mais, dans son recneil, M. Becq de Fouquicrcs nous
donne une description détaillée
du jeu des piquets qui ont avec
les quilles une étroite parenté.
Ce jt'U consiste non seulement à fielier
un piquet dans la terre liumiile, mais
encore à renverser en même temps un
de ceux déjà ficljés en terre, en le frap-
pant vers la Icle. (Pollux, IX, 120.)
PoUux dit également qu'on
rencontre chez quelques poètes
doriens l'expression de jaucr au
Itiquct.
Ce jeu s'est conservé jusfpi'à
nos jours; la manière dont les
enfants s'y prennent aujour-
d'hui doit être la même <[ue celle des Grecs. (3n prépare d'abord la
terre en la renuiant et en la mouillant. Chaque joueur s'arme d'un long
piquet d'un mètre environ, et, quand vient son toiu-, le fiche dans la terre
en le lançant d'une main vigoureuse de manière à le faire pénétrer le plus
profondément possible; or l'haliileté consiste à lancer son piquet de
façon t(u'avaut de se planter en terre il chasse en le frappant celui d'un
autre joueur.
LES PLAlSUiS DE LA JEUNESSE
ll'.iPHK.S UXK GIIAVUHE SUR DOIS DU .\VI» SIÈCLE
EXTIIAITE DE l'oUVIUGE DE CnMEMUâ : OI\B[S SENSUALIS
l'icruit.i
^80
Le jeu des couteaux.
Un jeu d'adresse se rapprocliaut de celui des piquets consiste à i»lauter
des couteaux dans une planclie ou dans une pièce de bois quelcon([ue, au
centre de laquelle est un point dont il s'agit d'approcher le plus possible.
Une fi,ravure italienne nous a conservé la représentation du jeu des cou-
le JEU DES couteaux
Il ' A P II K s C A II A C C I , X V U ° SIÈCLE.
teaux, dans laquelle l'arme, au lieu d'être projetée horizontalement, est
simplement fichée eu terre et jetée à hauteur d'homme.
Ce jeu est représenté dans les peintures égyptiennes, et il est fort pro-
bable que les Grecs l'avaient adopté.
m. — Les squils à l'époque carolingienne.
U-e jeu des picpiets a été connu eu France à l'époque carolingienne,
et on prétend même que le nom du jeu vient justement de ces primitifs
piquets qui remplaçaient les quilles. Il existe en effet dans la langue cel-
tique le mot squil, (pii signifie éclat de l)ois; c'est donc bien à ces piquets
que l'on veut faire allusion, ils devaient même être assez semblables aux
échalas (pie l'on place au pied des vignes pour les étayer.
-2H\ —
\\. — Los quilles au qiialor/.it'iiic si«^<'l<v
Au ([iiatdi'zit'iuc sic'cle, on trouve assez frcqnemmeiif le inol hillf ou
billclli' (jui, avons-nous vu, désigne tour à tour un troiu- ou une tigo de
bois ou (le métal do i;rosseur et de hauteur variables :
i37o. — Ciiiu liulereiit ad quilli.'is qiui; in parlibiis illis (Bapalmis) vocanliii' gallicc t/illi's.
{Air/i. ,JJ. 104, pii'ce loi.)
l.'iOl. — Ainsi (jiic les cumpaigiioiis s'c'sl)aloii.'nl à un jeu appolé la Ijillcllc. {/l/ld., 1 '.(),
pit-ce 223.)
Tbiers, dans son volume sur la passion du jeu, raj)i)orte une anecdote
LE JEU DE QUILLES
n'.M'llKS VAN I.OCIIOM, XVII» SIÈCLE.
quehiue peu fabuleuse sur le jeu de quilles ; il raconte que saint Jean-
Benoît, ù qui on doit le fameux pont d'Avignon, ((ayant aperçu des gens
qui jouaient aux (piilles proche d'une des anciennes portes de la ville
d'Avignon et qui blasphémaient le nom de Dieu, il renversa les quilles de
sou bâton, ce qui irrita si fort l'un des joueurs qu'il donna un soufllet au
saint; mais Dieu vengea sur-le-champ l'injure faite à son serviteur, ayant
tourné la tète à ce joueur en sorte qu'il avait le devant derrière. »
Le jeu de quilles a été fort en faveur chez les plus grands seigneurs, et
30
— 282 —
(l;iiis los dépenses du roi Jeun d'Angleterre, 13.")0-13()0, nous trouvons
la mention d'une somme de 8 sols 7 deniers payée à nu nommé Tas-
sin, « pour une petite table pour maître Jehau le Fol, pour (juatre
chaières, onze formes et onze quilles, achetées du commandement du
roi » .
En 1309, le jeu de quilles fut défendu ]»arune ordonnance de Charles V,
non seulement aux ecclésiastiques, mais même aux lanjues. Dans le
LE JEU DE QUUXES A LA BOULE ET LE JEU DE QUU.LES AU BATON
d'aPIIKS une OnAVURE DE L. CAnACCI, XVIl" SIKOLK.
Recueil ties jeux publié en 15(S7, l'auteur n'a consacré ([ii'uu vers au jeu
de quilles :
A quille l;i aussi pareillciiieiil.
Le commentateur de cet ouvrage fait observer que ce jeu était aussi
connu sous le nom de « quille rapeau » ou « ram})eau » .
A cette époque on se servait seulement de trois quilles mises en ligne
droite et le joueiu^ devait à chaque coup abattre au moins l'une d'elles ; s'il
y manquait, il était mis hors le jeu et, pour pouvoir continuer la partie,
il devait payer à nouveau le montant complet de l'enjeu : payer cette
amende était désigné par le mot rempk/\ (\m signifie vraisemblaldement
qu'après avoir acquitté sa dette le joueur était rappelé an jeu.
C'est probablement à ce jeu qu'il était permis de se livrer certain
jour iUi la semaine, si nous eu croyons Noël du Fiiit dans ses Propos
/■usi/(/ues et facétieux (1585); il dit, en effet, que l'on ne doit « ne
|)rendre chemise blanche, ne danser, ne chanter, au vendredi, ne filei'
an samedi, n'étudier aux fêtes; mais loisible jouer aux quilles, aux
bibelots on ;ui coclion va devnnt ».
— 28 't
V. — Les quilles à pîroiieHei
Au seizième siècle, Clément Marot a fait, dans ses vers, allusion aux
fjuilles :
Morl csl un jeu pire qu'aux quilles A ce méclianl jeu Goquillîird
Ni qu'aux échecs, ni qu'au quillard. Perdit sa vie et ses coquilles.
Si anodin (jue cet exercice paraisse, il fut, eu 1604, défendu aux ecclé-
LES QVLLI^ES
d'apuès uni: composition de Claudine bouzo^net steli.a, xvii' siècle.
siastiques de se livrer à ce jeu ainsi qu'au jeu de billard. Le Synode
de Langres, (|ui a édicté cette défense, est très explicite à ce sujet.
En lOO."}, Louis XIII enfant s'amusait avec des quilles minuscules
délicatement travaillées au tour : c'est ce qu'Héroard a qualifié dans
ses Mémoires de « petites quilles à pirouette » .
Delille, si justement appelé « le Virgile français », a donné une
bonne description du jeu des quilles dans son Ho)nme des cliamps :
Un bois roulant de la main qui le guide
S'élance, elierclic, alleint dans sa course raiiido
Ces cônes alignés qu'il renverse en son cours
El qui toujours lombnnl se relèvent loujoiu's.
'js:; —
VI. — ItoilcMiii ■■«■piilt- un habile joiiciii* <le qiiillos.
L'art de lùcii jouor aux ([uilles a été cous'uléré par des yeiis d'es-
prit comme un des talents dont ils avaient le plus à av p,loi'ifiei'. Racine le
jeune, dans ses Mémoires sur la vie de son père, dit ([iic Hoileau <;.\c('llait
à ce jeu :
Jf l'ai souvcnl vu (ibiillrc loulcs les neuf d'un seul coup de boule. Il faut avouer, disail-il
à ce sujet, que j'ai deux grands lalenls aussi ulilesl'un que l'autre à la soci('ti'' et à i'ELat : l'un
de bien jouer aux quilles, el l'autre de bien Faire des vers.
\II. — l>c l'ulilitc' du jeu de quilles pour développer
l'adresse des enfants.
Au connuencenieut du dix-neuvième siècle, le jeu de quilles était
LtPeUtJoL-dc Qmlle^)
u'aimiks U.N TAULHAU 1)1-; david ténieus, .\vu« mèci.e.
complètement passé de; mode et l'auteur de la Vijjiniutstiquc de lu jeu-
nesse^ M. Durivier, dont le manuel parut en 1803, s'exprime ainsi au
sujet du jeu de quilles dont il déplore l'abandon par la jeunesse :
Ce Jou lie nous pnriiît p;is iurfiler l'espèce de mépris dons lequel il esl lumbé. 11 n'ii rien de
l)i('n i'uliganl, cl exi.ce assez d'adresse, piiur exei'CiM' de lein[is en leiiips celle de nos jeunes
LE JEU DE QUILLES
d'aimiès /('.v proverbes de lagnet, svii' sikci.e.
gens. Il a d'ailleurs un avantage qui u'esl pas à négliger, c'est de pouvoir s'accommoder <-i la
force proportionnelle des différents âges, par la facilité de varier à volonté le calibre des quilles
el de la boule.
Pour jouer coinmodéuicnt à ce jeu, il faut |)ré|);u'er un emplacement
di.sposé (le façon à donner toutes facilitt's au.x joueurs qui se livrent à
- 287 —
cel oxercico. Nous trouvons sur ce sujet ([uclqucs (MUiseils |U';iru|ues dans
un licciiril (les (imiisciiionts de lu raiiipagiie, |nil)lié <mi ■182() :
Ln bouU est tm feu danjereiuK Ccn^ fin ne se conte/Ue dvJtc ■
i vtirjUsetu lej coifvs divhirui^ et dejarbaie; Risifue SouveîU d'en ver-dre cUu
ICttJ
La place «la juii était liien salpètrée et bien unie; des pieux, enfoncés en terre jusqu'au
nivenu (tu sol, iiiiliquaienl la place des quilles ; celle du milieu, qu'on nommait le colas,
était plus haute que les autres, et le joueur qui la faisait tomber seule gagnait neuf points.
Comme les quilles se placent sur trois rangs de trois, il est avantageux d'attaquer le carré
qu'elles forment par sa diagonale, attendu qu'alors la chance de rencontre est comme cinq à
trois, et qu'elle n'est que de trois lorsque le joueur se place vis-à-vis de l'une des faces du carré.
La forme des quilles varie autant que leur grandeur; on doit veiller à ce qu'elles aientbeaucoup
d'assiette en creusant le dessous du pied. Les meilleures quilles se font en frêne ou en orme ;
les petites peuvent être faites en acacia.
288
\ III. — l.o j«Mi des quilles sirspeiuliies.
Un autre jpu, qui présente avec les quilles une certaine analogie,
LE JEU DE QUILLES AU XVIII» SIECLE
Ii'aP^^KS U.NE C h a vu HE DE I.' ECO LE ALLEMANDE.
est le " jeu des quilles suspendues »; un de ses pi'inci|iaux avantai;(>s est
de n'occuper qu'un enqdacement restreint et de ne pas exiger uno force
J^u h^ndc aiL'auJrajverj- d& Ces atuJI^s anjeUs
fUyus e^t une imat^S' vai^faùt^
Laisse iaru^rer <:x niy auvaat^ refier a£.b£ntJ^
musculaire bien considéraltle, ce (pii j)ei'niet aux daines de |)reiulre jiart
à ce divertissement :
Mu
<
p«4
— -2H9 —
On trace sur lu Ipri'.'iiii, à l'iiulc d'un ((H'iIlmii ut d'uii pi(iut'l, un i^'rand cercle de treize
à quatorze mètres de diamètre, cl un second concentri(iue de neuf pieds de diamèli'c, puis
encreuse à un pied do profondeur l'espace compris entre ces deux cercles. Au centre de ces
cercles est un arbre autour et près du pied duquel on atlaclie une lanière de cuir portant neuf
anneaux. Ceci fait, on plante hors de renceinte du cercle neuf piquets correspondant aux neuf
anneaux cl reliés à eux par un fil de fer ; c'est h cliacim de ces llls que sont suspendues les
LES QUILLKS
D AI'RKS UNK LITHOOIl VPHIE 1)K I.ASSAl.l.K, XIX" SIKCl.E.
quilles au moyen d'un crochet. Par leur base, ces quilles arrivent jusiiu'à terre et elles sont
placées nu nriilieu de l'espace creusé dans lequel doit courir la boule. (Jlette boule a un diamètre
tel qu'elle puisse facilement passer de l'un ou de l'autre côté des quilles sans les ébranler.
.\près la dernière quille, et à un espace égal à celui que les quilles ont entre elles, on plante en
terre une arcade. Chacune des quilles est numérotée et sa valeur correspond au numéro
d'ordre qu'elle porte. L'avantage du joueur est de chercher h. ce que sa boule n'ébranle que les
dernières quilles et qu'elle ait assez de force pour pouvoir franchir l'arcade qui termine le jeu,
ce qui augmente son gain de dix points.
Ce jeu occupe peu de place et est très amusant ; il a sur les autres jeux de quilles l'avan-
tage de dispenser les joueurs de ramasser les quilles après chaque coup. L'ébranlement de la
quille sufllt poui' qu'il soit visible que la boule l'a loucliée.
I\. — Diverses ropréseiilalioiis <lii jeu <le «iiiilloSt
Le jeu de «{uilles a Joiiné lieu à des représentations fort nombreuses;
un disciple de (lallot, Van Lochoni, dans son recueil intitulé : /rs Dcaur
et bien Adroits Jniicuvs do tmiles sniics de jeux, a représenté (|uatre person-
nages grotesques jouant aux quilles. Otte curieuse gravure a été, paraît-
— -2'M\
il, iiis[)irét' |»;u' les célèbres liyiu'cs dr l{al>el<iis. Dans un ;;t'iiiT tlili'éi'L'nf,
le lableau de Téniers, coiimi sous le nom de : /r Petit Jeu de (/iiillcs^ est
une intéressante i'('|>réseutali(jn de ce divertissement; le sujet représente
LK ,\VX l)K nl'ILLES, n'APiiiis l'nk cAiiicAiinK m. l'èpoulu; liiivoLinioNNAiiiK (1).
la ('((ur d'une ferme où, près d'une rivière, des paysans réunis en i;roupe
se livrent à ce plaisir ehani|iètre en vidant de noiuln-euscs chopes de bière.
LK JEU DE (JlilLLES, h'aimiks un:-, (juvmiie m i'i;i;viii:i; kmi'IUI':
Stella a i^ravé deux planches relatives au jeu de (piilles; la première
l'ait ])artie de sa suite des jeux : tandis ((u'im des joueurs s'apprête à
(1) Cette Rraviire l'ail partie de tou(e la séiic des |iam|ililc(s ([ui furent publiés au nioiiu-nt de la liévn-
lution et dont la dispersion dans le p\d)lic eontiibua beaueciup à la fermentation des esprits qui devait
aboutir aux sanî,'lantes périodes de l'époque révolutionnaire. Les trois personnages qui sont représentes
ici lin'urent la noblesse, le eler}?é et les paj'sans. C'est un de ees derniers qui vient d'envoyer sa boule
dans le jeu de (piilles. La gravure ori;j;inalc portait coninic légende : « Je pur'u' M. l':i}ihé que j':ii m:in<iiiè
iiiiin cil»/). — l'diir iiiiii je iic Ir iii:iii<iiie jiax. .1
LI-: JEU DES QUILLES ET LE JEU DU SL\M
r>'AÉi\KS LES LiTHOGiiAi'Hii> iiK LE l'iuNCE. HXTiiAiTEs DES .7c».r flrs Jcunc! filli's dc loHf les pcn/f, 1823.
— 292 —
lancer la boule, ses camarades regardent et l'un d'eux éci'it sur le mur
le nombre de quilles abattues.
Le même artiste, dans une autre suite de planches intitulée : les
Quatre Ages de la vie, n'a
pas cru trouver un meil-
leur sujet pour caracté-
riser les plaisirs de la
jeunesse, que de repré-
senter des adolescents
jouant aux quilles. Dans
le précieux recueil des
Modes et Costumes dit dix-
st'iilihiie sièc/e, qui fut pu-
blié chez Bonnard et (jui
se compose d(; plus de
vini!,t volinues, nous trou-
vons la représentation
d'une partie de cpiilles
|)()ur bnjuelle se pas-
sionne un brillant cava-
lier français ((ui relève
galarnuK^nt les (juilles
abattues par nue jeune personne avec laquelle il se livre à ce divertissement.
LE JEU DES QUILLES
ri'Ai'iiEs les .Jeudis de ma lanle, xix" sikci.k.
LE JEU DE QUILLES ET LE JEU DU SIA.M, d'aimiès la Gymnastique de la jeunesse, an xi, 1.S03.
Au second plan, deux dames élégamment vêtues semblent se faire
d'im|)ortantes coiilidcnces sans se préoccuper de ces jeux d'enfants.
C3 g
ui a
Q 2
i
— -2[)3 —
Un gi'av(Mir italioii, L. (lai-i'acoi, nous a tlonnr une donltlc li-^nratiou
(lu jeu (le quilles; il a d'abord dépeint le jini qui se joue avec une liouii;
cl neuC ([uilles dans un einplaoeraent garni de })lanches tout au pour-
tour, et, au second plan, il nous a montré comment se praticjue le jeu
de quilles au bâton.
Sous Louis XV, à une époipie où la mode était au cbimiis, ou a repré-
_b^ Qiu/-éca
I) APKKS L'NH LITIKIGIIAI'HIK 1)K CHAIII.KT. XIX' SIKCI.E.
sente un i^roupe de jeunes haltitaiits du Céleste FJrapire faisant une partie
av(M' quatre ([uilles seulement; c'est là uue fantaisie de {.graveur à laquelle
il lie faut pas attacher autrement d'importance. L'ami des enfants, Ber-
quiu, dans un d<» ses frontispices, a représenté une partie de quilles
à laquelle semblent prendre grand plaisir quatre petits garçons, tandis
que leurs jeunes camarades font gravement rouler leur cerceau.
En 1822, Charlet a pris pour sujet d'une de ses lithographies une
partie de quilles dans uu cabaret; au premier plan un vieux grognard
vient imprudemnuMit placer sa jambe au milieu du jeu, ce qui lui vaut
de la part des joueurs un compliment peu flatteur.
— -IQi —
•oésîo sur le jeu de quilles.
Lo jeu do quilles a aussi eu sou poète et nous citons qnekjues vers
e\\vi\\{%AG?, Jeux des jeunes garçons, qui résument assez élégannuent le jeu :
Eli bien ! Prosper, redresse donc les quilles,
Yeux-lu gager que je gagne d'un coup ?
Il ne me faut que trois points. — C'est beauc(nip. —
Mais convenons ; je laisse là ces billes ;
Je pi'endrai, moi, la boule que voici. —
C'est convenu. Jean s'élait dit ceci :
J'ai fait denx points avec petite boule,
Avec la grosse au moins j'en ferai trois.
Jusques au bout, tout joyux il la roule,
El la soulève et la trouve de poids.
Pour mieux jouer, il s'urc -boule, il s'efforcH,
I.ajelle enfin à ses pieds. — Tu le vois,
Lui dit Prosper qui ril, entre ses doigts,
Il faut d'abord bien connaître sa force.
LE .\VX DlilS QUILLi:S CIII.NOISES
D'Arri-S i'IM.RMLNT, XVIIl' SIÈCI.F.
Hlne ootcrriease .
^TlarcAanJi' de/ûoets d âejeiiœ
/fUnelske à aœom/noi)erlesp(Tm^uei9.2,'^/û^Serde.l'iù?e trompe/te àeôoùs,
4^^ûuiss sortes àe fà'des,.5,(^useaaa^ à àealelles.d<9j'ûideaa deùoi'S\
7,^wusse/on,S,'l/nœufen ôû/s.-9.'îln ^oâ/ef ùe èoisJûJïïouân à café-
//, 21/w cAasse, /£. %u' / 'oiw <- V /our à filer, /3,S5ou/es et auittcs ,
/4f^aâtetle à serairteai/(\/ô,'^asses et soucoupes à. cafe\
/6, ïtn ÇDamien /7ê/^tUer, /S.^arreauœ pour te dos D'ime câaise.
— :>!)a
CINQUIEME PARTIE
LE JEU DU SIAM
I. — l>is|>o.sili«>ii «le «'c jeu.
Le jeu tlu Siain ditlère peu du jeu de quilles; il u'est cepeiidMut |)as
Le Si arcL ,
ylvce CjoUB' b/<uÂ& (Xpji-LitLe v\ Parw le vlusT ri^aicrsLuc aes TTlms ,
VOn ne pactjaipter ^îj-^/XTâi. Game i Jettou 111 Si lanà trop or-anil^frai/lauœ dotatr ,
LE ,)I:L UU blAM
d'ai'Iils lx c.AhriiN hi' youieait ji'U du juif, xviii' sekci.k.
absolument identique, car on emploie treize quilles dont neuf forment le
cercle tandis que la dixième est |)lacée au centre; sur le front du jeu
— 2!)6 —
et en une seule ligne sont plaeées les trois dernières ([uilles, ee <[ui doiuio
à l'ensemble nne disposition assez irrégulière. La boule est remplacée
par nne sorte de disque dont la tranche est taillée en biseau, ce qui l'oblige,
en roulant, à former des cercles conceutri(jues. Quand ce disque est
lancé d'une main habile, on peut prévoir dune manière à peu près
certaine quelle sera l'étendue des ravages occasionnés dans le jeu par
ce projectile.
L'habileté de celui (jui lance le dis([ue peut, dans ce jeu, maîtriser le
hasard, à condition (ju'il connaisse bien le terrain sur lecpiel il joue,
l'inclinaison (pi'il doit donner à sou projectile, ainsi (pie la Force avec
^-^l=S^i^.
LE Ji;U DU SIAM
u'aI'RKS U.\K. vignette du PIIKMIKU KMPIIIi:.
laipielle il duil èlre lauc('' : le moindre obstacle, la plus petite ii'r(''gularil(
dans le terrain |)eut, en ell'et, déconcerter le coup le mieux combiné.
11. — !.«> joli <l<> la l»oiil<> |)l«l«» au soizîôiiu» sît'elf.
Le jeu du Siani devait être connu au seizième siècle, puisque, dans
son énnmératiou des jeux, Rabelais mentionne le jeu de la boule plate,
et il ne semble pas que cette dénomination puisse s'appliquer à un autre
jeu (pi'au jeu du Siam.
m.
— 298 —
Siipérioi'ilô «lu j<Mi du Siam sur le jeu cle quilles.
M. Durivior, que nous citions plus haut, tient ce jeu en grande estime :
Cel exercice suppose plus de calcul el demande plus d'adresse que le jeu de quilles ordi-
naire. 11 faul qu'à la justesse du coup d'œil, le joueur unisse la précision du mouvement qu'il
veut imprimer à sa roulelle ; qu'il mesure la totalité de sa révolution sur l'espace^ qu'elle doit
parcourir, afin de la faire entrer à propos, el abattre seulement li- nombre de quilles désiré. On
a vu des joueurs abattre au choix des spectateurs telle ou telle quille indiquée, el manquer
rarement leur coup. Sans doute, il y a dans tout cela plus de routine et d'habitude que d'autre
chose, surtout dans la très grande majorité des joueurs, qui sont bien loin dn problème de
mécani(jue qu'ils résolvent sans s'en cire doutés ; mais le temps de loisir employé à acquérir
cette habileté, fruit d une longue habitude, leur a épargné des écarts de conduite nombreux,
peut-être même des crimes, ou au moins des désordres à la société! Depuis que le goùl de ces
sortes d'amusements a passé, il a fallu nécessairement les remplacer par d'autres, car il faut à
tous les hommes un délassement quelconque. Les mœurs ont-elles gagné au change?
IV. — Oi'ifi,ine du nom donné st ee jeu.
Le jeu (lu Siam était le passe-temps favori des soldats retraités aux
Invaliiles; sous Louis XIV, les ambassadeurs de Siam qui vinrent à cette
époque mar([uèrent
un vif intérêt pour
ces parties et pas-
saient de Ioniques
heures à regarder
k's vieux soldats se
livrer à cet exer-
cice : ce fut en leur
honneur et en sou-
venir de leurs fré-
quentes visites «jue
l'on donna le nom
de « jeu du Siam »
à cette variété du
jeu de quilles.
Dans les cartons
du nouveau j(ni du
juif, auquel nous avons eu déjà plusieurs fois recours, nous trouvons
la reproduction d'une parti(^ de jeu du Siam à la porte d'une auberge où,
malgré son enseigne : A la grapite de Canti/ia/i, on promet simplement
aux consonmiateurs de leur servir de la bonne bière. Suivan'^f^ la règle,
neuf quilles sont disposées en cercle autour d'ime (piilbî ceiilrale, tandis
que les trois quilles <jui doivent former le front se trouveu! du côté
opposé au joueur.
LE JEU DU SIA.M AU XVIt= SIECLE
APIIÉS LNK COMT.EFAÇON ÉTHANGÉnE DES COMPOSITIONS
DE CLAI'UINE DOIZONNEI STEI.I.A.
CHAPITRE VI
JEUX CyMNASTigUES
Le saut. — i. Les nxerciccs du saut aux temps homériques. — 2. Les plus illustres
sauteurs yrecs. — 3. Diverses espèces de sauts. — 4- ''^^ exercices du saut au seizième
siècle. — 5. Le plus illustre sauteur à la foire de Saint-Germain, au dix-huitième siècle.
— G. Rapport du colonel .Amoros sur le saut. — 7. Diverses espèces de sauts pratiqués
dans les jeux d'enfants. — 8. Le saut dans le cerceau. — 9. Le saut à la corde. —
10. Poème de Katz sur le jeu du saut à la corde. — 11. Gravures diverses sur le jeu de
la corde.
Le saut à cloche-pied. — 1. .Analogie du saut à cloche-pied cl de la danse. — 2. .Vsco-
liasmus ou le jeu des outres enllèes, en Grèce. — 3. Les jeux à clociie-picd chez les P>o-
mains. d'après Pollux. — (\. La mérelle à cloche-pied au seizième siècle. — 5. La marelle
à cloche pied, d'après Stella.
Coupe-tête et saute-mouton. — 1. Représentation antique du jeu de saute-mouton.
— 2. Le jeu du coupe-teste et du' passavant au seizième siècle. — 3. Le jeu de la poste
au dix-septième siècle.
Le cheval fondu. — i. Ktymologic de ce mot. — 2. De la manière do pratiquer ce jeu.
— 3. Faveur de ce jeu au seizième siècle. - — [\. Le cheval fondu, d'après les anciennes
f,'ravures.
La culbute, le pète en gueule et le monde renversé. — 1. Le jeu du 0 calampo » dans
l'antiquité. — 2 La roue animée ou le jeu du pète en gueule. — 3. He[)résentation de ce
jeu, d'après Breuyhel. — t\. Graveurs des dix-septième et dix-huitième siècles ayant
représenté ce jeu. — 5. Le monde renversé.
La lutte. — 1. Définition. — 2. La lutte aux temps préhistoriques. — 3. La lulle dans
l'antiquité. — 4- ^^ jeu de la résistance ou l'assaut du château. — 5. Le puyilat. La
boxe. — 6. Les jeux de la lutte, d'après Stella.
La danse. — 1. La danse considérée comme jeu d'enfant. — 2. Le jeu de laf;rue et du laby-
rinthe. — 3. Danses sacrées et danses j^uerrières chez les Romains. — \. Interdiction
des danses chez les chrétiens. — 5. Les danses au Moyen Age considérées comme spec-
tacles. — 6. Persistance des danses ecclésiastiques en France et en Ralie. — 7. Rais et
ballets au commencement du dix-septième siècle. — 8. Les danses enfantines, d'après
anciennes i;''avurcs.
La gymnastique. — 1. Son origine grecque. — 2. Les exercices de gymnastique faisant
partie de l'éducation des jeunes gens, d'après Rabelais. — 3. Instituts de gymnastique
étrangers. — 4- Méthode amorosienne. — ■ 5. Gymnastique scolaire et gymnastique
médicale.
L'escrime. — 1 . L' « armatura » chez les Romains. — 2. L'escrime au Moyen .Vge en France.
— 3. L'escrime au dix-septième siècle, d'après Stella. — 4- Lî'"' salle d'armes pour les
enfants en 1829. — 5. Pièce de vers sur l'emploi de l'épée.
Patinage et glissade. — 1. .Avantages du patinage. — 2. Comment on apprenti à patiner.
— 3. De la fabrication des patins. — 4- '-^^s Skies norvégiens. — 5. La glissoire au
seizième siècle.
Les petits feux. — 1. Leur origine antique. — • 2. Signification de cette coulumo. — 3. Les
feux de joie à l'époque chrétienne.
Le jeu de la pendaison.
uoo —
PREMIERE PARTIE
LE SAUT
faire
les c
1 — Les exercices dii saut aux Iciiips lioiiiéi'iqiics.
A.MAis on n'a reuconti'i'' une inanifustation de la force el île
raj:,ilité humaine plus ancienne que l'exercice du saut. Les
anciens Grecs considéraient cet art comme un des prin-
cipes les plus imiiortants à apprendre à la jeunesse, et il
figure parmi les jeux mentionnés dans les poèmes liomé-
riques. Déjà, à cette époque, il formait l'objet d'un prix
s|>écial. Un ])eu plus tard, quand les Grecs instituèrent le
jiciikitlilon ou concours quintuple, ils ne manquèrent pas de
rentrer le saut dans cette sorte de programme au même titre que
)urses à pied, le jet du dis(|ue, celui du javelot et enfin la lutte.
II. — Les plus illustres sauteurs grecs.
Le SMut était considéré comme une des meilleures preuves des
qualités physiques des athlètes; les auciens auteurs nous ont conservé
le souvenir d(> sauteurs éinérites, et on retrouve le nom d'un certain
Pliayllius (pu pouvait franchir d'un seul bond
une distance de 54 à 56 pieds. Ce personnage
était, au surplus, un coureur infatigable, et ses
deux performances, pour employer le mot mo-
derne, s'allient admirablement, car la course
n'est qu'une succession de sauts plus ou moins
ra|)procbés et plus ou moins étendus.
III — Diverses espèces de sauCs.
On distingue deux sortes de sauts : le saut en
LE SAUT A LA l'EiiciiE hautcur et le saut en largeur; les anciens, pour
D ACUÈS imriGnAVlIUK ALLEMANDE , . , T p ' i
acqueru" une plus grande torce a cet exercice, se
XVlll" SIECLE. 1 1 O '
chargeaient de masses de jnétal nonnnées haltères,
dont la forme a varié, mais dont le nom est resté intact jusqu'à nos
jours. Les Grecs utilisèrent le saut connue exercice d'endurance, et
LA CORDS. .
u'ArJIÉS UNK GHAVLBK UE ÀVG. DE SAINT-AUBI.N liiUiK I)K LA SllïK DLS l'eUls poUssCIIS de l'aiis, XVlirsiÉCLE.
— 3Ui —
ratlilctc qui (xnivait sauter longtemps chargé du fardeau le plus i)esant
était déclaré vainqueur. Un des meilleurs moyens de se préparer au
saut consiste à marcher à cloche-pied pendant un laps de temps presque
sans limite. Cette manœuvre, exigeant un très grand etrort, augmente
dans ime notable proportion les forces et la souplesse; des muscles.
i
IV. — l.fs oxoroîccs <lii saiil au st>î/.i<'ino siOele.
Dans les dernières années du seizième siècle, ce genre d'exercice
était vraisemblablement très en hon-
neur, puisqu'un auteur contemporain a
écrit sur ce sujet un traité complet, qui
ne contient pas moins de deux cents
pages; il est intitulé : l'Exercice de muter
et de vohiçjer en l'air. L'auteur, Archange
Tuccaro, était un Napolitain, et il a
dédié son travail au roi de France.
Dans sa jiréface, il se plait à montrer
le goût que le roi Charles IX témoi-
gnait pour tous les exercices du corps :
ïoulesfois, je reprûsonleray icy ce magna-
nime Roy el qui jamais ne sera assez loue,
Ciharles IX du nom, lequel eu quelque exercice du
corps que ç'eusl esté s'exerciloit de grande alTeclion
avec certaines règles et mesures : Il domptoil le
cheval le plus fier el rebours qui eust peu esire, avec
telle prudence que l'art el son bon jugement luy
enseignoienl : 11 s'esprouvoil contre le plus fort et
robuste luictcur qui fust. Il s'esludioit à la course : Il s'adonnoil à toute espèce de saut, s'y
nionstrant fort adexlre et dispos : Il tiroit i'ort proprement des armes avec les plus grands
maistres d'escrime : Il esloit merveilleusement agile à se manier et voltiger sur un cheval
de bois, il estimoit eslre chose très honorable de sç.avoir toutes sortes de bals el de danses,
esquels par dessus tout la mesure el cadence est nécessaire. Il esloit désireux au possible
de s'exercer à ces sauts périlleux, esquels j'avois cest honneur de luy servir de maisire : Il
prenoil à grand plaisir tous les jeux de bals : Il ressembloil un nouveau Mars en toute manière
de tournoy : Il esloit cliasseur infatigable et y esloit très expert.
Le même auteur a fait précéder ces dialogues sur Part de sauter et
voltiger eu l'air d'un sonnet fort bien tourné, dans lequel les éloges ne lui
sont du reste pas ménagés :
Se lancer dedans l'air, dans son vuide azuré
Voltigeant y tracer d'un corps prompt et agile
Mille tours el retours : puis se trouver habile
A terre, d'un plein saul, sur ses pieds assuré.
LA non \ I \ Mtiaiii 1
Ii'aI'IIÈS AllCH\\(h IKUl 1 t M
LE SAIT DIT .. SAIT lH' CHAT .. (Jl'ON l'AIT AU Slfce.K i:T AU HANC
Ii'aI'IIÈS AllCHANGF. TLCCAIIO, U'i'JO.
— 304 —
Faicl croiiT à l'ignorant que ce vol aéré
N'est seulement conduicl que de la main subtile
D'un démon imposteur : pauvre sot et déljile,
Qui voudrois que tout fusl par Ion œil mesuré.
Arcliange docle, expert, par son discours le monstre
Qu'en cest art ne se fait de cliarme aucun rencontre
El que la seule cause est la dextérité.
11 mérite eiilre Inus une double louange,
Ki qu'on sacre son nom à la postérité.
Car, bien dire et sauter, sont les faicts d'un Arcliange.
BlCAUYOlS nie CtlAUVINCOURT, .\NGKV1N.
Les diverses liji^ures du livre d'Archanj^e Tiiccaro iudiqueut com-
ment on doit procéder par assouplissement j^raduel pour obtenir l'agi-
lité nécessaire afin de bien sauter; il nous montre successivement le
saut sur un tréteau à différentes liauteurs, le saut sur un tremplin, et,
en dernier lieu, le saut péi'illeux exécuté au moyeu de planclies ados-
sées contre im nuir.
V. _ i,e plus illiisiro saiiloiii- à la foii'e «lo Saiiil-dierinain
au «li.v-luiilièiiie si<>cle.
On a conservé le souvenir, dans les temps modernes, de saut(Hirs
vraiment extraordinaires ; c'est ainsi qu'on racout(^ cpi'à la fameuse foire
LES DIVERSES MAN'IÈtiES DE SAUTER A LA COliDE
h'aI'Iiks 1(1 Giinmaslique de id jeunesse, an xi, IHIC!.
de Saint-Germain, qui se tenait chaque année à la veille des Rameaux,
on vil apparaître, en t742, un certain Grimaldi ([ui avait été surnommé
^
,....-p..V
i.t: SALT EN AHiiii:ni-; I!i:t()L1!Xe i:sli;vi-: suk lks inax TiiEï.ïi;Ai \
I> AIMIKS AliClUNCK TUOnAIIO, l.'i!l9.
30(>
« la Jambe de fer » ; au cours d'un divertissenieiit iiouiuié les prix de
Cjjlhèro, il fit le pari d(; hondir jus([u'au lustre (jui, suivant la mode de
l'époque, était placé au-
dessus de la scène et ser-
vait à l'éclairer. Le dan-
seur tint parole et il avait
pris même un élan si fu-
rieux, que de la ])ointe de
sou pied il détacha un des
cristaux formant les garni-
tures du chandelier suspen-
du, et il envoya ce projectile
d'un nouveau genre dans la
barbe de Méhémet-Etfendi,
ambassadeur- de la Sublime-
Porte. Ouand, après la fin
du spectacle, (îrimaldi se
pr(''seuta pour obtenir les
félicitations et la récom-
pense que méritait, à sou
avis, cet exploit, il ne hit
pas peu étonné de rece-
voir, au lieu du cadeau,
une volée de bois vert qui
lui hit administrée par un esclave de l'ambassadeur, sous le fallacieux
prétexte qu'il avait manqué de respect à l'envoyé ottoman eu lui pro-
jetant ainsi une pierre au visage. L'histoire raconte que (îrimaldi s'en
consola en déclarant, à qui voulait l'entendre, que les Turcs étaient
trop barbares pour comprendre la sublimité d(^ son art.
VI. — Kapporl tlii colonel .Vinoros hxiv le ssiiil.
LE SAUT A LA C0tU)E
D'ArnKS LE Kinderspeel de katz.
Au sujet des sauteurs célèbres, nous avons ro])inion du colonel Amoros
qui a été le promoteur des exercices physiipies pour la jeunesse. Amoros
était un colonel espagnol, qui avait été précepteur de l'Infant Dom Fran-
çois de Paule, mais il se rallia à la France lors de l'invasion des armées
de Napoléon, et gouverna plusieurs provinces au nom du roi .Joseph.
Réhigié en France en 1814, il fut nommé, en 1831, directeui' du Gym-
nase militaire. Un certain nombre d'exercices de gymnastique ont gai'dé
— ;iu7
s(tii nom : tels, le « saut iiinorosicii » , la » porche aiiiorosieune ». Cm (•(•loue
LE JEU DE LA COUDE A SALTEU
d'aPHÈS une estampe destinée au jeu de la FA.NTASMAGOIUE, XIX' SrÉCLE.
assure avoir vu un Anolais franchir un fossé de dix mètres de lari^eur,
LA GRANDE COUDE A SAUTEU ET LE JEU DE LA PETITE COUDE
d'après UiNE GKAVL'RE DU PHEMIEli EMI'IllK.
Citons également un autre sauteur du nom d'irland, né dans le comté
d'York, qui, à l'Age de dix-huit ans, en 1799, était capable de sauter par-
— aos —
dessus dix clicviuix placés côte à côte ou d'aller, d"uu cuu|) de talon,
crever uue vessie placée à plus de cinq mètres au-dessus du sol.
vu. — Divcivsos espèces de sauls pratiqués dans les jeux trenfaiils.
Eu dehors de ces exercices, qui rentreut plutôt dans le doiuaiue de
Tacrohatie, le saut est une des récréations les plus recherchées par les
LES PLAISUJS DE L.\ CORDE A SAUÏEU
d'apiiks umî i.itiioo n a I'HIe iik lk pu in ce, 1S23.
jeunes gens des deux sexes; pour le rendre plus attrayant, on pralicpie
cet exercice tantôt avec (pielques accessoires, comme le saut à la corde,
tantôt en le soumetlant à une refile fixe, connue le « saule-mouton >- ou
le « cheval fondu ".
VJU. — Le sau( dans le eereeaiit
Dans aucun des documents relatifs à des jeux d'enfants, nous ne
trouvons la relation du saut à la corde antérieurement au <lix-huitième
siècle. En effet, au seizième siècle, et prohablement à une époque anté-
rieure, on se servait, pour ce genre d'exercice, de cerceaux en bois,
analogues à ceux (pie les enfants font rouler eu h^s frai>pant avec un
;!0!l
lȈloii. Olaiiis Magnas, daus son J/is/a/rc t/cs pci//i/cs scptt'ntr/niKai.i., nuintrc
des jeunes gens sautant à travers des cerceaux garnis de grelots. De même,
dans le recueil de 1587, des Trrntc-si.r figtircs coittenaiit tous 1rs Jrii.i\..,
on le trouve représeuté au second plan de la gravnr(> de la » Boutte
hors (l) » et il est intitulé « Sauter daus le cerceau ». La légende (pii
accompagne la planche ne laisse, du reste, aucuu doute sur ce délas-
sement juvénile :
Autre qui soiil d'ingéniciiN cerveaux,
A qui mieux, saullcnl dans le cerceau,
El ce plaisir merveilleusement louent.
Stella, (pii a également représenté ce jeu, semble considérer le cerceau
1, K S A V: T A I, A 11 1! A N U !■: C 0 H I) K
d'apiiks um-: ciiAvuiiE nu svii'= siÉcxii.
beaucoup plus connue un accessoire destiné à sauter, cpie comme un
cercle servant danmsement aux jeimes enfants :
Et j'aime bien mieux les postules
De ces sauteurs dans le cerceau ;
Quand ilz prcnenl mieux leurs mesures
(Jue le beau meusnicr à l'Aneau.
l.\. — l.c saut à la cordo.
Le saut à la corde est un des exercices les plus violents pour les
enfants, et il est loin de pouvoir être pratiqué sans une direction sérieuse.
Le jeu de la corde peut se jouer de difTérentes manières; daus le saut à
la petite corde, on joue seul et on exécute différents mouvements. Les
(1) Voir la rc'jjivscnt.iliiiii de ce jeu à la |)a^e 11)1.
— 310 —
cul'aiits l'ont aussi de petits jtas, <{ui ressemblent assez aux anti(|nes
pas (le si-Sdl dans les contredanses. La croix de clicvulicr est un pas de
corde f<jrt élégant; il consiste à
croiser les deux bras sur la i)oi-
trine dans le moment où la
corde passe sous les pieds, à les
développer et à les renfermer
avec vitesse; la corde [)rend un
mouvement oscillatoii'e cpii la
fait croiser tantôt dans un sens,
tantôt dans un autre; le specta-
teur lui voit prendre une forme
tantôt circulaire, tantôt a})pro-
chant de la croix de Malte.
Pour bien jouer ù la corde, il
faut pouvoir disposer d'un par-
quet bien planchéié, ou tout au
moins d'un terrain uni; on doit
prendre garde ([u'il ne s'y trouve
des cailloux ; le mouvement ra-
pide de la corde pourrait lancer
au loin ces objets et occasionner
des accidents.
A la grande corde, on admet
un nombre indéiiui de joueurs;
deux enfants tournent la corde pendant que leurs camarades passent
successivement !Ui milieu; quand les joueurs sont babiles, trois ou quatre
écoliers peuvent sauter ensemble au centre de la corde; mais le moindre
faux pas fait manquer le jeu : on proportionne la rapidité du mouve-
ment à l'adresse des sauteurs. Les écoliers appellent donner du rinaif/re
l'action de faire tourner la corde avec beaucoup de vivacité.
•oéiiic de liai!/, sviv le jeu du saul à la eorde.
iy<2a^ a c/ïcû^ c/ot^TZÙ .
IIEUIIKIL bE JI!i:X DU XIX" SIKCLE.
Lhi ingénieux Hollandais, .lacques Katz, vivant au temps de Louis XIV,
a composé un recueil considérable de poésies latines et hollandaises,
a célébré les jeux de l'enfance dans un poème intitulé Kinder-Speel :
on pense bien que celui de la corde n'y a pas été oublié; voici en
quels termes il en fait la description, et la morale qu'il en tire :
- ;tii
Deux piifanls, tiloisnés d'une vingliiiiie de pas, liennenl une corde un peu h\d\p qu'ils funl
tourner en effleurant la terre; un li'oisième di)il passer enli'e eux sans tonrher ce coi'ilcan
LES DOUBLES ET LES CROISES
nimcuuKs m; l\ coude a sauter, d'apkês une gravure de momes nu xix'
mobile, ou mieux encore danser el sauter au milieu avec légèreté, sans que sa corde ou ses
pieds ne l'arrêtent ou le louchent en aucune façon; sans quoi il est puni de sa maladresse, et
obligé de prendre à son tour la place de l'un de ceux qui agitent le petit cible : c'est ainsi que
les fiuiles de l'un servent de soulagement k un autre.
Etudiez les mouvements, les regards de cet écolier; voyez comme il épie le moment d'entrer:
dès que la corde, courbée en demi-cercle, est au point le plus
favorable à son dessein, il part comme un trait, ni trop tôt ni
trop tard, sans lenteur el sans vitesse intempestive, mais à
l'inslant rigoureux; parvenu au centre, il saute avec autant de
souplesse que de gaieté, et fatigue ses camarades, qui envient
son adresse et son bonheur.
Que d'instructions utiles ne peut-on pas trouver dans cet
amusement puéril! 11 vous apprend que si vous manquez l'oc-
casion, la minute, la fortune vous échappe; vous perdez le fruit
de vos soins; et rarement l'instant perdu se retrouve.
11 ne semble pas que le jeu d(> la corde ait la petite corde a:,sal;ti:i{
' . Ii'API;HS VICTOR ADAM, X1X« SIÈCLE.
été pratique a une époque hieu ancienne en
France, car Rabelais n'en fait pas mention dans sa nomenclature des
jeux de l'enfance an seizième siècle, qui est cependant des plus complètes.
— 312 —
XI. — (liraviiiT.s diverses sur le jeu de In e«>rde.
En delioi's des exercices du cerceau, nous avons, pour le tlix-scptième
siècle, une gi'avure représentant deux petits enfants faisant sauter à la
grande corde un de leurs petits camarades.
Au dix-huitième siècle, Auguste de Saiut-Aubin, dans sa suite des
Ji'Kx (les petits po/isso/is de Paris, représente l'un et l'autre des ieux de
LA COUDE A SAUTEH, d"apiiès une lithographie nu xix" sièclk.
corde; au premier plan est un petit garçonnet qui j jue à la petite
corde, tandis (]ue derrière lui d'autres bambins tiennent un;* grande
conle qu'un jeune sauteur semble avoir bien de la peine à franchir. La
légende de cette planche tire cette morale :
Celle corde lournanle, insirumeiil de plaisir,
Accroche mon joueur, dans son orbe l'enliaîne.
Ainsi l'objel de nos désirs
Cause bien souvent noire peine.
Le Prince, en 1823, nous montre de petits collégiens pratiquant ce
double jeu avec entrain. Enfin, une lithographie du temps de Louis-
Philippe représente trois fillettes s'apprètant à sauter ensemble à la
grande corde.
t
— ;u;}
DEUXIEME PAiniE
LE SAUT A CLOCHE-PIED
I. — Analogie du saut à cloche-pîecl e( de la danse.
Les différentes sortes de jeux dans lesquels on doit se juouvoir sur
un seul pied étaient très en usage chez les anciens, et, dans certains
cas, ces derniers avaient fait de cet exercice une sorte de danse plus ou
moins sacrée.
11. — « AMColiaisiniis » ou le jeu des outres enflées, eu (lirOee.
Un des divertissements qui avaient le plus de succès était le « jeu
des outres enflées » ; à
Athènes comme à Sparte,
les jeunes gens se li-
vraient à cet exercice cpii
était connu sous le nom
A' Ascoliasiinis ; il fallait que
les concurrents fussent
assez hahiles pour pou-
voir danser à cloche-pied
sur une outre remplie de
vin et frottée d'huihv Les
joueurs essayaient de se
maintenir sur un seul pied
au centre de ce l>allon
glissant et de tenir l'autre
jambe élevée en l'air ;
leur chute était naturel-
lement le signal des rires
de la multitude.
Ce jeu revenait pério -
di(piement au moment de
la saison d'automne; après
les vendanges, pour se reposer des durs labeurs, les ouvriers iuriuaieut
un cercle et l'on apportait au milieu d'eux une outre gonllée de vent.
LA MAnELLK A CLOCHE-PIEI)
ii'ai'iiès le Kindersprcl uv. kaiz, xviii'-' isiiici.i:.
— :ii4 —
Cette outre était faite de la peau d un jjoue et euduite dune é|)aissc
couche de graisse; chacun des joueurs
devait sauter à cloche-pied sur ce cous-
sin mouvant et la j)lnpart roulaient à terre
pour la plus grande joie de l'assistance.
JMistral, dans ce chef-d'œuvre qui a nom
Mireille^ rappelle cette coutume qui n'est
pas encore disparue chez les liahitants du
midi de la France :
El dans la foLili," qui se prcssu, Irisle comme un long
fi'ène que l'on a écimé, disparut le grand coureur. Ni à la Sainl-Jean, ni à la Sainl-Pierre, nulle
part jamais plus il ne s'esl montré pour courir ou sauter sur l'outre enflée.
LE ji:l; di;s oltues enklees
u'ATÉlts INK rlEllllE GKAVÉK ANÏlgLlî.
111. — Les jeii.v à cloclie-piocl elioz les Koiiiaiii$«, d'après l'ollii.v.
l'ollux <Iécrit trois jeux qui se jouent également à cloche-pied; dans
LA MasELI^E a Cl^OCHE-PlÈ
Ii'aI'UKS INK COMPOSITION IIK CLAIIHMÎ UOl'ZONNKT STKU.A , XVII'" SIKDLK.
le premier, un seul joueur armé d'une baguette poursuit son partenaire;
dans le second, qui était plus spécialement désigné sous le uom d'e//ipi/se,
les joueurs se livraient à une sorte de mimi(pie destinée à rappeler les
— 310 —
danses des féeries; ciiliu le troisième jeu consistait ;i compter les sauts, et à
celui qui en avait fait le plus i;rand nombre revenait la palme d(^ la victoire.
I\'. — La inéi-elle à eloche-pîed au seizièn»e si^clet
Tous ces différents exercices nous amènent à parler de la « mérelle
à cloche-pied », jeu qui était connu et pratiqué au seizième siècle, ainsi
Jajtpar FertlU Ouec Trimle^tJji.Ro^
t-âParù Ata^JTjUPirUijf fui Snaju/uM a. laBcUiiIm^t
LE SAUT A CLOCHE-PIEU
1)'a[m;è< r.NK GiiAVURK HE pÉuiaLK, xvii" ^^Il;cI.^:.
que~nous le montre le recueil d(> 1587. Dans cet ouvrage, ce jeu est
désigné sous le nom de « franc du carreau )- et servait alors de passe-
temps aux larpiais désœuvrés :
Cepremier jeu est du franc du carreau,
Que les laquets ont touiours au cerveau
Pour y jouer en attendant leur maisirc ;
L'autre, le rond, fréquenté volontiers...
Dans un ouvrage de la même époque, intitulé : le L'mre ilc la diuhhrie,
nous trouvons encore mentionné ce môme jeu :
Ils se hobent (bougent) de leurs maisons ;
Là jouant en toutes saisons
Aux quilles, au franc du carreau...
Ce jeu du carreau n'est auti-c ((ue le jeu de la marelle ou mérelle,
— ;!17 —
où l'on trace avec la craie une sorte d'échelle et où les eiiCaiits sautent
dans les intervalles à cloche-pied (ou à pied-hot, ])il)ot), jtour chasser
avec le pied le palet.
V. — I.a marelle s» eloelie-pîed, d'apri^s Stella.
Au dix-septièiue siècle, Stella, dans sa représentation du jeu de la
marelle à cloche-pied, senihle indiquer qu'on se coidcntait alors de
^/uz^^^e/cc^.
marquer sur le sol des raies parallèles; l'explication qui nous en est
donnée par l'artiste est plutôt vague et ne nous apprend rien de nouveau
sur la règle de ce jeu :
Cet enfant saule à cloclio-ijit
Contrefaisanl l'eslropit'',
Par-dessus ceUe tablalure.
Peul-eslre qu'il travaille en vain,
Car, s'il passe outre la mesure,
Son en-jeu changera de main.
Ce jeu, qui est encore pratiqué de nos jours, est considéré comme
très favorable aux mouvements du corps et il exerce les muscles de la
janil)e et du jarret; il a un double avantage, c'est d'obliger d'abord le
joueur à bi(ni conserver son équilibre et ensuite de lui donner l'adresse
et le coup d'œil poui' qu'il sache jeter habilement la pierre dans la case
— 318
LE JEU DE LA MARELLE A CLOCHE-PIED, i.apuks une mthoghaphif, de i.e imiince, 1823.
déterminée ; ces exercices étaient, au coinraenccment du dix-neuvième
siècle, recommandés comme un des éléments de gymuasticjue les |dus
favorables à la jeunesse.
LA MARELLE A CLOCIIE-I'IED, h'apiiks i.\ suite des jeux chinois de wllement, 1759.
31U
TUOISIIIME PARTIE
COUPE-TÊTE ET SAUTE-MOUTON
1. — Itopi'rsoiiliilioii aiiti<nio du jon do nsiii(o-iii<miIoii.
Le sautc-inoutoii consiste! à franchir d'un bond rapide le dos de l'un
des joueurs qui s'est légèrement incliné et a afî'ermi sa position en tenant
ses mains appuyées sur ses genoux. Pour franchir cet obstacle, le sauteur
doit, après avoir pris son éiau, trouver un point d'appui à l'aide de ses
mains (pi'il pose sur les épaules du patient.
JLA Poste
u'aIMIÈS L'Nli OIIMPCISIIION UE <;i.AUUINE BOLIZO^NET STELLA, XVU" SlliCLE.
Ce gein-e d'exercic»' a du être connu des anciens, quoicpie dans les
auteurs grecs et latins n(jus ne trouvions pas de passages désignant ce
jeu d'une manière spéciale.
Au point de vue de la représentation figurée, M. Becq de FoU(piières
signale, dans l'ancien et célèbre cabinet Durand, un cylix sur lequel une
petite scène rappelait d'assez près notre saute-mouton; ou voit, en effet,
un enfant accroupi par-dessus la tète duquel s'élance un de ses camarades.
— 320 —
II. — Le jtMi <lii coiipe-tefitc et du passavant an sei/iènic sièfle.
Dans le recueil des TretUc-six figures contenant Unis les Jeua\ etc..
., ck
LE JEU DE SAUTE-MOL'TOM
d'à ni lis BEniALL, xi.\<' sikc l[
1587, 011 trouve trois vers qui sont consacrés à ce tliverlissemeut (1) :
Ils saillent tous en ci'iant : coiippe leste,
L'un par sus l'aulro, est-ce pas jeu lionnesle ?
Jouëul aussi afin d'eux escliaulfer.
On trouve quelques variantes du mot « coupe teste » , et il s'écrit
K croupe teste » et » croque teste » .
III.
I.e jeu de la poste au di.v-septième siècle.
Au seizième siècle le jeu de saute-mouton se nommait passen'ant, et,
pour comprendre cette désif:,natiou, il suffit de rappeler le passage des
œuvres de Rabelais où se trouve raconté un des exploits de l'illustre
personnage tlu roman de Pantar/ruel :
<< Paniu'ge se rendait un jour par mer au pays de Lanternoys; ayant
eu maille à partir avec \\\\ certain Dindonnault, mai'chand de moutons,
qui faisait route avec lui, Panurge, pour se venger de son compagnon.
(I) Voir la rc])i-csenUliuii de ce jeu à rarticlc' consacré aux barres, pa^je .'JO.
LM COUPE-TETE .
l>Al-lltS U.NE (ill.VVlllE Illi AUO. \>ï. SUM-.UblX, -llRl'.E IIK LA SUITE hKS t'ClHs l'ollSSUIlS df Pcilh, XYlll'' SIÈCLE.
■ô±2 —
Lie JKU MF. SALiTr.-MOLi'roN, [i'aimiks im-; r.nwriŒ w. jonMimi, skcumi i;mi'1iik.
cul l'ecuiu's ù un tour <Ui su Iîk'oii. Il propcisu ù Diudoiiiiaull de lui
acheter uu de ses moutons à un Iton prix; aussitôt le marché conclu,
Panurge, après avoir choisi dans le troupeau la
l)ète la |dus helle, la saisit dans ses l»ras vigou-
reux et trampiillemeni la jeta par-dessus Itord.
Ij's antres montons, voyant le chemin pris
pnr lenr camai'ade, se précipitèrent par-des-
sus ](! liastingage du Italeau et en (pielqnes
secondes tout le troupeau ('-tait à la mer. »
C'est prol)al)lement à ce haut l'ail ([ue l'on
doit la locution : « b'aire comme les mouhms
de Fanurge. »
On peut s'expliquer l'acilenienl la sinn-
litnde qui existe entre le passavuitt et le .suutc-
moi//o/i, ]niis(pie aussitôt qu'un jruienr a santé
par-dessus son camarade il doit comme lui
l'aire le jnouton.
Au dix-septième siècle, le jeu de saule-
mout(Mi, tel (ju'il est pratifpn/ maintenant pai' les jeunes gens, était
connu sous le nom de la /ms/r. Stella m)us a représenté neuf garçons
jouant à la //wA-, (prclle assimile à la voltige :
ij:.ii;u du sautk-mouïox
i)'.\]'iii':s r.NK Giiwimiî allkmandi':
mi xviii» siKci.iî
Ainsi r;inj,'ez d'un air li'gor.
Ils s'exercent à voUigcr
Kl \(inl p;ir voltos et courbelles ;
Que si qnelqu'iin est curieux
De .juïci' qui s.'uiie le mieux,
Il n'ii pas uiiin(iué de luni'Ucs.
— a2:( —
Sniiit-Aul)iii, dans sa sc'^i'ic ilos Jeux des pc/i/s
/)()//sfi()iis de Paris, au dix-liuiliènie siècle, donno, au
suj(^t (lu jeu (le saule-uKtulou, une petite le('(»u de
morale (|ui ue laisse i)as (jue d^Mi'c nu [xîu piu'teii-
tieuse :
Bon courage ! ouliliez les soucis île l'école ;
Sautez, fendez les airs, retombez aussil(M,
De nos ambilieux vous êtes le symbole :
Ils veulent s'i-lever et tombent ilc plus iiaut.
LlCIlit! DKSAUTK-JIOUl'ON
ll'Al'niiS VlCÏOll All.Ul,
OUATlUEMi: PARTIE
LE CHEVAL FONDU
I — FJyiiiol<>;;'io cl«' e«' mol.
Un autre jeu (jiii |ii'('seute avec le saute-uioutou une i;rau(le analogie,
LK.JKU DU C1U-;VAL FONDU
J)'a|'I1KS lINli GIIAYIIIIK Dlî CAnBACCI (1), XVII'^ SIKCLK.
;1) Nous avons à plusieurs reprises reprocluil des leiivres de cet ai'Uste qui a iîiavé (mile une série de
planches relatives an jen. Au^'ustin Cai'racci était le cousin du célèbre peintre de lîol(i(;ne. plus connu
siius le nom de Carraclie: comme lui. il était né il Dolo^ne en t537, et il mourut à Parme dans les pre-
mières années du dix-septième siècle. Pour la peinture, il eut comme maîtres Fonlane et Passeroti, mais
il s'appliqua beaucoup plutôt à la [gravure qu'à la peinture. Pour la gravure il avait eu comme maitre le
célèbre graveur hollandais. (Corneille Corl. Il aida aussi son frère, l'illusli-e .\nuibal Carrache, à la galerie
Parnèse, où toute la fable de Cépliale cl l'.alatliée est de sa composition. On lui doit également un Trailé
de ijersiieclive et d'urchileclure.
— 324 —
mais qui cependant ne doit jias être confondu avec Ini, est le jeu du
<i clieval fondu ».
Tout d'abord ce nom demande quelques explications : fnndu est uii
tenue de marine, et signifie coulé à fond, enfoncé, abaissi" ; iiiusi, jouer
au '< cheval fondu », c'est jouer à faire enfoncer, abaisser nu on plusieurs
écoliers (|ui fout le péuil»]e métier de chevaux.
II. — De la inaniiTo de pratiquer ee jeu.
(kî jeu ne laisse pas que de présenter cpielque danger; les parents
et les maîti-es ne doivent le permettre qu'aux jeunes gens qui sont assez
vigoureux pour le supporter et assez prudents pnui' n'en point abuser.
J.E Che.vai. Fondv
u APiii;s UMî ciiMrosiTiiiN m; ci.aiidink bouzo.nm-t stki.la. xvii" sew.li:.
Les écoliers qui jouent au cheval fondu se divisent en deux troupes de
quatre, cinq ou six joueurs chacune; ces deux troupes jouent alternative-
ment le rôle de « chevaux » , et celui de « cavaliers » ou sauteurs ; ceu.x:
([lie le sort a désignés pour remplir les premiers les fonctions de che-
vaux se rangent de Ole, l'un au bout de l'autre; le premier a les mains
appuyées sur une table, sur une fenêtre de rez-de-chaussée, ou tout autre
ih ^ <\
en ra Œ
-5 H
— 3;26 —
appui solide; le second lui serre les reins avec les bras, ainsi de suite.
Le premier cavalier prend sou élan, appuie ses mains sur le dos du
dernier cheval, et saute le plus loin que ses forces le permettent; le
second sauteur se place immédiatement derrière lui; si les derniers n'ont
Ll-2 JICU DU CHEVAL FON'DL', b'Ai'iiiis une i;iiavii;i: ih; im;ui:i.li:. \\\i >iiaax.
pas assez de place, il faut ([u'ils sautent par-dessus la tête des autres,
et c'est alors que le jeu devient dangereux; le dernier arrivé frappe
trois fois dans ses mains, afin de signaler l'adresse de son parti; dans
ce cas les cavaliers continuent à sauter, et les autres continuent à les
recevoir sur les épaules. Si le jeu manque par la faute des sauteurs,
et si ces derniers se laissent tondter de côté, ils deviennent patients à
leur tour.
III. — l'aveiir «le et» jjou nii sei/.îf'iiic •sii'el*'.
Ce jeu a été, au seizième siècle, adopté quehiuefois par les grandes
|)ersonues elles-mêmes, si l'on peut donner ce nom aux courtisans dont
l'unique préoccupation était de briller aux yeux de leur patron et de
s'attirer ainsi ses faveurs. Les historiens de l'époque racontent cpie l(;s
gentilshommes français monti'èrent à ce jeu une dextérité remarquable.
L'amiral de Colignv, lisons-nous, fut envoyé en 1556 à Bruxelles,
vers l'l']iii|)('ri'iir |miiii' In l'.ililicilidii de la Irrvc. Ariivr dans (•clic ville
le 2;) mars, il lui loi;('' en ime l'iic iionimce des Ai'ènes. « Le lendemain
matin, ra|i|H)i'lc la l'clatidii de l'aiiihassade, les seif^iKMirs français,
asseiublés chez M. lAniiral, en une faraude cour (|ni élail an lo^is,
[MMidant «piil dépêchait ([uel(|nes affaires, se mirenl la phipai'l à jonei*
an cheval fonchi; mais, h; hruit s'en étant réiiandn, itlnsicnrs i;enlils-
hunnnes llaniands cl aidres de (jnalilé accdni'ui'cnt ci li'iinvcrenl le jen si
hean quils lirenl de même, mais U's nùlres emportèrent le pi'ix. »
|\'. — l,«" choviil r«»ii<lii «l'aprôs les suicii'iiiios ^i-jix ur<'.s.
Stella, en reprodnisant le jen du cheval l'ondn, a l'ait nn hmi mot
(piehjne pen gaulois :
C'est à bon droit ([uc cri ('iifiml, Piiisqu'cn des lii'ux si bien IliiiKjiii'z
En postiii'i' (le Irioiiipluint, Il passe cl rnonle à l'escaliulc
De sa bravoure fait parade : Par-dessus deux canons liraquez.
Lv: cincvAL hjndu
i)'Ai'iii;s i'.\r: ciiMi'usniii.s m: v.nn.Kn, xvie' siÈci.t:.
Au temps di; Louis \\\ , Evviw u rt^présenlé mi gi'onpc dCnlanls
<pii se livrent aux donceurs de ce jen, et, nn peu api'ès lui, IN'i'cilc
nous a montr('' de jemies paysans (pii se ehevauclienl l'un l'auli'c au
— 3:28 -
Sun (le la flùtc duii bei'f;('r iiu''laiicoli([uemeut appuyé le long du tronc
(1 un vieux saule.
Le jeu de saute-niuuton a inspii'é un artiste moderne, M. Monvoisin,
(jui, au Salon de 1836, a représenté <{uelques enfants pratiquant avec
entrain ce noble jeu.
CINQIIIÈMF] PARTIE
LA CULBUTE, LE PÈTE-EN-GUEULE ET LE MONDE RENVERSE
1. — I.c jcii du ealaiii|><> dans l'aiiliquité.
Nous étudierons ensemble ces trois genres d'exercices, <{ui présentent
re eux une très grande analogie.
Dans les auteurs anciens, on trouve le n(jm d'un jeu (jui n'a pu être
LE JKU DU PETE-EN-GUKULK
DAi'ilKS a LA GIIAMIE FKSTE LIE NOSIUK VILLAGE " DE VAN UllEl'GHEL, XVIl: SIÈCLE.
identifié : il est désigné sous le nom de aitamiio. On suppose que ce n'est
qu'une altération d'un autre mot ratamho, et ({ue ce jeu consiste à marcher
UE Jeu r>E Pet en Gi'eule
niVERSES MAMÈHES 1)E FAIRE LA CLILBUTE
>'aPI1KS les compositions DR CLAUDINE BOIIZONNET STEf.T A . XVIie SIÈCLE.
..Lie/
— 330 —
la tète en l»as et les pieds en l'air. Il ferait paitie des exercices auxquels se
livraient, chez les Grecs et les Romains, les cabislcres ou faiseurs de cul-
butes.
Les Grecs étaient très habiles à ces sortes d'exercices auxquels se
livraient même les femmes, et ils en augmentaient le danger en exécutant
les culbutes au milieu de poignards plantés en terre par la poignée.
II. — I.a roiio animée ou le jeu du pt'te-en-gueule.
Dans les campagnes, un jeu fort populaire parmi les enfants consiste à
LA CULBUTE
h'aPIIKS l'NK fillAVlIllE DE CAllIlACCI, XVII' SIÈCLE.
faire une sorte de roue animée formée de l'enlacement de deux joueurs;
pour cela, deux enfants doivent se tenir de telle façon que l'un reste
debout tandis que son camarade, la tète en bas, saisit avec ses bras les
jandjes du premier. Dans cette position, ils se renversent sur le dos d'un
troisième joueur qui est à quelques pas et leur présente son dos en
forme de pont. En multipliant ainsi les obstacles, la roue vivante avance
au moyen de renversements alternatifs, et c'est à chacun son tour à venir
heurter le sol avec sa tète. Malgré le peu d'élégance de ce j(>u et le
danger cpi'il présente, il a été très en honneur depuis la fin du seizième
siècle jusqu'au dix-huilième, et tous les graveurs cpii se sont occupés des
jeux tl'enfants ont consacré une composition à cet exercice bizarre.
LA CULDLTK liT LA LUTTK
Ai'iiKs ixK Gmvtiii; itai.ihnm: iir xvir' sikci.k.
Soi —
III. — lleprésciiCaCioli <l<' ce jeu «Paprès Breiigiiel.
D.ius uiK! cui'ieuse gTaviu-e de Breughel représentant une iète popu-
fiirc, <jn vuit au premier plan deux joueurs cpii s'apprêtent à franeliir
LE JEU DU ri:TE-E.\-(;UEULE
u'aimiks i;xe compo-^iïijn de tettki.in, xvii" siÈOLi:.
rnlisliicle lonué par deux de leurs camarades (jui sont à demi étendus par
terre; un groupe de curieux les regarde et sendde trouver ce spectacle
profondément hilare.
I\. — (jii'aviires <l<'s ilî.v-septièiiie et «li.v-luiî(iOiiie sîêeles
ii^siiit représeiilé ee jeu.
Stella na pas man(pu' de le mentionner an nombre des jeux des entants
et (.'Ile déclai'e :
Cl- phiisir l'sl furl iiiiiocenl
El dans cr jeu divcrlissiiiil.
Les eiiraiits se (luiiiieiil cairiri'c.
Un artiste du temps de l.ouis .\1V, Tettelin, a également consacré à
ce jeu une composition aussi élégante ipu; le permettait le sujet; il
nous montre trois groupes de jeunes enfants employant ce procédé peu
rccommandable pour descendre une penti' gazonnée.
:i;t;i
LK MONDE RENVEllSK, ii'aphks um; vlgnetti; du xi.x." sikclk.
I,e inoïKie renversé.
On ii|»p<'lle égaleiueut le niniu/c rc/irrrsé ou le poirier /oiinlni un jeu i|
consiste à se tenir la tète
eu bas et les jambes eu lair
pour imiter la fourche de
l'arbre ; si ces futurs acro-
bates se mettent eu mouve-
ment dans cette position,
le jeu prend le nom d<;
marche des fourches ; le pa-
tient doit alors avancer sur
les mains en maintenant ses
jambes verticalement.
Stella a représenté cet
exercice de la marche des
fourches, mais elle Tinti-
tide, fort improprement du
reste, " la culbute ». Dans
les six vers suivants, on
peut voir que les règles
de ce jeu n'ont pas varié
depuis le dix-septième
siècle :
A voir li'Ui'S soubresauls bouiroiis,
Qui ne tliniil que ces poupons
Auroienl bon besoin d'ellébore ;
UN CUNCOUUS D'EXERCICES CIIAMI>ÈTHE-i
d'apmés une gravuke du xvii» siècle.
Leur corps esl pourlanl bien dressé
Si, selon que diL Pylhagore,
L'Iioinnie est un arbre renversé.
Ou a quelquefois combiné ce jeu du poirier ou du chèue fourchu avec
— :iu —
lu jeu du coupe-t(Me (tu du saute-inoutou ; dans ce cas, le joueur devait,
par un bond, passer euti-e les jambes de son eaniai-ade pour venir retom-
ber de l'autre côté.
Tous ces jeux ne sont pas, à proprement parler, des amusements
bien recommandables pour l'enfance; on pourrait plus exactement les
comparer à un retour vers les supplices de l'hupiisition, et, si on in-
tligeait de pareils traitements aux enfants eu f^uise de pimition, ils ne
manqueraient pas de se récrier sur la rif;ueur du cbàtiment.
La ((Culbute» pai'ticipe aux mêmes dangers et procure des cbarmes
aussi contestables (jue le <( monde renversé » et le jeu du " [>ète-cn-
giieule», aussi ne croyons-nous pas avoir besoin d'en donner une plus
ample descriptiou.
SIXIEME PARTIE
LA LUTTE
Dêiiiiilioii.
Le premier exercice auciuel se soit livi'é l'Iioumie, pour faire l'é-
preuve de sa force,
est sans contredit
la lutte qui est une
image de sa l'ésis-
tauce contre des
ennemis éventuels.
Par le mot /Nlfc,
il faut entendre
spécialement • des
cond)ats dans les-
quels l'adresse
prime la force bru-
tale ; dans cet exer-
cice, en effet, on
exclut soigneusement tous les coups et même tous les cbocs, de
(piebpie nature (pi'iis soient, de nianière à laisser à l'adresse toute sa
puissance.
LA LUTTE A MAIN ARMÉE
UAi'iiÈs OLAIUS MAGNVS. xvi» sikci.k.
LES mVEUSES FOR.MES DE LA LUTTE
d'aI'HKS les COMI'DSITIIIXS DK CHCDINE BOUZO.NNET STELLA, XVll^ SlhCI.K.
xm —
I,a liitl<» aux Icinps pri'liistoriqiics.
Un (les [)liis anciens exoiuples de lutte que nous ait laissés l'anti-
quité fabuleuse est la lutte d'Antée, fds de la Terre, avec Hercule, qui
fut obligé de soulever dans ses In'as le géant libyen et de l'étoufler
sans qu'il lui fût possible de touclier à nouveau la terre d'où il tirait
toutes ses forces.
C.ereycon d'Eleusis fut considéré coraine le père de la bdte, car ce
fut lui qui, le premier, montra que rien ne peut éti-e opposé à l'adresse
savamment utilisée par le lutteur.
m. — I.n liillo <lnns Tantiquilt-.
Aux temps antiques, les lutteurs recouvraient leur corps d'une com-lie
d'buile destinée à empêcher
leur adversaire de les sai-
sir à jdeiue main, ce cpii
leur permettait en outre de
s'échapper de leurs liras.
M. Becq de Fouquières
a consaci'é un chapitre de
son savant ouvrage à la
lutte des adolescents, c'est-
à-dire (( de ces combats vo-
lontaires et sans danger
auxquels, par amusement,
se livrent les enfants. Un
se roule ensendde sur le
sable et l'on se relève tout
en riant. »
Dans les Di<inj/si(i<jiirs^ de
Nonnus (X, 325), ih)us re-
levon.s une description rela-
tive à ces luttes juvéniles :
Baccluis se sentait attiré vers Ainpclos ; ils se plaisaient ensemble dans les Lois touffus h
lancer clans lesnirs le « thyrse » vagabond... Parfois restés seulssur la rive solitaire, ils jouaient
sur le sable du llcuve aux riches cailloux et s'y livraient en riant à l'exercice de la bille.
August(> se plaisait beaucoup à assister aux jeux et aux luttes des
eid'ants, quelquefois il les faisait se disputer jiour obtenir en récompense
quelques menus cadeaux.
LA \a'\:ïv.
:ai\ihix,i, wn"
43
— 338
IV.
I.o jeu ilo la résistance ou l'assaut du château.
(.h<!/. les Romains, on pratiquait également le «jeu delà résistance d ;
dans cet exercice il s'agissait
de supporter, sans bouger, le
choc d(> ses a(lversair<'s et do
ne pas lâcher pied sous |)eine
de perdre la partie.
Au seizième siècle, ce jeu
était désigné sous le m un de
'< Je snis dessus la tejre, vi-
lain )> ; dans le recueil de 1587,
nue gravure représeidc ({uatre
jeutu's enfants s(» livrant à cet
exercice : au ceidre d'une ter-
rasse, se tient le défenseur de
la place qui est atta(jué par
deux jeunes garçons et une
filletle en robe longue qui ne
seJidde pas être nn agresseur
bien redoutable.
Au dix-septième siècle, cet
nt a été repris sous le nom de tassant du duUcau : une demi-
d'enfants entourent un tas de sable au sommet duquel est grimpé
.A LUTTE DANS LANTIQUrrÉ
l'.NE OUAV'JIIE ITALIENNE DU XVir» SIÈCLE
ainusemc
douzaine
LES l'ETITS MAUVAIS CAItNIvMENTS
II' Al' Il H s UNE LlTIIOGll A ni lE DU XIX" SIÈCLE
un de leurs camarades ; ce dernier doit supporter l'effort des assaillants
sans abandonner le sonunet de sa forteresse improvisée.
;i:jo —
SIclhi ;i (l(''t'ril en ces Icrincs un |)('u ti'()|t itoiiipciix celle Julie juvénile
A-l-on jiiinuis vu goiiveriuuif
En veiiii- niioux en son honneur
Dedans une ville de guerre,
El cel autre qu'en cet assaut,
Ç.e brave a renversé par terre,
Pouvoil-il faire un plus beau saut?
Lu Inife, qui fait partie intéi^i'ante des
exei'oices de gymnastique, a sidji les mêmes
vicissitudes que cet art et a été peu en lion-
,, , ,. , ,.,.., ., , LE Ji:U DE LA lîESISTANCE
neui- jusqu a la lin du dix-lmitieme siècle. „m.iu>s vR.roi, adam, xix- sièclk.
V. — Le |)iis,'îlat et la boxe.
Nos voisins d'outre-Manclie, grands amateurs de tous les sports athlé-
tiques, ont beaucoup pratiqué la lutte ; depuis une centaine d'années, cet
' <JOi*ryiAny
'X^ÛÛX/'J . U. C'c/^/ii/^'Il
exercice a pris plidôt, chez eux, la forme du pugilat ([ui a été également
connu et pratiqué dans toute l'antiquité.
<;hez les anciens, le poing fermé était d'abord nu; on imagina ensuite
qu'il serait possible de rendi'e les coups plus forts en prenant dans la main
une boule de pierre ou de métal. Voilà l'origine du combat à poing ai-mé.
On alla jusqu'à entourer le poing de courroies garnies de ferou de plomb.
^ _ 340 —
Cette espèce de lutte coiisistriit à hatti-e sou adversaire jusqu'à ce qu'il
tombât par terre ou qu'il se déclarât vaincu.
Les combats de » boxers », en Angleterre, ont été dans ces dernières
années une des plus grandes attractions du public, et ceux ([ui se li-
vraient à cet exercice s'y préparaient par un eulraînement tout spécial.
VI. — l,os jjciiv «U' la liiM»', d'api-f-s Slclln.
Stella n'a pas man(|ué de mentionner la lutte parmi les jeux des
enfants : elle décrit cet exercice sous le nom de; hntaille.
Vdiiiy comme les faclions Mais je crois que pour tous itlessez,
Changent les aigneaux en lions
VA renversi'iil loul sur la terre :
11 restera, de cette guerre,
Seulement quelques nez cassez.
SEPTIEME PARTIE
LA DANSE
I. — l.a dîinso «•onsidi-rco t'oiiiinc Ji<Mi d'oiifanl.
Une étude sur les jeux doit ('«(iiqu'endre la daiis(» eu tant ([u'exercice
pbysiqui' , ci nous avotierous tout d'abord bien nettement que notre préten-
tion n'est i)as d'étu-
dier l'art cliorégra-
pbitpie : nous lais-
serons ce soin à des
autetu'S plus compé-
tents, qui })ourront
tirer un admirable
parti de ce sujet. Au
surjtius , il est bon
de taire observer
t\\w tous b's artistes
(]ui ont consacré des
études spéciales aux
divers jeux des en-
tants n'ont pas maïKjuc' de comprendre la danse parmi les délassements
juvéniles, et la préoccupation de signaler à la jeunesse les bienfaits (\i\ cet
exercice se retrouve depuis l'auteur anonyme du fameux recueil de lo87
jusqu'au premier tiers du dix-neuvième siècle, où nous voyons que Marlet
a consacré à ce! annisement une de s(!s plus cliarmautes litliograpbies.
L.V DANSE AU XVI« SIÈCLli, n'APiiF.s OLAIVS MAO.WS
Ilisloire des peujAi's seplenlrionatix.
l'il —
l,<' joii (l<> 1)1 s'iMic <■! «lu Inh.vriiiMio
Los anciens oui ]>rali(Hi('' un jiMi lorl rôoréatil' (|iii (Mail connu s((ns lo
nom (le jeu (le la ///v/c et dn l(i/iijriiitlic : ce jeu a été ainsi nonuné parce que,
à riniilalioii de ces oiseaux voyageurs qui volent eu longue lile, les
danseurs se tenaient par la main et décrivaieut. guidés par' le conduc-
teur du choMir. des leurs et des (h'-toui's ra])pelaut les ])lis et les replis
I,A DANSE DES OEUFS AU XVI» SIECLE
d'aPHÈS une GIlAVUnE DE M. DE VOS.
des labyi'intlies. (lotte danse remontait à la pins liante antiquité, puisque,
dans Homère, nous la voyons figurée sur le boucli(!r d'Achille : le
poète en attribue l'invention à Dédale en l'honneur d'Ariadne.
Au surplus, les anciens ont considéré la danse comme une des
parties essentielles de l'éducation do la jeunesse; les jeunes Romaines
prenaient une de leurs principales distractions dans la nmsique chorale
qui participait dn chant et de la danse : « Tantôt, dit M. Becq de Fou-
quières, elles se tiennent toutes par la main et l'une d'elles a la con-
duite du chœur qu'elle enroule et déroule à son gré. Tantôt, un(; ronde
se forme : les jeunes gens alternent avec l(>s jeunes filles, tous se
tiennent par la main et forment ainsi un collier, les jeunes gens don-
— M2 —
liant à leur danse une allm-e martiale, les jeunes filles affectant luie
tenue modeste et décente. »
III.
Danses sacrées et danses guerrières clie/. les Romains.
Les Romains avaient également des danses sacrées et des danses
guerrières, et la tradition rapporte que ce fat Romulus qui inventa ce
genre de saltation. Numa fonda un collège de jjrètres dont la mission
était d'exécuter des danses armées autour de l'autel de Mars.
RONDE D'ENFANTS
d'à PII Es UNI! CIIAVUUE DU XVII» SIÉCLK.
(ÉCOLE I T A L I E .N N E )
Le j(ni de la danse |)rit chez les Romains un dévelo|)i»enient si con-
sidéra])le, que les danseurs en renom étaient honorés à l'égal des sou-
verains.
Un des mimes dont l'antiquité a conservé le souvenir fut le célèbre
Pylade, qui savait à lui tout s(Hd figurer sur la scène tout un drame;
son succès fut si considérable, que tous les riches Romains voulurent
alors s'offrir le luxe de présenter chez eux à leurs clients des repré-
sentations mimées.
Tibère, voyant dans cette coutinne une marque de décadence, chercha
vainement à en arrêter le développement et cette mode ne fit que s'accen-
tuer pendant les dernières années de l'Empire.
LE COVRT BaSTON
LA Dan CE
L.V DA.NSE ET Li;> I.XEUCICES DE TRACTION
d'aI'IIKS J.ES CflMI'OSITIONS Dli CI.AUDI.NIi HOUZONXET STELLA, XVII» SIÈCLE.
'%
344
IV. — Interdiction des danses eliez les chrétiens.
La danse (]iii, à ronf:,ine, avait eu mi caractère sacré, dévia peu à
LA DANSE
n'APltÈS UiNE OliAViniE FIE NICOLAS GUÉnAI'il), XVII" SIÈCLE.
peu de sou but pnmitii et pénétra sur le théâtre; les chrétiens, qui
LES PLAISIRS UE LA DANSE A LA CAMPAGNE
u'aiuks lne gbavube de la fin du xviii" siècle.
s'étaient emparés de cette coutume, eurent à sului- les nombreuses
défenses du pouvoir ecclésiastique. Vers la lin du sixième siècle, un
LN li\L A L'EPOUUE 11EV0LUT10N\.\II!E
Et noua aussi, j'valsons.
Ii'aI'HÈS INK CAniCATl'llE HE I.'kI'UOI E RKVOLUTIONNAI liE.
44
— :w, —
('•vr(|m' <l'Aii\ci'rc, diMiMidil, diiiis un syimdc Iciiii sons s;i pi'rsidiîiicc, lu
dîiiisc (jui Jiv.iit lieu ;iii\ cdciidcs de jinivirr cl i|ui v\i\'\[ iiiic |irali(|iio
vcii.-inl du |(;ii;iiMisiii(' ; ces liiiliiiiidcs lacliciiscs coiisislaiciit en liiiiii|iifts
J^^i« ^' .^,
l.\ nWSi;, iiAiiu,-, hi l.i/iiniiis/h/iir ilr /a jriiiK'sse, an xi, ISOIl.
suivis de danses (|ni avaicnl lien dans riiil(''ri(!in' nn^'iiK; des ('-^liscis. Cet
nsa;i,(', ('(ndrairc à rcspril nirnic de la ridi^ion (■ln'(''li(!nnc, ne dispanit
pas (•(ini|d(''l('nii'nl et on r'('li'ouv(i des li'ac.(îs d(! ccllr (■oiiliunc jiis(|n'à
nnc (■■|>oi|n('. ass(!z rapproclirc^ do nons.
V. — l.cs iliiiisrs au ^lo,><-ii .\n<«, 4*<>iisiil<-f<'-<''s <'oniiii4> s|H'«'CjwI«'s.
^réliiil snrlonl à l'issue des repas (pi'a\'ai(!nl lien les danses acconi-
|)af>'nées d(! tours
d'iMpiilihre, l(^ (ont
oxf'cnlé an son des
instrunieids.
Vers la lin du
lieizièino sièch;, lo
goût de la ii(d)lossc
poiu' la danse di-
minua dans de
f;randes pro|ioi'lions
pour ne reparaiiro
<|ii'an <|niii//iènie
siècle. I.es danseurs (\[w. l'on voil li^nrer alors dans les niinialin'es <le nos
nianns(;rits sont des danscîurs de jindession vêtus d'un<; manière l'oi't
('•l(''f^anle el (pii ac('(im|dissaienl leurs pas rylhmés au son des inslrnmenls.
DANSK DKS KOUS
rAC-siMii.i: h'um: mimaiiiik h'iin manuschiï m' tM'.v/.ii'MK siki:i.iî
nu H llini.l(HIII;i.llI|.; FIDI.IIKVDNNK A l,'l!NIVKI|Sllli d'dXKUIII.
— 3'»8
VI. — l*ci'sîs»taiico des daiisofi» ecclésiastiques
en France et en Italie.
Malgré les décisions des conciles et les anathèmes lancés par le
clergé, les danses dans les églises se conservèrent dans certaines provinces
de la France et notamment à Besançon. Dans le Mercure de France^ de
septembre 1712, nous trouvons une lettre écrite de cette ville, relative à
une danse ecclésiastique qui s'y faisait le jour de Pâques; elle avait nom
de bergeretla et ne disparut complètement qu'en l'année 1738.
LA DANSE
d'aPUÈS une vignette du PIIKMŒII EMI'IUE.
Les danses ecclésiastiques se sont conservées encore plus longtem|»s
en Italie, et on en reti'ouve dans certaines églises de Rome juscpi'à la fin
du dix-huitième siècle.
Cette cérémonie d'un genre spécial se pratiquait sur une espèce de
théâtre séparé de l'autel, qu'on nommait le chœur, et Jaubert raconte
qu' « en 1793 on en voyait encore des v(\stiges dans les basiliques de
Saint-Clément et de Saint-Pancrace de Rome. Quoique l'Eglise ait jugé
à propos de retrancher cette danse de ses céi-émonies, elle est cepen-
dant encore en usage en Espagne, en Portugal et dans le Roussilloii. »
VII. — liais et ballets au coniniencenient du dix-septî^ine siècle.
Les grands .ballets et les bals f'ui'ent mis à la mode eu France par
(ktherine de Médicis. Henri IV rafTolait de la danse et ce fut sous ce
roi, selon Cahnzac, (pu' le peuple français dansa le plus.
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— ;jso —
Dans le Joiinial d'Héroard, on voit que Louis XIII tout enfant fut
monté au cabinet dii roi, en 1603, où il dansa au sou des violons toutes
sortes de danses. Un peu plus tard, en 1605, nous le voyons danser,
devant le roi, la bourrée où il composait des grimaces. Il excellait dans
la sarabande, la gavotte, et |)lusieurs autres danses.
Sous Louis XIV, le clergé se montrait intolérant pour la danse :
Un curé so vanlait d'avoir aboli les danses des paysans les jours de fêles el de dimanches :
« Monsieur le curé, lui dil Fénelon, ne dansons pas, mais permellons à ces pauvres gens de
danser, afin qu'ils oublient un moment combien ils sont malheureux. »
^Mcm./i:
I) Al'IlliS U.NE LITHOGHAI'IIIK DE MAULliT, XIX" SIECLE.
Le mot bnllcl vient, dit-on, de bulle, parce que, dans l'origine, on
dansait en jouant à la balle pour donner au corps, par la réunion de ces
exercices, de la force, de la souplesse et de l'agilité.
Le ballet est un divertissement très ancien. On regarda toujours la
danse comme la plus heureuse expression du plaisir, et elle en est encore
aujourd'hui l'image.
Le Dictionnaire des Arts et Métiers, de Jaubeit, nous donne une origine
assez spécieuse des bals qui généralement suivent les dîners; parlant
i
— ;}oi —
(l(> la ilnnso dos festins, cet auteur dit qu'elle s'exécutait après les
repas au sou de divers iustcunients (pii semblaient (îxciter les convives
à de nouveaux }daisii's. On la regarde comme l'origine des bals en règle,
car elle était une espèce de bal où éclatait la joie, la uuignilicence et
l'adresse.
\'lll. — Los «laiisos ciirniitîiics, d'après les niieicnnes gTavures.
Stella a bien considéré la danse comme un amusement enfantin et
elle a représenté une ronde de jeunes enfants dansant au son de la
tlùte d'un de leurs petits camarades monté sur un cube de pierre.
Quelque lieu qu'on puisse choisir,
Peut-on trouver dans un plaisir
Plus de douceur et d'innocence,
El ne semble-l-il pas encore
Qu'on va retrouver en celte danse
Une image du siècle d'or.
Dans une suite de gravures représen-
tant les appartements de Louis XIV, on
voit que la quatrième cliaml)re était la salle
de bal, oi'i le duc de (lliartres et sa sœur
dansaient gravement devant la ducbesse
d'Orléans assise dans un grand fauteuil; à côté d'elle est le duc de Bour-
gogne accompagné de la ducbesse de (Ibartres, de la duchesse du Maine
et de la jeune comtesse de Conti.
LA RONOE DES PETITES FILLES
h'aPIIKS une LITHOGllAPHII! DE VICTOIl ABAM
XIX" SIÈCLE.
HUITIEME PARTIE
GYMNASTIQUE
I. — Son orîg-ine g-reeque.
Ou peut dire que le mot aussi bien que la chose sont d'origine
grecque, et, au début, cette expression était un résumé complet de l'édu-
cation et de l'instruction que l'on devait donner aux enfants à Sparte.
Les exercices avaient quelque chose de rude et de martial et étaient
destinés à tremper aussi fortement le cœur des jeunes Grecs qu'à aug-
menter la vigueur et la souplesse de leurs membres.
A Athènes, la gymnasticpie prit un caractère plus doux, les auteui'S
— 332 —
qui ont traité cette questioD l'ont étudiée à un triple point de vue : le
premier consistant dans l'exercice des courses à pied, à cheval ou en
char ainsi que dans la lutte et dans le jet du disque : c'est ce qu'ils
appellent la gymnastique militaire. Le second, connu sous le nom de gym-
nastique diététique, avait pour hut de former la force physique et de con-
Li:S DIVERS A(.;i!ES UE GYMNASTIQUE
d'aitiics le TiiAiTK iNTiTUi.i-; la Gymnastique de la jeunesse, an xi, 1SU3.
server la santé. Le troisième était la gymnastique athlétique, qui se rap-
porhiit |)lus particulièrement aux jeux puhlics.
Les Romains n'ont pas considéré la gymnastique comme une science
et ils l'ont remplacée par des exercices destinés à augmenter la vigueur
des jeunes gens qui s'y livraient; de ce nombre était le lancement du
dis<jue et du javelot, la natation sous la cuirasse, la course et le pugilat.
II. — I.os exercices de g-j'inna.stiquc
faisant partie <le ré<lucatioii des jeunes g-ens, d'après Rabelais.
Au Moyen Age, ou semble s'être peu préoccupé de la gymnastique
pro})rement dite; elle était remplacée par les jeux et les exercices en
honneur chez les chevaliers.
Au seizième siècle, nous voyons que la gymnastique était encore
considérée sous un point de vue identique; ainsi Rabelais, quand il
décrit l'éducation de Gargantua, nous dit :
... Quand il étoil babillé, peigné, bravement il Iravailloil en faisant quelque bonne lecture
pendant deux ou trois lienres, puis Tescuyer gymnaste lui montroit l'art de la chevalerie, mon-
toil sur un coursier, sur un lienet, sur un cbeval barde, cheval léger, et lui donnoil cent pas en
— XV.i —
.■irrii'i'c, le r.-iisdil V(illij;ci' en l'nir, rriuicliir le fossé, saultùl Ift [iiilis, puis liilldit, (■(nii'nil,
siiuldil, puis nagcoit en profuiule eau, puis issant de l'eau rontlemcnl, nioiiloil ciicontre la
niontasiii\ puis pour galaiiler les nerfs, on lui avoil fait deux grosses saumonés de plnmli,
lesquelles il nommoll allitres ; icelles preuoil de lerre de cliascune main et les ('levoil en l'air
au-dessus de sa lèle, les lenoit ainsi sans remuer.
Peiidniit les dix-seplièiiic et dix-huitièine siècles, la f^ymiiasti(|iie
louiha dans un discrédit cdiiiplct et on ne commença à s'en pivoccMpcr
à nouveau qu'au moment où Bufï'ou et Rousseau firent entendre leur
élo(|ueute parole, tentant d'améliorer le sort des enl'ants.
III — liistiliits (le s,',y>»iin8ti(|iio é<i'nii!i-ers.
Toutefois, le faraud mouvement qui devait mettre eu honneur les
exercices de gymnasti(|ue n'est pas parti de chez uous, il nous vient de
• /tJaMu^m/>tu dû^^e/u./u .'.ft^ÀiU^'r
DIVEUS AGRES DE GYMNASTIQUE
EXÉCUTÉS d'aPBKS LA MÉTHODE AMOIIOSIENNE.
la Suède (!t de rAllenuifi;ue : ce fut à Munich qu'un philanthrope, nommé
Saltzman, conçut l'idée de fonder une école spéciale pour renseignement
méthodique du mouvement corporel en vue de l'accroissement des forces
physiques. Un peu plus tard, en 1814, le poète Ping fonda à Stockholm
un Institut national de gymnastique qui existe encore.
4r.
3o4 —
IV. — !>k'(lioclc ainoi'osicniie.
En 1815, le colonel Amoros, après avoir créé, à Madrid, un établis-
sement analogue sous le nom A'Institut Pesta/ozzien, essaya d'en établir
un à Paris.
La méthode araorosienne débute par des exercices élémentaires, qui
se fout sans appareils et consistent eu mouvements réglés des extrémités
inférieures et supérieures, (les mouvements doivent être accompagnés de
chants qui, en marquant le rythme, développent la voix et le jeu des
v^-fec^c^ C^-if,-^^-v<n^z<*^i^t:
muscles pectoraux. Ensuite elle compi'end la marche, puis la course sur
terrain facile d'abord et ensuite coupé d'obstacles, le saut des fossés et
des barrières, l'équilibre sur les pouti'es fixes et en mouvement, l'exercice
des haltères et du trapèze, la lutte à bras-le-corps, l'escalade du mur,
l'ascension à l'aide de la perche, de la corde lisse, de la corde à nouids
et de l'échelle, le travail des trapèzes, la voltige sur le cheval de bois,
l'exercice de la barre fixe; la natation, l'équitation, la danse, la paume,
le ballon complètent cette méthode.
3.1 5
V. — fi> ■iiniisliqiu-' scolaire vl :;',viiinastiqii<> inodicah-.
A partir (11* la scofnulc moitiô du dix-neuviôinc siôclc, la f;ymnasti(|uc
fut mise au nombre (l«.'s matières <|iii devaient être enseifiiHu-s dans les
collèges; plusieurs fois cette question a été |)ortée à la tribune et satis-
faction a été donnée à ses partisans.
On s'est beaucouf) préoccupé dans ces dernières années de la gvmnas-
ticpie médicale, qui enseigne la méthode de conserver et de rétablir la
santé par le moyen de l'exercice ; on obtient ainsi un double résultat :
d'abord celui d'augmenter la force et l'adresse chez les jeunes gens, et
ensuite de leur dtmner une grâce n'ayant rien detféminé et résidant
uni([iUMnent dans l'aisance et la souplesse des mouvements.
NEUVIEME PAllTIE
L'ESCRIME
li' (< iiriiiiiliira » clie/. les Itoiuains.
Le jeu des armes , que
nous désignons plus commu-
nément sous le nom d'cscrhuc,
était fort cultivé par les an-
ciens, et les professeurs des
gladiateurs devinrent les
maîtres d'armes des légion-
naires. Cet art était alors dé-
signé sous le nom à'urniutiira ; il
consistait principalement dans
l'attitude à donner au corjis
et dans l'habileté à fiapper à
l'arme blanche le point visé.
LKScniMi: Al" xvh' sn;c;Li:
IIAIMIKS CUMEMIS : OUlilS .s/i A'.St .1 /./>' l'ICliltA.
H. — I.Visei'iino au Movoii Age en l'ranee.
11 appartenait aux Fi'auçais d'élever cet exercice à la hauteur d'un
art, et, en examinant les nMes de la taille levée en 1292 siu- les habi-
— 356 —
taiils de Paris, nous vciyons qu'il y avait à ccUl' époque se})t cscrcniis-
seeurs qui habitaient dans le quartier du Marais et qui payaient une
redevance annuelle variant entre trente sous et douze deniers, il faut
cependant arriver jusqu'au seizième siècle pour trouver une ordonnance
royale réglementant l'exercice de cet art. En l.^j(i7, Charles IX, par ses
lettres-patentes en date du mois de décembre, autorisâtes ma/s/rrs Jm/ci/rs
l'Escrime
1) APIIKS UNE COMl'OSITIO.N' I>E CLAUlil.Nli BOUZONNET STELLA, XVIP SIECLE.
Cl escrimeurs d'espées de la ville de Paris à se réunir en communauté, et
il confirma leurs statuts.
On a, au Moyeu Age, quelquefois désigné sous le nom d'escrime des
exercices consistant à eufder les tètes mauresques du manège dans nue
course au galop, mais cet exercice dépend beaucoup plus de ré(piitation
que du jeu de l'épée.
La science de l'escrime fut particulièrement en faveur au temps de
Louis XIII, et, après avoir été un peu délaissée, elle est maintenant
revenue plus en honneur (]ue jamais.
m. — L'cseriiiio mi «lix-septîèiiic .sièflt', d'après Stella.
Stella a considéré l'escrime comme un des jeux de l'enfinici^ et elle
nous a représenté un jeune garçon qui, armé d'un fleuret niiuii d'une
— 3o8
forte 1)oiiIl' à son oxiréiuité, semble foil préoccupé à p;irci' un coup droit
do son adversaire. Voici en ipiels tcTuies l'auteur décrit ce jeu :
Bien que l'on semble plus adret,
A s'escrimer de son fleuret,
Il ne sçauroil quoy qu'il exerce,
N'ayant pourpoint ny lioquelon ,
Luy doner de quarte ou de tierce
Droit dans le neuviesme bouton.
]\. — liie salle d'armes pour les enCanls en 1829.
Dans un journal, /e Bon Grnie, publié de 1823 à 1836, et destiné
spécialement aux enfants, nous trouvons la reproduction dune salle
L'KSCKl.ME
h'ai'Uks hi Cii-aiidc Eiicyriopéilie iiK ihiieuot i;t h'aiiîmiu p.t, xviiif sikci.e.
d'armes dessinée par Marlet, un tles artistes les plus en vogue de l'époque.
Dans cette salle, on voit un jeune garçon d'une douzaine d'années pre-
nant sa leçon av(^c un professtnu' doué d'une maguififjue paire de favoris ;
ce jeune boinme se fend et atteint le plastron que le maître porte attaché
L'ESClil.ME
h'ai'Iuos la (Uundi: lùici/cloiiédie he iudeiicit et d'alejiheut, wiii" siècle.
à son cou. Dans le fond de la salle, tieux jeimes gens attendent patiem-
ment d'avoir l'honneur de pouvoir tirer av(>c le maîliM^ ; notons, en
passant, les yeux flamlxnants du jeune élève qui prend sa leçon et qui
— :t:i!) —
cnniprcml la t^ravitr de r('iisc'ij:,iicin(Mil qui lui csl ddiim''. L'iMlitciii' du
journal s'cxousc, on (|n(d(|UL' sorte, i\o reproduire cetle gravure, en
disant :
En vous envoyant, mes amis, ce dessin, je n'ai pas du tout l'inlcnlion de vous engager
à devenir de petits tapageurs, et je n'ai point la crainte à ce sujet, attendu que cola ne
peut Mre à redouter que de la part de jeunes gens mal élevés, sans principe et sans jugement.
LKSCIUME
d'aphks la ('•ijmnasliqiie df la jeunets", an xr, 1803.
Je veux seulement vous olîrir l'exemple d'un exerci(;e salutaire propre à développer les forces,
à raffermir la poitrine, à donner de la souplesse, de la grâce au corps et de la noblesse au
maintien.
V. — PîOco de vers sur remploi tie l'épée.
On s'est plu, an dix-huitième siècle, à faire nue petite pièce de vers
pour montrer les diverses formes sons lesquelles on peut considérer le
fleuret de l'escrimeur et l'épée du combattant (1) :
Je regarde la terre, et je vis en prison ;
Si j'en sors une fois, craignez avec raison.
Je suis dure et cruelle et non pas inflexible.
Quand je suis en courroux, je fais siffler les airs ;
J'attaque, je repousse etj'envoye aux Enfers.
Je me repais d'Iionneur, et maintiens la licence ;
J'opprime également le crime el l'innocence ;
Et lorsqu'avec mon art je gagne quelque cœur,
Perfide que je suis, je cause son malheur.
(1 Cl-Ul- pclitc Liii}.'mo est tirée d'un recueil qui, au clix-liuiliénie siècle, était fort à la mode. Il est
intitulé : .l/;ifl,-isi;i éHi;/»i,i(i(/iie. contenant un yrand nombre d'énijinies in{;énieuses choisies entre toutes
celles qui ont paru depuis prés d'un siècle, à Paris, chez la veuve Duchesne rue Saint-Jacques, nu
Temple du l'uniL Wi'i. avec appruhatinn et privilèiie du roi.
— :{60 —
DIXIEME PAUTIE
PATINAGE ET GLISSADE
I. — Avaiilsiffcs du paliiiaii'c.
Le jeu de patinage est un des plus jolis exercices auxquels puissent
se livrer les jeunes gens et les adolescents. Ce genre de sport présente
un grand avantage au point de vue de la santé ; il oblige au plus fort de
l'hiver à sortir des demeures souvent hermétiquement closes, pour prendre
un exercice aussi salutaire que vivifiant. La pureté de l'air, l'intensité du
froid, la circulation plus accélérée des humeurs et du sang, la tension
des muscles, ces mouvements circulaires ou en zigzag que font les pati-
LES THAINEAUX ACCOUPLES
I) APIIÊS UNE SUITE DE JEUX l'UnLIÉE AU COMMENCEMENT llU XIX' SIÈCLE.
ueurs, la joie franche qui les anime, tout cela doit nécessairement avoir
une influence très grande, non seulement sur le physi<pie, mais encore
sur le moral de l'homme.
LA Glissoire
fi: ':': V'J:'-- «... -:'\ ■■*?^. J^
X.E Traisneau
LES l'LAISIllS IJE LIIIVEI!
d'aI'HKS I.KS r.llMI'IlSlTIONS hK Cr.H niNF. miTZONNKT STKM.A, Wll' SlKr.r.E.
— ■M)'2 —
On regarde cet exercice comme dangei'eux, parc<^ (|iie l'on peut tomber
et se blesser; ceci est absolument faux, car on ne dépend (jue de sa
propre adresse, ce qui fait qu'on court moins de ris({ues. On tond>e
souvent, à la vérité, en a|»prenant à patiner, mais il faut a[tprendre à
tomber sans se faire de mal.
11. — Coiiiiiieul on apprend à pnCiiioi*.
On apprend à patiner en se tenant derrière un petit traîneau, d<' ]teiu-
de se démettre le pied ;
bientôt, on fait tenir le
corps en équilibre sur deux
morceaux de fer, dont cba-
cun n'est large que de quel-
ques millimètres, et c'est
ainsi qu'on parvient à for-
mer ces mouvements multi-
pliés qui ajoutent à la grâce
naturelle du corps et qu'on
voit toujours avec nu nou-
veau plaisir.
Dans certains pays, le pa-
tinage est considéré comme
\m exercice absolument na-
tional; dans les régions Scan-
dinaves, on donne plusieurs
fois par an de grandes fêtes
à propos de courses sur la
glace, qui sont l'occasion de
véritables réjouissances pu-
blicpies et où les jeunes gens
LES PATINS A LA poulai.m: tiennent à lionneur de faire
DAi'nÉs UNE GiiAvnu: DK MoiiKs iiE r.A iiiîSTAi uATiiiN. paratlc dc Icur adrcssc*.
m. — Do la fabrication des pnlin.s.
La l'orme et la matière dont les ]iatins ont été faits ont varié à l'in-
iini. La ])remière idée (jui a dû venir aux habitants des pays froids a
été de garnir la cliaussure d'un morceau de bois destiné à faciliter le
glissement sur la glace. Un peu plus tard, on a remplacé cette arête de
bois par un os assujetti par des courroies; au British Muséum de Londres
LES TRAINEAUX
irAIMIKS INIÎ SlilTE nr. JEUX PUBLIÉE AU COMSIENCEMENT DU \l\' SIÈCLE.
nc'i —
on j)eut encore voir une paire de ces patins, qui doit remonter à un mil-
lier d'années. Cojnme la civilisation est devenue plus raffinée, on a eu
l'idée d'employer le métal pour remplacer la primitive mouture eu os, ce
qui donnait à cette chaussure d'hiver une rigidité et une solidité beaucoup
jilus apprécial)les.
IV. — I,os skies iiorvôg-îciis.
Dans les pays qui sont couverts de neif^e |)eudant les trois quai'ts
de l'année, on euqdoya des patins d'une dimension considéi-able, (pii
étaient fciriués d'une
monture en bois lé-
ger reliée par des
bandes de parche-
min ; à l'aide de
cet appareil, nom-
mé s/de^ les chas-
seurs norvégiens
descendent avec
une rapidité verti-
gineuse les pentes
des montagnes cou-
vertes de neige ; un
bâton ferré, qu'ils
tiennent à la main, leur permet de régler h>ur course. La manière de
courir sur des patins n'est certes pas une science bien difficile à acquérir,
mais elle demande cependant quelques leçons, et, par suite, n'est pas à
la portée de tous les jeunes enfants; c'est pourquoi le jeu de la glissade
a toujours été préféré par la jeunesse en France.
\'. — I.a glissoire an seizième siècle.
Au seiziènu' siècle, cet exercice est compris dans le recueil des
Trente-six figures coniciuuit lom les jeiix^ etc.. et se trouve réuni sur- la
même |)lanche que les jeux de la Fossette et des Esteufs.
Ayant Irouvé quelque pLice assez nette,
A l)eâux esteufs jouent à la fossette.
Plus ils s'ea vont sur la glace griller
On bien souvent le marmouset ils baisent,
El cependant tous les autres se plaisent
Au jeu (le croce, au lieu de sommeiller.
Les enfants voient avec plaisir arriver l'hiver poiu- pouvoir se livrer
à cet amusement, <pii présente au moins l'avantage d'être à la pm-téc de
toutes les bourses.
h'ai'uks \.'HiUoi,
DE l'YRHHICA SALTATIOVE
' des peuples septentrionaux nr. OLAIUS MAGNiiS
LES AMUSEMENTS DU FEU ET DE L'EAU
M'IIKS LES COMPOSITIONS IlE CLAUDI.NE HOUZONNET STELLA, XVI|S SIKCLR.
— 300
ONZIEME PARTIE
LES PETITS FEUX
I — Loin* origine siiiti(|ii(><
Ou a considéré coniino faisant partie des jeux d'enfants lo saut à
travers les flammes d'un minuscule Jjùchor. dette coutume de faire des
feux de joie, de danser autour et de les fraucliir p;ir manière de jdai-
LES PETITS FELX
d'apiiks in »ii)r>Èr,K Tinii dix recueil nn Dessus de tahuli'eves, xviii' siÉcr.E.
sauterie, remonte à nu temps très haut de l'antiquité. A Uome, le
onzième jour des calendes de mai, ou célébrait les fêtes de Paies, la
divinité ([ni présidait aux travaux des champs :
Cï'lail, dil Properce, le jour dos Palilics, le jour où Rome vit commencer ses murailles.
Les pasteurs céléljraient cet anniversaire par des festins et des jeux ; Us clierclinient leurs
délices dans des mets rustiques, et la bande, aux pieds poudreux, franchissait gaiement les
monceaux de fuln qui llan)l)uient rà et là.
;{()-
Sigiiilifailioii «I»" oolU" (•oiiIiiiim'
Ovide a fait innitioit do cofte i'outiime<et il dit, : (( J'ai saule à tra-
vers trois rangées de tlammes et j'ai répandu de l'eau lustrale de ma
hrauelie de laurier. » Le luèni* poète nous donne l'explieation de eettt;
singulière eoutuiue : « Au moment de la fondation de Koine, dit-il, il
fallut transporter les dieux Lares sous de nouveaux toits. Ouittaut leurs
Li;S PETITS l'EU.X
D'aIMIKS UNK GllAVlII'.E 1)U XVIll''
demeures agrestes pour de nouvelles habitations, ils mirent le l'eu à
celles qu'ils abandonnaient, et à travers les flammes sautèrent troupeaux
et pasteurs. » Cette explication est peu acceptable, et il est préférable
de voir dans la coutume d'allumer des feux une idée de purification,
car de tout temps le feu a été considéré connne le purificateur par excel-
lence.
A l'appui de cette hypothèse, nous donnons le témoignage de Denys
d'Halicarnasse, (jui raconte que, le jour de la fondation de Rome, Romulus
ordonna ([ue des feux fussent allumés devant toutes les tentes, et tout
le peu[»le dut sauter à plusieurs reprises à travers les flammes pour se
purifier des souillures [lassées.
368 —
m. - I.es feux do joie à répoQ"*" clirétieime.
La c'uutiiiue des feux do joie est entrée daus les habitudes du clu'is-
tianisme et, pour en faire oublier l'origine païenne, on a dédié à saint
Jean tons les feux que les paysans ont coutume d'allumer sur les mon-
tagnes le 24 juin.
Au seizième siècle, Olaius Magnus, dans son Histoire des peuples sep-
k'ntri<nun(j\ a ('*crit un chapitre qu'il a intitulé De Pi/rrliica Sultiitkmc et
dans le(|uel il explique longuement qu'à certaines époipies de l'année, et
particulièrement en hiver, on fait de grands feux composés surtout de
bois résineux; en brûlant, ce bois produit une crépitation; cette sorte
de musique stimule les danseurs qui entreprennent une ronde autour
de'ce bûcher improvisé.
Au dix-septième siècle. Claudine Stella a représenté les petits feux
dans son précieux recueil, et elle nous montre un groupe de bambins qui
s'apprêtent à traverser d'un bond rapide un feu formé de quelques brin-
dilles de bois incandescent et dont l'embrasement u'a rien de bien terrible.
Dans la légende en vers qui accompagne la planche, l'auteur a soin de
nous expliquer (ju'il s'agit bien des feux allumés au mois de juin :
Ce k'ur csl une volii[)li'' Miiis si le plaisii' île ce jeu
De siiuter au cœur de l'eslé, Ne dure pas plus que leur Feu,
Par-dessus ces feux de.bourée. Il sera de courle durée.
DOUZIEME PARTIE
LE JEU DE LA PENDAISON
C'est à peine si l'on peut donner le nom de jeu cà cet exercice bar-
bare, <[iii n'a du reste été prati(|ué ([u'à une épocpie où les mœurs avaient
encore nue rudesse toute primitive. Le seul auteur ([ui nous ait rapporté
cette tradition est Athénée : il nous apprend que les anciens Thraces,
à la fin d<' leurs festins, quand ils s'étaient gorgés de nourriture et de
boisson, tiraient au sort pour savoir lequel des convives devrait faire la
périlleuse expérience du jeu de la pendaison. Celui que sa mauvaise
étoile avait marqué pour cet exercice peu enviable, montait sur une
pierre et se passait autour du cou un nœud coulant fait à une; corde ([ui
avait été préalablement attachée au plafond de la salle du festin. D'une
main il tenait \me serpe au moyen de laquelle il devait trancher la corde
370
d'im coup rapide au moment où l'un des assistants lui faisait perdre pied
en retirant la pierre sur laquelle il était monté. Si le patient se trouvait
surpris par la secousse et n'avait pas le temps de couper la corde au-
dessus de sa tète, les convives éclataient <le rire en se faisant un jeu de
sa mort et en criant : " Il a perdu l II a perdu l »
LK JEU DE LA l'ENDAISON
11 y avait, dans ce jeu, une idée assez élevée qu'il est intéressant de
dégager. Ceux qui se faisaient ainsi un plaisir de passeï* de vie à trépas
étaient poussés par une sorte de fanatisme religieux analogue à celui des
adorateurs de Vichnou, qui les incite à se jeter sous les roues du char
symbolique, pour faire à la divinité le sacrifice de leur existence.
CONCLUSION
.— ■ ■-c-'jgrrr.^
N France les sports out pris, depuis quelques années,
un développement considérable, et nous avons cru,
en adoptant cette expression typi([ue, prendre exemple
sur nos voisins d'outre-Manche : c'est même proba-
blement à l'amour de l'imitation, qui sévit chez nous
toujours avec la même intensité, que l'on doit le
succès prodigieux que tous les exercices de force et
d'adresse ont obtenu depuis une période relativement
récente. Il ne faut pas croire cependant que, avant de copier nos voisins,
notre beau pays de France ait ignoré tout le ])arti qu'on pouvait tirer
des exercices sagement mesurés qui sont un repos pour l'esprit et
représentent pour le corps le délassement dans le sens le plus étendu
de ce mot.
En parcourant les différents jeux que nous avons étudiés dans ce
volume, on peut se faire une idée du développement que nos ancêtres
avaient su donner à chacun de ces modes de divertissement, et nous
ajouterons qu'ils ont mieux compris ce qu'on était en droit de demander,
comme exercice physique, à l'adolescence.
De nos jours on cherche surtout à arriver à la perfection dans un exer-
cice déterminé; pour employer la langue que nous lisons couramment
dans les feuilles spéciales, nous dirons que la jeunesse n'a plus niainte-
naJit d'autres préoccupations que de battre le record soit du saut en
longueur, soit de la course à pied ou à bicyclette. Il est juste d'ajouter
([ue nos athlètes modernes ol»tiennent, au moyen de l'entraînement pro-
gressif, des résultats vraiment suq)renants. Sait-on seulement à quel prix
ont été obtenus ces efl'orts surhumains?
Combien est-il arrivé souvent dans les institutions que tel élève qui a
gagné la coupe d'honneur dans le saut en longueur ne soit rentré chez lui
en vacances avec des troubles de santé qui ont été provoqués parce qu'on
a voulu violenter la nature en lui demandant plus qu'elle ne pouvait
donner. Il y a peu d'années, un homme éminent par son talent d'orateur
avait donné à l'institution à la tète de laquelle il était placé une place
prépondérante aux exercices physiques. L'expérience, après avoir duré
un temps assez long, n'a pas donné tous les résultats que l'on avait espérés
et l'on est revenu maintenant à des idées plus saines et plus modérées.
Jadis les jeux étaient classifiés d'une manière plus savante, l'on réser-
vait à chaque âge les exercices auxquels il était possible de se livrer
sans danger pour la santé des enfants et de plus on savait jouer avec
rien ; maintenant il faut une multitude d'accessoires pour se livrer au
moindre exercice. Nous ne pouvons citer de document plus concluant que
cette gravure que nous donnons comme frontispice et qui représente les
jeux d'enfants usités au seizième siècle, d'après le tableau de Pierre
Breughel conservé dans la galerie impériale de Vienne. Voyez comme ces
enfants savent se distraire avec les éléments les plus simples; la course,
le saut sous toutes ses formes, le jeu du porteur, etc., s'accomplissent
sans aucuns accessoires. Pour rendre leur jeu ])lus intéressant, quelques
enfants plus ingénieux se servent des objets de la vie usuelle pour donner
plus d'attrait à leur délassement : un tonneau auquel on a emprunté un
de ses liens fournit l'occasion de jouer au cerceau, et pendant ce temps
sur la futaille vide deux gamins apprennent le métier d'équilibriste ; un
peu plus loin ime barrière permet à quati'e jouvenceaux de réaliser la
légende des quatre lils Aymon.
Certes beaucoup de ces amusements ne sont pas encore perdus, mais
actuellement le jeu est devenu beaucoup plus savant. Il s'est fondé toute
une branche d'industrie dont l'unique préoccui)ation est de fabriquer des
ustensiles évitant la fatigue aux joueurs , ou permettant d'obtenir des
combinaisons savantes en rapport avec les recherches qui président main-
tenant à toute notre vie.
Beaucoup de jeux ont été détournés de leur but primitif, ce sont
entre autres les jeux de bague qui, au Moyen Age, se pratiquaient dans
les tournois. Tous les jouteurs, munis d'une lance, devaient être aussi
bons cavaliers qu'habiles hommes d'armes, pour atteindre au bon endroit
l'anneau c[ui devait leur assurer les suffrages et l'estime des nobles spec-
tateurs. Regardons un peu ce que nous avons fait de cette élégante institu-
tion. Peu à peu le cheval a été remplacé par un mécanisme permettant
aux cavaliers de tourner eu cercle, et, à l'aide d'un bâton pointu, de
décrocher les anneaux placés à leur portée ; bientôt après on a trouvé inutile
d'exiger du joueur un semblant d'adresse et on s'est contenté de le faire
tourner en rond sur son insensible coursier. De nos jours tout est per-
fectionné, le cheval est remplacé par cet animal dont un adage populaire
dit ([ue « tout eu est bon depuis les pieds jusqu'à la tète ». Mais, à vrai
dire, nous avons opéré un triste changement et nous n'avons pas à nous
montrer fiers de la route parcourue de[iuis les chevaliers du Moyen Age
armés de pied en cape jusqu'au pâle voyou de barrière qui, pour ses dix
centimes, vient à la fête de Neuilly chevaucher sur les cochous articulés.
Le jeu doit faire partie de l'éducation de l'enfant et il convient que
ses maîtres ne le hiissent pas, surtout au début, seul arbitre de ses amuse-
meuts. Il est bon que les précepteurs joueut avec les enfants d'abord
pour les intéresser et leur apprendre les règles du jeu et ensuite pour
leur y faire prendre goût davantage. Bien souvent, en effet, les enfants
restent dans une cour de récréation à se promener d'un air las et ennuyé,
ue voulant se livrer à aucun exercice sous prétexte que cela les ennuie ;
si vous scrutez la psychologie de ces jeunes cœurs, vous verrez que ce
n'est pas le mol ennui qu'il faut dire, ayons le courage d'appeler les choses
par leur nom et avouons franchement que les enfants refusent souvent
de jouer par respect humain. Cette appréciation peut sembler absurde,
mais elle est pourtant juste : la grande préoccupation de l'enfant est tou-
jours de paraître plus que son âge ; les bambins de sept à huit ans cherchent
à imiter ce qu'ils voient faire à leurs aînés qui ont atteint une douzaine
d'années. Par suite du même raisonnement, ces dei'uiers veulent se com-
porter comme des jeunes gens, et naturellement, conmie ils ont aperçu
ceux qui se préparent aux examens se promener dans les cours en devi-
sant de choses graves, ils cherchent à les imiter et ils repoussent le jeu
comme bon tout au plus à anuiser ceux qui portent encore le pantalon
court. Rien cependant n'est plus essentiel que d'éviter ces causeries entre
enfants, qui sont toujours inutiles et souvent malsaines.
Ces jeunes cerveaux ont besoin d'être occupés d'une manière effective,
et c'est là que les règles du jeu interviennent d'une manière efficace. Le
joueur doit en effet s'astreindre à certaines exigences, et pendant que
les esprits sont tendus, soit pour obtenir aux quilles un coup remar-
quable, soit pour assurer le gain d'une partie de billes, on peut être cer-
tain qu'il n'entrera pas d'idées mauvaises dans ces jeunes cœurs et
que, après s'être délassés pendant une heure ou deux à ces exercices
salutaires, ils se remettront au travail, les membres peut-être un peu las,
mais le cœur tranquille et l'esprit libre de toute préoccupation. Considé-
rons donc le jeu comme l'aliment moralisateur par excellence de la jeu-
nesse, appliquons-nous h amuser les enfants sans leur demander d'efforts
trop violents et sans leur imposer des jeux compliqués qui devien-
draient alors un véritable cassement do tète : 11 faut que la récréation
soit complète, et, pour que le travail devienne profitable, il est bon que,
lorsque l'enfant s'amuse, il n'ait pas d'autre idée en tête, et il faut qu'il
se rappelle ce proverbe latin qui est la plus saine ligne de conduite
que l'on puisse indiquer : Age quod agis.
HENRY-RENÉ D'ALLEMAGNE.
TABLE METHODIQUE
Phéface.
CHAPITRE PREiMIER
l'REMIEUS JEUX DE L'EXFAXCE
Premièhe I'aktie. — Le cerceau.
1. DéliailioD 3
2. Le troclius ou cerceau cliez les Grecs et cliez les Romains 4
3. Le, cerceau servant d'accessoire pour les tours d'acrnlialie (j
4. Rayons placés dans l'intérieur des cerceaux 7
5. Matières servant à la fabrication des cerceaux 8
6. Traduction du poème de Kalz, par Feutry 8
7. De la conduite ralionmdle du cerceau '■>
8. Gravures représentant le jeu du cerceiiii '.I
9. Poésie sur le jeu du cerceau Il
Ukuxième pahtie. — Le cerf-volant.
i . Délinition 12
2. Origine chinoise du cerf-volaul 12
3. Expériences de Franklin au moyen du cerf-volant. Ses continuateurs li
4. Utilisation du cerf-volant pour mesurer la colonne de Ponipé'' 16
5. L'expérience du jardin Marliœuf 17
6. Diverses formes données aux cerfs-volants 18
7. Cerfs-volants enduits de plros|iliore 18
8. Emploi du cerf-volant comme moteur. 10
0. Règles à observer pour la construction des cerfs-volants 19
10. Gravures représentant le jeu du ccrf-volanl 21
TiioisiÈME PARTIE. — Le jeu du chat et du rat, le jeu de la corde
et le jeu de l'anguille.
1 . Le jeu du pivot clicz les Romains
2. Le jeu du cliat et du rat au dix-neuvième siècle
3. Le jeu de la corde
4. Le. jeu de l'anguille
47.
— 37-' —
QuATiiiÈME l'AUTiE. — Le Criquet et le bâtonnet.
1 . Origine anglaise du jeu de ciiquel
2. Le bilonnet considéré coniine im di's [lius niicicns jeux sirasbourgcoi:
CiNouiiiMR l'AiniE. — Les échasses.
1. Leur définilion d'après Pompcius Festiis 30
2. Les cciiasscs cliez les rioinaius 30
3. Fable de Riclior sur les écliasscs 31
4. Les ccIkisscs au seizième siècle ; leur ulilisaliou dans les fêles |iubli(|ues 32
0. Coiubal d'ccliasses à Namur 32
6. Les écbasses landaises 33
7. Représenlalion artislii)ue du ji'U di's écbasses 34
Sixième paiitie. — Le sabot.
1. Délinilion 3S
2. Le jeu du sabot cbez les Grecs et clicz les Homains 33
3. Ln sabiit au Ireizième siècle. Origine probable de ce nom 36
4. Anecdote sur le jeu du sabot 38
5. De la manière de pratiquer ce jeu 38
0. Gravures représeiilant le jeu du sabol 39
Septième paiitie. — La toupie.
i. Origine moderne de ce jeu 41
2. Définilion du jeu de la toupie 42
3. Théorie de ce jeu 42
4. Haber-gess ou loupie d'.\llemagne 44
0. Gravures représentant le jeu de la loupie 47
6. Poésie sur le jeu de la toupie 48
Huitième paptie. — Le toton.
1 . Délinilion de ce jeu 40
2. Emploi du toton en place des dés à jouer 49
CHAPITRE II
JEi'x .V c.oiniu
PnEMiÈiiE PAIITIE. — La course.
1. Définilion 51
2. Le jeu de la course cbez les Grecs ' SI
3. Le jeu de la course dans les Pardons en Bretagne 52
4. Do la manière de bien courir, d'après M. Laurcni de Jus.'-ieu o2
— 373
Dkiixikmf i'mitik. — Le jeu de barres.
1. nolinilion î>4
2. l.'Osli-Mchynda cliiv. les (iroc^ ^i
3. Le ji'u ilo la coi|iiilli' du'/. Ii'.s Honiains !i^>
4. Lo j(Mi (II! barres au Moyen ,\go î>C
b. Le jeu do barres en rîelyi(]ue et en Italie ">7
6. Le jeu île barres de Napoléon I" _ -iS
7. Le jeu de barres assis 58
8. Poésie sur le jeu de i)arres 60
Troisième rARiiE. — Les quatre coins.
1 . Le jeu de la niarmile chez les Romains 60
2. Le champ esiroit au quinzième siècle. 64
3. Manière de pratiquer ce jeu 64
4. Le jeu des paquets 64
5. Le jeu des fagots 66
6. Le jeu do la mer agitée 6"
7. Gravure du jeu des quatre coins au dix-builiènie siècle 6S
QiATRUtME PARTIE. — Le jeu de cache-cache.
i . Le jeu de cache-cache chez les Romains 68
2. Le jeu de cligne-niusetle an Moyen Age 69
3. Le cache-cache Nicolas 70
4. Le furet du bois Mesdames et le jeu <le la pantoulle 73
CHAPITRE m
JEUX l)'.-VI)RESSE
Premu'RE partie. — Jeu de l'arc et de Tarbalëte.
1. Existence de l'arc dans l'antiquité 75
2. Usage de l'arbalète en France à une époque reculée 76
3. Diverses espèces d'arcs employés au Moyen Age 77
4. Exercice obligatoire de l'arbalète au quatorzième siècle 80
5. Les confréries do l'arbalète au seizième siècle 81
6. Le jeu du Pape-Gaye 83
7. Jeux publics de l'arc et de l'arbalète au dix-neuvième siècle 86
8. Un ancien jouet des enfants suisses 88
9. Gravures diverses représentant le jeu de l'arc 88
Decxième partie. — Le jeu de bague.
1 . Origine mauresque de ce jeu 91
2. La bagU(! à cheval dans les carrousels 91
3. Le jeu de bague perpendiculaire 92
— 374 —
4. Les jeux de l)ngiios aux scizièmo cl dix-septième siècles, il'afirès îles anciennes estampes. . . 03
5. Dcfinilion du jeu de hague au dix-lmilième siècle 00
6. Le jeu de bafjuc de Jean Papillon en 1766 !I7
7. Le jeu de bague du jardin de Monceau, près Paris '.18
8. La bague cbinoise au jardin Tivoli 100
9 Jeu de bague mû par des [iihiales 101
10. La promenailc dédalicnnc. 102
1 1. Caricatures polili(|ues sur le jeu de bague 102
12. La flolte aérienne •. lOo
13. Les manèges de chevaux de bois depuis le second Empire 100
14. Le jeu de bague à pied 107
1j. Le jeu du baquet 108
10. La bague sur l'eau ; 110
17. L'oiseau égyptien 112
18. Le jeu des oiseaux volligi'urs 113
TiioisiÈMr e.vnTiE. — Le bilboquet.
1 . Description du jeu et origine du nom 114
'2. Fabrication des bilboquets IIG
3. La foire franche des bilboquets 116
4. La passion du jeu du bilboquet au dix-liuilième siècle 118
5. De l'industrie des bilboquets au dix-neuvième siècle 118
6. Le bilbo(]uet joué avec un palet 121
7. Représentations diverses du jeu du bilboquet 121
OiATiinîMic r.MiTiF. — Le jeu du diable.
1. Composition de ce jeu 122
2. Origine chinoise du diable. Sa description d'après le l'ère Amiot 124
3. Emploi des diables en Chine pour remjilaeer le bruil de la crécelle 124
4. De la vogue du diable en France on 1812 120
!i. De la manière de jouer an diable 127
6. De la fabrication des diables 130
7. Estampes satiriques sur le jeu du diable 130
CiN'oiiuùMF. l'.MiTU:. — Le jeu de rémigrette.
1. Délinition 131
2. La satire du jeu de l'émigrette 132
3. Vogue considérable de ce jeu 132
4. lieprésenlalion du jeu de l'émigrette 134
Sixii'.ME p.MiTiK. — Le jeu de tonneau.
1. Délinition et origine probable du jeu i\r tonneau 13îi
2. Le jeu diî grecque au dix-luiiiiènn' siècle 13j
3. Tonneaux en forme di' trépied; manière de pratiquer ce jeu au dix-neuvième siècle 130
SKPTnhii: CAUTiR. — Le jeu du bouchon et le jeu du palet.
1 . Le jeu du pali't dans l'antiiiuilé 139
2. Origine du jeu du bouchon 142
3. J( u de bombiche ou p'u de galoche 142
4. Heprésentaliun du ji'Li du bouchon 144
— 373 —
CHAPITRE IV
,IEI'\ DE It.M.I.F.
l'iiKMiiîiiK PAiiTii:. — Le jeu de la balle.
1. Déliiiilinii ilii j(>ii ilo la IjjiIIc 1 4">
2. La balle chez los Grecs tt chez les lioinains 1 4G
3. Les jeux de IjhIIo au Moyen Age liiO
4. Manière de fabriquer les balles. Leur composition \''>i
5. DilTérenles manières de jouer à la balle lll:!
(j. La balle eniiMiisoiinée i;;U
Deixii'.me PAiiTiE. — Le jeu du ballon.
i . Déduilion. — Son emploi ciiez les Romains 1 54
2. Le jeu de la soûle au (|ualorzième siècle Ib4
3 Le jeu tlu ballon prali(|ué par les rois de France 1:19
4. Manchons cl brassards servant à lancer le ballon. i:J9
5. Manière de fabriquer les ballons IGl
6. Description du jeu du ballon 104
Troisiiîme partie. — liC jeu de paume.
1 . Origine de ce nom 105
2. Le jeu de paume ciiez les Grecs et chez les l^omains 1 6'j
3. Le jeu de paume à la cour des rois de France , 108
4. Diverses inlerdictions du jeu de paume 170
5. La paume au quinzième siècle. 170
6. La paume au seizième siècle 171
7. L'équipe du jeu fie piumie royal sous Louis XIV 173
8. La paume considérée comme jeu d'argent 174
9. Le jeu de paume devenu, au dix-septième siècle, un speclacle public 17.ï
10. Usages et coutumes dans les jeux de paume à la lin du dix-huitième siècle 170
11. Diverses espèces de jeu de paume 178
12. Les tripots ou jiuix de paume à Paris 179
13. Le Seruienl du jeu de paume 182
14. Le jeu de paume et le lawn-tennis 183
1'). La corporation des paulmiers-raquettiers 184
16. Description du métier de paulmier au dix-huitième siècle In4
17. Les balles du jeu de pauuie 18!;
18. Raquettes et balloirs 188
19. Arrêts et règlements concernant le jeu de paume IflO
20. Gravures représentant le jeu de paume 192
21. Poésies sur le jeu de paume . 191
QuATRii'.ME PARTIE. — Le jcu du mail, de la crosse et du croquet.
1. Dé(inilioi). — Le jeu du mail dans l'anliquilé, d'après le poêle lalin Quintus Eniiius 190
2. Les divers jeux du mail élablis dans Paris 190
3. Des quatre manières de jouer au mail 199
4. Origine l)yzanline du jeu de polo 201
— 37G —
;i. Lo jeu (li^ lu crohsp ail Irci/ioinc sii'cle 202
6. Le jeu de la truie el îles qiialre aveugles 204
7. Lo paiile-tnaillo, aiicêlre ilu jeu de croquet 200
8. Le jeu de la crosse, d'api es Stella 207
9. Le jeu royal de la passe 208
CiiNQuiÉMF, PAnTiE. — Le jeu du volant.
\. Le jeu de voliiiil de la reine Clirisliiie de Suède 211
2. Le volant de Frédéric de Prusse 211
3. DilIéreiUs noms du volant résultant de son mode de fahricalion 213
4. Définition du jeu du volant 21 i
!i. Le volant au cornet 210
6. Avanla^^es du jeu du volant pour la jeunesse 217
7. Gravures représentant le jeu du volant 21'.i
8. Poésie sur le jeu du volant 222
9. Le jeu des f^ràci's 224
CHAPITRE V
JEIX ItK ItOVI.ES
Piif.mikhe l'AiiTiK.* — Les billes.
1. Délinilion 227
2. Le jeu de la dispersion ou du cliastelct 228
3. La tropa ou jeu de la fossette 228
4. La rangelte 231
!). Les gohillcs au dix-huitième siècle 232
0. DilTérents jeux de billes 234
7. Importation des billes étrangères 233
8. Fabrication des billes à Strasbourg 230
9. Diverses représentations du jeu de billes 238
Dkuxikmic l'AiiriK. — Le jeu de boules.
1. Définition.. 239
2. Le jeu de boules tlie/ les anciens 23'J
3. Interdiction du jeu de boules par l'ordonnance de Charles V, en 1309 240
4. Anecdote sur Tiirenne pris comme arbitre dans une partie de boules 241
'■I. Les boulingrins an dix-liiiiiièine siècle en Angleterre 243
G. Le coeboiinet. 243
7. Le jeu de boules d'après les e-iiampes du dix-seiitième au dix-neuvième siècle 244
8. Le jeu ilu clos-poite 232
9. Poésies sur le jeu de boules 254
10. Tableaux célèbres représentant le jeu di' boules 255
TiioisiÈME p.\nTiii — Le jeu de billard.
1. Origine commune du jeu de mail et du jeu de billard 256
2. Le jeu de billard au seizième siècle 260
3. Louis Mil el le jeu de billard. 261
4. Délinilion du jeu de billard an ilix-septième siècle t 201
— ;{77 —
."i. Louis XIV fl Cliiiinillard 264
11. I,e liilliiiil (le Louis XI\', daiii'c's une eslaiiiiu; lie 'rruuvniii oijC
7. Formes el matières diverses du bàloii scrvaiil à pousser les billes 207
s. Le jeu de liillard, d'après Van Loclioin 270
1). Les billards publics au dix-seplièuie siècle 270
10. La salle de billard du cbàleau des Tuileries au mouieut de la lîévoluliou 271
11. Le billard allégori(|ue de M. île La Fontaine 272
12. Le jeu de la poule au billard 274
13. Le jeu de la Montoison eu 1821 274
14. lîiMards à musi([ue g-jg
l'i. Billards à bandes mobiles 07c,
10. Diverses nialières servant à former les tables de billard 277
17. Hcpréscntalions arlisli(|nes ilii jeu de billard 277
18 Les règln.s du jeu de billard mises en vers 27H
(JUAruiitMi': eAiirii':. — Les quilles.
1. Le jeu des piijuels clie/, les Romains 279
2. Le jeu des coulcaux 280
.'i. Les s(iuils à l'époque carolingienne . 280
4, Les quilles au quatorzième siècle 281
'■>. Les quilles à pirouette 284
li. Boileau réputé un liabile joueur de quilles 28')
7. De l'ulilité du jeu de quilles pour développer l'adresse des enfants 28.">
8. Le jeu des quilles suspendues 288
'.t. Diverses représentations du jeu de quilles 28'J
10. Poésie sur le jeu de (|uilles 2'J4
CiNoi'JiiMic i-AUTiii. — Le jeu du Siam.
1. Disposition de ce jeu 29")
2. Le jeu de la boule plate au seizième siècle 296
H. Supériorité du jeu du Siam sur le jeu de quilles. 298
4. Origine rlu nom donné à ce jeu 298
CHAPITRE VI
JEUX GYMXASTiyUEïl
l'ilEMIÉRE PAIITIK. — Le SaUt.
1. Les exercices du saut aux temps bomériipies 300
2. Les plus illustres sauteurs grecs 300
li. Diverses espèces de sauts 300
4. Les exercices du saut au seizième siècle 302
0. Le plus illustre sauteur à la foire de Saint-Germain au dix-lmilième siècle 304
6. Happort du colonel Amoros sur le saut 306
7. Diverses espèces de sauts pratiqués dans les jeux d'enfants 308
8. Le saut dans le cerceau 3O8
9. Le, saut à la corde 309
10. Poème de Katz sur le jeu du saut à la corde 3IO
11. Gravures diverses sur le jeu de la corde 312
— 378 —
Deuxième pahtik. — Le saut à cloche-pied.
1. Analoyio du saut à cloclie-piod et de la danse 313
2. Ascoliasniiis ou le jeu des outres enflées, en Grèce 313
3. Les jeux à cloclie-pied clicz les Romains, d'après Pollii.v 314
4. La mérclle à cloche-pied au seizième siècle 310
5. La marelle à cloche-pied d'après Stella 317
Tiiui^iÉMii PAiiTit:. — Coupe-téte et saute-mouton. *
1. Heprésentation anlique ilu jeu de saule-inuuluu 310
3. Le jeu du coupe-teste et de passavant au seizième siècle 320
3. Le jeu de la poste au dix-septième siècle , 320
QuATiiiÈMii PARTIE. — Le cheval fondu.
Elyniologie de ce mot 323
De la manière de pratiquer ce jeu 324
Faveur de ce jeu au seizième siècle 326
Le cheval fondu d'après les anciennes gravures 327
Ci.N'ouiÈME l'AïuiK. — La culbute, le pète-en-gueule et le monde renversé.
1. Le jeu du calampo dans l'antiquité 328
2. La roue animée ou le jeu du pèle-en-gueule 330
3. Représentation de ce jeu d'après Van Breugliel 332
4. Gravures des dix-septième et dix-huitième siècles ayant représenté ce jeu 332
0. Le monde renversé 333
Sixième partie. — La lutte.
1. Déliiiition 334
2. La lulte aux temps préhistoriques 336
3. La lullo dans l'antiquité 336
4. Le jeu de la résistance ou l'assaut du château 338
5. Le pugilat cl la boxe 339
6. Les jeux de la lulte, d'après Stella 340
Septième pahtik. — La danse.
1. La danse considérée comme ji'U d'enfaiil 340
2. Le jeu de la grue et du laliyrinlhe 341
3. Danses sacrées et danses guerrières chez les Romains 342
4. Interdiction des danses chez les chrétiens 344
y. Les danses au Moyen Age, considérées comme spectacles 346
6. Persistance des danses ecclésiastiques en France et en Italie 348
7. Bals et ballets au commencement du dix-septième siècle 348
8. Les danses enfantines, d'après les anciennes gravures 3.ïl
379 -
Hlith-.me PAiiTiE. — Gymnastique.
1. SoD origine grecque 331
2. Les exercices de gyiiinasliquc faisant parlic de i'éJiicalion des jeunes gens, d'après Habclais. 3o2
3. Insliluls de gymnastique étrangers 353
4. Métliode amorosienne 3o4
b. Gymnasti(jue scolaire et gymnasti(iue médicale 3o">
Neuvièsie partie. — L'escrime.
1. L'armalura cliez les Romains 353
2. L'escrime au Moyen Age en France 355
3. L'escrime au di.Kseplième siècle, d'après Stella ; 30
4. Une salle d'armes [lour les enfanis en 1829 'iï>8
5. Pièce de vers sur rcm[iloi do l'épée 359
Dixième paiitie. — Patinage et glissade.
1. Avantages du patinage 360
2. Comment on apprend à paliner 362
3. De la fabrication des patins 362
4. Les skies norvégiens 364
3. La glissoire au seizième siècle 3C4
Onzié.me l'APTiE. — Les petits feux.
1. Leur origine antique 366
2. Signification de celle coutume 367
3. Les feux de joie à l'époque ciirétienno 368
Douzième paiitie. — Le jeu de la pendaison 368
Table des planclics hors texte 380
TABLE DES PLANCHES HORS TEXTE
Les divers jeux d'onfaiils usité-i au seizièmo siècle (Fronlispico) 0
Les jeiuv des cercles au Luxembourg 4
Le jeu du cerf-volant au di.x-liuitiènitf siècle 12
Le cerl'-volaut 20
Les danseurs dédiasses aux Cliain|is-Elysées 32
Le jeu du sabot 37
Le jeu de lu toupie en Russie 42
Le jeu (lu toton ou de la pirouette 50
Le prix de la course '63
Aux barres, coupe-lêle et autres jeux rj9
Le jeu des (juatre-coins 63
Le jeu des quatre-coins 6">
Le jeu de eache-caclic mitoulas 71
Le caclie caclie 72
Le lir au pape-gayc eu Bel^^ique 76
Les occupations du dimanche 79
A tirer au pape-gaye et autres jeux 8r>
Le roi du jeu du pape-gaye 87
Le jeu du lir à l'arc 80
Course à la bague 95
Jeu de bague (époque Louis-Pliilippo) 96
Jeu de bague édilié dans le jardin de Monceau, près Paris 99
Les amusements <le la bague chinoise au jardin de Tivoli i'M
Vue perspective d'un jeu de bague dCl
Le jeu de bague ou jeu du baquet 100
Tirer la jatte et autres jeux 109
Le jeu à tirer la jatte 1 1 1
L» jeu du bilboquet 11.')
— 381 -
Lit fuiru fraiiclio des bilboquets 117
Au bilboquet et autres jeu.\ ..■.■.;..■.,, 110
Le diable ol le bilboquet ;..■...; ; fia
La iiiaiiicrc de jouer au diable \2^
La vengeance des diables '. 12.)
Le jeu du diable 126
Le jeu du diable et ses accessoires 120
La manière de jouer au diable i:i(»
Mirabeau, cbcf d'uuc légion de l'armée noire et jaune en grand unilorme i:i:!
Le jeu du tonneau. ..'..:.>..■ i:n
Le jeu du tonneau, d'après Ueeam|is •. .'■.' l'M
Les diiïérentes matières de jouer au [lalel .- ■. . . . 141
Les papas jouant au petit palel. 143
A la balle et autres jeux 147
A la fossette aux esteufs et auirrs jeux i . . . . i'6'2
L'Iionime aux ballons 15o
Les jeux do mandorc, pipuet et aiilres jeux 1S7
Le jeu du ballon 16S
La longue paume des Ciiamps-Éljsées 17i
Un brosseticr marcliand de raquettes 184-
La raquette et le volant. 1?8
Le jeu de paume 191
Le jeu de la longue paume 193
Un jeu de paume sous le premier Empire 19î>
Sauter dans le cerceau et autres jeux 197
Divers jeux en usage au seizième siècle 205
Le jeu royal de la passe 209
Le volant 214
Le jeu de la bague volante 223
Les divers jeux de billes 229
La bloquette 230
La fossette ou le jeu de noyaux ''i33
L'enfance 237
A la roulée aux œufs et autres jeux .' 242
Le jeu du clos-porte en Hollande 249
Le jeu de boules de Carie Vcrnet 2oi
Le jeu du clos-porte au seizième siècle 253
Le jeu du billard en terre au seizième siècle 257
Le royal jeu des fortifications 263
La partie de billard de Louis XIV avec Cbamillard 265
Le jeu du billard 269
Le jeu de billard, de Marlet 270
Tableau de la poule au billard 273
Billard à musique, exposé par P. Cbarles Cliéreau • ■ 275
Le jeu de quilles 283
Le jeu des sages 284
Le jeu du lapin 2f 8
Le jeu des quilles et le jeu du Siam 291
Une partie de quilles 292
Une tourneuse marcbande de jouets et de jeux 294
Divers jeux en usage au seizième siècle 297
La corde, d'après la suite des Petits polissons de Paris 301
Le saut, dit « saut du cbat », qu'on fait au siège et au banc 303
Le saut en arrière retourné, élevé sur les deux tréteaux 305
Le saut à la corde au dix-neuvième siècle 3i2
Le franc du carreau et autres jeux 315
Le coupe-tête 311
Le jeu du clieval fontlu 325
Le cheval fondu d'après Boucher 320
Diverses manières do faire la culhute 320
La culbute et la lutte 331
Les diverses formes de la lutte 333
Je suis dessus ta terre, vilain ; et aulres jeux 337
La danse et les exercices de traction 343
Un bal à l'époque révolutionnaire 345
La danse, d'après les « Quatre iiges de la vie », de Stella 347
La leçon de danse 34y
Un bal paré au dix-septième siècle 3oO
Gymnase normal militaire el civil 3 2
La leçon d'escrime 357
Les plaisirs de l'hiver 361
Le patinage au dix-huitième siècle 362
Les traîneaux 363
Les amusements du feu et de l'eau 365
Le feu de la Saint-Jean 309
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